Dvd Interview de Chikashi Kubota (One-Punch Man, One Piece)
En mars, le salon made in Asia de Bruxelles accueillait en invité animation Chikashi Kubota, qui n'est autre que le character designer et directeur de l'animation de la série animée One-Punch Man ! Nous avons eu la chance de pouvoir le rencontrer dans une ambiance détendue. Voici le compte-rendu de notre interview, où l'artiste aborde essentiellement son travail sur l'adaptation animée du manga de ONE et de Yûsuke Murata, mais où il revient également sur son parcours et sur son travail sur le film 6 de One Piece.
Chikashi Kubota, un grand merci d'avoir accepté cette interview. Pour commencer, pouvez-vous nous dire d'où vient votre envie de travaillé dans l'animation ? Y a-t-il des oeuvres ou des artistes en particulier qui ont forgé ce désir ?
Chikashi Kubota : Quand j'étais en classe je dessinais souvent dans les marges de mes cahiers. Je faisais beaucoup de petits flipbooks, ces dessins qui se suivent d'une page à l'autre et qui donnent l'impression de s'animer en tournant très vite les pages. Je suis devenu de plus en plus pointilleux là-dessus, et ça a fait germer en mois l'envie de devenir animateur.
A cette époque, c'était le gros boum de Dragon Ball, qui a forcément été une très grosse influence.
Au départ je voulais devenir mangaka, mais je n'ai pas le talent pour raconter une histoire.
Du coup, avez-vous déjà essayé d'écrire des mangas en amateur ?
Quand j'étais en maternelle ou en primaire (rires).
J'avais acheté des crayons exprès pour ça, mais c'est en commençant à faire des flipbooks que je les ai vraiment utilisés.
Ensuite, comme je le disais Dragon Ball m'influençait beaucoup à cette époque. Quand j'avais 11 ans j'ai acheté un livre, une sorte de mook sur la manière dont l'animé Dragon Ball était conçu. Ca a été une sorte de révélation : c'était ça que je voulais faire ! Et je voulais alors travailler sur une série « à la Dragon Ball ».
Du coup, vous aimeriez avoir l'occasion de travailler sur une version animée de Dragon Ball ?
Si on me le propose un jour, je sauterai sur l'opportunité !
En tant que character designer et directeur de l'animation sur One-Punch Man, à quoi avez-vous fait le plus attention ? Qu'avez-vous voulu le plus faire ressortir ?
Yûsuke Murata a un dessin superbe dans le manga d'origine, donc j'ai surtout voulu faire en sorte que les fans ne soient pas déçus par le rendu de l'animé, en mettant le plus en valeur possible le travail original de M. Murata.
Justement, puisque vous parlez du manga et du travail de Yûsuke Murata, on trouve que l'animé reprend très fidèlement la mise en scène du manga. Comment vous y êtes-vous pris pour si bien rendre en animation la mise en scène léchée de M. Murata et son sens des perspectives ?
Je vous remercie beaucoup de vous en être aperçu, car c'est quelque chose auquel nous avons vraiment fait très attention. Quand on commence à lire un manga, la première chose qu'on remarque est le visuel. Yûsuke Murata a un dessin dense et reconnaissable, et après avoir lu le manga je me suis forcément dit qu'il fallait voir la même chose en animation pour bien lui rendre honneur. Que ce soit moi, le réalisateur Shingo Natsume, ou le staff de manière générale, on avait tous conscience qu'il fallait faire quelque chose de très fidèle au manga. On est très contents d'y être arrivés.
Est-ce que ONE et Yûsuke Murata avaient un droit de regard sur l'anime ? Ont-ils supervisé un peu les choses ?
ONE est intervenu pour apporter des idées afin d'améliorer le scénario. On a un peu joué au ping pong avec lui, en nous renvoyant mutuellement des idées.
Yûsuke Murata a vu mes designs, a donné deux ou trois consignes pour des petits changements, a revu les designs finalisés et les a validés.
Dans un manga, il y a des dizaines, des centaines de dessins, mais il y a certaines choses qui ne sont connues que des dessinateurs originaux, par exemple un petit détail dans un costume qui a un signification, ou l'angle des sourcils dans telles circonstances... C'est sur ce genre de petites choses que M. Murata m'a beaucoup aidé.
Comment s'est déroulé le travail avec le réalisateur de la série, Shingo Natsume ?
