
Manga Rencontre avec Cédric Biscay autour du manga Blitz
Premier manga de l'éditeur Iwa rattaché à Shibuya Productions, Blitz est un manga qui semble avoir conquis et fidélisé son lectorat depuis près de deux ans, entretenant une cadence rythmée puisque sept tomes sont parus à ce jour. Titre hybride franco-japonais, dirigé par Cédric Biscay œuvrant avec le scénariste Tsukasa Mori et le dessinateur Daitarô Nishihara, le manga a su se frayer une place dans le paysage du manga de nos contrées.
Cédric Biscay était justement présent durant les deux dernières éditions du Festival International de la Bande-Dessinée d'Angoulême pour présenter l'œuvre et honorer plusieurs séances de dédicace, et des conférences. Pour nous, c'était le timing idéal pour rencontrer l'auteur qui a accepté de jouer le jeu de l'interview, à deux reprises, pour une rencontre en plusieurs temps.


Bonjour Cédric, merci à vous de nous accorder cette entretien.
Cédric Biscay : Merci à vous ! D'autant plus que le cadre du Festival International de la Bande-Dessinée d'Angoulême est propice, et que la sortie du tome 7 approche à grands pas (ndt : A l'heure de l'enregistrement de l'interview).
C'est vrai que Blitz profite d'une parution soutenue, à raison d'un tome tous les quatre mois. Comment entretenez-vous cette cadence ?
Cédric Biscay : Avec beaucoup de nuits blanches ! (rires)
J'ai une histoire que je veux développer, je sais où je vais et comment je veux travailler mes personnages. Ainsi, je n'ai pas un travail d'écriture si important à faire.
Avant d'évoquer toute la structure de Blitz, revenons à vos débuts. Vous avez lancé votre carrière en fondant la société Shibuya International dont le but est de faciliter les coopérations entre entreprises françaises et japonaises. Par la suite, vous avez travaillé sur l'union des cultures des deux pays, en créant notamment le salon MAGIC qui se déroule annuellement à Monaco. D'où vous vient cet amour de la connexion entre le Japon et la France ?
Cédric Biscay : La réponse est assez basique. J'étais un grand fan du Club Dorothée, donc biberonné aux séries comme Dragon Ball, Saint Seiya et Captain Tsubasa. Ou Olive et Tom, appelons-le comme autrefois (rires).
Je me suis toujours intéressé à ce pays qui produisait tous ces contenus incroyables. Pas seulement le manga ou l'animation, mais aussi le jeu-vidéo. Je voulais travailler avec le Japon, et c'est un peu par hasard que j'ai compris que les rapports entre ce pays et le reste du monde pouvaient être parfois compliqués. Comme j'avais la sensation de mieux comprendre le Japon que la plupart des gens, j'ai pensé qu'il fallait que j'en fasse un business. J'ai donc démarré avec Shibuya International en 2002, entreprise qui va d'ailleurs fêter ses 20 ans. Sur cette période, j'ai travaillé plusieurs domaines, mais pas nécessairement le manga ou l'animation. Il était plutôt question des énergies renouvelables ou l'agro-alimentaire. Ma spécialité était de simplifier la compréhension entre les deux pays, ce qui pouvait concerner tous les marchés.
C'est en 2014 que j'ai touché ce que j'aime avec la société Shibuya Productions basée à Monaco, sachant que nous avons une succursale au Japon, à Yamanashi. Dès lors, j'ai pu travailler sur la mise en place de projets comme de l'animation ou le jeu-vidéo, Blitz étant le premier manga dont je suis auteur et scénariste. Et étant un grand fan de bande-dessinée nippone et d'anime sportifs, c'est forcément une histoire de sport que j'allais imaginer.

On peut donc dire que la boucle est bouclée !
Cédric Biscay : On peut dire ça. A savoir que je ne me sentais pas spécialement légitime pour faire du manga, dans le sens où le Japon regorge d'auteurs monstrueux, que des centaines de pépites sont publiées, et que la concurrence est énorme. Ce qui m'a fait sauté le pas, c'est l'idée des échecs et inclure dans la boucle Garry Kasparov. Il fallait répondre à certains critères dont la présence d'un dessinateur japonais aux côtés du scénariste français que je suis, sans quoi ça n'aurait pas marché. Avec ces ingrédients, j'ai pu lancer Blitz. Effectivement, la boucle est bouclée par rapport à mon lien au Club Dorothée, mais il reste encore beaucoup de choses à faire.
