Ciné-Asie Chronique ciné-asie - Monster Boy - Hwayi
Le gang des serpents, composé de cinq hommes passés maîtres en cambriolages et assassinats, enlève un petit garçon et l’élève comme s’il s’agissait de leur fils. Il l'appelle Hwayi, du nom d'un genévrier rare cultivé dans la serre qu'ils occupent comme couverture. Une fois âgé de 17 ans, les pères s'interrogent sur ce qu'ils doivent faire de Hwayi, qui n'est pas de la même nature qu'eux. Doux et intelligent, l'adolescent est cependant sujet à des crises d'angoisse et d'hystérie, se manifestant par l'apparition d'un monstre qui le pourchasse. Alors que l'un de ses pères décide de l'impliquer dans un meurtre pour qu'il devienne définitivement l'un d'entre eux, le jeune homme découvre sur la scène du crime des indices sur son passé. Cela marquera le début d'une révolte.
Le direct-to-dvd, expression englobant les films n'étant pas passés par le cinéma et ayant fait directement l'objet d'une version DVD, est généralement réservé en France, s'agissant des films asiatiques, à de bons gros nanars d'action comptabilisant un nombre d'entrées conséquent dans leur pays d'origine. « Hwayi » est un peu différent. Réalisé par Jang Joon-hwan, il a fait un petit carton au box-office sud-coréen en 2013 (25ème), ce qui n'est pas négligeable dans la mesure où le réalisateur avait connu un échec injustifié avec son sympathique « Save the green planet » en 2003. Le réalisateur faisait alors partie, au début de ces années 2000, de la génération dorée, dite nouvelle vague sud-coréenne, composée des désormais célèbres Park Chan-wook, Bong Joon-ho, Kim Jee-woon... La longue traversée du désert lui fut-elle profitable ? Difficile à dire, tant ce « Hwayi » est à la fois assez réussi et divertissant, mais aurait pu être infiniment meilleur.
Ce qui plaît au premier abord, c'est le synopsis audacieux. Un enlèvement d'enfant par un gang sauvage nous ramène aux légendes urbaines du torture porn (enlèvements de personnes suivis par des mises en scène macabres). Le cinéaste ne joue pas la carte de l'ultraviolence, puisque le jeune garçon subit une maltraitance psychologique plus que physique, et celle-ci est très peu filmée. Très vite, le film bascule en s'intéressant à l'identité volée du jeune homme, soumis à de multiples interrogations. Puis c'est la vengeance qui prend le dessus, en même temps que le désir de protéger ce qui lui est cher. Ainsi, le film passe rapidement entre différentes situations. La narration est fluide, l'ensemble est dynamique et on ne s'ennuie jamais, seules quelques longueurs peuvent être notées à la fin, qui se pare des habits du mélodrame sans en être un. « Hwayi » n'appartient vraiment à aucun genre, il surfe sur plusieurs. Un peu de thriller par ici, un peu de « vigilante » par là, quelques jolies scènes d'action, un début subversif, pour un ensemble très violent, mais pas gratuit.
Pourtant, avec un synopsis de départ aussi bien choisi, on aurait pu s'attendre à nettement mieux. C'est simple, le choix est ingénieux, le développement beaucoup moins ! Le principal problème ? Une psychologie des personnages quasi inexistante. Énormément de choses sont inexploitées ou manquantes. Pourquoi avoir choisi d'élever l'enfant ? Que ressent vraiment Hwayi suite à la découverte de ses origines ? Il n'extériorise rien, rien d'autre en tous cas que des cris, des pleurs, un malaise. Le réalisateur ne s'attarde pas assez sur ses personnages, dont en premier lieu Hwayi, qui sont pour la plupart très caricaturaux, voire assez inutiles. Cinq pères, cinq portraits clichés. Le doyen bien sadique, le sage un peu plus intelligent que les autres, le fou qui se marre tout le temps, l'exécuteur efficace, le gentillet un peu obsédé et très ivrogne. J'exagère ? Vraiment ? Que dire alors du jeune méchant à mèche (au secours le look de chanteur de K-pop à minettes... on soupçonne l'acteur d'en être un, comme par hasard) ? Que dire de l'inspecteur obsessionnel aux méthodes peu orthodoxes depuis qu'il s'est fait agresser par le gang (et qui un comble, ne sert finalement pas à grand-chose dans l'intrigue...) ? Que dire du lobbyist de l'immobilier très véreux qui lorgne vers la politique ? Que dire de ces écolières niaises ?! Tout ce qu'il ne fallait pas faire est bien dans la panoplie !
