Nouvelle rencontre avec Masaaki Yuasa autour du film Inu-Oh- Actus manga
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Dvd Nouvelle rencontre avec Masaaki Yuasa autour du film Inu-Oh

Vendredi, 05 Août 2022 à 18h00 - Source :Rubrique interviews

Après plus de deux années d'absence, le Festival International de la Bande-Dessinée d'Angoulême a fait son retour avec une 49e édition qui s'est exceptionnellement tenue au mois de mars. Le contexte de la crise sanitaire, sans doute peu aidé par la guerre en Ukraine et la fermeture de certains espaces aériens, n'a pas permis un salon aussi foisonnant que ces derniers temps en termes d'invites japonais que les éditeurs l'espéraient. Néanmoins, un grand nom s'est pourtant rendu sur place : Masaaki Yuasa. Présent à l'occasion de la projection en avant-première de son nouveau film, Inu-Oh, le talentueux réalisateur nous a fait l'honneur d'une interview durant laquelle il revient sur sa carrière, sa nouvelle œuvre, et sa vision de l'adaptation.


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Bonjour M. Yuasa et merci de nous accorder cet entretien. Vous avez entamé débuté dans l'animation japonaise dans les années 90, et êtes particulièrement actif dans la réalisation depuis les années 2010. On peut voir un chamboulement dans votre carrière, lors de la création du studio Science Saru en 2013. Comment est venu ce déclic ?


Masaaki Yuasa : Je travaillais au sein d'un important studio. Je déplorais un manque de souplesse, qui m'empêchait de faire ce que je voulais. Avec d'autres artistes, nous avons décidé de créer notre propre studio.


Vous semblez beaucoup aimer le travail d'adaptation. Vous avez notamment adapté les manga Ping Pong de Taiyô Matsumoto, et Devilman de Gô Nagai. Côté littérature, il y a aussi Japan Sinks: 2020, librement tiré du roman de Sakyo Komatsu et désormais Inu-Oh. Mais à ces adaptations, vous insufflez une identité forte. Qu'est-ce qui vous plaît dans le fait de retranscrire une œuvre préexistante ?


Masaaki Yuasa : Une adaptation est toujours un exercice plus simple qu'une production originale, notamment dans le format film qui implique un laps de temps limité. Bien sûr, chaque optique a ses avantages et inconvénients. Par exemple, quand on adapte une œuvre existante, il y a tout un public de fans préalable qu'il ne faut pas décevoir.


J'aime adapter des œuvres intéressantes, qui sont aussi des œuvres qui plaisent aux gens. J'essaie toujours de répondre à cette attente.

 

Inu-Oh adapte le roman de Hideo Furukawa. Qu'est-ce qui vous a séduit dans l'œuvre littéraire d'origine ?


Masaaki Yuasa : Hideo Furukawa a modernisé le texte du Dit des Heike (Heike Monogatari). On peut même dire qu'il a fait une traduction contemporaine de cette histoire. Le poème original narre les chroniques de la défaite des Heike racontées par des moines aveugles. Inu-Oh raconte l'histoire de ces moines. Puis, j'ai moi-même adapté ce récit pour le transcrire autrement. J'ai trouvé cette optique très intéressante.


Inu-Oh vous permet de retrouver l'univers graphique de Taiyô Matsumoto, dont vous aviez adapté le manga Ping Pong. Comment se sont passées ces retrouvailles, et pourquoi le choix de Taiyô Matsumoto pour le character-design ?


Masaaki Yuasa : J'adore Taiyô Matsumoto ! Alors, dès que j'ai une opportunité pour travailler avec lui, je la saisit. Mais en parallèle, j'ai aussi envie de travailler avec d'autres artistes. Ceci explique pourquoi je n'ai pas collaboré avec M. Matsumoto depuis quelques temps, mais l'occasion était idéale. M. Matsumoto ayant dessiné la couverture du roman, c'était le bon projet


Dans Ping Pong, il n'était que l'auteur de l'œuvre que j'adaptais. Cette fois, l'auteur est Hideo Furukawa, même si M . Matsumoto a illustré son roman. Quelque part, c'est un peu comme s'il était l'un des auteurs du matériel d'origine, tout en étant un artiste du film puisqu'il a conçu le character-design. Je lui ai laissé une liberté totale dans la conception des personnages, sauf pour les deux principaux. Comme ces protagonistes sont les figures qui allaient être les plus mises en mouvement, il fallait en tenir compte.


 

Dans le film Inu-Oh, la première demi-heure est présentée comme une fresque historique un peu mystique. Puis, il y a un moment de bascule qui fait passer le film dans un opéra rock aux différentes scènes musicales qui chamboulent aussi la mise en scène. Comment avez-vous traité ce moment de bascule ?


Masaaki Yuasa : La réalité historique se compose d'énormément de récits oubliés. Ainsi, je trouvais dommage de faire un film historique sur des éléments que nous connaissons bien. J'ai donc essayé de faire travailler mon imagination pour privilégier une trame qui n'existe pas dans l'Histoire avec un grand H.


Inu-Oh a été produit dans un contexte particulier, celui de la crise sanitaire. Sur quel plan cette crise a impacté la production du film ?


Masaaki Yuasa : En réalité, le covid n'est pas la cause du retard de sortie d'Inu-Oh. Avant la crise sanitaire, notre planning avait déjà du retard. J'ai interrompu la production pour privilégier Eizôken, afin d'achever sereinement Inu-Oh par la suite. A ce moment, la pandémie était devenue grave, ce qui m'a poussé à travailler seul, en télétravail. C'est depuis chez moi que j'ai œuvré sur la musique, l'histoire et l'animation.



Sur certaines de vos œuvres, une certaine idée revient : La fermeture de l'humain à autre chose. On trouve ainsi la présence de comportements xénophobes dans Devilman Crybaby et Japan Sinks 2020, le dénie de la mort dans Ride Your Wave, tandis qu'Inu Oh aborde cette forme de cloisonnement d'une autre manière. Est-ce que cette idée de « l'homme qui se ferme » vous est chère en tant qu'artiste ?


Masaaki Yuasa : En effet, je m'intéresse beaucoup aux idées de l'émancipation, de l'acceptation et de la tolérance. Pour traiter ces thèmes, je dois parler de personnages prisonniers du passé. Mais en même temps, je n'ai pas l'intention de caricaturer. Dans Inu-Oh, nous voyons des samourais cherchant à unifier le pays. Ils ont un objectif, et c'est pourquoi ils ont ce type de comportements malgré eux. Dans le cas de Japan Sinks 2020, il y a peut-être une part de caricature, mais j'ai voulu montrer que des individus humains dans la vie de tous les jours peuvent changer en mal face à un événement dramatique ou catastrophique. Je ne défends pas ces comportements, mais je voulais montrer qu'ils existent.

Interview menée par Takato. Remerciements à M. Masaaki Yuasa pour sa disponibilité, ainsi qu'à son interprète et à Games of Com pour l'organisation de la rencontre.

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