Dvd Rencontre avec le réalisateur Shuhei Morita (Tokyo Ghoul, Freedom...)
Chaque édition de Paris Manga marque la venue de certaines personnalités de l'animation japonaise. Pour l'édition hivernale de 2019, l'un de ces invités fut Shuhei Morita, un animateur atypique, et réalisateur des OAV Freedom ainsi que des deux premières saisons de l'anime Tokyo Ghoul. L'artiste a accepté de jouer le jeu de l'interview, afin de revenir sur ses différents projets...
Pouvez-vous nous parler de votre parcours ? Comment êtes-vous devenu réalisateur dans l'animation japonaise ?
Shuhei Morita : Quand j'avais 19, j'ai été fasciné par le film d'animation Akira ainsi que les œuvres de Hayao Miyazaki. Avec d'autres personnes, on a fondé le studio indépendant Kamikaze Douga. A cette époque, j'ai aussi réalisé deux courts métrages, "Reki" et "Otoko Date", qui ont été beaucoup diffusés sur MTV. Plusieurs studios d'animation m'ont ensuite contacté pour me recruter, mais j'ai refusé.
Vous avez réalisé Kakurenbo, une adaptation de votre propre création. Pouvez-vous nous en parler ?
Shuhei Morita : J'ai créé Kakurenbo pour deux raisons. La première, c'est parce que j'aime les yokai, mais pas les fantômes. La seconde, c'est suite à ma rencontre avec l'auteur Kuro Shiro. Un jour, sur internet, je suis tombé sur son travail, et je l'ai tout de suite apprécié. J'ai vite pensé qu'on allait bien s'entendre. A savoir qu'aujourd'hui, il est un romancier reconnu mais, quand je l'ai connu, il n'était qu'un employé dans une usine. Nous sommes devenu amis, et nous avons créé l'histoire de Kakurenbo, plus tard.
Yanigata no Kumo est une légende d'un temple de Tokyo qui dit que "Si tu viens te cacher, les ôni vont te chercher". (ndt : Kakurenbo signifie "se cacher". Le terme est donc utilisé dans cette légende). Pour moi, ça a été un déclic. C'est tout cet ensemble qui a abouti à Kakurenbo.
Vous avez réalisé les OAV Freedom, œuvre initiée par Katsuhiro Otomo. Est-ce que travailler avec un si grand artiste du manga et de l'animation a constitué un challenge pour vous ?
Shuhei Morita : Ce qui est bien avec M. Otomo, c'est qu'il ne met jamais en avant sa célébrité et son image. On peut travailler avec lui en toute simplicité. Le fait qu'il ne cherche pas à se mettre en avant fait peur aux gens, ils sont intimidés. Personnellement, au contraire, je m'efforçais de lui rentrer dedans pour lui donner mon opinion. Ça lui arrivait de dire que "je fais chier", mais sans méchanceté. Il a vraiment une oreille attentive, et ce fut une expérience géniale.
Parlons maintenant de Tokyo Ghoul, série animée pour laquelle vous avez réalisé les deux premières saisons. Comment vous êtes-vous retrouvé sur ce projet ?
Shuhei Morita : A la base, ma société, Yamato Works, travaillait sur le projet Gatchaman Crowds. J'ai œuvré avec plusieurs membres du studio Pierrot dont le producteur, M. Ôta, aussi producteur de Tokyo Ghoul. C'est lui qui m'a proposé le poste de réalisateur.
Après avoir travaillé sur Freedom et obtenu plusieurs récompenses, j'ai eu du mal à reprendre le travail. Je m'acharnais à toujours faire mieux, pas parce que j'ai la grosse tête, mais parce que je voulais me perfectionner. Ça a été un vrai frein. Grâce à ça, j'ai tout de suite dit oui à l'offre de M. Ôta. Dès le lendemain, j'ai lu tous les tomes de Tokyo Ghoul parus à ce jour. J'ai rappelé M. Ôta en lui disant ce que je pense du manga, et en lui confirmant qu'il pouvait me choisir s'il voulait. Il m'a répondu qu'il n'avait pas à choisir, parce que c'était moi qu'il voulait, il n'a contacté personne d'autre. C'est comme ça que j'ai intégré le projet.
Les deux saisons que vous avez réalisées prennent le risque de s'éloigner de l'intrigue du manga à certains instants. Quelle était la réflexion derrière ce parti-pris ?
Shuhei Morita : Il faut savoir que lorsque la première saison s'est terminée, il était déjà prévue que la seconde soit diffusée trois mois plus tard. Mais il fallait garder l'intérêt de l'audience durant ces trois mois. On en était conscients, on a donc tenu une réunion avec le producteur et l'auteur, Sui Ishida. On s'est réunis autour d'une table pour se demander comment remplir cette période. On a hésité, puis l'auteur a proposé de créer une histoire originale. M. Ishida est quelqu'un qui aime les challenges, et j'aime y répondre. C'est pour relever ce défi, proposé par l'auteur du manga, que l'intrigue de l'anime a dévié de celle de l’œuvre originale. Je ne voulais pas en parler jusqu'ici parce que la dernière saison était en cours de diffusion. Maintenant qu'elle est finie, je peux parler librement. Aussi, ce qu'aime particulièrement Sui Ishida, c'est créer des œuvres dont on ne peut deviner la fin.