Or, ce « Hwayi » aurait pu être plutôt réussi avec des personnages plus inspirés. La solution idéale aurait été de proposer des flash-back sur un moment de la vie de l'enfant avec chacun de ses pères, élément qu'on ne voit que dans les jolis dessins du générique de fin. Il aurait ensuite été judicieux de verser dans le genre « vigilante » avec un Hwayi les éliminant un par un, dans un traitement à la Kill bill. Alors vous me direz qu'avec des « si », on peut transformer la pire bouse en macaron d'une grande boutique des Champs Élysées.
Oui, certes. Sauf que lorsqu'on voit un si bon synopsis gâché à ce point, qu'il ne manque pas grand-chose pour faire un vrai bon film, on se prend à rêver de ce qui aurait dû être fait : ici, vous l'aurez compris, un traitement plus inspiré des personnages, et un penchant plus prononcé dans le vigilante. Sacré gâchis. On ne peut que regretter également que la plupart des scènes d'action, pourtant assez réussies, ne s'étendent pas sur des plans plus longs, souffrant, ça devient une habitude, d'un montage clipesque à la MTV fort dommageable.
Et ce n'est pas la symbolique recherchée par le réalisateur qui sauve le film. Hwayi se cherche, s'émancipant vis-à-vis de ses pères, luttant contre le monstre qui lui apparaît parfois (effets spéciaux pas trop dégueulasses, il faut le souligner) : oui... so what ? Cette idée aurait pu trouver sens et puissance si les personnages, encore une fois, avaient été plus travaillés. On ne ressent jamais la solitude et la souffrance de Hwayi dans sa quête tragique, mais libératrice comme on peut ressentir celle des personnages de « Sympathy for Mr Vengeance » ou de « J'ai rencontré le diable ». Le film de Jang Joon-hwan ne joue pas dans la même catégorie. Cela manque de richesse, de férocité, puisque le garçon est foncièrement gentil, n'évolue pas, ne se durcit pas, même lorsqu'il perd ceux qu'il veut protéger. En cherchant à trop s'écarter d'un genre, le film manque d'impact.
L'ensemble du casting est bon, preuve que la Corée du Sud est un véritable vivier. Mais là encore, on se contente du bon, on n'atteint pas l'excellence. Preuve en est avec l'acteur Kim Yoon-seok, le génial proxénète repenti de « The Chaser », au visage ténébreux et aux expressions glaçantes (un digne concurrent pour Choi Min-sik !), qui surjoue quelque peu le père le plus méchant et le plus sadique des cinq. Concernant Yeo Jin-goo, qui interprète Hwayi, son potentiel semble limité par son personnage, trop blanc ou trop noir, qui intériorise ou explose. Ne pouvant pas montrer ce qu'il sait faire dans un entre-deux, on attend de le voir dans quelque chose de moins manichéen pour pouvoir se prononcer sur son talent.
Des bonus, le DVD en a. Et pas n'importe lequel, parce que, comble de l'ironie, ceux-ci sont un pied de nez aux défauts du film. Outre un making of classique d'un quart d'heure, on s'attardera en effet sur une séquence de 25 minutes intitulée « Hwayi et ses pères »... qui enrichit considérablement la psychologie des personnages et le scénario ! Dommage, c'est dans le film qu'il faut faire le travail, pas à l'extérieur !
Un bonus pour le moins déconcertant donc, qui rend la pilule de la déception encore plus difficile à avaler.
« Hwayi » est un film noir et violent qui remplit avec sérieux le cahier des charges d'un thriller sud-coréen traditionnel, sans exploiter ses atouts à leur juste mesure. La piste psychologique et fantastique, avec l'apparition d'une créature pourchassant le jeune homme, fait plouf. L’ambiguïté de la cohabitation entre cinq assassins qui s'évertuent à se considérer comme de vrais pères pour un enfant qu'ils ont enlevé, enfant qui est plus pur qu'eux, n'est jamais approfondie. Enfin, le tournant dans le genre « vigilante » (revenge movie coréen), qui aurait pu lancer véritablement le film après une première partie qui s’essouffle progressivement, est largement insuffisant. Trop classique, trop cliché, pas assez approfondi, « Hwayi » ne parvient jamais à avoir un réel impact sur les esprits. Dommage, le synopsis de départ était tellement prometteur. On espère voir le cinéaste proposer autre chose ces prochains mois, après sa longue absence durant la décennie 2000. Mais il faudra qu'il acquière entre temps une capacité à formaliser une vraie puissance narrative, en creusant aussi bien son scénario que ses personnages.