Le dessinateur de Blitz est donc Daitarô Nishihara. Pouvez-vous nous parler de votre rencontre avec cet artiste ?
Cédric Biscay : Au départ, il n'était pas prévu que Daitarô Nishihara soit le dessinateur de Blitz. Voilà pour l'anecdote : Lors des salons MAGIC, nous nous octroyons une quinzaine de minutes sur scène pour présenter nos activités et nos nouveautés. Quelques jours avant, on m'avait présenté un dessin de l'artiste, mais je n'avais pas eu le temps de m'y attardé tant j'étais occupé avec l'organisation de l'événement. Arrivé sur cette scène, devant 500 personnes, je présente le projet Blitz, manga sur les échecs parrainé par Garry Kasparov. Quand ce qui devait être les illustrations de couverture apparaissent à l'écran, j'ai un immense blanc. Je ne valide pas du tout la proposition. On était sur un style visuel qui versait plus dans le shôjo, et ce n'était pas la patte que je cherchais. Je me rattrape en précisant que ces visuels n'étaient là que pour donner un vague aperçu de l'histoie, mais un autre problème se posait : Je devais présenter le premier chapitre en mai au Festival de Cannes, sachant que nous étions déjà en mars. Avec mon équipe, on a ratissé en long et en large jusqu'à faire la rencontre de Daitarô Nishihara et rendre le chapitre à temps. Si nous devions respecter ce délais, c'est aussi parce que Garry Kasparov allait être présent à Cannes.
Par rapport aux débuts de Blitz, on remarque notamment le nom de Harumo Sanazaki sur le premier tome...
Cédric Biscay : C'est une histoire différente. Harumo Sanazaki est co-scénariste sur le premier tome. C'est parce que nous voulions accélérer la cadence et maintenir le rythme que nous avons engagé une autre co-scénariste, Tsukasa Mori.



Vous êtes donc trois sur le manga : Vous au scénario, Tsukasa Mori en tant que co-scénariste, et Daitarô Nishihara au dessin. Comment vous partagez-vous les taches de la création ? Quel est le déroulé de la conception d'un tome de Blitz ?
Cédric Biscay : De base, j'ai un scénario et une histoire à raconter. Il faut ensuite découper cette intrigue et la dialoguer, de manière à ce qu'elle corresponde aux codes du manga. C'est là que Tsukasa Mori intervient. Après ce tri et ce découpage en chapitres, le résultat est envoyé à Daitarô Nishihara qui nous présente son storyboard. Ce qui est intéressant avec lui, c'est que c'est que le résultat est constitué de 50% à 60% du rendu final. On a une vue réelle des planches décisives. Il a la capacité de comprendre immédiatement ce que j'entrevois à l'image, ce qui devrait normalement être la partie la plus compliquée. Dans mes retours, il n'y a que très peu de demande de correction. Je m'étonne moi-même de cette alchimie et du talent de Daitarô Nishihara, ainsi que sa capacité à comprendre l'univers de Blitz.
Blitz se distingue aussi par des étapes de son histoire bien ficelées. Tout l'arc du tournoi national était défini par des points bien distincts (l'entraînement, les repêchages et les phases finales), tandis que vous indiquiez avoir en tête le point d'arrivée. Est-ce que tous les grands arcs de la série sont déjà définis, ou la marge d'improvisation reste grande ?
Cédric Biscay : J'ai une bonne marge pour improviser, mais je connais à ce jour les grandes étapes de Blitz. Il y a pour moi trois grands arcs, mais je ne m'interdit pas de changer ça. Je prends très peu d'avance dans le travail, et nous en sommes à ce jour à l'écriture du tome 8. Mon histoire reste écrite dans ses grandes lignes. J'ai son squelette en tête, mais je rajoute énormément d'éléments à chaque volume. Dans les mangas, j'aime les longues histoires. Je me dis toujours que j'ai 25 tomes à l'esprit, mais je ne serais pas en galère pour rajouter des opus supplémentaires. Je n'ai pas ces problèmes de pages blanches avec Blitz en ce sens.
Nous avons évoqué Garry Kasparov, champion mondial d'échecs qui est à la fois le parrain de Blitz ainsi qu'un personnage de la série. Comment l'avez-vous rencontré ? A-t-il un rôle dans la conception du manga ?
Cédric Biscay : Je n'avais pas de contact direct avec Garry Kasparov. Mais quand j'ai pensé au thème des échecs, il m'est immédiatement venu à l'esprit et ai pris contact avec son entreprise basée à New-York pour lui donner les premiers éléments de la série. Quelques temps plus tard, il m'indique qu'il devait passer par Paris prochainement, et me donne rendez-vous. Tout se fait relativement vite : Je lui pitch la série, et lui me montre son enthousiasme car le manga est un médium qu'il ne connaissait pas, ce qui lui permettrait de s'adresser à un autre type de public. Dans un deuxième temps, il a pensé que le projet pouvait permettre de démocratiser un peu les échecs au Japon. Dans ce pays, le shogi reste le jeu de réflexion le plus pratiqué, et il m'a appris que le meilleur joueur de shogi du Japon est aussi le meilleur joueur d'échecs du pays. Ce qui n'est pas très normal, c'est un peu comme si, chez nous, le meilleur rugbyman était le meilleur joueur de handball, sur le simple principe que ce sont des sports de ballon.
Pour son apparition en tant que personnage, j'y tenais vraiment. Il a divers rôles dans la série puisqu'il apprend rapidement au lecteur la tenue d'un tournoi à Monaco, ville à laquelle je tenais à faire des clins d’œil, et intervient régulièrement dans des parties d'échec. Garry Kasparov ne prend pas part à l'écriture de l'histoire, mais il intervient de différentes manières. Et son expertise sur les parties d'échec reste primordiale.



Dans Blitz, le choix de représentation des parties d'échec au sein du récit est original. Loin de la théâtralité d'autres séries de jeux/réflexion où les personnages exposent fièrement leurs stratégies, les duels du manga reposent plus sur des métaphores visuelles épiques. Quelle fut la réflexion ayant aboutit à cette décision ?
Cédric Biscay : C'est un choix personnel qui vient de mon expérience de lecteur. Si actuellement je peux voir autour de moi un petit engouement autour des échecs, tout le monde s'en fichait il y a encore deux ans. Il n'y avait pas encore eu de confinement, ni de diffusion de la série « Le jeu de la dame » sur Netflix. Le jeu des échecs pouvait avoir une image assez soporifique : Des parties qui durent cinq heures, un seul coup toutes les cinq minutes... Ce n'est pas un thème facile à magnifier dans un manga. J'ai trouvé intéressant de m'amuser avec l'imaginaire des joueurs, le fait qu'ils s'inventent un champ de bataille, où ils combattent lors de leurs parties, afin d'établir une bonne balance entre ces optiques imagées et les autres plus classiques.
J'aime beaucoup ces visions épiques, mais ça peut rendre moins intense des partie plus traditionnelles. Il fallait établir un équilibre entre les deux, afin d'intéresser tous les types de lecteurs. D'après les retours que j'ai, ça semble bien vu. D'autant plus que dès le volume 2, nous avons choisi d'inclure en bonus des tomes les explications tactiques des parties, ce qui permettra aux connaisseurs d'y trouver leur compte et de voir que tous les duels sont réfléchis et ont un sens.
Oui, qu'on ne pense pas que les parties désignent un vainqueur selon les besoins de l'histoire...
Cédric Biscay : C'est ce dont je ne voulais pas. Je souhaitais plusieurs niveaux de lecture pour Blitz. Je me rends d'ailleurs compte, lors des séances de dédicace, que la série attire des lecteurs de manga comme des joueurs d'échec.
La série est très hétéroclite : Les héros sont des français dans un cadre japonais, et se confrontent eux-mêmes à des joueurs de tous pays. Il y a une idée de casser les frontières dans Blitz qu'on peut aussi mettre en parallèle avec votre propre évolution professionnelle. Est-ce qu'une telle idée est importante dans un manga qui aborde un jeu comme les échecs ?
Cédric Biscay : Il y a plusieurs réponses à cette question. Il y a effectivement un parallèle avec ma propre carrière car j'ai essayé de briser les frontières entre le Japon et la France. Il y a aussi le fait que le jeu des échecs est un sport mondial, contrairement à d'autres sports qui très plus restreints.
Aussi, je pense que c'est l'une des rares valeurs ajoutées qu'un auteur étranger peut apporter à un manga. J'ai tenu à conserver le côté "school life" que je trouve toujours intéressant et exotique, tout en plaçant les personnages dans une école internationale afin de brasser plein de nationalités différentes. Ca permet de sortir de ce qui se fait habituellement dans les titres purement japonais, et apporter ma pierre à l'édifice de l'internationalisation des mangas. Le plus dur était de concevoir une œuvre telle qu'on aurait pu la trouver dans un magazine de prépublication comme le Jump, mais avec une petite touche étrangère. Ce cassage des frontières est donc une touche que je pouvais amener, tout en gardant une certaine humilité.



Blitz a été lancé à un moment délicat, au début de la crise du Covid-19. Ca ne l'a pas empêché de connaître son succès, avec des chiffres particulièrement enthousiasmants.
Cédric Biscay : Tout le monde me dit que ces chiffres sont bons, et c'est vrai que je suis content qu'on ait vendu 20 000 exemplaires du premier tome. Mais comme je compare avec les chiffres des mangas japonais... (rires)
Dans le secteur du manga de création française, c'est très fort. Mais ce n'est pas le point de comparaison que je cherche. Ça reste néanmoins un sacré cap, surtout quand on se prend deux confinements au lancement du manga. Le premier est tombé deux semaines après la sortie du premier volume, soit trois mois de vide complet sachant que les tomes n'étaient pas disponibles sur Amazon à ce moment. Pour le tome 2, c'était la même chose, même si le deuxième confinement était plus souple.
Malgré tous ces obstacles, les débuts de Blitz ont été couronnés de succès.
Cédric Biscay : Oui, sachant qu'il était au début difficile de rayonner auprès de la presse, car un auteur français n'intéresse pas toujours dans le milieu du manga. Au fur et à mesure, et peut-être grâce au rythme de parution de trois tomes par an, les choses ont changé. Je vois maintenant des articles sur des sites généralistes tandis que Blitz, sur des sites spécialisés, aura des reviews aux côtés d'autres mangas. Ce n'était pas un pari gagné à la base car pour faire quelque chose du niveau des japonais, il faut se lever de bonne heure. C'est « step by step », sachant que nous avons vendu le droits aux États-Unis pour une parution en septembre. Et étant donné que la série est publiée au Japon sur le Shônen Jump+, la prochaine étape serait une sortie physique là-bas. La publication américaine peut jouer car outre le fait que les États-Unis représentent le troisième pays consommateur de manga, ça symbolise surtout une sortie en langue anglaise. On réussit quelques petits miracles avec Blitz, et pourvu que ça continue. Ma venue au Festival International de la Bande-Dessinée d'Angoulême en est un, c'était inespéré auparavant !
L'étape idéale, ce sera l'adaptation animée. Nous avons déjà eu quelques demandes, de studios connus mais pas forcément de la sphère manga, même si deux de ces offres sont issues du Japon. Nous n'avons rien signé pour le moment, mais nous examinons toutes les offres. Il faut une viabilité économique et ne pas produire un anime juste pour produire un anime.

Après cette première étape, nous avons pu retrouver l'auteur, en janvier dernier, pour quelques questions supplémentaires.
Un changement survient pour Blitz : Le manga est aujourd'hui distribué par Editis-Interforum. En quelques mots, pouvez-vous parler des enjeux de cette évolution ? Comment pourrait-elle impacter le futur de Blitz ?
Cédric Biscay : On change totalement de dimension, puisque le poids d'Interforum est beaucoup plus important que celui de notre premier distributeur. Ça permet de toucher davantage de points de vente, mais on arrive aussi à être disponible sur Amazon, grâce à eux. Le fait de pouvoir être distribué aussi en grandes surfaces changera beaucoup de choses.
Comme Interforum est plus gros, plus de commerciaux feront le travail de terrain auprès des libraires. C'est un vrai grand changement, car même si on fait de la communication de notre côté, de la communication de presse essentiellement, nous n'avons pas le budget d'un gros éditeur. C'est donc rassurant d'avoir un distributeur important comme force de frappe, pour mieux toucher les librairies.
Ce changement est opéré depuis début janvier, donc il est un peu tôt pour obtenir de véritables premiers chiffres. Mais on sent que l'effet est bon. On sentira véritablement les effets dès le 23 février, date de sortie du neuvième tome de la série.
Récemment, on a pu voir sur les réseaux sociaux votre engagement dans la lutte contre les violences faites aux femmes. Vous avez notamment reçu le titre d'ambassadeur des droits des femmes à Monaco. Y a-t-il aussi une volonté d'inclure ce combat dans vos travaux, et donc dans Blitz ?
Cédric Biscay : C'est une bonne question, parce qu'on ne peut pas dire que j'ai une vraie volonté inclusive dans ma démarche d'écriture. Ça me vient naturellement. Le meilleur exemple qui me vient, c'est le personnage de Harmony, une femme, véritablement « badass ». Elle peut difficilement avoir le même traitement « shônen » que Tom, parce qu'elle est déjà forte. C'est une figure stable, sûre d'elle... C'était une évidence qu'un personnage féminin fort pouvait fonctionner. Je ne voulais pas partir dans le schéma de la potiche amoureuse du héros.
