Fleurs du mal (les) Vol.7 - Actualité manga
Fleurs du mal (les) Vol.7 - Manga

Fleurs du mal (les) Vol.7 : Critiques

Aku no Hana

Critique du volume manga

Publiée le Vendredi, 01 Décembre 2017

Critique 2 :

Il y a eu les montagnes impossibles à franchir pour sortir de cette étouffante ville, puis la cabane partie en fumée... et après avoir été confiné chez lui sans revoir Sawa, il semblait évident que la jeune fille était l'ultime "autre côté" de Takao, son seul réel moyen d'échapper à la normalité écrasante du monde. Oui, ça semblait évident... mais est-ce le cas ? Et si l'"autre côté" n'existait pas ? S'il était impossible de s'extraire du quotidien codifié et étouffant pour ces collégiens ?
Brutalement "libéré" par Sawa, ayant enfin entrevu ce que la collégienne, mise à nu, renferme en elle, Takao semble prêt à affronter avec elle, une dernière fois, la société qui ne cesse de les rappeler dans le rang. Si l'"autre côté" n'existe pas, la seule solution pour se libérer de ce monde, c'est d'aller jusqu'au bout. Le jour de la fête de l'été, après avoir interpellé la foule en criant haut et fort leur ressenti, les voila qui s'imbibent d'essence, briquet à la main...

Les derniers chapitres du tome 6 des Fleurs du Mal, avec leur impressionnante montée de tension et de gravité, laissaient deviner pour la suite un ultime grand moment afin d'achever la premier partie de la série. Et ça ne manque pas, tant Shuzo Oshimi mène à merveille la "conclusion" de cet arc, qui concrétise parfaitement toute l'évolution des deux personnages centraux depuis le premier tome. Bien sûr, il y a l'intensité tragique pure et dure de ce que Takao et Sawa s'apprêtent à faire pour se libérer des chaînes imposées par la société, mais il y a aussi bien d'autres choses. Leur prise de conscience qu'ils ne sont peut-être eux aussi que des "cafards" incapables de s'extirper de leurs chaînes invisibles. La manière dont réagissent les parents des deux enfants, car forcément, en voulant ainsi se "libérer", ils ne peuvent que meurtrir leur entourage paniqué et perdu. Leur discours où chaque phrase a un sens lourd, voire une symbolique profonde. La symbolique des fleurs d'Odilon Redon, justement, qui sont plus imposantes que jamais. Le découpage très intelligent, où chaque case dans le présent s'accompagne de plusieurs autres des tomes précédents, montrant bien qu'aucun des précédents événements n'a été laissé au hasard et que chacun d'eux a eu un sens dans le parcours des deux collégiens. Et puis l'ultime geste de Sawa envers Takao, qui montre à quel point quelque chose a changé en elle.

Le rideau se referme alors sur la première partie de la série, au bout de la quarantaine de pages qui composent le premier chapitre du tome. Il se referme impeccablement, avec force, mais aussi avec la soudaineté qu'il faut, afin de marquer un parfait contraste avec la suite, qui, dès le deuxième chapitre du volume, nous offre une ellipse et un nouveau "démarrage".

La deuxième grande partie du volume peut alors commencer, de façon marquante à sa manière, car son atmosphère contraste complètement avec le tout début du volume. La fête d'été est désormais passée depuis longtemps, et le collège aussi. On retrouve Takao, désormais au lycée Migiwa, dans une autre ville loin de ses années de collège. L'adolescent, en apparence, semble être comme calmé, apaisé. Quand ses camarades de classe lui parlent de leurs délires du moment, il leur répond vaguement en riant doucement... mais en l'observant bien, on devine vite que tout n'est que façade. A chacun des instants où on le suit, on le ressent comme résigné, éteint. Il ne s'intéresse pas aux activités de ses "amis" qui passent leur temps à comparer les filles ou à aller au karaoké, il se contente d'observer la vie morne de ses parents et notamment de son père qui commence à boire un peu trop... Tout est désespérément banal, formaté, codifié. Tout ce qu'il cherchait à fuir est là, l'entoure, et il ne semble plus chercher à s'en extirper même s'il ne s'y sent pas bien du tout. Et à chacun de ses pas, notamment quand il erre dehors ou quand il a ses réactions effacées devant les autres, on ressent totalement en lui le fameux spleen baudelairien. Pour cela, on peut vraiment compter sur la patte visuelle d'Oshimi, qui continue d'évoluer au fil de la série. Ici, le visage de Takao brille par ses légères nuances : qu'il soit muet, qu'il parle, qu'il rigole, on trouve toujours dans son regard quelque chose d'éteint et de mélancolique. Et les décors de cette banale ville, notamment dans la nuit, son soignés, magnifiques et renforcent très bien l'atmosphère.

Très introspectif, nous plongeant au plus près de Takao, ce volume laisse bien deviner que malgré les mois qui passent, il a laissé quelque chose derrière lui, il lui manque quelque chose, ou plutôt quelqu'un. On le constate bien à travers quelques brèves cases éparses où l'on devine la silhouette passée de Sawa, comme un souvenir dans l'esprit du jeune garçon. Et tout comme le lecteur resté sur la fin abrupte de la première partie de la série, Takao ne peut que se demander ce qu'est devenue la jeune fille qui a tant fait basculer la vie et dont il n'a plus eu la moindre nouvelle.

