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Manga Interview de Shu Sakuratani, l'auteur de Rooster Fighter - Coq de Baston

Dimanche, 11 Février 2024 à 12h00 - Source :Rubrique interviews

En juillet dernier, à l’occasion de Japan Expo, les éditions Mangetsu eurent l’honneur d’accueillir en France Shu Sakuratani, l’auteur de l’un des mangas les plus barrés de leur catalogue : Rooster Fighter – Coq de Baston, une série mêlant action, comédie, monstres géants et gallinacés, qui ne cesse de gagner en capital-sympathie au fil des tomes. Entre ses séances de dédicaces pour le public, le mangaka donna également des interviews, et ce fut l’occasion pour nous d’aller à la rencontre d’un artiste que l’on sentait un peu timide mais très gentil et content d’être là. A l’approche de la sortie du tome 6 de sa série le 14 février, on vous propose aujourd’hui de découvrir cette rencontre !

Rooster Fighter nous plonge dans un monde a priori similaire au nôtre en tous points, à ceci près qu'y sévissent les kijû (une parodie des célèbres kaijû), de gigantesques monstres assoiffés de sang qui ne pensent qu'à tuer les humains et qui apparaissent soudainement, sans crier gare, ici et là. Ces créatures terrifiantes menacent à tout moment l'espèce humaine, et leurs apparitions aléatoires semblent rendre difficile l'intervention des forces de l'ordre ou des forces de défense. Mais heureusement, quand un de ces monstres apparaît, le dénommé Keiji ne semble jamais bien loin, et n'hésite jamais à se dresser contre eux pour les terrasser avec son cri surpuissant. Keiji pourrait donc être le héros de l'humanité, le sauveur capable d'éradiquer cette grande et mystérieuse menace... et cela, même s'il mesure 50cm à tout casser, qu'il n'a que deux pattes et que c'est un sacré emplumé. Car oui, Keiji est un coq !





Qu'est-ce qui vous a attiré vers le manga ? Y a-t-il des œuvres ou des auteurs en particulier qui ont forgé ce choix ? Et avez-vous suivi des études particulières pour ça ?


Shu Sakuratani : A la base je faisais un métier tout à fait ordinaire, mais je me demandais si j’avais vraiment de passer toute ma vie comme ça, à me contenter de ce travail alimentaire. C’est à cette époque que j’ai lu un manga du nom de Sexy Commando Gaiden - Sugoi yo!! Masaru-san (manga inédit en France, ndlr), qui m’a beaucoup plus et m’a stimulé, à tel point qu’il m’a donné envie de faire moi-même du manga.



Vous saviez déjà dessiner à cette époque ?


Oui, depuis l’enfance. Il m’est déjà arrivé de gagner des prix lors de concours de dessin quand j’étais plus jeune.




Comment vous est venue l'idée décalée de Rooster Fighter, avec ce coq badass et ultra viril affrontant la menace de monstres géants ?

A la base, j’avais envie de dessiner un manga de super-héros, ou en tout cas avec un héros hors du commun. J’avais alors en tête l’image d’un héros de ce type affrontant des gros monstres.


Au fil de la série arrivent ensuite d'autres volatiles, à commencer par la petite Piyoko et la badass poule Elizabeth qui viennent former un trio assez détonnant avec Keiji. Comment avez-vous imaginé ce trio qui, quelque part, se complète assez bien ?

J’avais besoin de ces deux personnages pour communiquer avec Keiji. Je les ai conçues de manière à ce qu’elles aient une bonne harmonie avec lui.




Les kijû sont un détournement évident des célèbres kaijû. Avez-vous un attrait particulier pour les monstres géants ? Si oui, quelles sont vos références en la matière ?

Il y a toutes sortes d’oeuvres qui m’ont influencé pour la création des kijû, notamment le célèbre Godzilla. Je peux également citer la série Ultraman. J’aime bien les séries en prises de vue réelles de ce genre, où il y a des kaijû et autres monstres que le héros doit affronter. L’esthétique de ce genre de séries me plaît et m’amuse.


L'oeuvre joue entre une part d'action intense et suffisamment sérieuse d'un côté, et de l'autre côté un humour décalé souvent présent et qui, même s'il est parfois largement en trait, se ressent toujours par le simple fait que les protagonistes sont des volatiles. Comment procédez-vous pour trouver le juste équilibre entre le côté sérieux et le côté comique ?

Je n’essaie pas forcément de trouver un équilibre entre ces deux aspects de manière consciente, mais il est vrai que dans toutes les scènes plus ancrées dans le quotidien je vais faire en sorte d’apporter beaucoup de scènes humoristiques, alors que quand arrivent les scènes d’action je vais diminuer le côté comique pour mettre en avant les combats et le côté viril des personnages.




Justement, avec Keiji, vous jouez aussi la carte de la virilité si poussée qu'elle devient parfois ridicule. Etait-ce une volonté de tourner un peu en dérision ce côté excessivement viril ?

Oui, c’est totalement volontaire ! J’ai tendance à penser qu’une virilité excessive devient forcément ridicule et donc drôle.


La série, au fil des tomes, connaît des rebondissements de plus en plus intéressants, avec des kijû plus nuancés puisqu'il y en a des gentils, Elizabeth qui change un peu d'avis sur eux, Keiji qui recroise sa famille en réveillant un peu son passé, Piyoko qui veut s'affirmer tout en gardant une part mystérieuse puisqu'elle ne vieillit pas... Tous ces éléments vous trottaient-ils en tête depuis le début ? Ou les avez-vous incorporé au fur et à mesure ?

Il y a un petit peu des deux. Mais pour un cas comme celui de Piyoko, si elle grandissait on perdrait un peu de son personnage, donc j’avais décidé dès le début qu’elle ne grandirait pas. Après, il y a des personnages qui, au fur et à mesure que je les dessine, vont naturellement se complexifier sans que j’y aie pensé au départ.




Vos volatiles ont à la fois un design globalement très réaliste et des expressions faciales juste suffisamment marquées pour faire passer leur caractère ou l'humour. Quelles difficultés avez-vous rencontrées pour trouver le bon équilibre dans ces designs ?

En fait, je ne réfléchis pas trop quand je dessine. J’ai l’impression que ce sont des choses qui se révèlent un peu naturellement quand j’ai mes crayons en main et qui reflètent un peu ma personnalité. Je pense que c’est ma personnalité qui me pousse à dessiner des choses plutôt réalistes.


Au milieu de ces designs réalistes, la petite Piyoko est un peu à part avec son visage tout mimi et ses yeux un peu typés shôjo qui traduisent son innocence. Avez-vous eu des influences particulières pour la concevoir ? Personnellement, je me trompe peut-être, mais ses regards et mimiques me rappellent Pinoko, la petite fille du manga Black Jack d'Osamu Tezuka.

Effectivement, j’ai eu en tête Pinoko de Black Jack quand j’ai créé Piyoko ! Je me disais qu’il me fallait à tout prix ce type de personnage que j’aime beaucoup.


A gauche la Piyoko de Sakuratani, à droite la Pinoko de Tezuka.



Les designs de vos kijû sont très travaillés, originaux et denses. Comment les imaginez-vous ? Avez-vous des auteurs ou œuvres (manga ou non-manga) d'influence pour ça ?

J’ai été influencé par les films des sagas Alien et Predator, et aussi par certains ennemis des films Avengers. Il y a aussi d’autres influences que je n’ai pas en tête dans l’immédiat, mais il y a vraiment toutes sortes d’oeuvres qui m’ont inspiré pour les concevoir.


Pour finir, revenons sur votre précédente et première série, T-Dragon, un manga à ce jour disponible en France uniquement en numérique sur Piccoma, et dont le pitch était déjà assez barré. Qu'est-ce que cette première expérience sur une série longue vous a appris ? Et entre ça et Rooster Fighter, qu'est-ce qui vous attire tant dans ce genre d'histoire d'action-SF improbable ?

Je pense que mon goût pour le mélange d’action et de science-fiction vient vraiment de films comme Avengers. Sinon, ma première expérience de série longue sur T-Dragon m’a fait réaliser que quand on planche sur ce genre d’oeuvre, il faut réfléchir constamment à la suite, sinon on va droit dans le mur et c’est un échec.




Interview réalisée par Koiwai. Un grand merci à Shu Sakuratani pour ses réponses et sa gentillesse, aux éditions Mangetsu ainsi qu’à Japan Expo pour l’organisation de cette rencontre, et à Miyako Slocombe pour sa qualité d’interprète !

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