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Ciné-Asie Chronique - Aniki mon frère

Vendredi, 20 Janvier 2012 à 09h33

Aniki mon frère... film choc de Takeshi Kitano qui nous fait découvrir l'impitoyable milieu des yakuza via le prisme de deux frères... Découvrez dès maintenant la chronique du film signée Rogue Aerith !


 
 
Refusant de se soumettre à l'autorité du clan qui a abattu son chef, le yakuza Yamamoto (Beat Takeshi) quitte le Japon pour rejoindre son demi-frère Ken à Los Angeles. Celui-ci, accompagné d'une bande de petites frappes, est dealer pour un gang de Mexicains. Yamamoto va entraîner les jeunes sur un chemin extrême. Parmi eux, Denny (Omar Epps), un ami de Ken, devient le protégé du yakuza. Pour Denny, Yamamoto est son « aniki », son frère. Peu à peu, grâce à Yamamoto, la mafia japonaise devient très puissante, et les dangers se multiplient.

En 1999, avec l'Eté de Kikujiro, Takeshi Kitano prouvait qu'il pouvait s'égarer du carcan dans lequel les médias occidentaux l'avaient enfermé, à savoir qu'il serait le spécialiste du film de yakuzas entre violence et onirisme. Avec Aniki mon frère, Kitano revient sur un film de yakuzas mais en transposant cette fois-ci son univers aux Etats-Unis. Un pari plutôt intéressant qui remplit toutes ses promesses.

On retrouve donc l'ambiance ultra violente des tout premiers films (Violent Cop et Sonatine pour n'évoquer qu'eux) mêlée à un scénario qui ramène à une sorte de conquête de l'Ouest. Kitano nous concocte un mélange dont il a secret, un film de yakuza inventif violent mais ponctué de nombreux accents comiques. Il évite surtout l'écueil dans lequel seraient tombés bon nombre de ses compatriotes cinéastes : un anti-américanisme constitué de clichés et de caricatures. Certes, il dénonce, plus ou moins directement, la vulgarité et l'orgueil des mafias occidentales. Mais c'est aussi en imposant le modèle nippon que Kitano esquive des situations qui auraient été trop lourdes. Ainsi, les anciennes traditions nippones sont à la fois la base du scénario et s'immiscent çà et là intelligemment. La loyauté constitue le socle d'un récit pas surprenant du tout, mais dont on ne saurait néanmoins pas deviner la fin, ce qui est somme toute le principal. Aniki mon frère est, sous son habillage de violence, un film sur la fidélité, l'honneur, l'amitié. En contrepartie de ce sens très nippon des valeurs qui est bel et bien le support de l'oeuvre, un seppuku redynamise l'affaire en milieu de film, tandis que des scènes d'action représentatives des méthodes yakuzas apparaissent comme de véritables explosions. Kitano nous montre bien qu'il n'est pas prêt d'abandonner ce genre de scènes : la violence y est brute et radicale. Tellement excessive qu'elle frôle souvent le second degré.

Cela nous amène tout droit vers un des points les plus marquants de l'oeuvre de Kitano : l'humour. Aniki mon frère excelle dans le domaine, grâce à des choix tout à fait judicieux opérés par l'acteur-réalisateur. Le personnage de Yamamoto, déphasé au début, puis montant en puissance, utilise la barrière du langage pour demeurer (presque) totalement silencieux pendant tout le film, un parti-pris narratif osé qui porte vraiment ses fruits comme nous allons le voir plus tard. Kitano s'est adjoint les services d'acteurs nippons très doués qui rentrent parfaitement dans son jeu : son ami Susumu Terajima (impeccable), ou encore Ren Ohsugi, Masaya Kato et Claude Maki. Mais le plus remarquable est la décision de Kitano, qui s'avère payante (et comment !), d'avoir appelé un acteur afro-américain peu connu pour jouer son protégé : Omar Epps (qui est depuis devenu le Dr Foreman dans House M.D.). Le film de Kitano repose en grande partie sur la relation entre Kitano et Omar Epps, car le premier devient, sans qu'on s'en rende vraiment compte (affection ? souvenirs ? hasard ?) le mentor du second. Et plutôt que mentor, disons « grand frère »... soit « aniki » en japonais ! La complicité entre les deux acteurs est palpable, si bien que le film en ressort indéniablement grandi. Comme dit précédemment, Kitano reste silencieux pendant le film. Un choix qui ne manque pas d'ingéniosité parce qu'il endosse un rôle-clef, rappelant le théâtre traditionnel japonais : celui de comique à mimiques. Le silence est la règle, et c'est par le visage que Kitano s'en sort : derrière ses lunettes noires et son côté taciturne, chaque expression, sourire ou rire, est propice à un fou rire chez le spectateur. Et lorsque Kitano prend un malin plaisir à faire tourner en bourrique Omar Epps, tout est encore plus irrésistible. Aniki mon frère se distingue donc par une variation constante du ton, les gags rendant ces personnages de gangsters violents très attachants. La violence renversa à coup sûr celles et ceux qui ne sont pas habitués à l'univers du cinéaste. Pour autant, Kitano ne s'y complaît pas, il en offre au contraire une approche esthétisante comme il l'a toujours fait dans le passé (et c'est ce qui manque d'ailleurs à Outrage, trop premier degré, pas assez esthétique). On relèvera par exemple une scène où les cadavres jonchent le sol pour écrire l'idéogramme « mort » après une fusillade chaotique.

La mise en scène est soignée et le rythme est savant : on peut voir dans Aniki mon frère une phase d'exil et de découverte, une phase ludique où Kitano s'amuse tout en élargissant l'influence de son petit groupe, et une fin en apothéose, parce qu'étendre à ce point une nouvelle mafia ne peut se faire sans conséquences désastreuses. De plus, ce n'est pas Kitano qui compose avec les Etats-Unis, mais les Etats-Unis qui s'inclinent face à Kitano : acteurs et décors de Los Angeles se fondent dans l'univers créé par le cinéaste, sans fausse note.

L'ambiance sonore est en retrait, la musique de Joe Hisaishi n'étant pas mémorable (ce n'est pas grave, elle l'est partout ailleurs), laissant la place au réalisme des scènes de fusillade.

Côté bonus, comme d'habitude, on a droit aux « classiques efficaces » : bandes-annonces, filmographies, making of, interviews. Et devinez quoi ? Et bien, comme d'habitude, nous aurions apprécié un making-of et des interviews un peu plus longs et détaillés.

Avec Aniki mon frère, Takeshi Kitano appose l'empreinte nippone sur le territoire américain. Conjuguant les traditions japonaises aux décors de Los Angeles, il livre un film rigoureux qui brille par son ton varié, entre violence et ludisme. On est vraiment surpris de retrouver un humour aussi bon que dans l'Eté de Kikujiro mêlé à une violence aussi brute que dans Violent cop. Un grand film, encore une fois.
 
 

commentaires

Clemclem

De Clemclem, le 11 Février 2012 à 16h37

Je sais pas pourquoi tout le monde s'obstine à dire que la BO est pas terrible, je la trouve parfaite moi. 

brigada

De brigada, le 27 Janvier 2012 à 20h23

a voir en vostf la vf est trop mauvaise

Tsukinohime

De Tsukinohime [1101 Pts], le 22 Janvier 2012 à 17h58

il à l'air sympa :)

Kiraa7

De Kiraa7 [2429 Pts], le 21 Janvier 2012 à 12h51

J'adore tout ce qui tourne autour de la mafia et je veux voir Aniki depuis bien longtemps. Bref, merci de cette chronique Rogue, va falloir que je vois ça dès que possible ;)

Sheejhaumn

De Sheejhaumn [2046 Pts], le 20 Janvier 2012 à 23h38

Pas encore vu celui-là. Mais ça me tente bien.

Kimi

De Kimi [3392 Pts], le 20 Janvier 2012 à 23h21

Adulant Kitano, j'ai été ravi par Aniki. Rien a redire dessus, j'en garde également un très bon souvenir comme dk & Koiwai. ^^

Theranlove2

De Theranlove2 [4047 Pts], le 20 Janvier 2012 à 19h35

J'ai adoré ce film ^o^ le trailer et la chronique sont parfaite...

Yuusuke

De Yuusuke [332 Pts], le 20 Janvier 2012 à 18h27

D'habitude je suis pas spécialement fan de films style 'biens mafieux' mais pour le coup la chronique et le trailer m'ont donné envie '_' (et pis je dit pas non à un made in Kitano) sympa', à voir, si j'ai l'occas' :)
IchigoSan

De IchigoSan [998 Pts], le 20 Janvier 2012 à 15h45

Très bon film, j'adore ^^
Koiwai

De Koiwai [12681 Pts], le 20 Janvier 2012 à 13h13

Je garde un excellent souvenir de ce film également. D'ailleurs ça fait très longtemps que je ne l'ai pas vu.

dkrevenge

De dkrevenge [2696 Pts], le 20 Janvier 2012 à 09h53

j adore ce film.

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