Critique du volume manga
Publiée le Mardi, 13 Février 2024
Si les précédents tomes de BABEL étaient déjà bien épais, ce n'est rien à côté de ce cinquième et dernier volume de la série, qui est riche de 360 pages environs, en laissant dont tout le loisir à Narumi Shigematsu de mener son récit à terme comme elle le souhaite. Bien sûr, cela se répercute légèrement sur le prix de vente du volume, qui est de 8,50€ là où les précédents tomes était proposés à 8,25€. En somme, on a une augmentation de 0,25€ pour ce qui est quasiment un tome double, ce qui est un prix on ne peut plus raisonnable !
A l'issue du tome précédent, nous laissions Olsen et son entourage dans une situation on ne peut plus critique: Lilith menace Europaris, et il ne faut surtout pas la laisser quitter la ville, car elle a beau n'être qu'un concentré d'informations, elle emporte tout dans une déferlante de données. A l'heure où tout se détraque et où Bibliotheca se déforme, Olsen se laisse entraîner par Ferran, le pion du docteur Mirabilis qui semble ne rien vouloir lâcher. Et si les prmeières dizaines de pages leur permettront d'entrevoir encore certaines nouvelles vérités, ce n'est rien à côté de la suite qui emmènera notre héros toujours plus loin, à travers le temps et l'espace...
Qu'il est difficile de parler de cet ultime opus de BABEL sans trop en dire, tant celui-ci est riche à la fois en rebondissements et en thématiques ! Néanmoins, nous allons nous appliquer ici à en révéler le moins possible et à rester évasifs sur beaucoup de choses afin de ne gâcher aucune des surprises que nous réserve Narumi Shigematsu.
Car des surprises, il y en a un paquet dans ce dernier pavé où la mangaka, en étant partie d'une interrogation claire (s’il y avait dans les données numériques des erreurs similaires à celles qu'il pouvait y avoir à l'époque où l'on recopiait les écrits sur papier, à quoi ça pourrait aboutir dans un avenir lointain ?), reprend à une sauce futuriste/anticipation plusieurs éléments du mythe de la Tour de Babel pour aller vraiment au bout de son idée, quitte à perdre en cours de route un lecteur qui ne serait pas attentif. De ce fait, on ne peut que conseiller, si possible, d'enchaîner en peu de temps la lecture de l'intégralité de la série (comme votre serviteur l'a fait) pour vraiment se plonger au mieux dans cet univers finalement proche de la hard-SF, mettant en avant la puissance des écrits dans notre Histoire et dans l'évolution du monde, et allant jusqu'à proposer différentes métaphores très fortes pour porter cela (à l'image du personnage de Ferran, présenté comme une sorte de page blanche du fait de son absence de souvenirs et d'émotions).
Et si l'histoire imaginée par l'autrice est très ample puisqu'elle traverse le temps et l'espace et implique l'humanité tout entière (voire même l'univers tout entier), celle-ci n'oublie pas pour autant les enjeux plus personnels qui dynamisent très bien le récit: Olsen et son contexte familial (avec notamment la découverte des souvenirs de son père disparu), le sort de Ferran, l'amitié de Lipp et des autres qui veulent être utiles à leur compagnon, les ambitions de figures comme Mirabilis, Guy et madame Flick, ou encore certains inévitables sacrifices parsemant cette dernière ligne droite, sont autant de choses qui nous happent facilement jusqu'à la fin. Enfin, à tout ceci s'ajoute le travail visuel de la mangaka, qui prend des proportions assez folles lors des moments les plus mouvementés où réel et virtuel, humanité et données se confondent.
A l'arrivée, on ressort conquis par la lecture de ce dernier tome, qui met efficacement un point final à un récit très exigeant mais qui vaut assurément le détour. Si Narumi Shigematsu est une autrice qui nous avait déjà pas mal séduits avec ses deux autres mangas publiés précédemment en France (Running Girl qui racontait le parcours d'une jeune handicapée en vue des Jeux paralympiques, et A nos fleurs éternelles qui proposait une version romancée de la jeunesse de la figure historique de Zeami), BABEL, en plus d'être sa plus longue série, est sans aucun doute aussi son manga le plus ambitieux et fascinant. A présent, on attendra avec impatience la parution française de son seul titre encore inédit en France et qui est aussi le premier manga de sa carrière: L'écrin de notre histoire, one-shot teasé par Akata (encore à la fin de ce dernier tome de BABEL) depuis déjà plusieurs mois et ayant pour sujet l'art de la reliure.