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Voq

De Voq [683 Pts], le 04 Novembre 2023 à 23h12

10/20

    Après un Final Fantasy XVI ultra dirigiste, où l'exploration était complètement laissée à l'abandon, l'envie de revenir à un JRPG à l'ancienne a eu vite fait de s'imposer. Et ce n'est pas le choix qui manque, mais avec Chrono Cross, on tient un sacré combo : Squaresoft, époque PS1, successeur de l'excellent Chrono Trigger, avec ça on ne devrait pas pouvoir se tromper... si ?

    Malheureusement pas sorti en Europe à l'époque, le jeu a récemment bénéficié d'un portage sur Nintendo Switch intitulé Chrono Cross - The Radical Dreamers Edition qui... n'est pas non plus arrivé chez nous, arf. Mais qui est sorti en Asie en incluant ses diverses traductions, et puisque le zonage n'est plus de mise sur les consoles actuelles, vive l'import.

 

 

*Vieux jeu, nouvelle version

 

    Donc voilà, plutôt que de me casser la tête à jouer à une version PS1 US (j'aurais pu), je me suis jeté sur la version Switch actuelle. De ce que j'ai compris, pas de différence dans le jeu en lui-même, mais présence :

 

- de textes en français (pour un jeu jamais sorti en France, c'est fort) ;

 

- d'une touche permettant d'augmenter la vitesse du jeu, ce qui sera notamment très, très, TRÈS appréciable en combat (apparemment, c'était déjà disponible auparavant, mais uniquement en New Game +) ; ainsi que d'une touche permettant de diminuer la vitesse du jeu, mais vu qu'il n'est déjà pas bien rapide de base, l'intérêt m'échappe un peu ;

 

- d'une touche permettant d'éviter les combats, ce qui sera également très appréciable par moments ;

 

- d'une touche permettant à nos persos de devenir invulnérables, ce qui... retire absolument tout intérêt aux combats ? Ou permet de ne pas avoir besoin de s'acharner pendant des heures si un boss s'avère trop coriace. Ou permet de torcher le jeu si on veut le terminer, histoire de, mais que ça nous gonfle de continuer à jouer normalement (je dis ça en plaisantant, mais en vrai c'est souvent très tentant comme option) ;

 

- et enfin, du jeu indépendant The Radical Dreamers, dont Chrono Cross a piqué les personnages. Il s'agit d'un genre de Visual Novel, tout en texte accompagné d'illustrations, où des choix s'offrent régulièrement à nous (mais pas de game over si on se trompe, soit ça n'a pas d'incidence soit on tourne en rond jusqu'à trouver le bon choix). Après l'introduction, on se retrouve à explorer un manoir à coups de choix du type "un croisement : aller tout droit / à gauche / à droite" ou "une porte : l'ouvrir / passer son chemin". Alors dans un premier temps, rien de bien palpitant mais on se laisse prendre au jeu. Et puis une fois qu'on a exploré l'intégralité de ce qui nous était accessible en usant de toutes les options possibles, on se rend compte que malgré certains événements qui ont ponctué l'aventure on n'est pas plus avancé pour progresser davantage : il faudrait donc recommencer à tout explorer pour voir si quelque chose n'a pas changé entre temps, en se retapant exactement les mêmes lignes de texte à chaque fois... juste non. Trop laborieux pour poursuivre sans soluce, et pas assez intéressant pour aller en chercher une.

 

    Donc, Chrono Cross, puisque ça reste l'attrait principal de cette nouvelle édition. (On pourra d'ailleurs regretter de ne pas plutôt avoir eu une compilation avec Chrono Trigger, dont la seule version arrivée chez nous est confinée à la DS, mais c'est une autre histoire.)

 

 

*La suite de Chrono Trigger... de loin, dans le brouillard

 

    Comme souvent avec les jeux qui m'intéressent, avant d'y jouer, je n'ai pas cherché à savoir quoi que ce soit au sujet de Chrono Cross. Le « successeur de Chrono Trigger », ça suffit à me convaincre. Parce qu'en vrai, il n'y a rien de mieux pour découvrir un jeu et s'y immerger que d'y jouer soi-même. Le risque, c'est que quand le jeu s'avère décevant, on tombe d'autant plus haut. Et pour le coup, baser ses attentes sur Chrono Trigger, c'est le meilleur moyen d'être déçu...

    Bref.

 

    On incarne Serge, un ado qui vit paisiblement dans son petit village, et à qui il va arriver suffisamment de bricoles pour qu'on ait jugé intéressant d'en faire tout un jeu. En l'occurrence, il va se retrouver projeté dans un monde alternatif où il est censé être mort dix ans plus tôt. Il va aussi faire la connaissance de Kid, une jeune fille qui recherche la mystérieuse « flamme gelée » sans vraiment de raison, et fera face au méchant Lynx qui... est méchant.

    Voilà, en gros, pas de voyage entre différentes époques comme dans Chrono Trigger, ici on se contente de deux mondes parallèles, identiques à deux-trois détails près. Oui, ça veut dire qu'au lieu d'environnements qui changent selon l'époque, on se tape juste deux fois les mêmes lieux à visiter... et ça, franchement, ça a comme une odeur de flemme de la part des développeurs.

    Après, même avec deux mondes quasi identiques, ce sont justement les petites variations qui peuvent donner tout son sel à l'histoire. Sauf que l'histoire, ben ça part un peu dans tous les sens. On ne sait jamais trop où le jeu veut nous mener, ni à quoi rime ce qu'on est en train de faire, sauf à l'approche de la fin où on nous claque des tartines d'explications indigestes, tout ça parce que le reste du temps le scénario s'égare dans une multiplication de sous-intrigues et de personnages superflus. Oui, on se retrouve avec toute une palanquée de persos jouables, ce qui peut paraître sympa à première vue, sauf que les trois quarts ne servent à rien, autant au niveau de l'histoire que des combats.

    Mais bon, j'imagine qu'il fallait bien faire un peu de remplissage, en l'état on dépasse à peine les 30h, ce qui n'est pas si mal (équivalent à Chrono Trigger), mais retirez le superflu et ce qui reste risque de paraître un peu maigre.

 

    Ah non c'est vrai, j'oubliais deux détails qui peuvent gonfler la durée de vie.

    Le premier : plus d'une fois au fil de l'aventure, le jeu nous largue sans qu'on sache où aller (ou plus précisément, on sait où il faut aller, mais pas comment). On a donc le choix entre tout réexplorer, dans les deux mondes, jusqu'à trouver ce qu'on cherche... ou aller consulter une soluce (ce que j'ai fait, mais à l'époque ce n'était pas si simple). Un exemple parmi d'autres : pour ne pas perdre toute sa vie à cause de la chaleur en explorant le volcan, il faut la bénédiction du dragon de l'eau. Sauf que dans un monde, l'île du dragon de l'eau est bloquée par la glace... et dans l'autre monde, on n'a même pas de bateau pour y accéder. Donc qu'est-ce qu'on fait, on cherche un moyen de faire fondre la glace ? Perdu, il faut changer de monde et trouver le PNJ qui pourra nous emmener en bateau. Sans aucun indice, évidemment, sinon ce n'est pas marrant. Je me plaignais de FFXVI et de son côté ultra dirigiste, mais là on tombe dans l'excès inverse. Alors c'est sûr, si on joue sérieusement sans soluce, ça implique un petit paquet d'heures en plus, mais pas de celles qui rehaussent l'intérêt du jeu.

    Et le deuxième : les fins multiples. De base, on a deux fins différentes, une où l'on bat le boss final normalement et où on enchaîne aussi sec sur le générique ; l'autre, la "vraie fin", où on bat le boss final en utilisant un certain objet de la bonne manière et où on a droit à un épilogue avant le générique de fin (bon, cet épilogue est nase, mais c'est toujours mieux que pas d'épilogue du tout). Et si l'objet en question peut se trouver sans soluce, concernant la manière de l'utiliser, c'est juste introuvable (fun fact : les soluces que j'ai consultées, aussi détaillées soient-elles, ne sont pas fichues d'expliquer d'où ça sort). Mais même en laissant ça de côté, Chrono Cross peut se vanter d'avoir pas moins de douze (!) fins différentes : les deux déjà évoquées, et dix autres accessibles en new game +. Merci mais non merci, j'ai déjà eu du mal à trouver la motivation pour le finir une fois, aucune intention de recommencer.

 

 

*Le gameplay : tentatives louables, résultats pas toujours probants

 

    Bon, je me plains du déroulement du jeu, mais à la limite, ça passerait encore s'il était servi par un gameplay efficace. Et donc, le gameplay, parlons-en.

    La bonne nouvelle de ce côté, c'est que là où les développeurs auraient pu se contenter du minimum syndical en réutilisant ce qui marchait dans d'autres jeux, non, ils ont eu à cœur de proposer quelque chose d'original. La moins bonne nouvelle, c'est que tout en restant convenable (rien de franchement mauvais), le résultat est un peu bancal.

 

    Déjà, on oublie le système de progression classique où les personnages gagnent des points d'expérience qui les font monter en niveau, on a juste un niveau global pour tous les persos qui augmente à chaque boss battu - et de très légères augmentations de stats (surtout PV) pour chaque victoire sur les quatre-cinq premiers combats après un boss.

    Ce qui veut dire, d'une part, pas de leveling, si les combats nous paraissent un peu corsés, on ne pourra se rabattre que sur l'équipement (quand il est possible d'en obtenir du meilleur)... ou sur les autres combattants disponibles : au bout d'un moment, on n'essaie même plus de les choisir par affinité, on se contente de comparer leurs stats et de choisir les persos les plus forts, puisqu'il y a d'énormes disparités entre eux. (Ou alors on peut avoir la flemme de jouer sérieusement et utiliser le bouton pour rendre les persos invulnérables, c'est une possibilité.)

    Et d'autre part, ce système a pour conséquence que les combats hors boss ne servent un peu à rien. Sans expérience à récolter, pourquoi s'embêter à combattre le tout-venant des ennemis ? Parfois du butin utile, mais le plus souvent non, alors quand on a battu une fois ou deux un même monstre, on a ensuite tendance à l'éviter. Quand je disais que la présence d'une touche pour éviter les combats était très appréciable...

 

    Ensuite, il y a le système d'éléments. Les éléments, ce sont à la fois les consommables (à usage unique), et les magies, qui ne disparaissent pas après utilisation mais qu'on ne peut activer qu'une seule fois par combat, qu'il s'agisse de soin, de soutien ou d'attaque.

    Chaque personnage dispose d'un certain nombre d'emplacements d'éléments (nombre qui augmente au fil du jeu), répartis par niveaux. Pas de PM, donc : si on compte utiliser trois fois la boule de feu dans un même combat, il faut posséder l'élément en trois exemplaires, et les attribuer à trois emplacements. Et puisque les emplacements sont limités, on a intérêt à bien réfléchir aux éléments qu'on va leur attribuer, tout en faisant attention à leur niveau... Vu que c'est un peu long à gérer, une fois qu'on a bien équipé nos trois persos actifs en éléments, on n'a plus envie de devoir recommencer avec d'autres, ce qui incite d'autant moins à varier les combattants (entre ça et les grosses inégalités dans les stats, je n'ai pas dû tester la moitié des persos que j'ai recrutés, et je ne crois pas avoir changé une seule fois d'équipe durant les dix dernières heures de jeu).

    Par ailleurs, les éléments se voient affublés d'un niveau (1 étant le plus faible, 8 le plus puissant, rien de bien particulier ici) ainsi que d'une couleur. Six couleurs en tout, qui fonctionnent par paires : rouge/bleu, vert/jaune et blanc/noir, chaque moitié d'une paire étant efficace contre son autre moitié. Et oui, on parle de couleurs plutôt que d'éléments, parce que si le rouge correspond globalement au feu et le bleu à l'eau et la glace, le vert quant à lui est associé à la fois au vent et aux plantes, et le jaune à la terre et à l'électricité... Un peu étrange, mais bon, ça n'a pas vraiment d'importance. Outre les forces et faiblesses, l'enchaînement des couleurs en combat n'est pas anodin, puisque les trois dernières couleurs utilisées (tant par notre équipe que par l'ennemi) apparaissent en haut de l'écran et renforcent les éléments de même couleur, ou dans certains cas permettent l'utilisation d'actions spéciales (les invocations, notamment : on ne peut lancer une invocation bleue que si les trois derniers éléments utilisés étaient également bleus). Bref, ce système d'éléments fonctionne plutôt pas mal et représente une bonne part de la dimension stratégique du soft.

 

    Enfin, quant au déroulement des combats en lui-même, une fois l'affrontement déclenché en touchant l'ennemi à l'écran, on retrouve la disposition classique des JRPG tour par tour avec notre équipe d'un côté, les ennemis de l'autre. Les actions, en revanche, sont un peu moins classiques : chaque personnage, à son tour, dispose de 7 points d'action, à dépenser comme on le souhaite :

    Trois niveaux d'attaque qu'on peut enchaîner, associés à des taux de réussite variables, plus les éléments, plus une faible régénération des points variant selon les actions effectuées et qui permet parfois à un personnage d'agir de nouveau au cours d'un même tour, sans oublier de tenir compte de l'ennemi qui peut agir durant le tour d'un personnage et ainsi interrompre un enchaînement d'attaques ou chambouler les effets de couleurs qu'on essayait de placer...

    En fait, cet aspect stratégique est sans doute ce qu'il y a de plus intéressant dans le jeu... le problème étant qu'il n'a pas si bien vieilli. À y jouer aujourd'hui, le tout paraît trop lent (même en augmentant la vitesse du jeu), avec certaines animations trop longues et inskippables, et surtout une navigation un peu laborieuse dans le menu d'éléments (claire, certes, mais laborieuse) : au bout d'un moment, entre ça et l'absence d'expérience, le moindre combat facultatif apparaît un peu comme une corvée qu'on préfère éviter.

 

 

*Un bilan pas trop reluisant

 

    Des combats qu'on a tendance à zapper malgré certaines qualités, une histoire qui peine à accrocher, ajoutons à ça des graphismes dignes de leur époque (autrement dit qui ont mal vieilli), et une bande-son de qualité mais dont certains morceaux ont été empruntés à Final Fantasy... Sans virer à la véritable catastrophe, on est très loin d'un incontournable. Là où son grand frère Chrono Trigger vaut toujours le détour, Chrono Cross a un peu l'air de n'être resté en mémoire que pour cette filiation, qui ne transparaît pourtant que très peu dans le jeu.

    Je ne suis pas forcément mécontent d'y avoir joué, mais s'il s'était étendu sur 60 ou 80h plutôt qu'une trentaine, ou si je n'avais pas eu accès à une soluce sur certains passages, je ne pense pas que j'aurais eu le courage d'aller jusqu'au bout. Quant au new game +, même pas la peine d'en parler. Chrono Trigger, j'aurais envie d'y rejouer. Celui-ci, non.

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