Contrast : Critiques

Déjà connue en France pour les boy's love Comme neige au soleil et Pas cet amour-là (tous deux sortis dans notre langue en septembre 2019), itz a fait son retour dans le catalogue des éditions Hana en juillet dernier avec l'un de ses derniers mangas en date, Contrast. Riche dedix chapitres, cette oeuvre a été prépubliée au Japon entre 2018 et 2021 dans le magazine Canna de l'éditeur Printemps Shuppan. Elle est ensuite sortie là-bas en octobre 2021 en un unique volume broché agrémenté d'un court chapitre bonus en forme d'épilogue, pour un total d'environ 320 pages, ce qui est en fait une lecture bien épaisse pour un prix très correct de 7,95€.

Contrast, c'est l'histoire de deux lycéens qui, comme le laisse deviner le titre, n'ont a priori rien en commun: tandis que Kanata Aoyama est un adolescent populaire, sociable, toujours entouré en ayant régulièrement droit à des déclarations d'amour (qu'il refuse toutes), de son côté Akira Senkawa est un garçon certes intelligent et cultivé, mais très discret, renfermé et on ne peut plus solitaire. Pourtant, quand ils se croisent dans les couloirs, il se jettent systématiquement un regard, comme s'ils étaient intrigués l'un par l'autre. Alors quand ils ont enfin l'occasion de se parler et donc de faire connaissance, c'est peut-être le début de quelque chose...

Dans les faits, la base de l'histoire ainsi que son déroulement sont assez classiques, et on devine sans problème vers quoi tout ceci va nous mener à la fin. Mais là où itz brille, c'est en premier lieu dans son abord très appliqué et crédible de ses personnages, qui vont passer par bien des étapes: la connaissance, la consolidation de leur amitié voire plus encore, les moments plus difficiles où ils risquent de se disputer et de s'éloigner l'un de l'autre... Tout ceci étant amené par un développement assez poussé sur eux. Ainsi, au fil de leurs moments passés ensemble, de leurs confidences, de leur ouverture mutuelle, on découvrira que chacun d'eux a son background, son passé parfois douloureux, ses regrets, ses secrets... tout ceci venant peu à peu expliquer pourquoi ils sont tels qu'ils sont aujourd'hui, en plus de permettre à l'autrice d'aborder subtilement certains sujets forts comme l'homophobie et ses conséquences, les apparences trompeuses, ou encore le fait de jouer un rôle face aux autres. Tout l'intérêt ici est, alors, de voir comment Kanata et Akira vont, petit à petit, apprendre à se révéler l'un à l'autre, parfois dans la difficulté car certaines choses sont difficiles à avouer, pour essayer d'avancer chacun face à leurs problèmes, pour s'accepter eux-même et tout simplement pour être réellement eux-mêmes, le tout sous l'oeil de personnages secondaires particulièrement bien campés, que ce soit Mizuki, Kanda qui évite bien le rôle négatif dans lequel il aurait pu être enfermé, ou même un certain autre personnage qui a droit à des nuances réalistes dans l'épilogue.

Pour bien porter tout cela, la mangaka, bien aidée dans la version française par une traduction soignée de Delphine Desusclade, s'applique beaucoup dans son écriture assez introspective, fluide dans les évolutions intérieures des protagonistes, et pleine de jolies petites idées (comme le contraste entre l'ombre dans laquelle on veut enfermer Akira, et la lumière de son nom pouvant signifier "soleil" ). Et c'est également son travail visuel qui séduit sans mal, en étant tout en finesse, en jaugeant bien les émotions, et en offrant de nombreux découpages très propres pour porter un rythme assez doux.

Ainsi Contrast se dresse-t-il comme un récit particulièrement joli, touchant et abouti, tandis que l'édition française lui fait honneur avec, comme déjà dit, son prix très honnête et sa traduction soignée, mais aussi sa jaquette fidèle à l'originale nippone, sa première page en couleurs sur papier glacé, son papier très légèrement translucide mais restant de bonne facture, son impression très correcte et son lettrage convaincant.