Critique du volume manga
Publiée le Jeudi, 22 Décembre 2022
C'est dans un climat de tension palpable, alors que les plans de Leon sont sur le point de se concrétiser, que Kamuro, encore elle, finit par lâcher toute la vérité à Taichirô et Asuma sur l'identité de chacun au sein du clan Akabane dans le monde virtuel de Planet. Alors que Taichirô fuyait une réalité où il hait son père depuis la mort d'Aya, il apprend soudainement que Shiro, ce père de substitution si bienveillant qu'il s'était trouvé dans Planet, est en réalité son vrai papa, et ça le déstabilise complètement. Kamuro a bien senti qu'en fuyant dans le monde virtuel, chaque membre du clan Akabane évacuait son rêve de retrouver une vraie famille dans la réalité. Mais la jeune disciple de Kojirô a à peine le temps d'en faire part que le "rapace noir", alias l'intelligence artificielle Sasumata épaulé par Leon, accélère ses plans visant à confondre réalité et virtuel et à offrir aux I.A. une réelle existence quitte à nuire à l'humanité.
C'est alors dans un climat particulier que se déroule se dernier volume, en premier lieu parce qu'Uru Okabe y interroge de plus belle la place des I.A. dans notre monde, sujet on ne peut plus actuel. Et cela, il le fait assez bien à travers les deux antagonistes de l'oeuvre, entre un Sasumata ne cessant de se questionner sur ce qu'il est (il a une conscience et des émotions, alors qu'il est censé ne pas réellement exister), et un Leon qui ne peut accepter que son premier véritable ami ne soit qu'un être virtuel n'ayant pas de réelle existence. Même si c'est abordé succinctement, ces éléments existent, dégagent quelque chose d'assez fort, et permettent au mangaka de question le rapport que l'on peut avoir avec le virtuel en bien comme en moins bien, sans frontières bien délimitées entre le bon et le néfaste.
Ce que l'on retiendra le pus reste toutefois, ce que Kojirô, le créateur de Sasumata, a mis en ce dernier, surtout dans le prénom qu'il aimait lui donner. Et cela dit tout des regrets profonds que cet homme a pu avoir vis-à-vis de la famille qu'il a brisée, des regrets qu'il n'a jamais su clairement exprimer directement dans la réalité, incapable de trouver comment se faire pardonner, comment assumer vis-à-vis de ses fils et de son épouse. Dans la dernière ligne droite, Okabe accentue, fort logiquement, les rapports que peuvent avoir Kojirô et Taichirô à l'heure où ils doivent faire face à la menace du duo Leon/Sasumata. Et dans l'ensemble, même si le tout est un peu expéditif jusque dans les dernières pages et que l'on regrettera beaucoup le rôle finalement moindre de Miyabi, ce final se tient bien.
A l'arrivée, on n'aurait pas été contre quelques dizaines de pages supplémentaires pour que le mangaka aborde plus profondément certains thèmes un peu trop rapidement évoqués, mais Goodnight World reste une série régulièrement riche en moments forts (le tome 3 restant peut-être le summum), au fil de laquelle Okabe, par le prisme du rapport entre réalité et virtuel, croque un drame familial très intéressant.