Alors, Takao se relèvera-t-il ? Y aura-t-il un renouveau pour l'adolescent en plein spleen ? Pourra-t-il se faire à sa condition imposée par l'oppressante société ? Une forme de salut semble bien arriver petit à petit dans le tome à travers un nouveau visage féminin, Aya, camarade d'une autre classe, aussi grande que belle, très populaire, mais qui cache une passion secrète. Passion qui ne peut que rappeler des choses à Takao, l'époque où il se plongeait assidûment dans les livres...

On attend donc avec impatience de voir ce qui attend désormais Takao, quel rôle aura Aya, si l'ombre de Sawa perdurera... Pour l'heure, Shûzô Oshimi achève brillamment la première grande partie de sa série, et démarre la deuxième avec tout autant de talent et de puissance, en décortiquant de toujours aussi près les tourments de l'adolescence et bien plus encore.


Critique 1 :

Confiné chez lui sur ordre de ses parents et suspecté par la police pour les différentes affaires qui ont frappé la ville, Takao n'est plus que l'ombre de lui-même, et n'a plus de nouvelles de Sawa... jusqu'à ce que celle-ci fasse irruption chez lui pour amener le jeune homme avec elle, de force. Le lendemain, le festival d'été de la ville a lieu, l'endroit où le duo va mettre en œuvre son plan final.

Après la remarquable montée en puissance du tome précédent, l'heure est venue d'acheter la première grande partie de la série. Le découpage de l’œuvre quant à la construction des volumes est assez cruel, aussi il ne faut qu'un chapitre pour démontrer le plan final de Sawa et Takao, mais quel chapitre ! Ici, le malaise des deux jeunes gens à l'égard de la société n'est que plus évident, plus puissant aussi, une force appuyée par la mise en scène de Shuzo Oshimi et son art à faire aller ses protagonistes de l'avant, les rendant capables d'actions qui dépasseraient facilement le commun des mortels. On frissonne, et on a même peur durant ce chapitre à l'intensité hors normes, tant chaque page pourrait facilement marquer la fin pure et simple de la série, selon le déroulement de l'action. Évidemment, le lecteur étant au courant que Les Fleurs du Mal comportent 11 tomes, l'histoire ne s'arrête pas là, mais les frayeurs sont d'autant plus réelles que le mal-être de Sawa et Takao les rend aussi effrayants que touchants. On en viendrait même à condamner le monde qu'ils pointent tant du doigt, cette société de « cafards » comme ils appellent ses habitants, ce malgré les exactions des deux individus.

Alors, comment rebondir après une telle montée en puissance ? Le second chapitre du tome ouvre le nouveau cycle de la série, et n'est finalement que la suite logique des événements, une suite à la fois apaisante par rapport au sort des personnages, mais aussi tragique par le message qu'on peut facilement y voir, à savoir la victoire d'une société codifiée sur ceux qui ont tenté de la défier, deux adolescents qui n'y trouvent pas leur place et qui ont tenté de changer les choses à leur manière. Pourtant, le contexte de cette suite n'est que la suite logique, une suite qui apporte d'ailleurs une certaine fraîcheur à la série tant elle se montre nettement différente et oriente le message de l’œuvre vers une autre dimension : l'adolescence pure et simple, dans un cadre pour le moment plus modéré par rapport aux plans hors du commun de Sawa. Le Takao qui nous est montré nous surprend par ses airs d'élèves discrets, mais les masques tombent assez vite et l'adolescent a évolué de manière logique par rapport aux six tomes précédents. En tant qu'individu en proie au doute et en train de murir, il est temps pour lui de faire de nouvelles expériences, renouer avec des éléments qu'il avait délaissés, chercher à progresser de lui-même tout en restant sceptique par rapport au monde qui l'entoure. En somme, Shuzo Oshimi dépeint le mal-être de cette période trouble qu'est l'adolescence d'une toute autre manière, d'une façon plus solitaire puisque Takao n'est plus accompagné, ce qui apporte aussi un grand renouveau à l'intrigue. Le casting de personnages s'enrichit lui aussi, on notera les amis assez ordinaires de Takao, archétypes des camarades de lycée subissant la normalité du monde, ainsi qu'un nouveau personnage féminin important : Aya. Classique de prime abord, elle finit par se démarquer aussi, montrant un autre aspect de l'adolescence par sa passion qu'elle tente de cacher au monde, aussi sa rencontre avec Takao sera l'ouverture idéale pour que le nouveau binôme puisse évoluer.

Globalement, il règne alors une ambiance douce-amère dans ce volume. La tempête s'est calmée, le rythmé est plus calme, mais le ton n'est pas forcément joyeux pour autant. La société continue d'être montrée sous ses aspects les plus frustrants, le cadre de Takao n'est que le reflet du monde qu'il n'accepte que difficilement, et le héros est loin d'être aussi épanoui que lorsqu'il fréquentait Sawa, même son regain d'intérêt quant à ses passions s’apprête à renaître. Cette ambiance vient aussi de l'absence de certains personnages phares du premier arc, Sawa et Nanako surtout, ce qui reste logique par rapport à l'idée de Shuzo Oshimi de faire progresser son héros sur le chemin de la vie, une route où l'on perd parfois de vue des personnes qui semblaient pourtant essentielles à notre épanouissement. Oui, ce septième tome marque un nouvel arc différent, mais à l'atmosphère toujours captivante et aux messages à la fois durs et sincères.


Critique 2 : L'avis du chroniqueur
Koiwai

17.5 20
Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Takato
16 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs