Destins Paralleles - Elle Vol.1 - Actualité manga
Destins Paralleles - Elle Vol.1 - Manga

Destins Paralleles - Elle Vol.1 : Critiques

Koto koto ― Chihiro no koto ―

Critique du volume manga

Publiée le Jeudi, 22 Février 2018

Découvert aux éditions Casterman en 2015 avec l'excellent Sangsues, sa première série longue, le mangaka Daisuke Imai revient enfin dans notre pays, cette fois-ci aux éditions Komikku, avec un projet alléchant : Destins Parallèles, qui est sa deuxième oeuvre longue, et qui se compose en réalité de deux séries de trois volumes distinctes (pour un total de 6 volumes, donc). Un peu dans la veine d'un manga comme Made in Heaven qui a été publié aux éditions Asuka il y a 11 ans, cette oeuvre au format atypique propose de suivre deux fois la même histoire sentimentale, mais chacune des deux séries nous présente cette histoire à travers le point de vue de l'un de ses deux personnages centraux. Ces deux facettes d'une même pièce présentent la naissance d'une romance à Kyôto entre les dénommés Chihiro et Yukichi. Destins Parallèles - elle se centre sur Chihiro, tandis que Destins Parallèles - lui se consacre à Yukichi. Chose étonnante et témoignant sans doute de l'aspect assez ambitieux du projet, les deux séries n'ont été publiées au Japon ni dans le même magazine, ni chez le même éditeur ! Dans cette chronique, on va s'intéresser à Destins Parallèles - elle, qui a été publié chez l'éditeur Futabasha.


On fait ici la connaissance de Chihiro, habitant dans la maison de sa mamie dans une ancienne boutique de potiers, au fin fond de la rue Gojôzaka de Kyoto, alors qu'elle est en pleine recherche d'un petit miroir qu'elle possède depuis l'enfance. non pas que ce petit objet a une grande valeur, mais il lui a été offert par sa mère quand elle était petite, et elle en a toujours pris grand soin... Alors quand sa mamie finit par lui dire qu'elle l'a vendu dans une brocante, elle est un peu désespérée ! Pourtant, elle ne sait pas encore à quel point ce petit objet va bouleverser son existence. Car quand elle le retrouve, tout à fait par hasard, il est entre les mains d'un jeune homme de l'université Rakuhoku qu'elle vient d'intégrer, et celui-ci, qui vient de la bousculer, le lui offre avec un grand sourire. Chihiro est troublée, d'autant plus que sa mamie lui dit que quand ce garçon a acheté ce miroir, il comptait l'offrir à... son âme soeur ?! Est-ce un signe du destin ? Une chose est sûre: Chihiro sent son coeur battre, et souhaite retrouver la trace du garçon, réussir à nouer des liens avec lui...


La base de l'intrigue de cette version "elle" est somme toute très classique, encore plus quand on n'a pas encore lu la version "lui" avant : globalement, l'avancée du scénario se résume à la prise de conscience de Chihiro qu'elle se sent attirer par le garçon qu'elle a croisé par hasard. Le fait qu'ils se soient bousculés, que ce soit lui qui avait son miroir, qu'il a dit vouloir l'offrir à son âme soeur... Tout ceci ne peut-il qu'être un hasard ? Daisuke Imai met alors en avant, dans le début de sa romance, l'idée de destin (bien reprise dans le titre français des deux séries), tant, à l'instar de Chihiro, on a envie de penser que le destin de Chihiro et du garçon était forcément voué à se lier... Mais peut-être que Chihiro est la seule des deux à penser ça ? La réponse commencera à se dessiner à la lecture du tome 1 de la version "lui", centrée sur le garçon en question, Yukichi.


Car ici, c'est bel et bien entièrement sur Chihiro et sur son point de vue que l'on se focalise. Avec un tel point de départ, la demoiselle peut sembler un peu naïve et fleur bleue... et c'est le cas. Mais Daisuke Imai ne tombe pas dans les pièges habituels, et aborde les choses sous un angle qui se veut très crédible et assez réaliste (la chute assez cruelle de ce tome 1 nous le montrera bien). Pour cela, l'auteur prend soin de décortiquer suffisamment la jeune fille et son caractère, qu'on comprend hérité d'une enfance et d'une adolescence où elle était effacée, manquait de confiance en elle, et n'avait (et n'a donc toujours) aucune expérience avec les garçons. Imai parvient à la rendre instantanément attachante grâce à sa manière assez douce de la dépeindre, on suit alors avec intérêt ses hésitations, et surtout ses évolutions où elle peut compter sur un entourage lui aussi intéressant, où certains visages se démarquent et ont aussi droit à leurs petits développements. Des évolutions, elle en connaîtra pas mal dans ce premier tome, que ce soit physiquement avec un relooking qui la mettra mieux en valeur (et que l'on constate aussi dans ses brèves apparitions de la version "lui"), et psychologiquement avec sa fébrile prise de confiance en elle et ses efforts pour essayer de retrouver le "garçon au miroir" et se rapprocher de lui.


Mais les efforts seront-ils payants ? Imai les dépeint avec beaucoup d'application et une certaine bienveillance, via des scènes assez diverses, où les amis de Chihiro sont là pour l'épauler si besoin, ou alors où on a l'occasion de suivre leurs pas dans divers endroits de Kyoto comme les temples pour effectuer des prédictions. Cela dit, rien ne sera facile pour elle, car tout comme le lecteur qui n'aurait pas encore lu la version "lui", Chihiro ne connaît en réalité rien du garçon qui a commencé à faire battre son coeur et qui n'apparaît ici qu'à quelques reprises en l'intrigant de plus belle. Pourquoi lui a-t-il donné le miroir qu'il venait d'acheter ? Est-ce vraiment à elle qu'il était destiné ? Pour tout savoir, c'est sur la version "lui" qu'il faudra bel et bien se pencher, Daisuke Imai confirmant alors qu'il a réellement tout bien pensé, tant l'autre série éclaire tout avec cohérence et logique.


C'est également sur le plan visuel que le mangaka a très bien pensé l'aspect parallèle de ses deux séries, chacune des scènes où Chihiro et Yukichi se croisent étant très cohérentes visuellement, en nous présentant souvent le même lieu (forcément) dans des angles de vue différents. A ce titre, il y a notamment la scène de la première fois où ils se croisent sans se remarquer, qui consiste en une double-page aux vues totalement différentes dans chaque série, les deux doubles-pages en question permettant alors d'apprécier le cadre de la scène dans son intégralité une fois les deux volumes 1 lus. En dehors de ces petits détails, Imai, comme c'était déjà le cas dans Sangsues, excelle dans l'utilisation de ses décors, qu'il met très souvent en avant en nous y immergeant pleinement, parfois dans ses recoins, comme dans les premières pages d'"elle" qui nous invitent au sein d'une demeure tout en longueur. En se basant sur des photographies bien retravaillées, et avec des angles de vue souvent canons, il nous immisce totalement dans une ville de Kyôto dont il prend soin de proposer divers lieux. En tête, le cadre de l'université Rakuhoku, dont Imai offre même un plan sous la couverture, mais pas que : on pense par exemple aux temples. L'auteur, enfin, accorde toujours autant de soin aux expressions subtiles de ses personnages, et à ce titre certains découpages des expressions faciales de Chihiro, case par case, sont d'une beauté et d'une sensibilité folles et rendent Chihiro profondément craquante.


Destins Parallèles, dès ses deux premiers tomes, se présente comme une lecture très juste, poignante et captivante, dont le concept est très bien exploité. Le fond de l'histoire n'est pas forcément très original, mais Daisuke Imai l'exploite à merveille pour offrir deux personnages centraux poignants et crédibles, suffisamment travaillés en profondeur, le tout dans une ville de Kyôto où on a l'impression de se trouver.


Notons que les deux volumes 1, mis côte à côte, forment une jolie illustration complète réunissant Chihiro et Yukichi sur un pont. En dehors de ça, on a une édition très soignée, avec une première page en couleur pour chacun des deux tomes 1, un papier souple, épais et sans transparence, une excellente impression faite chez l'imprimeur Aubin, et une traduction très fluide et cohérente de Fabien Nabhan. Celui-ci est évidemment en charge des deux séries, et reste cohérent dans les dialogues que l'on retrouve dans les deux séries.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
17 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs