Chronique Ciné - La colline aux coquelicots- Actus manga
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Dvd Chronique Ciné - La colline aux coquelicots

Vendredi, 13 Janvier 2012 à 14h20

Voici notre chronique du film La Colline aux Coquelicots, actuellement au cinéma !


 
 
Chaque nouvelle sortie d'un film du studio Ghibli, symbole de réussite de l'animation japonaise à travers le monde, constitue, en soi, un événement. Ainsi, après l'envoûtant Arrietty il y a un an, c'est au tour de la Colline aux coquelicots de fleurir sur les grands écrans français. Un film attendu avec une impatience mêlée de crainte, après l'échec public et critique (malgré sa première place au box-office annuel japonais) des Contes de Terremer, précédent et premier film de Goro Miyazaki, fiston de Hayao, qui avait lui-même dénigré la première oeuvre de son fils, qu'il ne jugeait "pas encore prêt".

C'est donc sous la houlette très rapprochée de son paternel, qui a par ailleurs signé ici l'écriture du scénario, que Goro réalisa son deuxième film. La Colline aux coquelicots, c'est donc avant tout une histoire de famille, et l'histoire d'un clash entre un fils et son père qui n'a jamais cessé d'être sur son dos pour apporter ses conseils et reproches, pour ordonner de refaire certains passages jugés mauvais, pour diriger le projet aux côtés de Toshio Suzuki. Au final, c'est dans la difficulté, sur les bases d'une relation père/fils et professeur/élève à la fois tendue et bienveillante, et juste après le drame du 11 mars 2011, que le film naquit dans sa version définitive. Alors, une expérience aussi éprouvante a t-elle permis à Miyazaki fils de faire des progrès depuis l'assez vide Terremer ?

Umi, 16 ans, élève de première, fort caractère au coeur tendre, est malgré tout hantée par la disparition d'un père marin dont elle refuse inlassablement la mort, hissant alors jour après jour les drapeaux signifiant sa présence sur la colline aux coquelicots, et entretenant, sans rechigner à la tâche et en attendant le retour de sa mère partie en voyage, la grande demeure où logent toute sa famille ainsi que Mademoiselle Hokuto. Un contexte peu évident à gérer, mais Umi sait faire preuve de ténacité.
En plus de cela, viennent s'ajouter les tumultes du lycée, où se lève une révolte contre la démolition du Quartier Latin, très vieille bâtisse délabrée servant de local à plusieurs clubs du lycée.
Entre ses douleurs familiales et la révolte grandissante au lycée, la jeune Umi doit évoluer, se faire une place, trouver l'équilibre entre la famille, la vie sociale du lycée, et la naissance de ses sentiments pour Shun Kazama, membre du club de journalisme.

A l'origine du film, on retrouve un shôjo manga du début des années 80, publié en France par Akata/Delcourt. L'adaptation s'avère être en réalité proche dans les grandes lignes, mais différente sur plusieurs points quand on regarde légèrement plus en détail. Ainsi, parmi les grandes différences, on remarque que dans le manga, la lutte estudiantine ne concerne pas ce Quartier Latin (qui n'existe d'ailleurs pas dans le manga), mais le port de l'uniforme. Le personnage de Hokuto est, dans le manga, un jeune homme qui est en quelque sorte le premier amour d'Umi, et dans le film celui-ci devient une femme. Sur ce point, on peut vraiment regretter que le réalisateur n'ait pas conservé la version masculine, qui lui aurait sans doute permis d'aborder plus finement l'évolution amoureuse de son héroïne, mais nous reviendrons là-dessus plus tard. Chose également très importante dans le manga, la naissance de la lutte estudiantine est, à l'origine, montée de toute pièce par Shun et son ami à lunettes, qui y voient un moyen de rembourser les dettes qu'ils ont accumulées en utilisant l'argent de leur club pour aller fréquenter... une geisha. Un aspect totalement effacé du film, sans doute pour le rendre plus accessible aux plus jeunes.

