Comet Girl Vol.1 - Manga

Comet Girl Vol.1 : Critiques

Sazan to Suisei no Shoujo

Critique du volume manga

Publiée le Mercredi, 28 Avril 2021

Le label Sakka des éditions Casterman n'est pas le dernier pour dénicher des oeuvres sortant des sentiers battus, se démarquant des codes actuels du manga car assez personnelles artistiquement, et on en a encore eu quelques preuves ces dernières années avec des titres comme Sengo ou Quenotte et le monde fantastique. C'est dans cette même optique que s'inscrit la nouvelle aventure spatiale de l'éditeur: Comet Girl. De son nom original Sazan to Suisei no Shoujo (littéralement "Sazan et la Fille de la Comète"), cette oeuvre en deux volumes avait initialement été annoncée en France dès l'automne 2019 pour une publication au printemps 2020, avant d'être repoussée à cause de la situation sanitaire. Entièrement en couleurs, elle a été prépubliée au Japon entre 2015 et 2018 sur le site Toch des éditions Leed (site dont provient aussi Quenotte et le monde fantastique), et est la toute première oeuvre de Yuriko Akase, une jeune mangaka née dans les années 1990 et dont la carrière ne s'est pas arrêtée là dans son pays: après avoir publié en 2019 l'histoire courte "80's Video Trip" dans le prestigieux magazine Harta d'Enterbrain, elle est revenue l'année dernière sur le site Torch pour lancer sa nouvelle série, Nightmare Busters, tout ceci étant toujours en couleurs et teinté de SF et d'aventure.

Comet Girl nous plonge dans un futur où la Terre a bien changé, y compris pour les humains eux-mêmes qui, à cause des extraterrestres et des robots à haut rendement, doivent bien souvent aller chercher leur travail dans l'espace désormais. C'est le cas de Sazan, un jeune homme qui officie en tant qu'agent de voirie interplanétaire, en allant d'astre en astre avec son collègue et pote Ryûji pour y effectuer différents travaux, notamment de rénovation ou d'aménagement. Appliqué au travail, le gaillard reste toutefois assez candide sur certaines choses, notamment sur le plan sentimental puisqu'il n'a jamais connu l'amour. Mais peut-être que cela va changer d'une manière pour le moins tumultueuse.

Un beau jour, son pote Ryûji lui dit que la fille-comète rôderait en ce moment dans le coin. La fille-comète ? Eh bien, il s'agit d'une créature qui, selon les rumeurs, sèmerait la destruction sur son passage, car son organisme renferme une immense quantité d'énergie, et qu,e partout où elle va, elle est alors la cible d'individus malintentionnés qui veulent s'emparer de cette puissance, quitte à tout ravager. Sazan écoute ça d'une oreille distraite, sans se douter que, peu de temps après, alors qu'il a loupé sa correspondance pour rentrer chez lui, il tomberait nez à nez sur la fameuse fille-comète... et qu'à la place d'une entité destructrice, il trouve une ravissante et gentille jeune femme qui le reconduit sur Terre sur sa moto de l'espace. Pour Sazan, c'est le coup de foudre: le voila amoureux pour la première fois de sa vie, et Mina, puisque c'est son nom, semble elle-même facilement attirée par ce garçon qui est le premier à ne pas la rejeter. Mais la puissance de la fille-comète est telle que, bien vite, elle se retrouve à nouveau pourchassée par des pirates de l'espace, et décide alors de fuir, comme elle l'a toujours fait, pour ne pas mettre en danger Sazan. Mais Sazan peut-il la laisser ainsi s'échapper ? N'écoutant que son coeur, le jeune homme charge Ryûji de prévenir sa famille, tandis que lui-même embarqué incognito sur le vaisseau d'une des bandes de pirates afin de rejoindre et sauver l'élue de son coeur. C'est là le début d'une grande aventure spatiale...

A partir de là, Yuriko Akase nous offre une aventure spatiale dans la plus pure tradition de tout un genre, où le résultat fleure bon le charme rétro des années 70 et 80. On peut penser à des mangas ou des animes bien connus de cette époque (en tête desquels Dirty Pair, Mina ressemblant d'ailleurs un peu à l'une des deux héroïnes de cette oeuvre), ou de façon plus générale à un paquet de films plutôt grand public de ces années-là, de par l'ambiance assez légère et très rythmée, sans grosse prise de tête, qui est proposée quasiment d'un bout à l'autre. Une chose est sûre: Akase adore ce type d'oeuvres d'aventure-SF typée 80s: c'est également le sujet de son histoire courte 80's Video Trip (où le jeune héros fait un voyage vidéo dans les années 80 à l'époque de la jeunesse de ses parents), et dans sa nouvelle série Nightmare Busters un personnage a de faux airs du Doc de Retour vers le futur entre autres.

Bref, on tient là un divertissement délicieusement rétro, et qui se voit très bien servi par le style de l'autrice. La narration, ainsi, est très rythmée: jamais de temps mort, mais pas de rush non plus dans l'intrigue, tant on en cerne efficacement les différents éléments, de la romance naissante dans les débuts, jusqu'à l'apparition d'une menace bien plus grande à la fin du tome. Entre les deux, tout au long des 240 pages composant ce premier volume, on se régale de l'aventure nous faisant voyager dans un cosmos plein d'imagination bien sûr, mais aussi du traitement offert aux personnages. Ainsi, par exemple, découvrira-t-on vite le gang Pique-Nique et son leader Kidd, un pirate de l'espace à l'allure de cochon (mais ne le lui dites surtout pas) particulièrement truculent dans son rôle de méchant pas si méchant que ça, encore plus quand on entrevoit son passé. Mais c'est surtout Mina qui séduit, évidemment, pas uniquement pour son physique charmant et pour son caractère bien campé, mais aussi pour ce que l'on découvre d'elle: une fille aux origines sombres, à l'enfance triste, pourchassée quand elle n'est pas rejetée à cause de sa puissance, n'ayant jusque-là jamais eu d'amis... Il n'en faut pas plus pour la rendre attachante à souhait, et pour comprendre l'attachement qu'elle montre pour Sazan.

Et pour porter tout ça, il y a surtout ce dessin bourré de charme. Bien sûr, il y a les designs des personnages qui,n qu'ils soient humains ou non, ont aussi quelque chose de très typé shônen des 80s, notamment pour leur palette d'expressions. Mais il y a surtout non seulement les décors omniprésents et bourrés d'inventivité, ais aussi les couleurs qui ne sont aucunement là pour faire du remplissage et peuvent même avoir une utilité dans l'intrigue (par exemple, les cheveux de Mina qui changent de couleur quand elle laisse éclater sa puissance). On a une superbe qualité graphique, un univers foisonnant qui se remarque dès la première page, avec la vue depuis la fenêtre de la chambre de Sazan derrière lui tandis qu'il se réveille dans son lit futuriste. Et le plus impressionnant dans tout ça, c'est que, comme pour offrir un récit qui daterait vraiment des années 80, Yuriko Akase s'est passée de toute technologie moderne, ses dessins et sa colorisation sont faits intégralement avec ses mains, ce qui lui permet même certaines nuances de couleurs qui n'auraient peut-être pas été possibles avec des outils numériques. Dans tous les cas, c'est extrêmement généreux et ravissant, jusque dans certaines très chouettes petites idées de mise en scène (les reflets de l'eau vers le début, les larmes en apesanteur...).

Pari réussi, alors, pour cette première moitié de série: Yuriko Akase nous offre une aventure spatiale trépidante et très facilement divertissante, dans une style visuel et dans une ambiance "80s" très travaillée. Il n'en faut pas plus pour se laisser conquérir, en espérant que la suite sera tout aussi bonne voire encore meilleure ! Il ne faudra pas attendre bien longtemps pour le savoir, puisque Casterman a eu la très bonne idée de publier le deuxième et dernier volume en même temps que le premier.

Cette chronique ayant été faite à partir d'une épreuve numérique fournie par l'éditeur, pas d'avis sur l'édition.
  

Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
16.75 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs