Dernière Heure Vol.2 - Manga

Dernière Heure Vol.2 : Critiques

Gojikanme no Sensô

Critique du volume manga

Publiée le Mardi, 10 Octobre 2017

C'est avec un étrange sentiment que l'on ouvre ce deuxième volume de Dernière Heure, sorti en France fin août. Peu après cette sortie est tombée la triste nouvelle du décès de son autrice Yû, encore en tout début de carrière. Dernière Heure restera sa première et dernière oeuvre originale, et les volumes 3 et 4 paraîtront dans notre pays à titre posthume. Face au talent d'une artiste partie beaucoup trop vite, profitons donc de chaque page qu'elle nous laisse, au fil d'un deuxième tome qui propose les mêmes qualités que le premier volume.


Alors que Shinokawa est revenue du front vivante et qu'elle peine à revenir au collège, dans quelques jours ce sont Sekizen et Kitayama qui devront partir à la guerre après avoir été appelés. Tandis que certains de leurs camarades de classe leur préparent une petite fête avec de bonnes choses à manger, les deux jeunes garçons semblent prendre la nouvelle assez calmement. Sekizen y voit une opportunité d'en découvrir plus sur cette guerre mystérieuse et opaque, tandis que Kitayama affiche un comportement positif et un sourire. Saku, exempté, ne peut que s'interroger sur le comportement de Kitayama qui est un ami proche. Ce dernier lui avoue alors certaines choses, sur son rapport à lui, et sur la fille qu'il aime depuis toujours. Pour Kitayama, c'est décidé : quand il reviendra du front, il déclarera sa flamme à l'élue de son coeur ! Mais reviendra-t-il seulement ?


Plus encore que dans le premier volume, ce deuxième tome s'intéresse beaucoup plus à ceux qui restent et qui reviennent, plutôt qu'à la guerre et au front en eux-mêmes. Des images du front, nous n'en avons ici que très peu, et Yû les équilibre bien pour éviter toute violence, hormis à la toute dernière double-page qui fait l'effet d'un choc en insistant enfin un peu plus sur les mystères insondables de cette guerre. Mais hormis ça, la question du conflit et de ses mystères reste plutôt en retrait, et n'est entretenue que par les interrogations que les personnages ont, par un objet que Sekizen trouve, et par ces énigmatiques peluches de lapins qui parlent. Pourtant, cette guerre est indéniablement là, et se rapproche encore : bientôt, les rations alimentaires pour les envoyés au front disparaissent, et les heures de sport sont remplacées par des heures d'entraînement militaire avec des soldats inconnus. Oui, la guerre est bel et bien là, s'immisçant de plus en plus dans le quotidien des jeunes...


Et c'est encore ce quotidien qui intéresse le plus Yû. 


Dans ce cadre scolaire, l'un des personnages les plus en vue du tome est assurément Kitayama, qui tente de prendre son départ au front comme une chance. Une chance d'enfin surpasser son ami Saku dans quelque chose, de trouver une confiance en lui pour enfin avouer des sentiments qu'il contient depuis toujours. Une chance d'avancer, tout simplement. Mais la guerre peut être on ne peut plus cruelle, et le jeune garçon risque d'être profondément mis à mal... 


Face à Kitayama et aux autres jeunes destinés à partir en guerre les uns après les autres, les deux exemptés Miyako et Saku ne peuvent que s'interroger sur ce qu'ils peuvent faire de leur côté. Miyako semble déjà avoir trouvé une réponse, en faisant simplement ce qu'elle sait faire de mieux : à manger, pour réconforter ceux qui en ont besoin. Toujours avec le sourire, ou presque. Mine de rien, cette jeune fille se qualifiant elle-même d'idiote affiche un sacré courage. Quant à Saku, il est en plein doute, en plein sentiment d'inutilité. Il a l'impression de ne servir à rien en ne pouvant pas partir au front comme les autres pour protéger les siens... Mais sur demande de M. Kuma, il pourrait bien se trouver un rôle : travailler au potager. Un rôle qu'il prend d'abord mal, mais a-t-il raison de négliger la cultivation des légumes ? Il s'agit bel et bien d'une tâche cruciale, surtout en ces temps de guerres où les rations alimentaires disparaissent et où s'offrir une indépendance alimentaire saine et nécessaire. Et puis, négliger cette tâche, ce serait sous-estimer le pouvoir que la cuisine peut avoir pour apaiser ou réunir les coeurs. Sur ce dernier point, difficile de ne pas retenir la beauté du message que véhicule un simple plat de concombres dans le lien entre Saku, Kitayama et Miyako.


C'est également dans ce cadre que le récit se pare d'un parfum de romance scolaire, autour d'un quatuor amoureux aussi classique qu'efficace. Saku est amené à se rapprocher de Shinokawa d'une manière presque intimiste, la jeune fille se confiant même un peu à lui, et l'on suit alors avec intérêt quelles pourraient être les réactions de Miyako et de Kitayama face à cela. Yû dose très bien cet aspect, pas insistant et avançant simplement avec naturel. Il y a toujours beaucoup de douceur dans la façon dont la mangaka croque les choses, et son dessin ne fait qu'accentuer l'aspect assez calme, simple et éthéré de ce quotidien pourtant menacé par la guerre.


Si le manque d'avancées sur les questions concernant la guerre pourrait frustrer certains lecteurs, Yû excelle sur tout le reste, en dépeignant sur un ton pacifique les avancées de ses personnages, qui tentent de poursuivre leur quotidien comme si de rien n'était, alors que rien ne dit que la situation n'empirera pas.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
16 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs