Ciné-Asie Chronique Ciné Asie - The Raid 2
L'assaut mené par la police d'élite de Jakarta s'est soldé par un fiasco : tous les fonctionnaires, pourtant combattants aguerris, ont péri au combat. Tous ? Non. Un bleu, un traître et un combattant d'exception, Rama, quittent l'immeuble ravagé. Rama est récupéré par un groupe de policiers qui luttent secrètement contre le crime organisé et la corruption dans la police. Une nouvelle mission lui est confiée : Rama doit être un agent double, en infiltrant un grand syndicat du crime. Pour cela, il doit abandonner sa famille et se faire emprisonner dans la même prison qu'Uco, le fils d'un chef mafieux de la capitale indonésienne. Mais rien ne va se passer comme prévu...
The Raid avait été accueilli par des applaudissements soutenus à sa sortie, venant des spectateurs comme de la presse. Cette quasi-unanimité attirait l'attention : les exigeants Télérama et Inrockuptibles étaient aussi satisfaits que Studio Ciné Live et Première. The Raid avait même beaucoup plu à Jean-Baptiste Thoret, officiant alors pour Charlie Hebdo. Ce premier volet dégageait une force brute jamais vue, proposant de l'action pure et décomplexée, puisque basée sur un scénario simplissime, ce qui faisait son charme : grimper les étages d'un immeuble envahi par les trafiquants et les éliminer un par un jusqu'au chef se situant au sommet. Cette recette de la montée de niveaux, inspirée du jeu vidéo, avait tellement séduit que Sylvester Stallone avait annoncé vouloir s'en inspirer pour un volet d'Expendables.
Mais plus que tout, The Raid impressionnait par ses combats, basés sur un art martial indonésien largement méconnu, bien qu'entrevu dans Merantau, le premier film du même réalisateur. Cet art martial, c'est le pencak-silat. D'origine indonésienne, combinaison de deux courants (le pencak majoritaire à Java, Madura et Bali et le silat à Sumatra), cet art martial se révèle extrêmement impressionnant, car d'une violence inouïe, lorsqu'il est pratiqué par de grands spécialistes et bien mis en scène. The Raid 2, comme le premier, a pour lui son acteur principal, Iko Uwais, spécialiste du pencak-silat, et un réalisateur gallois, Gareth Evans, rompu à une mise en scène rendant hommage aux chorégraphies complexes élaborées, ayant lui-même conçu un documentaire sur cet art martial.
L'histoire de ce second volet commence directement à la suite du premier. Rama sort de la tour et est appréhendé par de mystérieux personnages...dans la foulée, une nouvelle mission lui est proposée, car il n'y a pas de temps à perdre pour continuer d'affaiblir la mafia. Pour autant, le lien entre les deux films s'arrête là, et regarder le 2 sans avoir vu le 1 ne peut pas vous être préjudiciable.
Alors quoi de neuf avec ce The Raid 2 ? Est-il aussi fort que le premier ? Oui. L'ingrédient des suites, le « harder, faster, stronger »est bien présent. Et le « better » ? C'est là où le bât blesse. Le premier The Raid étalait sa maîtrise sans fioritures : du combat partout, des angles de caméra improbables, une dynamique de tous les instants, une ambiance claustrophobe, il n'y avait rien de superficiel. The Raid 2 au contraire, s'il surpasse le premier en force brute, atteignant les cimes de l'ultra-violence et de la sauvagerie, est enveloppé dans du superficiel. Gareth Evans s'est senti obligé de faire plus au niveau du scénario. Pas forcément une bonne idée. Là où le premier était une pépite d'action non-stop, le second est plutôt un océan : des vagues gigantesques (les combats sont à couper le souffle), mais aussi quelques moments d'accalmie avec des dialogues pas forcément judicieux. L'homogène premier volet laisse ainsi sa place à quelque chose en dents de scie, avec même un gros vide entre 1h et 1h30. Le scénario tente de se la jouer thriller hongkongais, avec plein de personnages secondaires un peu partout... et cela ne fonctionne pas. Il y a même un choix pour le moins curieux : le réalisateur fait revenir un acteur (Yayan Ruhian) dont le personnage est décédé dans le premier volet... dans le rôle d'un nouveau personnage. Un peu de maquillage, un accoutrement un peu spécial, et hop, cela ferait presque illusion. Sauf que ce personnage est inutile à l'évolution de l'intrigue, n'étant là que pour proposer des combats dantesques... On peut donc se dire que, premièrement, le réalisateur manquait de pratiquants de haut niveau, et qu'en second lieu, il aurait pu dégraisser son film d'éléments ne s'imposant pas.
Cependant, ce scénario plus poussé ne souffre pas de tous les maux, puisqu'il instaure une ambiance encore plus poisseuse que dans le premier volet. Tout n'est que violence physique, décors urbains sordides, sales ou abandonnés, contrastant avec le luxe des habitats des patrons mafieux. Il n'y a qu'à voir cette scène presque surréaliste où, débarquant face à une bande de malfrats, Rama entrevoit un auto-stoppeur kidnappé se faire sodomiser par une fille totalement délurée équipée d'une ceinture godemiché. C'est d'un mauvais goût absolu, et pourtant, ça colle à l'ambiance ultraviolente des snuff movies, dont on sait la mafia friande. Et la mafia indonésienne n'est pas composée de gentilshommes avec code de l'honneur... Le scénario, s'il a bien des défauts, permet donc d'alimenter un univers très glauque, faisant passer l'immeuble du premier opus pour un hôtel cinq étoiles. Le scénario a également une autre vertu : celui de rendre moins manichéen son héros principal, qui de flic parfaitement intègre se métamorphose peu à peu en loup. Moins sympathique que dans le premier opus donc... mais plus que jamais invincible, et c'est peut-être là un autre défaut : niveau crédibilité, le film est à la masse, car si Rama donne, Rama subit aussi. Au vu de toutes les blessures qu'il doit endurer, ça le fait moyen de le voir encore debout dans certaines situations. Même si c'est un code du film d'action, on aurait pu penser que Gareth Evans, adepte de réalisme à tout prix, change un peu la donne. En tous les cas, il semblerait illogique que l'intrigue de The Raid 3, qui n'est pas prévu avant 2017-2018, reprenne directement là où se termine ce second volet...parce qu'un héros dans un tel état repartant au combat quelques jours après, ce n'est juste pas possible.
Vous l'aurez compris, le scénario amène du bon (l'ambiance qui choque, la complexification du personnage principal) et du moins bon (beaucoup de personnages, de situations ou de dialogues superficiels). Mais il faut surtout souligner que The Raid 2 fait entrer le film de combats dans une dimension jamais atteinte. Il y a d'abord le choix fait par Gareth Evans : du quasi-plan-séquence pour les combats au corps-à-corps, limitant les coupures et le phénomène clipesque. C'est un plaisir incommensurable, dont on pensait que seul Donnie Yen pouvait encore se vanter (et encore, pas tout le temps...), que de voir de vraies chorégraphies sauvages exécutées à l'écran par des sportifs de haut niveau. Si tout est extrêmement violent, c'est bien parce que les artistes maîtrisent totalement leur sujet. Le réalisateur a fait un autre choix, celui de proposer davantage de plaies ouvertes. Le sang coule donc davantage que dans le premier volet. Les personnages secondaires ne servent pas à grand-chose dans le scénario...mais c'est une tout autre affaire une fois en combat ! Mention spéciale ici au top model Julie Estelle, née d'un père franco-américain, qui va vous faire redécouvrir le maniement des marteaux. Et que dire des angles hallucinés, comme cette caméra retournée sur le flanc, au sol, pour mieux suivre une chute à travers une vitre ? Un plan-séquence de folie que celui-là, entamant une poursuite pour ensuite aller à une vitesse folle. Et vous ne risquerez pas la nausée, on n'est pas sur de la caméra-épaule ! Tout est fluide et bien pensé. Bref, les chorégraphies et la mise en scène bénéficient d'un soin tel qu'ils dépassent allègrement tout ce qui s'est fait jusqu'à présent. Les adorateurs des films de combats, ayant placé sur un piédestal les Bruce Lee, la 36ème chambre de Shaolin, les meilleurs Jet Li et Donnie Yen, le premier Ong-bak (oublions les bourrins Expendables), trouveront là le film fait pour eux. Pour ma part, j'insiste une dernière fois : c'est le meilleur film de combats vu à ce jour, et on franchit un cap dans l'ultraviolence et la maîtrise quant à la mise en scène et au montage. Attention, à réserver à un public averti !
Cerise sur le gâteau, le Blu-ray comme le DVD sont chargés à bloc, puisque les bonus sont communs aux deux éditions, avec près de 3 heures de suppléments ! C'est tellement rare qu'il faut l'écrire : bravo et merci à Wild Side vidéo. Vous n'avez AUCUNE excuse de voir le film illégalement ! Un poster, une rencontre filmée avec le réalisateur et l’acteur principal, 9 scènes coupées (dont une majorité de combats !!!), un documentaire sur le cinéma d’action indonésien, un making-of, et pas mal d'autres reportages (comment tourner une suite, réaliser un film d’action, chorégraphie des combats, chacun de ces 3 éléments durant un quart d'heure environ !). Seule différence entre Blu-ray et DVD, hormis la qualité de l'image ? Le Blu-ray est livré dans une superbe édition steelbook, le DVD dans une édition cartonnée tout aussi sympa.
En résumé, bien que la tentative de scénario ne soit pas forcément payante en alourdissant certains éléments, mais en enrichissant d'autres, The Raid 2 s'éloigne de la simplicité du premier opus. Mais les combats et la mise en scène transcendent tout ce qui s'est fait jusqu'à présent. Le meilleur film d'arts martiaux, pour l'instant, c'est lui et pas un autre.
The Raid avait été accueilli par des applaudissements soutenus à sa sortie, venant des spectateurs comme de la presse. Cette quasi-unanimité attirait l'attention : les exigeants Télérama et Inrockuptibles étaient aussi satisfaits que Studio Ciné Live et Première. The Raid avait même beaucoup plu à Jean-Baptiste Thoret, officiant alors pour Charlie Hebdo. Ce premier volet dégageait une force brute jamais vue, proposant de l'action pure et décomplexée, puisque basée sur un scénario simplissime, ce qui faisait son charme : grimper les étages d'un immeuble envahi par les trafiquants et les éliminer un par un jusqu'au chef se situant au sommet. Cette recette de la montée de niveaux, inspirée du jeu vidéo, avait tellement séduit que Sylvester Stallone avait annoncé vouloir s'en inspirer pour un volet d'Expendables.
Mais plus que tout, The Raid impressionnait par ses combats, basés sur un art martial indonésien largement méconnu, bien qu'entrevu dans Merantau, le premier film du même réalisateur. Cet art martial, c'est le pencak-silat. D'origine indonésienne, combinaison de deux courants (le pencak majoritaire à Java, Madura et Bali et le silat à Sumatra), cet art martial se révèle extrêmement impressionnant, car d'une violence inouïe, lorsqu'il est pratiqué par de grands spécialistes et bien mis en scène. The Raid 2, comme le premier, a pour lui son acteur principal, Iko Uwais, spécialiste du pencak-silat, et un réalisateur gallois, Gareth Evans, rompu à une mise en scène rendant hommage aux chorégraphies complexes élaborées, ayant lui-même conçu un documentaire sur cet art martial.
L'histoire de ce second volet commence directement à la suite du premier. Rama sort de la tour et est appréhendé par de mystérieux personnages...dans la foulée, une nouvelle mission lui est proposée, car il n'y a pas de temps à perdre pour continuer d'affaiblir la mafia. Pour autant, le lien entre les deux films s'arrête là, et regarder le 2 sans avoir vu le 1 ne peut pas vous être préjudiciable.
Alors quoi de neuf avec ce The Raid 2 ? Est-il aussi fort que le premier ? Oui. L'ingrédient des suites, le « harder, faster, stronger »est bien présent. Et le « better » ? C'est là où le bât blesse. Le premier The Raid étalait sa maîtrise sans fioritures : du combat partout, des angles de caméra improbables, une dynamique de tous les instants, une ambiance claustrophobe, il n'y avait rien de superficiel. The Raid 2 au contraire, s'il surpasse le premier en force brute, atteignant les cimes de l'ultra-violence et de la sauvagerie, est enveloppé dans du superficiel. Gareth Evans s'est senti obligé de faire plus au niveau du scénario. Pas forcément une bonne idée. Là où le premier était une pépite d'action non-stop, le second est plutôt un océan : des vagues gigantesques (les combats sont à couper le souffle), mais aussi quelques moments d'accalmie avec des dialogues pas forcément judicieux. L'homogène premier volet laisse ainsi sa place à quelque chose en dents de scie, avec même un gros vide entre 1h et 1h30. Le scénario tente de se la jouer thriller hongkongais, avec plein de personnages secondaires un peu partout... et cela ne fonctionne pas. Il y a même un choix pour le moins curieux : le réalisateur fait revenir un acteur (Yayan Ruhian) dont le personnage est décédé dans le premier volet... dans le rôle d'un nouveau personnage. Un peu de maquillage, un accoutrement un peu spécial, et hop, cela ferait presque illusion. Sauf que ce personnage est inutile à l'évolution de l'intrigue, n'étant là que pour proposer des combats dantesques... On peut donc se dire que, premièrement, le réalisateur manquait de pratiquants de haut niveau, et qu'en second lieu, il aurait pu dégraisser son film d'éléments ne s'imposant pas.
Cependant, ce scénario plus poussé ne souffre pas de tous les maux, puisqu'il instaure une ambiance encore plus poisseuse que dans le premier volet. Tout n'est que violence physique, décors urbains sordides, sales ou abandonnés, contrastant avec le luxe des habitats des patrons mafieux. Il n'y a qu'à voir cette scène presque surréaliste où, débarquant face à une bande de malfrats, Rama entrevoit un auto-stoppeur kidnappé se faire sodomiser par une fille totalement délurée équipée d'une ceinture godemiché. C'est d'un mauvais goût absolu, et pourtant, ça colle à l'ambiance ultraviolente des snuff movies, dont on sait la mafia friande. Et la mafia indonésienne n'est pas composée de gentilshommes avec code de l'honneur... Le scénario, s'il a bien des défauts, permet donc d'alimenter un univers très glauque, faisant passer l'immeuble du premier opus pour un hôtel cinq étoiles. Le scénario a également une autre vertu : celui de rendre moins manichéen son héros principal, qui de flic parfaitement intègre se métamorphose peu à peu en loup. Moins sympathique que dans le premier opus donc... mais plus que jamais invincible, et c'est peut-être là un autre défaut : niveau crédibilité, le film est à la masse, car si Rama donne, Rama subit aussi. Au vu de toutes les blessures qu'il doit endurer, ça le fait moyen de le voir encore debout dans certaines situations. Même si c'est un code du film d'action, on aurait pu penser que Gareth Evans, adepte de réalisme à tout prix, change un peu la donne. En tous les cas, il semblerait illogique que l'intrigue de The Raid 3, qui n'est pas prévu avant 2017-2018, reprenne directement là où se termine ce second volet...parce qu'un héros dans un tel état repartant au combat quelques jours après, ce n'est juste pas possible.
Vous l'aurez compris, le scénario amène du bon (l'ambiance qui choque, la complexification du personnage principal) et du moins bon (beaucoup de personnages, de situations ou de dialogues superficiels). Mais il faut surtout souligner que The Raid 2 fait entrer le film de combats dans une dimension jamais atteinte. Il y a d'abord le choix fait par Gareth Evans : du quasi-plan-séquence pour les combats au corps-à-corps, limitant les coupures et le phénomène clipesque. C'est un plaisir incommensurable, dont on pensait que seul Donnie Yen pouvait encore se vanter (et encore, pas tout le temps...), que de voir de vraies chorégraphies sauvages exécutées à l'écran par des sportifs de haut niveau. Si tout est extrêmement violent, c'est bien parce que les artistes maîtrisent totalement leur sujet. Le réalisateur a fait un autre choix, celui de proposer davantage de plaies ouvertes. Le sang coule donc davantage que dans le premier volet. Les personnages secondaires ne servent pas à grand-chose dans le scénario...mais c'est une tout autre affaire une fois en combat ! Mention spéciale ici au top model Julie Estelle, née d'un père franco-américain, qui va vous faire redécouvrir le maniement des marteaux. Et que dire des angles hallucinés, comme cette caméra retournée sur le flanc, au sol, pour mieux suivre une chute à travers une vitre ? Un plan-séquence de folie que celui-là, entamant une poursuite pour ensuite aller à une vitesse folle. Et vous ne risquerez pas la nausée, on n'est pas sur de la caméra-épaule ! Tout est fluide et bien pensé. Bref, les chorégraphies et la mise en scène bénéficient d'un soin tel qu'ils dépassent allègrement tout ce qui s'est fait jusqu'à présent. Les adorateurs des films de combats, ayant placé sur un piédestal les Bruce Lee, la 36ème chambre de Shaolin, les meilleurs Jet Li et Donnie Yen, le premier Ong-bak (oublions les bourrins Expendables), trouveront là le film fait pour eux. Pour ma part, j'insiste une dernière fois : c'est le meilleur film de combats vu à ce jour, et on franchit un cap dans l'ultraviolence et la maîtrise quant à la mise en scène et au montage. Attention, à réserver à un public averti !
Cerise sur le gâteau, le Blu-ray comme le DVD sont chargés à bloc, puisque les bonus sont communs aux deux éditions, avec près de 3 heures de suppléments ! C'est tellement rare qu'il faut l'écrire : bravo et merci à Wild Side vidéo. Vous n'avez AUCUNE excuse de voir le film illégalement ! Un poster, une rencontre filmée avec le réalisateur et l’acteur principal, 9 scènes coupées (dont une majorité de combats !!!), un documentaire sur le cinéma d’action indonésien, un making-of, et pas mal d'autres reportages (comment tourner une suite, réaliser un film d’action, chorégraphie des combats, chacun de ces 3 éléments durant un quart d'heure environ !). Seule différence entre Blu-ray et DVD, hormis la qualité de l'image ? Le Blu-ray est livré dans une superbe édition steelbook, le DVD dans une édition cartonnée tout aussi sympa.
En résumé, bien que la tentative de scénario ne soit pas forcément payante en alourdissant certains éléments, mais en enrichissant d'autres, The Raid 2 s'éloigne de la simplicité du premier opus. Mais les combats et la mise en scène transcendent tout ce qui s'est fait jusqu'à présent. Le meilleur film d'arts martiaux, pour l'instant, c'est lui et pas un autre.
De Bobmorlet [5629 Pts], le 21 Mai 2015 à 23h05
Violent juste comme il faut.