Les différences sont donc nombreuses, et de taille. Parmi les thèmes abordés dans le manga, on retrouve des choses fortes et graves, comme le souvenir toujours présent d'un père disparu il y a longtemps, les révoltes estudiantines, les "mauvaises" fréquentations de certains élèves, voire même, beaucoup plus loin, un amour sincère mais interdit. Parmi tout ceci, Goro Miyazaki a dû faire des choix, modifier de nombreuses choses, en supprimer d'autres, et occulter certaines étapes de l'évolution d'Umi pour faire tenir son film en 1h30. Beaucoup d'étapes on été supprimées, et il faut croire que certaines n'auraient pas dû l'être si le réalisateur avait voulu mettre en avant avec plus de force ce qu'il a conservé.

Si l'on découvre rapidement en Umi une héroïne forte, gérant quasiment à elle seule la demeure familiale tout en n'oubliant jamais son père disparu, son évolution sentimentale aux côtés de Shun s'avère un peu maladroite, assez lisse. Il y manque cet impact qui aurait pu trouver sa source via le personnage de Hokuto qui, ici, ne sert finalement franchement à rien, ou encore dans le rapprochement des deux adolescents pendant la réfection du Quartier Latin.
Quartier Latin qui, par ailleurs, est sans doute la modification que le réalisateur a le mieux exploitée. Si, de par cette modification, l'aspect "lutte estudiantine" en prend un petit coup, il ressort en revanche de la réfection de la vieille bâtisse quelques-uns des moments les plus vivants du film. Même s'ils manquent cruellement de présence, les quelques personnages secondaires qu'on y rencontre, comme le responsable du club de philosophie, apportent une certaine fraîcheur, et de manière plus générale, c'est la vivacité avec laquelle tout le monde se serre les coudes pour retaper le bâtiment, la solidarité entre élèves qui en découle, qui réchauffent le coeur, d'autant que ces moments sont aussi ceux où les décors sont plus inventifs et sont les plus colorés et chaleureux.
Malgré tout, il manque bel et bien au film des personnages secondaires réellement intéressants et attachants. Des protagonistes comme le responsable du club de philosophie, la petite soeur d'Umi ou l'ami de Shun sont sympathiques, mais manquent cruellement de consistance, sont cantonnés à leur rôle. Résultent de tout ceci des interactions pas toujours très poussées d'Umi avec son entourage, ce qui tend à renforcer l'aspect un peu lisse du film, jusque dans la relation amoureuse entre Umi et Shun.

Finalement, la plus belle réussite de fond du film est d'avoir su sublimer la figure du père, ce père disparu d'Umi, qu'elle n'a jamais oublié, comme le montre, par exemple, la vieille photo qui revient de manière récurrente dans le film, et qui prend tous son sens dans les révélations finales. On se retrouve avec un final touchant, pour une véritable élégie de la figure du père. Quelques autres messages forts sont là, comme celui de ne jamais oublier l'héritage du passé. L'ambiance un peu nostalgique, nous le verrons, appuie bien cela.

En somme, une impression mi-figue mi-raisin se dégage de l'histoire. Un sentiment que le film a voulu aborder de nombreux thèmes, des sentiments à la paternité en passant par la vie lycéenne, en ne parvenant à digérer pleinement que peu de choses. Il aurait sans doute fallu au film quelques minutes en plus pour mieux aborder certains aspects et éviter ainsi ce côté trop lisse de plusieurs éléments de fond.

Passons maintenant à l'aspect visuel du film. Du côté des décors, il n'y a rien à redire : ça fourmille de détails, que ce soit dans les intérieurs, à commencer par le Quartier Latin, ou les paysages, qui font souvent appel à des vues sur le port et la mer ou sur les drapeaux érigés par Umi, le tout rappelant de manière régulière ce père disparu en mer. L'univers est très coloré quand il le faut (le Quartier Latin), et fait appel à des couleurs plus pastel, plus légères, en extérieur et lors des moments d'émotion. Le tout appuie à merveille la peinture d'époque et le petit vent de nostalgie qui souffle sur le film.
Du côté des personnages, on retrouve le design typique des films de Ghibli, simple mais expressif et agréable. On regrettera par contre une certaine indigence dans l'animation des personnages, pas toujours d'une fluidité exemplaire.
Mais comme pour Terremer, la principale qualité du film réside dans sa bande son, magistrale, variée. Alors que l'on a encore en tête le générique de fin envoûtant découvert dans la bande-annonce, on découvre au fil des minutes des musiques variées, de jolis morceaux de piano, des musiques au parfum de nostalgie, des chansons qui sonnent assez rétro et font parfaitement ressortir cette légère nostalgie du Japon de l'époque. Pourtant, malgré la beauté indiscutable de la bande son, celle-ci n'est pas toujours utilisée à bon escient. A quelques reprises, on peut la trouver trop envahissante, et trouver qu'elle appuie de manière trop grossière et prévisible certains moments d'émotion.
Dans le ton, on est fort logiquement beaucoup plus proche des oeuvres réalistes, intimes et personnelles d'Isao Takahata que des ambiances merveilleuses et fantastiques de Miyazaki père. Goro Miyazaki prend son temps pour créer des ambiances, affiche une volonté de bien faire, y arrive régulièrement en sachant nous toucher de par le réalisme et l'ambiance douce-amère ou nostalgique du fond, mais à cause des défauts explicités auparavant, n'atteint pas encore la maestria de Takahata dans le genre.

Au final, que penser de la Colline aux coquelicots ? Indéniablement, du chemin a été parcouru par Goro Miyazaki depuis les Contes de Terremer. On trouve ici une oeuvre plus riche, plus belle, plus vivante, mais encore maladroite. Sans cesse, on a l'impression que Goro Miyazaki, peut-être stoppé dans son élan par son père, n'a pas pu aller au bout de ses idées, l'un des exemples les plus frappants étant peut-être d'avoir conservé le personnage de Hokuto alors qu'il ne sert ici à rien. On a là un film agréable, parfois superbe, mais encore trop lisse, voire impersonnel, Goro semblant flirter entre le cinéma de Takahata et celui de son dirigiste de père. Il lui manque encore sa propre patte, qu'il ne pourra peut-être acquérir qu'après s'être pleinement affranchi des géants du studio Ghibli. Qui sait, peut-être qu'un troisième film pourra nous aider à y voir encore plus clair à l'avenir ?

Koiwai
 

commentaires

Gonbawa

De Gonbawa [403 Pts], le 19 Janvier 2012 à 20h12

... de même que "Souvenirs goute à goutte", "Only Yesterday" et les"Chuchotements du Coeur", réalistes et tous de Ghibli.

Machin

De Machin, le 14 Janvier 2012 à 19h19

Scénario classique mais très bon film. Pour rappel ce n'est pas le premier Ghibli "dans le monde réel" le tombeau des lucioles l'était aussi. ^^

Sorrow

De Sorrow [833 Pts], le 14 Janvier 2012 à 00h43

niveau du scénario j'ai trouvé ça correcte mais c'est vrai que ca change du fantastique auquel on était habitué chez les Ghibli.

 

Oui mais non. Ghibli, c'est surtout un sceau de qualité, il y a bien plus dans le studio que les films de Miyazaki (père), et heureusement. Il est dommage que l'aura de ce dernier ait tendance à diminuer les mérites et l'impression de variété de la plupart des autres réalisations, notamment celles de Takahata... Le tombeau des lucioles, Omoide Poroporo, Mimi wo sumaseba, Ocean Wave... Tout ces films jouent dans un autre registre, s'adressent sans doute à un public un peu différent, mais sont des Ghibli à part entière. 

Il est tout de même un peu dommage que beaucoup aient surtout l'image de films dans le même genre que "Princesse Mononoke" ou "Le Voyage de Chihiro" quand ils entendent le nom "Ghibli", et sont donc forcément un peu déçus quand ils voient quelque chose dans un style différent, mais possédant autant de qualités. 

 

Je n'ai pas encore vu La Colline aux coquelicots, j'espère qu'il sera proposé lors du festival Anima se tenant à Bruxelles en février (sinon, faudra que j'aille faire un tour en France pour enfin voir un Ghibli sur grand écran...), mais je pars sans aucun à-priori. Contrairement à beaucoup, j'ai adoré Les Contes de Terremer, parce que je l'ai pris pour ce qu'il est, une oeuvre de jeunesse de Miyazaki fils, avec ses imperfections mais surtout ses forces, et certaines scènes restent fortes dans mon esprit, tout comme certains personnages ainsi que les grands thèmes du film, et je ne me suis pas ennuyé une seconde. J'ai toujours trouvé les critiques forts durs envers ce film, et ai toujours eu davantage l'impression qu'elles viennent surtout d'une réaction au fait que le film porte le nom d'un Miyazaki, mais pas celui du père...

En plus, le film m'aura également permis de découvrir et donner envie de lire le cycle de Terremer d'Ursula K. Leguin, qui est devenu simultanément une de mes oeuvres et une de mes auteures préférées, donc je ne peux que l'en remercier.

tsubasadow

De tsubasadow [4300 Pts], le 13 Janvier 2012 à 23h46

Film vu hier soir, niveau graphisme rien à dire c'est juste Magnifique comme d'habitude, niveau musique pareil très agréable surtout la chanson de fin, niveau du scénario j'ai trouvé ça correcte mais c'est vrai que ca change du fantastique auquel on était habitué chez les Ghibli.

En tout cas j'ai passé un agréable moment et je le conseil à tous ceux qui n'ont pas pu le voir et si je devais donner une note alors je lui mets 15/20.

kairi

De kairi [2225 Pts], le 13 Janvier 2012 à 21h27

J'irai le voir quand je le pourrai !! ^^

Luciole21

De Luciole21 [2209 Pts], le 13 Janvier 2012 à 21h22

J'irais le voir dès que je peux ^^
pandoragirl

De pandoragirl [759 Pts], le 13 Janvier 2012 à 20h23

Je l'ai vu mercredi et ce film est génial !!! ^^

siky1

De siky1 [660 Pts], le 13 Janvier 2012 à 20h11

Je l 'ai vut mecredi après midid et j ai adoré la musique du film*.* l histoire en elle même est bien même si c est pas parfait. Allé le voir si vous pouvez parce que je pense qu il en vaut le coup (mais c 'est mon avis^_^)
LadyKya

De LadyKya [1310 Pts], le 13 Janvier 2012 à 19h37

Je l'ai vu aujourd'hui, Magnifique film, quelques lacunes c'est vrai, mais comme le dit lui même Goro (dans une interview sur allociné), la grosse différence et pas des moindre avec les autres oeuvres du studio Ghibli, c'est que c'est une histoire "dans le réel" et non dans le fantastique comme son précédent animé (les contes de terremer). Une approche assez loin de Ghibli enfin de compte. Je lui donnerai un 17/20, parce que les dessins sont tellement fabuleux qu'on a l'impression d'être dans une toile, et que j'ai eu le coeur serré pendant le film!!

Je suis de l'avis d' Osaka, allez le voir et jugé par vous même.

 

Theranlove2

De Theranlove2 [4047 Pts], le 13 Janvier 2012 à 19h01

Les images sont justes magnifiques, j'aime beaucoup les graphisme !
Je suis aussi totalement d'accord avec la Koiwai [merci encore la team!] et si je devais aussi donné une note sa serai 14/20

Osaka

De Osaka [320 Pts], le 13 Janvier 2012 à 15h22

je l'ai trouvé très bien, plein d'humour et touchant

certes moins magique qu'un ponyo ou arletty, mais Ghibli ce n'est pas que ça aussi

Goro n'est pas son père, et heureusement, ce qui amène de la diversité, de nouvelles expressions, et des impressions différentes...

A voir pour juger soit même plutôt que d'écouter des critiques qui par définition sont totalement subjectives

Totoye

De Totoye [1441 Pts], le 13 Janvier 2012 à 14h43

Film vu mercredi soir, je suis entièrement d'accord avec la critique de Koiwai. Je suis resortie de la salle avec un melange de sentiments entre la déception par certains passages (pour moi la fin vien trop vite, il manque un "quelque chose") et la beauté des images, les musiques (aaahhhh la musique de fin <3). Si je devai lui donner une note elle serait de 13/20. ^^
luunablue

De luunablue [741 Pts], le 13 Janvier 2012 à 14h33

Je vais le voir ce soir avec une amie :) plus une petite séance shopping avec celaquoi de mieux.

SOra

De SOra [142 Pts], le 13 Janvier 2012 à 14h25

faut que j'aille le voir ce film >.< mais avec la fac le temps me manque.

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