Art of K - Actualité manga

Interview de l'auteur

Publiée le Dimanche, 31 Décembre 2017

A l'occasion de Japan Expo 2017, les éditions H2T ont répondu présent, présentant ses premiers auteurs publiés au format physique. Parmi eux, Art of K, auteure et dessinatrice à l'origine d'Euterpe, série qui sera achevée en deux tome et qui prend comme propos la musique, ancrée dans une intrigue humaine sombre. Art of K a ainsi accepté de nous rencontré et revient aussi bien sur son travail que va vision de la série.





Bonjour Art of K, pourrais-tu te présenter, en tant qu'auteure ?



Art of K : Bonjour, je suis Art of K, auteure de Euterpe, aux éditions H2T. Je suis aussi graphiste freelance, mais j'ai toujours aimé faire de la bande-dessinée, du manga, et travailler la narration graphique. C'est comme ça que j'ai commencé à faire de la BD de mon côté.



Comment as-tu plongé dans le manga, et pourquoi avoir choisi ce format pour ton œuvre ?



Art of K : J'en lis depuis que je suis toute petite, j'ai grandi avec. Mais pas que, je lis aussi beaucoup de comics et de franco-belge. Je ne pense pas avoir trop réfléchi au format d'Euterpe. J'ai créé une histoire, et le format qui ma paraissait évident était le manga. Mais avant tout, je voulais faire une BD de ma création.





Comment s'est déroulée la création d'Euterpe ?



Art of K : Nous avions un fanzine avec des amis, j'avais prévu d'y créé une one-shot, une histoire complète. Comme la musique est un thème qui me tient beaucoup à cœur, j'ai voulu créer une histoire sur ce sujet, autour de personnages en plein conflit. C'est ainsi que j'ai créé petit à petit Euterpe, aussi bien les personnages que l'histoire.



En effet, Euterpe parle de musique et surtout de piano. Pourquoi cet instrument ? Es-tu toit-même pianiste ?



Art of K : Oui, j'ai fait plus de dix ans de Conservatoire et d'école de musique. Le piano était ma première passion, avant que le dessin prenne le pas. Mais j'ai quand même continué la musique de mon côté, même après avoir fini mes études. Ainsi, j'ai tenu à réunir mes deux passions en une.



Euterpe démontre un contraste intéressant, celui entre la musique classique telle qu'on peut se la représenter, et la noirceur du ton, surtout au début du premier tome. Si on imagine souvent les mélodies jouées au piano comme des sonorités douce, cette vision s'oppose à la narration grave du volume. Comment vois-tu cette dualité ?



Art of K : C'est vrai que dans l'esprit publique, la musique classique a cette image de douceur et d'agréable. Mais pour ceux qui en jouent, c'est quelque chose de plus intense et de plus stressant, comme une ombre qui les suivent partout. Les pianistes professionnels doivent faire face à des choses pas très agréables comme la pression, le public, la peur de se tromper... C'est ce qui ressort d'Euterpe : la musique classique est belle, mais elle se base sur quelque chose de beaucoup plus sombre.





On retrouve énormément Chopin au sein de ce premier tome. Est-ce un musicien qui t'a beaucoup marquée ?



Art of K : En effet, car j'ai eu beaucoup de Chopin lors de mes trois premières années de musique et d'examen. (rires)

Ce fut très stressant car la musique de Chopin est très belle, mais elle implique beaucoup de choses émotionnellement. C'est pour ça que j'ai choisi de le mettre à l'honneur.



Aussi, quand je dessine, j'écoute énormément Chopin. Il a un rythme doux à première vue, mais qui s'avère assez violent dans la manière de faire et d’exécuter.



Chopin est un musicien que l'on retrouve forcément dans d'autres œuvres parlant de piano, notamment Your Lie in April. Est-ce un titre qui t'a séduit ? Plus globalement, quelles sont les œuvres qui ont forgé ton expérience d'auteure ?



Art of K : Quand Your Lie in April est sorti, aussi bien en manga qu'en anime, j'ai tout dévoré d'un coup. Ça m'a beaucoup inspirée pour Euterpe car le héros, Kôsei Arima, est très torturé. Je prenais plaisir à voir un héros qui connait la musique et son exécution. Ça m'a influencée sur la narration, la manière de montrer le son par le papier.



J'aime aussi énormément le découpage des comics, très dynamique et qui pousse à la lecture. Mais l'auteure qui m'a le plus marquée sur la construction des personnages, c'est Mizu Sahara. Elle a notamment adapté une nouvelle coréenne qui parle d'un condamné à mort qui rencontre une pianiste qui va jouer le jour de son exécution (ndt : Watashitachi no Shiawase na Jikan, titre en un tome inédit en France adaptant le récit de Ji-Young Gong). C'est un récit qui m'a impactée car je ne savais pas qu'un coup de crayon pouvait procurer de telles émotions. Ça m'a beaucoup influencée pour Euterpe.



On remarque que tes personnages ont des caractères très marqués, par exemple Jon qui est un protagoniste très sombre. Comment établis-tu les psychologies de ces personnages ? Les as-tu pensées d'entrée de jeu, ou te laisses-tu plutôt porter par l'histoire pour les développer ?



Art of K : C'est vrai que je n'ai pas défini depuis le début les personnalités des personnages. En construisant petit à petit l'histoire, je me demande comment untel ou untel réagira face aux événements. C'est comme ça que chacun voit sa propre personnalité s'affiner, petit à petit.



Je ne prévois pas tout de ce côté-là car il peut m'arriver d'avoir certaines idées scénaristiques non prévues au départ, ce qui implique d'adapter le personnage aux situations. Je préfère laisser un peu d'imprévu plutôt que tout définir.





On peut voir une construction très particulière de tes planches et de tes cases, une sorte d'aura cinématographique. Comment réfléchis-tu ta narration ? T'arrive-t-il de t'inspirer d'autres arts comme le cinéma ?



Art of K : En effet, car je suis graphiste au sein d'une boîte de cinéma. Je fais beaucoup de montage, de bandes-annonces et d'animation. Inconsciemment, ce découpage s'est peut-être retrouvé dans mes bandes-dessinées. Vient ensuite mon éditeur qui m'a beaucoup aidé dans le découpage, ce qui m'a aidé à apprendre comment faire entrer le lecteur dans l'univers du récit par la narration. Ce n'était pas facile au début mais une fois habitués, on pense la chose de manière animée, ce qui permet d'avoir une construction qui tient la route.



La série est prévue sur deux tomes. Quel regard as-tu sur cet ensemble ?




Art of K : Je n'ai pas encore achevé le second volume, bien que j'ai déjà écrit le scénario jusqu'au bout. Quand j'ai commencé Euterpe, c'est à dire quand je suis passée du one-shot au format série, j'ai beaucoup réfléchi à là où je voulais aller. J'ai établi le chemin de chaque personnage, pour savoir où chacun se situera. Je sais donc où je vais et je sais à quoi m'attendre. J'ai une idée bien précise de la fin d'Euterpe, c'est surtout l'évolution affective des personnages, pour un aboutissement mature, qui n'est pas forcément fixée.





As-tu fait des correction entre la prépublication digitale sur Weekly Comics, et l'édition au format physique ?



Art of K : De mon propre aveu, j'ai un peu de mal avec les décors. (rires)

Je pense que je les ai un peu plus travaillés pour la version papier. On n'a pas le même ressenti sur la version numérique que sur la version physique, où on pense la création un peu plus sérieusement. J'ai dû refaire quelques cases et certains éléments que je trouvais bâclés.



Les mangas de création française se font de plus en plus nombreux, et abordent parfois des thèmes peu commun dans les œuvres japonaises. De ton côté, dans tes prochains titres, y a-t-il des sujets différents que tu souhaiterais traiter ?




Art of K : Oui, j'ai beaucoup d'idées. Beaucoup de sujets m'intéressent, j'ai quelques projets de mon côté, après je ne sais pas si ce sera publié ou non. J'aimerais créer des histoires politiques mais dans des univers de fantasy. Le policier m'intéresse beaucoup aussi car la première histoire que j'ai créée était un polar. J'aimerais beaucoup réfléchir davantage aux mécaniques d'écriture d'une œuvre policière pour, peut-être, sortir un titre de ce genre.


Interview réalisée par Takato. Remerciements à Art of K ainsi qu'à Mahmoud Larguem, responsable éditorial des éditions H2T, pour l'organisation de la rencontre.