Le direct-to-dvd, expression englobant les films n'étant pas passés par le cinéma et ayant fait directement l'objet d'une version DVD, est généralement réservé en France, s'agissant des films asiatiques, à de bons gros nanars d'action comptabilisant un nombre d'entrées conséquent dans leur pays d'origine. « Hwayi » est un peu différent. Réalisé par Jang Joon-hwan, il a fait un petit carton au box-office sud-coréen en 2013 (25ème), ce qui n'est pas négligeable dans la mesure où le réalisateur avait connu un échec injustifié avec son sympathique « Save the green planet » en 2003. Le réalisateur faisait alors partie, au début de ces années 2000, de la génération dorée, dite nouvelle vague sud-coréenne, composée des désormais célèbres Park Chan-wook, Bong Joon-ho, Kim Jee-woon... La longue traversée du désert lui fut-elle profitable ? Difficile à dire, tant ce « Hwayi » est à la fois assez réussi et divertissant, mais aurait pu être infiniment meilleur.
Ce qui plaît au premier abord, c'est le synopsis audacieux. Un enlèvement d'enfant par un gang sauvage nous ramène aux légendes urbaines du torture porn (enlèvements de personnes suivis par des mises en scène macabres). Le cinéaste ne joue pas la carte de l'ultraviolence, puisque le jeune garçon subit une maltraitance psychologique plus que physique, et celle-ci est très peu filmée. Très vite, le film bascule en s'intéressant à l'identité volée du jeune homme, soumis à de multiples interrogations. Puis c'est la vengeance qui prend le dessus, en même temps que le désir de protéger ce qui lui est cher. Ainsi, le film passe rapidement entre différentes situations. La narration est fluide, l'ensemble est dynamique et on ne s'ennuie jamais, seules quelques longueurs peuvent être notées à la fin, qui se pare des habits du mélodrame sans en être un. « Hwayi » n'appartient vraiment à aucun genre, il surfe sur plusieurs. Un peu de thriller par ici, un peu de « vigilante » par là, quelques jolies scènes d'action, un début subversif, pour un ensemble très violent, mais pas gratuit.
Pourtant, avec un synopsis de départ aussi bien choisi, on aurait pu s'attendre à nettement mieux. C'est simple, le choix est ingénieux, le développement beaucoup moins ! Le principal problème ? Une psychologie des personnages quasi inexistante. Énormément de choses sont inexploitées ou manquantes. Pourquoi avoir choisi d'élever l'enfant ? Que ressent vraiment Hwayi suite à la découverte de ses origines ? Il n'extériorise rien, rien d'autre en tous cas que des cris, des pleurs, un malaise. Le réalisateur ne s'attarde pas assez sur ses personnages, dont en premier lieu Hwayi, qui sont pour la plupart très caricaturaux, voire assez inutiles. Cinq pères, cinq portraits clichés. Le doyen bien sadique, le sage un peu plus intelligent que les autres, le fou qui se marre tout le temps, l'exécuteur efficace, le gentillet un peu obsédé et très ivrogne. J'exagère ? Vraiment ? Que dire alors du jeune méchant à mèche (au secours le look de chanteur de K-pop à minettes... on soupçonne l'acteur d'en être un, comme par hasard) ? Que dire de l'inspecteur obsessionnel aux méthodes peu orthodoxes depuis qu'il s'est fait agresser par le gang (et qui un comble, ne sert finalement pas à grand-chose dans l'intrigue...) ? Que dire du lobbyist de l'immobilier très véreux qui lorgne vers la politique ? Que dire de ces écolières niaises ?! Tout ce qu'il ne fallait pas faire est bien dans la panoplie !
Or, ce « Hwayi » aurait pu être plutôt réussi avec des personnages plus inspirés. La solution idéale aurait été de proposer des flash-back sur un moment de la vie de l'enfant avec chacun de ses pères, élément qu'on ne voit que dans les jolis dessins du générique de fin. Il aurait ensuite été judicieux de verser dans le genre « vigilante » avec un Hwayi les éliminant un par un, dans un traitement à la Kill bill. Alors vous me direz qu'avec des « si », on peut transformer la pire bouse en macaron d'une grande boutique des Champs Élysées.
Oui, certes. Sauf que lorsqu'on voit un si bon synopsis gâché à ce point, qu'il ne manque pas grand-chose pour faire un vrai bon film, on se prend à rêver de ce qui aurait dû être fait : ici, vous l'aurez compris, un traitement plus inspiré des personnages, et un penchant plus prononcé dans le vigilante. Sacré gâchis. On ne peut que regretter également que la plupart des scènes d'action, pourtant assez réussies, ne s'étendent pas sur des plans plus longs, souffrant, ça devient une habitude, d'un montage clipesque à la MTV fort dommageable.
Et ce n'est pas la symbolique recherchée par le réalisateur qui sauve le film. Hwayi se cherche, s'émancipant vis-à-vis de ses pères, luttant contre le monstre qui lui apparaît parfois (effets spéciaux pas trop dégueulasses, il faut le souligner) : oui... so what ? Cette idée aurait pu trouver sens et puissance si les personnages, encore une fois, avaient été plus travaillés. On ne ressent jamais la solitude et la souffrance de Hwayi dans sa quête tragique, mais libératrice comme on peut ressentir celle des personnages de « Sympathy for Mr Vengeance » ou de « J'ai rencontré le diable ». Le film de Jang Joon-hwan ne joue pas dans la même catégorie. Cela manque de richesse, de férocité, puisque le garçon est foncièrement gentil, n'évolue pas, ne se durcit pas, même lorsqu'il perd ceux qu'il veut protéger. En cherchant à trop s'écarter d'un genre, le film manque d'impact.
L'ensemble du casting est bon, preuve que la Corée du Sud est un véritable vivier. Mais là encore, on se contente du bon, on n'atteint pas l'excellence. Preuve en est avec l'acteur Kim Yoon-seok, le génial proxénète repenti de « The Chaser », au visage ténébreux et aux expressions glaçantes (un digne concurrent pour Choi Min-sik !), qui surjoue quelque peu le père le plus méchant et le plus sadique des cinq. Concernant Yeo Jin-goo, qui interprète Hwayi, son potentiel semble limité par son personnage, trop blanc ou trop noir, qui intériorise ou explose. Ne pouvant pas montrer ce qu'il sait faire dans un entre-deux, on attend de le voir dans quelque chose de moins manichéen pour pouvoir se prononcer sur son talent.
Des bonus, le DVD en a. Et pas n'importe lequel, parce que, comble de l'ironie, ceux-ci sont un pied de nez aux défauts du film. Outre un making of classique d'un quart d'heure, on s'attardera en effet sur une séquence de 25 minutes intitulée « Hwayi et ses pères »... qui enrichit considérablement la psychologie des personnages et le scénario ! Dommage, c'est dans le film qu'il faut faire le travail, pas à l'extérieur !
Un bonus pour le moins déconcertant donc, qui rend la pilule de la déception encore plus difficile à avaler.
« Hwayi » est un film noir et violent qui remplit avec sérieux le cahier des charges d'un thriller sud-coréen traditionnel, sans exploiter ses atouts à leur juste mesure. La piste psychologique et fantastique, avec l'apparition d'une créature pourchassant le jeune homme, fait plouf. L’ambiguïté de la cohabitation entre cinq assassins qui s'évertuent à se considérer comme de vrais pères pour un enfant qu'ils ont enlevé, enfant qui est plus pur qu'eux, n'est jamais approfondie. Enfin, le tournant dans le genre « vigilante » (revenge movie coréen), qui aurait pu lancer véritablement le film après une première partie qui s’essouffle progressivement, est largement insuffisant. Trop classique, trop cliché, pas assez approfondi, « Hwayi » ne parvient jamais à avoir un réel impact sur les esprits. Dommage, le synopsis de départ était tellement prometteur. On espère voir le cinéaste proposer autre chose ces prochains mois, après sa longue absence durant la décennie 2000. Mais il faudra qu'il acquière entre temps une capacité à formaliser une vraie puissance narrative, en creusant aussi bien son scénario que ses personnages.
De wukong, le 31 Janvier 2015 à 10h24
faudrai que je me le regarde on verra
De peachgirll [7837 Pts], le 25 Janvier 2015 à 15h22
Merci pour cette chronique. Je m'attendais à mieux pour ce film!
De esudesu, le 24 Janvier 2015 à 20h54
faudrait que je regarde quand même ce que sa donne xD
De lhine [294 Pts], le 24 Janvier 2015 à 15h41
Yeo Jin-goo n'est pas un idol/chanteur k-pop pour midinettes.
C'est un acteur. Il a commencé sa carrière avec Sad Movie en 2005. Un acteur prometteur mais qui joue souvent la partie enfance des héros. Hwayi étant son premier grand rôle étant adulte. Dommage, le jeu de l'acteur est bon (très bon selon moi) mais le reste ne suivait pas ! XD