Quand on travaille il est assis juste à côté de moi (rires). Je dessine, dès que j'ai un petit problème je lui demande son opinion, ou alors c'est lui qui me donne ses idées. Il y a entre nous une interconnexion très habituelle. Mais il n'est pas non plus très exigeant : une fois qu'il a donné ses directives générales, il laisse faire le staff à sa manière pour que chacun donne le meilleur de lui-même. De plus, il essaie de s'entourer de personnes avec lesquelles il a déjà travaillé auparavant, donc il connaît les habitudes de chacun.
L'adaptation animée de One-Punch Man étant très fidèle au manga, sur quels éléments pensez-vous avoir pu mettre un peu plus de votre personnalité ?
D'une manière générale, je n'ai rien mis de personnel. Je trouve que la qualité du manga est de très très haut niveau, donc j'ai pensé qu'en cherchant à ajouter quelque chose en plus ça n'apporterait rien de meilleur.
J'ai juste voulu être au plus proche possible du style de M. Murata. Il y a peut-être des petites touches personnelles qui sont inconsciemment ressorties, mais je ne peux pas m'en empêcher, car tout animateur à ses petits tics qui peuvent surgir ici et là.
L'animé étant diffusé une fois par semaine, on travaille chaque semaine et donc sur une période assez longue, et parfois le directeur de l'animation est différent d'un épisode à l'autre. En faisant bien attention, on peut alors voir d'un épisode à l'autre que le dessin n'est pas tout à fait pareil.
A votre avis, pourquoi One-Punch Man est un phénomène qui plaît autant ? Et vous, qu'y préférez-vous ?
Je pense que tout est dans le titre de la série : Saitama peut battre tout le monde en un coup de poing, c'est un peu comme si le boss final apparaissait dès le début. Habituellement, dans les séries de ce type on a un jeune héros qui va progresser peu à peu, et quand apparaît le méchant on se demande comment il va pouvoir s'en sortir. Mais là, contrairement aux habitudes, on sait déjà comment ça va se finir : en un coup de poing !
Saitama est un peu comme un personnage cheaté dans un jeu. Je pense que cette situation anormale et amusante peut parler très facilement à un large public à travers le monde.
Il y a aussi une histoire plus conséquente qu'il n'y paraît. Autour de Saitama arrivent plein de personnages qui ont beaucoup de personnalité. Et puis il y a tous les états d'âme de Saitama qui a des problèmes à force de finir tout le monde en un coup de poing. Bien que ça a l'air d'être très axé sur les gags, je pense qu'il y a une histoire très intéressante qui se cache là-dedans.
Personnellement, j'ai énormément de mal à dessiner fidèlement le style de M. Murata, mais je trouve l'histoire tellement intéressante que ça me pousse à continuer.
A votre avis, si vous étiez un personnage de One-Punch Man, qui seriez-vous ?
Saitama, bien sûr ! (rires)
Parmi vos autres travaux de character designer, on peut noter le film 6 de One Piece : Le Baron Omatsuri et l'île aux secrets, réalisé par Mamoru Hosoda. Quel souvenir gardez-vous de votre travail sur le design des personnages de l'oeuvre si célèbre créée par Eiichiro Oda ?
C'était... difficile ! (rires)
Mamoru Hosoda a un niveau d'exigence très élevé, et je pense que je n'étais pas encore très habile au dessin à cette époque, mais j'ai fait tout ce que j'ai pu.
Avec M. Hosoda, Sushio et Takaaki Yamashita, nous avons commencé par les costumes des personnages, en dessinant sans cesse en nous demandant ce qui était le mieux. On était là, tous les quatre, à travailler avec acharnement en buvant du café, c'était très ardu et pénible.
Je crois que ce que j'en retiens de plus positif, c'est que ça m'a donné l'occasion de rencontrer Eiichiro Oda et de discuter avec lui !
Justement, puisque vous parlez des deux autres character designers et directeurs de l'animation de ce film, Sushio et Takaaki Yamashita, pouvez-vous nous dire quelques mots supplémentaires sur votre collaboration avec eux ?
Quand on fait un storyboard au sein de Toei Animation, on procède par scène. Chacun de nous trois avait un nombre de scènes différentes à faire, celles-ci étaient dans le désordre et ne suivaient pas le déroulement du film. Nous avions donc tous trois notre lot de scènes à dessiner.
Pour être honnête, messieurs Sushio et Yamashita étaient vraiment très bons, et c'était un peu difficile pour moi de les suivre et d'être à leur niveau.
Interview réalisée par Koiwai. Remerciements à Chikashi Kubota, à son agent, à l'interprète Fabrice Renault, et au staff du salon made in Asia.
Chikashi Kubota, un grand merci d'avoir accepté cette interview. Pour commencer, pouvez-vous nous dire d'où vient votre envie de travaillé dans l'animation ? Y a-t-il des oeuvres ou des artistes en particulier qui ont forgé ce désir ?
Chikashi Kubota : Quand j'étais en classe je dessinais souvent dans les marges de mes cahiers. Je faisais beaucoup de petits flipbooks, ces dessins qui se suivent d'une page à l'autre et qui donnent l'impression de s'animer en tournant très vite les pages. Je suis devenu de plus en plus pointilleux là-dessus, et ça a fait germer en mois l'envie de devenir animateur.
A cette époque, c'était le gros boum de Dragon Ball, qui a forcément été une très grosse influence.
Au départ je voulais devenir mangaka, mais je n'ai pas le talent pour raconter une histoire.
Du coup, avez-vous déjà essayé d'écrire des mangas en amateur ?
Quand j'étais en maternelle ou en primaire (rires).
J'avais acheté des crayons exprès pour ça, mais c'est en commençant à faire des flipbooks que je les ai vraiment utilisés.
Ensuite, comme je le disais Dragon Ball m'influençait beaucoup à cette époque. Quand j'avais 11 ans j'ai acheté un livre, une sorte de mook sur la manière dont l'animé Dragon Ball était conçu. Ca a été une sorte de révélation : c'était ça que je voulais faire ! Et je voulais alors travailler sur une série « à la Dragon Ball ».
Du coup, vous aimeriez avoir l'occasion de travailler sur une version animée de Dragon Ball ?
Si on me le propose un jour, je sauterai sur l'opportunité !
En tant que character designer et directeur de l'animation sur One-Punch Man, à quoi avez-vous fait le plus attention ? Qu'avez-vous voulu le plus faire ressortir ?
Yûsuke Murata a un dessin superbe dans le manga d'origine, donc j'ai surtout voulu faire en sorte que les fans ne soient pas déçus par le rendu de l'animé, en mettant le plus en valeur possible le travail original de M. Murata.
Justement, puisque vous parlez du manga et du travail de Yûsuke Murata, on trouve que l'animé reprend très fidèlement la mise en scène du manga. Comment vous y êtes-vous pris pour si bien rendre en animation la mise en scène léchée de M. Murata et son sens des perspectives ?
Je vous remercie beaucoup de vous en être aperçu, car c'est quelque chose auquel nous avons vraiment fait très attention. Quand on commence à lire un manga, la première chose qu'on remarque est le visuel. Yûsuke Murata a un dessin dense et reconnaissable, et après avoir lu le manga je me suis forcément dit qu'il fallait voir la même chose en animation pour bien lui rendre honneur. Que ce soit moi, le réalisateur Shingo Natsume, ou le staff de manière générale, on avait tous conscience qu'il fallait faire quelque chose de très fidèle au manga. On est très contents d'y être arrivés.
Est-ce que ONE et Yûsuke Murata avaient un droit de regard sur l'anime ? Ont-ils supervisé un peu les choses ?
ONE est intervenu pour apporter des idées afin d'améliorer le scénario. On a un peu joué au ping pong avec lui, en nous renvoyant mutuellement des idées.
Yûsuke Murata a vu mes designs, a donné deux ou trois consignes pour des petits changements, a revu les designs finalisés et les a validés.
Dans un manga, il y a des dizaines, des centaines de dessins, mais il y a certaines choses qui ne sont connues que des dessinateurs originaux, par exemple un petit détail dans un costume qui a un signification, ou l'angle des sourcils dans telles circonstances... C'est sur ce genre de petites choses que M. Murata m'a beaucoup aidé.
Comment s'est déroulé le travail avec le réalisateur de la série, Shingo Natsume ?
Quand on travaille il est assis juste à côté de moi (rires). Je dessine, dès que j'ai un petit problème je lui demande son opinion, ou alors c'est lui qui me donne ses idées. Il y a entre nous une interconnexion très habituelle. Mais il n'est pas non plus très exigeant : une fois qu'il a donné ses directives générales, il laisse faire le staff à sa manière pour que chacun donne le meilleur de lui-même. De plus, il essaie de s'entourer de personnes avec lesquelles il a déjà travaillé auparavant, donc il connaît les habitudes de chacun.
