The Eminence in Shadow Vol.1 - Manga

The Eminence in Shadow Vol.1 : Critiques

Kage no Jitsuryokusha ni Naritakute

Critique du volume manga

Publiée le Mercredi, 05 Janvier 2022

Avec notamment le lancement du succès The Rising of the Shield Hero dès 2016, Doki-Doki reste un précurseur de la vague de mangas isekai qui s'abat depuis désormais quelques années sur le marché français, avec son lot de titres tour à tour excellents, sympathiques ou parfaitement anecdotiques. De ce fait, il n'y a rien d'étonnant à voir le label manga des éditions Bamboo continuer de s'intéresser au genre au fil des années, avec des titres assez variés comme Mushoku Tensei, Cautious Hero ou encore Je suis un assassin (et je surpasse le héros). Et 2022 ne devrait pas changer ça, puisque la toute première nouvelle série de Doki-DOki pour cette année est un nouveau titre isekai: The Eminence in Shadow.

De son nom original Kage no Jitsuryokusha ni Naritakute (littéralement "Je veux être une personne puissante dans l'ombre"), ce manga est en cours au Japon depuis 2019 chez Kadokawa dans le magazine Comp Ace (le magazine d'Overlord, entre autres), et il voit la dessinatrice Anri Sakano (dont c'est la première publication française mais qui est active dans son pays depuis une quinzaine d'années) adapter (comme souvent avec les mangas isekai) un light novel inédit en France, qui est écrit par Daisuke Aizawa (dont c'est la première oeuvre professionnelle) et est illustré par Touzai (également connu pour illustrer le light novel d'origine de Je suis un assassin). Notons qu'au Japon, The Eminence in Shadow connaît aussi depuis 2019 un spin-off manga comique, Kage no Jitsuryokusha ni Naritakute! Shadow Gaiden, preuve d'une certaine popularité. Et cette popularité devrait encore s'accroître prochainement puisqu'une adaptation de l'oeuvre en anime par le studio nexus est prévue dans le courant de cette année.

The Eminence in Shadow, comme son nom le laisse déjà un peu deviner, nous immisce auprès d'un personnage principal un peu particulier puisque, depuis tout petit, il a toujours voué une admiration sans bornes non pas aux héros ou aux grands méchants, mais à ceux qu'il appelle les "éminences de l'ombre", c'est-à-dire les personnages profitant de leurs capacités hors du commun pour plutôt tirer les ficelles depuis les coulisses. Il l'affirme lui-même: ça n'a jamais été un simple engouement passage tel qu'on peut en avoir dans son enfance, mais bel et bien une perspective qui l'a toujours motivé. Alors quand il meurt de manière improbable (on vous laisse découvrir ça) et se réincarne dans un autre monde typé fantasy sous les traits de Cid Kagenô, un garçon ayant dix ans au départ, il entrevoit enfin la possibilité de faire de son obsession son projet d'avenir...

Une fois n'est pas coutume, commençons par évoquer les principales limites de ce premier volume, qui sont au nombre de deux.
Tout d'abord, le rendu visuel qui, sans être désagréable, reste plutôt lisse autant dans ses designs (surtout les visages, avec même quelques grosses inégalités) que dans ses décors très standards et dans ses choix de découpage et d'angles sans grande inventivité. Pour faire court, disons que c'est dépourvu de la moindre personnalité, mais que c'est suffisamment clair pour probablement plaire au plus grand nombre sans forcément beaucoup marquer.
Ensuite, la rapidité du récit. Au départ, il s'agit clairement d'un choix volontaire pour évacuer les habituels poncifs de l'isekai et lancer au plus vite le vif du sujet... mais même après cette introduction expéditive, tous les premiers événements restent vraiment vite vus, que ce soit les premières années de Cid dans cet autre monde, la façon dont il "recrute" ses premières compagnes d'aventure (pour la plupart, on sait à peine comment il a fait), son arrivée dans une école de la capitale à l'adolescence pour parfaire son apprentissage... tant et si bien qu'au bout de ce premier tome, aucun visage n'est un minimum attachant parmi la galerie de personnages secondaires gravitant autour de notre héros.

Et pourtant, peu à peu, il y a de quoi se laisser prendre au jeu grâce à une spécificité assez propre à cette oeuvre: son héros, justement, qui a plutôt tout du anti-héros ! Cid est effectivement un personnage principal qui, à plus d'une reprise, serait presque plus antipathique qu'autre chose, en ceci que, pour atteindre son rêve de devenir une "éminence de l'ombre", il n'hésite aucunement à inventer de toutes pièces une histoire de lutte contre un démon et contre un ordre qui lui est dédié (l'Ordre de Diabolos), en manipulant ainsi son entourage crédule afin de mieux avancer peu à peu vers son but personnel.
Mais au-delà des ambitions pour l'instant pas bien glorieuses du bonhomme, ce qui a de quoi séduire provient de la manière dont il tâche de progresser vers son but: en exploitant les clichés propres à ce genre d'autre monde de fantasy. Cid semble effectivement connaître assez bien différents poncifs de l'isekai qu'il décide donc d'exploiter à sa sauce, ce qui confère régulièrement au récit, derrière son côté possiblement sombre, des notes presque parodiques du genre. On sourit alors plus d'une fois devant les manigance du gus, notamment quand une narration externe vient nous rappeler à certaines reprises que ce qu'il est en train de raconter/faire, c'est du gros mytho.
Mais justement, tout ça est-il voué à ne rester que du mytho ? En effet, à force de mettre en place des bobards, ceux-ci semblent se répandre plus encore que prévu et se concrétiser, et Cid paraît voué à voir ses histoires se retourner petit à petit contre lui... On n'en dira pas plus pour ne pas spoiler, mais il s'agit assurément d'un facteur très stimulant, qui devrait facilement accentuer les enjeux et les attentes pour la suite !

A l'arrivée, malgré les limites évoquées, les débuts de The Eminence in Shadow ont des petites originalités qui rendent facilement curieux de découvrir la suite. On ne pourra donc qu'apprécier le choix de Doki-Doki de publier les deux premiers volumes simultanément, tant le tome 2 devrait déjà nous donner une meilleure idée de l'oeuvre.

Enfin, l'édition française est, comme souvent avec Doki-Doki, de très bonne qualité. Habitué à ce type de récit, le traducteur Jean-Benoît Silvestre livre une version française limpide et immersive, tandis que le studio Charon offre un lettrage soigné. On a également droit à quatre premières pages en couleurs, à un papier à la fois épais et souple, et à une qualité d'impression convaincante.
  

Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
14 20
Note de la rédaction