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Manga Interview de Kamome Shirahama (L'Atelier des Sorciers)

Mardi, 05 Juin 2018 à 18h00 - Source :Rubrique interviews

A l'occasion du salon Livre Paris 2018 en mars dernier, l'éditeur Pika Edition a eu l'honneur d'accueillir Kamome Shirahama, autrice de l'un des best sellers manga du début d'année : L'Atelier des Sorciers, dont le premier volume a déjà émerveillé de nombreux lecteurs. En plus de séances de dédicaces et d'une conférence publique, l'artiste a donné des interviews, et nous avons fait partie de ceux ayant eu l'honneur de la rencontrer. Voici le compte-rendu de notre rencontre !
  
  
Kamome Shirahama, merci beaucoup d'avoir accepté cette interview ! Vous avez un parcours assez original : diplômée des Beaux-Arts de Tokyo, amatrice d'arts orientaux autant qu'occidentaux (on peut citer l'Art nouveau, l'Art déco...), vous êtes aussi connue pour avoir conçu aux USA des illustrations de comics DC, Marvel et Star Wars... Comment votre passion pour l'Art du dessin a-t-elle commencé ?
  
Kamome Shirahama : Je suis née dans une famille d'artistes. Mon père est designer et ma mère faisait beaucoup de peintures, donc quand j'étais petite je voyais déjà beaucoup d'oeuvres d'art, et mes parents m'emmenaient souvent au musée, ou alors ils m'incitaient à regarder des programmes sur l'Art à la télévision. C'est comme ça que je me suis intéressée très tôt à l'Art, et en particulier à l'Art occidental.
  
  
En quoi pensez-vous que vos études aux Beaux-Arts vous servent pour la création de L'Atelier des Sorciers ?
  
Ce qui est bien à l'université des Beaux-Arts de Tokyo, c'est que même au sein du département de design on apprend des choses très variées. Le design graphique bien sûr, mais aussi le design de produits industriels. Il y a aussi des cours de peinture japonaise traditionnelle, ou même d'encre de Chine, d'estampe, de gravure... J'ai adoré le fait qu'on pouvait tout y apprendre, ça m'a beaucoup servi.
  
  
Dans quelle mesure diriez-vous que votre intérêt pour l'Art nouveau, l'Art déco, les comics ou d'autres arts occidentaux a influencé votre dessin de L'Atelier des Sorciers ?
  
Je pense que dans les tendances d'Art déco et d'Art nouveau, on a un beau mélange de Beaux-Arts et de design (parfois industriel). C'est ce que j'ai essayé de montrer dans L'Atelier des Sorciers, par exemple en prenant vraiment des motifs typiques de l'Art déco et de l'Art nouveau. J'aime beaucoup, avant tout, le design.
  

  
Et effectivement, l'univers visuel que vous posez dans la série est esthétiquement incroyable, très riche. Que ce soit le design des vêtements, le bestiaire (chevaux ailés, vers-pinceaux...), les paysages insolites (comme les monts surréalistes), les architectures (l'atelier de Kieffrey, l'île-bibliothèque, la ville-île de Carn)... Quel est votre processus de création pour imaginer ces designs ?
  
Ce que j'essaie toujours de faire, c'est de puiser mes inspirations dans les choses qui sont les plus éloignées de l'idée de base. Par exemple, pour une armure de soldat, je vais essayer de me baser sur les vêtements les plus décontractés possibles. Je prends toujours des idées et des objets venant de l'idée inverse. Et pour les choses organiques comme la végétation, j'essaie de prendre des idées dans le domaine industriel ou dans des choses inorganiques, comme ça je peux jouer avec le décalage.
  
  
Et plus spécifiquement, comment avez-vous imaginé le design du costume des apprentis sorciers ?
  
De base, j'aime beaucoup les vêtements et tout ce qui est du domaine de la mode. J'adore travaille sur le design des habits. Beaucoup de dessinateurs et d'auteurs prennent pour modèles des vêtements déjà existants, mais moi je ne le fais jamais. Par exemple, je prends des manuels scolaires des écoles de Beaux-Arts ou de mode, ou alors je prends carrément des patrons pour créer de nouveaux vêtements. En quelque sorte, je crée les habits à partir d'éléments qui ne sont pas complètement achevés.
  
(l'éditeur de Kamome Shirahama prend brièvement la parole)
  
Quant elle a créé le manteau, elle s'est arrangée pour qu'une fois celui-ci porté, il ait la même forme que le chapeau pointu. Elle pense même à ça !
  

TONGARI BOSHI NO ATELIER © Kamome Shirahama / Kodansha Ltd.  
  
Il y a aussi beaucoup de minutie, par exemple sur les plis des vêtements, les matières et éléments (le bois, l'eau, le tissu...), les détails d'objets (les motifs des porte-plume...). Quelle importance accordez-vous à ce type de détails ? Comment les travaillez-vous jusqu'à être satisfaite ?
  
Je décris un univers qui, évidemment, n'existe pas, est complètement imaginaire. Donc pour les lecteurs, je voudrais donner le plus d'éléments possibles pour expliquer ce qu'est cet univers, et c'est pour ça que je mets autant de détails.
  
De plus, j'ai moi-même ce goût pour les détails, et j'aime décrire le plus possible dans ces détails mes idées de design. Mais comme j'ai tendance à travailler énormément sur les détails, je tente de me limiter pour que ce ne soit pas trop lourd. J'essaie de trouver le bon équilibre, de m'arrêter quand il faut pour conserver une facilité de lecture.
  
  
Comment avez-vous déterminé le caractère de Coco, l'héroïne ? Pourquoi en avoir fait une jeune fille si passionnée, parfois maladroite mais aussi capable d'être très débrouillarde ?
  
Quand j'ai créé le personnage de Coco, je voulais d'abord qu'elle parle aux jeunes filles de son âge. C'est un âge enfant-adolescent où il y a quelque chose de très particulier : on est souvent très positif, même s'il y a des problèmes on ne se tracasse pas trop, et c'est ce que j'ai voulu transmettre dans Coco pour que les jeunes filles s'identifient plus facilement à elle.
  
  
Vous offrez une conception intéressante de la magie : elle n'est pas un don inné, mais un art qui se pratique par le dessin. C'est en quelque sorte une science, un savoir qui peut être appris par tous avec des efforts et de la rigueur, ce qui change de beaucoup de récits de magie. De plus, le système de dessin pour lancer les sorts est bien conçu. Comment cette idée est-elle née et a-t-elle grandi en vous ?
  
Quand j'étais petite, je voulais moi-même devenir sorcière ! Mais à chaque fois que je voyais des histoires de sorciers, j'étais très déçue car les sorciers avaient toujours ce don dès la naissance, leurs parents étaient eux-mêmes sorciers... Du coup, chaque fois que je découvrais ça, c'était comme si on me disait que moi-même je ne pouvais pas devenir sorcière, car je n'avais, de base, pas le profil. C'est pour inverser cette tendance que j'ai voulu créer cette histoire, avec l'idée que si on fait des efforts on arrive toujours à réaliser ses rêves, même devenir sorcière.
  
De mon côté, j'ai choisi le motif des dessins comme moyen d'activer la magie, car il y a beaucoup d'artistes chez les lecteurs de manga, et je veux encourager ces lecteurs-artistes à aller jusqu'au bout de leur passion et de leur rêve. Même s'ils sont amateurs, ils peuvent faire des choses magiques, c'est-à-dire créer de très beaux dessins.
  
  
Aimeriez-vous que la magie existe ? A votre avis, si elle existait dans notre monde, quelles en seraient les conséquences ? Serait-ce bénéfique, ou sombrerait-on dans des choses comme celles évoquées dans le passé du tome 1 de votre manga ?
  
Si on pouvait pratiquer la magie dans notre vie réelle, ça pourrait être évidemment bénéfique, car on pourrait avoir peut-être plus de confort dans notre quotidien. Il y a encore des contraintes dans notre vie que l'on peut encore améliorer , un peu comme le font certaines machines dans notre société contemporaine.
  
Mais après, tout dépend de l'utilisation que l'on en ferait. On peut comparer ça avec le feu : le feu est indispensable à notre quotidien, mais il peut tout aussi bien provoquer des incendies s'il est mal maîtrisé.
  
J'espère que la magie ne serait pas utilisée comme arme !
  
  
  
Interview réalisée par Koiwai. Un grand merci à Kamome Shirahama, ainsi qu'à son interprète, à son éditeur, et à Clarisse Langlet de Pika Edition pour la mise en place de cette rencontre.

commentaires

tenmez190

De tenmez190 [2 Pts], le 12 Septembre 2019 à 05h45

That's good interview. I really love their manga pixel gun 3d

Azoth

De Azoth, le 11 Juillet 2018 à 11h31

J'ai découvert ce manga très récemment en lisant des scans, je l'ai trouvé tellement joli empreint d'un bon esprit que j'ai acheté la version collector du T01 ce matin, j'espère que l'autrice continura à nous faire rêver longtemps :)

cm17

De cm17, le 05 Juin 2018 à 21h54

Cette interview me convainc définitivement d'acheter le premier tome de l'atelier des sorciers.

Les dessins sont sublimes, l'histoire interressante et l'autrice passionnante de part son parcours!

Zeik

De Zeik [2187 Pts], le 05 Juin 2018 à 19h04

Merci infiniment pour cette superbe entrevue ! ^^

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