J'ai reçu ce titre d'ambassadeur pour les droits des femmes à Monaco avec surprise, car on ne peut pas dire que je sois un militant actif. Déjà, parler de « droits des femmes » me paraît hallucinant, car l'égalité devrait être quelque chose de normal. Je ne cherche pas à en rajouter dans mon manga, j'essaie simplement d'inclure des choses de la vie. L'autre exemple est celui d'un personnage en fauteuil roulant, véritablement fort. On n'est pas obligés de n'avoir que des mecs, beaux gosses et en parfaite santé. Je pense que Blitz est un manga assez fidèle à la société dans laquelle on vit.
Vous avez reçu la médaille de l'Ordre Saint-Charles, la plus haute distinction de Monaco, des mains du Prince Albert II. Quelle facette de Cédric Biscay est la plus fière de cet accomplissement ?
Cédric Biscay : Je n'ai pas eu le temps d'en être fier. Quand j'ai reçu le courrier, j'ai eu du mal à réaliser. À Monaco, comme en France, il existe une médaille par rapport aux distinctions culturelles, j'y ai donc pensé. Mais j'ai bien reçu l'Ordre de Saint-Charles, l'équivalent de la Légion d'honneur. Avec du recul j'en suis très fier. Mais je ne l'ai pas vu venir, par rapport à ce que j'ai accompli. J'ai tellement de projets que je suis encore « en cours de travail ». Il n'y a pas de facette de mois qui est la plus fière, j'ai juste eu la chance d'avoir été repéré dans mon travail. Ça reste une grande surprise.

Blitz est désormais publié aux USA, et le premier tome semble avoir rencontré un bon accueil critique. Pouvez-vous revenir sur l'expansion de Blitz à travers le monde ?
Cédric Biscay : Sans mentir, je m'attendais à ce que Blitz soit rapidement disponible dans des pays comme l'Espagne ou l'Italie, car c'était dans la logique par rapport à notre zone géographique. C'est très gratifiant de voir qu'un éditeur américain s’est intéressé au titre. Grâce à lui, Blitz est disponible aux États-Unis, au Royaume-Uni et en Australie. La parution y suit son cours et, ce que je perçois et qui est logique, c'est que le manga peut conquérir un public beaucoup plus large dès lors qu'il est disponible en anglais. Des amis et habitués du MAGIC, qui ne lisent ni le japonais ni le français, ont pu y avoir accès. À titre personnel, ça m'a permis de montrer mon travail en tant qu'auteur, et d'avoir des retours de professionnels. Du côté des joueurs d'échecs internationaux, ça commence à se passer le mot, et ils sont ravis d'avoir un manga sur leur sport favori. Je m'y attendais, mais cette parution américaine le prouve : La version anglaise est très importante.
L'année dernière, l'immense Kazuki Takahashi, auteur de Yu-Gi-Oh! nous quittait. C'est quelqu'un que vous avez rencontré, que vous avez même invité au MAGIC. Avez-vous un souvenir avec l'auteur ?
Cédric Biscay : Ça m'a vraiment touché, surtout dans de telles circonstances. Il faut savoir que Kazuki Takahashi était un homme en pleine forme, et un mangaka très ouvert, venant du jeu vidéo. Il a été exceptionnel au MAGIC, à accepter toutes les dédicaces, à faire des dessins pour les autres invités. Souvent, les artistes japonais n'aiment pas trop les photos, mais Takahashi-sensei acceptait tout. C'est une très grande perte dans le monde du divertissement au sens large. Il avait encore beaucoup à apporter, car il ne se reposait pas sur ses lauriers avec Yu-G-Oh!.
Pour finir, pouvez-vous glisser quelques mots sur l'avenir de Blitz, pour 2023 ?
Cédric Biscay : On poursuit notre rythme effréné de trois tomes par an. À côté, l'exposition niçoise a été prolongée jusqu'au 22 février. On va dépasser les 20 000 visiteurs, ce qui est énorme pour une exposition modeste. Je ne peux pas tout dévoiler, mais d'autres choses se préparent. J'ai toujours cette envie d'une adaptation animée, ce qui serait le Graal en tant qu'enfant qui a grandi avec les dessins animés du Club Dorothée.
Remerciements à Cédric Biscay pour sa disponibilité et ses réponses, ainsi qu'à Sahé Cibot et Sophie Fabrello de Shibuya Productions pour l'organisation des rencontres.