Tous les nouveaux concepts ont été proposés par l'auteur. Ils ont été mis en application par les équipes du studio, qui ont créé une nouvelle histoire. Certaines idées ont été repoussées, ou ont été développées sur moins d'épisodes... Il y a eu beaucoup d'allers-retours. En faisant ainsi, certains personnages secondaires, voire tertiaires, ont pu avoir un développement bien plus grand que dans le manga. C'est là qu'il commençait à y avoir une très grande séparation avec le manga original.
Le manga Tokyo Ghoul a la particularité d'être assez violent. Vous êtes-vous confronté à des difficultés pour adapter cette violence dans l'anime ?
Shuhei Morita : J'ai mis l'accent sur l'histoire, car montrer la violence juste pour montrer la violence ne m'intéresse pas. Il faut qu'il y ait une raison derrière. Dans Tokyo Ghoul, la raison, c'est la survie dans un monde devenu violent. Des raisons font que cette violence est légitime. Ce n'est pas la violence qui donne la raison, c'est la raison qui donne la violence, et c'est ce qui la rend montrable. Une violence sans motif me semble sans intérêt. La priorité est à l'histoire.
Le manga Tokyo Ghoul a connu un grand succès au Japon. Ce succès a-t-il amené certaines contraintes dans la production des premières saisons de l'anime ?
Shuhei Morita : Que ce soit pour la saison 1 de Tokyo Ghoul ou la saison 2, ce sont des challenges, autant pour nous que pour l'auteur. On pouvait se permettre de créer des choses non comprises dans l’œuvre originale car Sui Ishida nous donnait beaucoup d'informations sur la suite de la série. Ça nous permettait, au cas où, d'être original sans trahir le manga. Il n'y avait pas de pression particulière par rapport à la popularité de l’œuvre, car on partait sur un défi.
Quand on a un challenge face à nous, il faut le concrétiser. Et dès que j'avais un doute, je faisais un Skype avec le mangaka. Comme je ne suis pas sur Tokyo même, c'était difficile de le contacter. On discutait alors par vidéoconférences. (rires)
Quelle est votre actualité ? Des projets à venir ?
Shuhei Morita : Bientôt, un court-métrage sur lequel je travaille sera annoncé. Je boue d'impatience de bientôt faire un long-métrage, du moins j'espère.
Interview réalisée par Takato. Remerciements à Shuhei Morita, et à son agent et interprète, Emmanuel Bochew.
Pouvez-vous nous parler de votre parcours ? Comment êtes-vous devenu réalisateur dans l'animation japonaise ?
Shuhei Morita : Quand j'avais 19, j'ai été fasciné par le film d'animation Akira ainsi que les œuvres de Hayao Miyazaki. Avec d'autres personnes, on a fondé le studio indépendant Kamikaze Douga. A cette époque, j'ai aussi réalisé deux courts métrages, "Reki" et "Otoko Date", qui ont été beaucoup diffusés sur MTV. Plusieurs studios d'animation m'ont ensuite contacté pour me recruter, mais j'ai refusé.
Vous avez réalisé Kakurenbo, une adaptation de votre propre création. Pouvez-vous nous en parler ?
Shuhei Morita : J'ai créé Kakurenbo pour deux raisons. La première, c'est parce que j'aime les yokai, mais pas les fantômes. La seconde, c'est suite à ma rencontre avec l'auteur Kuro Shiro. Un jour, sur internet, je suis tombé sur son travail, et je l'ai tout de suite apprécié. J'ai vite pensé qu'on allait bien s'entendre. A savoir qu'aujourd'hui, il est un romancier reconnu mais, quand je l'ai connu, il n'était qu'un employé dans une usine. Nous sommes devenu amis, et nous avons créé l'histoire de Kakurenbo, plus tard.
Yanigata no Kumo est une légende d'un temple de Tokyo qui dit que "Si tu viens te cacher, les ôni vont te chercher". (ndt : Kakurenbo signifie "se cacher". Le terme est donc utilisé dans cette légende). Pour moi, ça a été un déclic. C'est tout cet ensemble qui a abouti à Kakurenbo.
Vous avez réalisé les OAV Freedom, œuvre initiée par Katsuhiro Otomo. Est-ce que travailler avec un si grand artiste du manga et de l'animation a constitué un challenge pour vous ?
Shuhei Morita : Ce qui est bien avec M. Otomo, c'est qu'il ne met jamais en avant sa célébrité et son image. On peut travailler avec lui en toute simplicité. Le fait qu'il ne cherche pas à se mettre en avant fait peur aux gens, ils sont intimidés. Personnellement, au contraire, je m'efforçais de lui rentrer dedans pour lui donner mon opinion. Ça lui arrivait de dire que "je fais chier", mais sans méchanceté. Il a vraiment une oreille attentive, et ce fut une expérience géniale.
Parlons maintenant de Tokyo Ghoul, série animée pour laquelle vous avez réalisé les deux premières saisons. Comment vous êtes-vous retrouvé sur ce projet ?
Shuhei Morita : A la base, ma société, Yamato Works, travaillait sur le projet Gatchaman Crowds. J'ai œuvré avec plusieurs membres du studio Pierrot dont le producteur, M. Ôta, aussi producteur de Tokyo Ghoul. C'est lui qui m'a proposé le poste de réalisateur.
Après avoir travaillé sur Freedom et obtenu plusieurs récompenses, j'ai eu du mal à reprendre le travail. Je m'acharnais à toujours faire mieux, pas parce que j'ai la grosse tête, mais parce que je voulais me perfectionner. Ça a été un vrai frein. Grâce à ça, j'ai tout de suite dit oui à l'offre de M. Ôta. Dès le lendemain, j'ai lu tous les tomes de Tokyo Ghoul parus à ce jour. J'ai rappelé M. Ôta en lui disant ce que je pense du manga, et en lui confirmant qu'il pouvait me choisir s'il voulait. Il m'a répondu qu'il n'avait pas à choisir, parce que c'était moi qu'il voulait, il n'a contacté personne d'autre. C'est comme ça que j'ai intégré le projet.
Les deux saisons que vous avez réalisées prennent le risque de s'éloigner de l'intrigue du manga à certains instants. Quelle était la réflexion derrière ce parti-pris ?
Shuhei Morita : Il faut savoir que lorsque la première saison s'est terminée, il était déjà prévue que la seconde soit diffusée trois mois plus tard. Mais il fallait garder l'intérêt de l'audience durant ces trois mois. On en était conscients, on a donc tenu une réunion avec le producteur et l'auteur, Sui Ishida. On s'est réunis autour d'une table pour se demander comment remplir cette période. On a hésité, puis l'auteur a proposé de créer une histoire originale. M. Ishida est quelqu'un qui aime les challenges, et j'aime y répondre. C'est pour relever ce défi, proposé par l'auteur du manga, que l'intrigue de l'anime a dévié de celle de l’œuvre originale. Je ne voulais pas en parler jusqu'ici parce que la dernière saison était en cours de diffusion. Maintenant qu'elle est finie, je peux parler librement. Aussi, ce qu'aime particulièrement Sui Ishida, c'est créer des œuvres dont on ne peut deviner la fin.
Tous les nouveaux concepts ont été proposés par l'auteur. Ils ont été mis en application par les équipes du studio, qui ont créé une nouvelle histoire. Certaines idées ont été repoussées, ou ont été développées sur moins d'épisodes... Il y a eu beaucoup d'allers-retours. En faisant ainsi, certains personnages secondaires, voire tertiaires, ont pu avoir un développement bien plus grand que dans le manga. C'est là qu'il commençait à y avoir une très grande séparation avec le manga original.
Le manga Tokyo Ghoul a la particularité d'être assez violent. Vous êtes-vous confronté à des difficultés pour adapter cette violence dans l'anime ?
Shuhei Morita : J'ai mis l'accent sur l'histoire, car montrer la violence juste pour montrer la violence ne m'intéresse pas. Il faut qu'il y ait une raison derrière. Dans Tokyo Ghoul, la raison, c'est la survie dans un monde devenu violent. Des raisons font que cette violence est légitime. Ce n'est pas la violence qui donne la raison, c'est la raison qui donne la violence, et c'est ce qui la rend montrable. Une violence sans motif me semble sans intérêt. La priorité est à l'histoire.
Le manga Tokyo Ghoul a connu un grand succès au Japon. Ce succès a-t-il amené certaines contraintes dans la production des premières saisons de l'anime ?
Shuhei Morita : Que ce soit pour la saison 1 de Tokyo Ghoul ou la saison 2, ce sont des challenges, autant pour nous que pour l'auteur. On pouvait se permettre de créer des choses non comprises dans l’œuvre originale car Sui Ishida nous donnait beaucoup d'informations sur la suite de la série. Ça nous permettait, au cas où, d'être original sans trahir le manga. Il n'y avait pas de pression particulière par rapport à la popularité de l’œuvre, car on partait sur un défi.
Quand on a un challenge face à nous, il faut le concrétiser. Et dès que j'avais un doute, je faisais un Skype avec le mangaka. Comme je ne suis pas sur Tokyo même, c'était difficile de le contacter. On discutait alors par vidéoconférences. (rires)
Quelle est votre actualité ? Des projets à venir ?
Shuhei Morita : Bientôt, un court-métrage sur lequel je travaille sera annoncé. Je boue d'impatience de bientôt faire un long-métrage, du moins j'espère.
Interview réalisée par Takato. Remerciements à Shuhei Morita, et à son agent et interprète, Emmanuel Bochew.
De ja2ka, le 23 Mai 2019 à 23h42
Ce manga est l'un de mes préférés. Les musiques et l'intrigue sont vraiment cool! good job!