L'adaptation animée de One-Punch Man étant très fidèle au manga, sur quels éléments pensez-vous avoir pu mettre un peu plus de votre personnalité ?
D'une manière générale, je n'ai rien mis de personnel. Je trouve que la qualité du manga est de très très haut niveau, donc j'ai pensé qu'en cherchant à ajouter quelque chose en plus ça n'apporterait rien de meilleur.
J'ai juste voulu être au plus proche possible du style de M. Murata. Il y a peut-être des petites touches personnelles qui sont inconsciemment ressorties, mais je ne peux pas m'en empêcher, car tout animateur à ses petits tics qui peuvent surgir ici et là.
L'animé étant diffusé une fois par semaine, on travaille chaque semaine et donc sur une période assez longue, et parfois le directeur de l'animation est différent d'un épisode à l'autre. En faisant bien attention, on peut alors voir d'un épisode à l'autre que le dessin n'est pas tout à fait pareil.
A votre avis, pourquoi One-Punch Man est un phénomène qui plaît autant ? Et vous, qu'y préférez-vous ?
Je pense que tout est dans le titre de la série : Saitama peut battre tout le monde en un coup de poing, c'est un peu comme si le boss final apparaissait dès le début. Habituellement, dans les séries de ce type on a un jeune héros qui va progresser peu à peu, et quand apparaît le méchant on se demande comment il va pouvoir s'en sortir. Mais là, contrairement aux habitudes, on sait déjà comment ça va se finir : en un coup de poing !
Saitama est un peu comme un personnage cheaté dans un jeu. Je pense que cette situation anormale et amusante peut parler très facilement à un large public à travers le monde.
Il y a aussi une histoire plus conséquente qu'il n'y paraît. Autour de Saitama arrivent plein de personnages qui ont beaucoup de personnalité. Et puis il y a tous les états d'âme de Saitama qui a des problèmes à force de finir tout le monde en un coup de poing. Bien que ça a l'air d'être très axé sur les gags, je pense qu'il y a une histoire très intéressante qui se cache là-dedans.
Personnellement, j'ai énormément de mal à dessiner fidèlement le style de M. Murata, mais je trouve l'histoire tellement intéressante que ça me pousse à continuer.
A votre avis, si vous étiez un personnage de One-Punch Man, qui seriez-vous ?
Saitama, bien sûr ! (rires)
Parmi vos autres travaux de character designer, on peut noter le film 6 de One Piece : Le Baron Omatsuri et l'île aux secrets, réalisé par Mamoru Hosoda. Quel souvenir gardez-vous de votre travail sur le design des personnages de l'oeuvre si célèbre créée par Eiichiro Oda ?
C'était... difficile ! (rires)
Mamoru Hosoda a un niveau d'exigence très élevé, et je pense que je n'étais pas encore très habile au dessin à cette époque, mais j'ai fait tout ce que j'ai pu.
Avec M. Hosoda, Sushio et Takaaki Yamashita, nous avons commencé par les costumes des personnages, en dessinant sans cesse en nous demandant ce qui était le mieux. On était là, tous les quatre, à travailler avec acharnement en buvant du café, c'était très ardu et pénible.
Je crois que ce que j'en retiens de plus positif, c'est que ça m'a donné l'occasion de rencontrer Eiichiro Oda et de discuter avec lui !
Justement, puisque vous parlez des deux autres character designers et directeurs de l'animation de ce film, Sushio et Takaaki Yamashita, pouvez-vous nous dire quelques mots supplémentaires sur votre collaboration avec eux ?
Quand on fait un storyboard au sein de Toei Animation, on procède par scène. Chacun de nous trois avait un nombre de scènes différentes à faire, celles-ci étaient dans le désordre et ne suivaient pas le déroulement du film. Nous avions donc tous trois notre lot de scènes à dessiner.
Pour être honnête, messieurs Sushio et Yamashita étaient vraiment très bons, et c'était un peu difficile pour moi de les suivre et d'être à leur niveau.
Interview réalisée par Koiwai. Remerciements à Chikashi Kubota, à son agent, à l'interprète Fabrice Renault, et au staff du salon made in Asia.
De kowazoe, le 17 Juin 2017 à 10h17
Intervieuw qui comme d'habitude est plaisante et intéressante à lire, merci beaucoup !