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Manga ACBD - Bilan 2008

Lundi, 05 Janvier 2009 à 14h24 - Source :ACBD

Comme chaque année l'ACBD(Association des critiques et journalistes de la Bande Dessinée) fait un bilan complet sur l'ensemble des publications de Bandes Dessinées en France.

En voici quelques extraits :

2008 : « Recherche nouveaux marchés… Désespérément ! »
Une année tonique qui ne se laisse pas impressionner par la crise financière ambiante…


Toujours plus :
4746 livres de bande dessinée ont été publiés en 2008 (dont 3592 strictes nouveautés), soit une progression (pour la 13ème année consécutive) de 10,04%.

Pour la 13ème année consécutive, la production de bandes dessinées est encore en nette progression : 3592 nouveaux albums (soit 75,68% du total des livres concernés par cette spécialité) ont été diffusés dans les librairies francophones en 2008 (contre 3312 et 76,79%, en 2007) !

Cependant, il faut bien reconnaître que les différents publics conquis par la bande dessinée au cours de ces dix dernières années ont quand même toujours tendance à se rabattre sur les valeurs sûres (qui bénéficient, en priorité, des campagnes de communication ou d’exploitation dérivées), et qu’ils n’ont que peu de curiosité pour des domaines qui ne sont pas, a priori, proches de leurs préoccupations : l’heure n’est donc pas à l’expérimentation et à la prise de risque, surtout en ces temps incertains, économiquement parlant…

Pourtant, il est évident que, ces dernières années, c’est l’exploitation des nouvelles niches commerciales qui a permis (et qui permet toujours), aux éditeurs, de gagner de nouvelles parts de marché : ces derniers ne doivent donc pas se contenter de satisfaire les 4 principaux lectorats :

- celui des séries asiatiques : 1453 nouveaux mangas, manhwas, manhuas et assimilés sont parus en 2008, soit 40,45% des nouveautés (contre 1428 et 43,12%, en 2007)
- celui des albums franco-belges : 1547 titres parus en 2008, soit 43,07% (contre 1338 et 40,39%, en 2007)
- celui des comics américains : 240 recueils parus en 2008, soit 6,68% (contre 227 et 6,85%, en 2007)
- celui des romans graphiques : 353 livres parus en 2008, soit 9,83% (contre 319 et 9,63%, en 2007)

Depuis cinq ans, cette croissance profite surtout aux plus puissants éditeurs (ils ont publié 2657 nouveautés – contre 1018 en 2007 –, soit 73,97% du secteur) au détriment de la "petite" édition qui, pourtant, progresse encore fortement en 2008, totalisant 936 nouvelles parutions (contre 613 en 2007), soit 26,06% du secteur.


Concentration et vitalité : 15 groupes dominent le secteur avec plus de 70% de la production, alors que pas moins de 265 éditeurs ont publié des bandes dessinées en 2008.

Consolidation, rationalisation et concentration sont plus que jamais d’actualité : à l’exemple du groupe Glénat qui, après avoir acheté le catalogue bandes dessinée d’Albin Michel (finalement rebaptisé Drugstore) et relancé L’Écho des Savanes, a repris le label Treize Étrange jusqu’alors dans le giron de Milan. Le dynamique groupe Glénat, qui est le 2ème du secteur en chiffre d’affaire, a publié 380 titres sous son propre label ou sous ses filiales Glénat Mangas, Caravelle, Vents d'Ouest et Drugstore – soit 8,01% (contre 295 et 6,84% en 2007).

Ce n’est pourtant pas le plus gros producteur de 2008 puisqu’en publiant 627 titres sous ses filiales Dargaud, Kana, Le Lombard, Dupuis, Blake et Mortimer, Lucky Comics, Le Caméléon et Fleurus – soit 13,21% de la production (pour 474 et 10,99% en 2007), Média Participations nous rappelle qu’il est toujours à la 5ème place du marché du livre tous genres confondus (même s’il pèse 7 fois moins que le leader qu’est le groupe Hachette : plus de 20% du marché du livre, à lui tout seul) et qu’il contrôle 40% de l’économie de la bande dessinée francophone : à défaut d’avoir pu racheter Éditis (le 2ème plus gros groupe d’édition passé sous la houlette de l’Espagnol Planeta) !

La maison Delcourt (et ses filiales Akata et Tonkam, laquelle célèbre déjà ses 15 ans d’existence) consolide sa bonne position en publiant un peu moins de titres qu’en 2007 (479, soit 10,09%, contre 484 et 11,22% l’an passé). Pour Livres Hebdo et Ipsos, il est le 4ème plus important éditeur de bandes dessinées francophones en chiffre d’affaires, alors que pour GfK, l’institut d’informations marketing concurrent, il monte sur la 3ème place du podium !

Ils sont talonnés, autant sur le plan économique qu’en production par le groupe MC Productions (Soleil). Ce dernier (qui s’est retiré du capital de la SEEBD, avant que ce groupement spécialisé dans la traduction de manhwas ne dépose le bilan, ayant quand même sorti 50 albums dans l’année) a publié 347 titres sous ses filiales Soleil, Quadrant Solaire, Soleil Manga, Fusion Comics et Iku comics – soit 7,31% de la production (contre 428 et 9,92% en 2007).

Dans le quintet de tête, il faut bien sûr compter sur les filiales Casterman, Fluide Glacial, Jungle et Librio du groupe Flammarion (qui dépend du groupe de communication italien RCS), lesquelles ont publié 323 titres – soit 6,8% (contre 316 et 7,33% en 2007) – et revendiquent, selon les sources, la 3ème ou la 4ème place du secteur !

- Panini qui a publié 279 titres sous ses labels Manga et Comics – soit 5,88% (contre 250 et 5,8% en 2007).
- Bamboo qui fête ses 10 ans avec 129 titres grand public – soit 2,72% (contre 123 et 2,85% en 2007).

Loin derrière ces 9 ténors du marché, notons quelques outsiders comme les éditeurs de mangas Asuka (124 titres – soit 2,61%, contre 55 et 1,27% en 2007), Taïfu (72 titres – soit 1,52%, contre 92 et 2,13% en 2007) ou Kurokawa, la filiale du groupe Éditis avec 68 titres – soit 1,43% (61 et 1,4% en 2007), le groupe Tournon (Carabas, Semic et Kami) avec 100 titres – soit 2,11% (contre 125 titres et 2,9% en 2007) (..)


Notons que du côté des mangas, la situation est pratiquement toujours la même : seules 9 séries (publiées chez 5 éditeurs, seulement) assurent plus de la moitié des ventes dans leur globalité, Naruto en tête avec son tirage de 220.000 ex. pour chaque nouveau tome (et il y en a eu 6 en 2008) ! Bien loin derrière, les autres leaders du secteur sont Death Note (5 volumes à 180.000 ex.), Fullmetal Alchemist (4 volumes à 90.000 ex.), One Piece (6 volumes à 72.800 ex.), Fairy Tail (3 volumes de ce nouveau "blockbuster" ont été tirés à 70.000 ex.), Samurai Deeper Kyo (2 volumes à 66.000 ex.), Nana (2 volumes à 60.000 ex.), Bleach (5 volumes à 49.500 ex.), sans oublier Dragon Ball Z dont le manga adapté de l’anime (5 volumes à 70.300 ex.) cartonne toujours !

On peut rétorquer que la plupart de ces chiffres de tirages sont revus à la baisse depuis quelques années, mais il faut savoir que réimprimer coûte beaucoup moins cher qu’autrefois et que les éditeurs, prudents, ajustent au mieux leurs frais. Ceci afin de ne pas trop subir les conséquences du taux des retours qui continuent d’augmenter vu l’inflation de la production ; surtout que l’impact est beaucoup plus lourd qu’en littérature générale, du fait de l’investissement initial plus élevé (couverture cartonnée, pages en couleurs…). Le tirage moyen baisse donc encore et l'écart se creuse toujours entre les "best-sellers" et le peloton des ventes moyennes : lequel doit se situer autour des 6000 exemplaires, en tenant compte l’édition bandes dessinées dans son ensemble.


1856 bandes dessinées étrangères (dont 1411 venues d’Asie et 292 des États-Unis) ont été traduites : un bond de 69 titres (soit 3,86%) contre un recul de 0,67% en 2007.

Malgré l’effondrement des traductions de manhwas coréens (98 en 2008 pour 130 en 2007), des manhuas chinois (23 pour 74 en 2007), et des ouvrages venus de Taïwan ou d’Inde (2 pour 15 en 2007), la bande dessinée asiatique continue d’alimenter la production avec 1411 albums (contre 1371 en 2007), ce qui correspond à 479 séries traduites (contre 528 en 2007), grâce aux 1288 mangas japonais publiés en français (contre 1152 en 2007).

La fidélité et l’implication d’un lectorat différent (plus jeune et plus féminin), lequel apprécie leur moindre coût, la succession des nouveaux tomes dans des délais très rapprochés et un contenu proche de leurs préoccupations, a permis la progression du manga sur le territoire francophone européen, sans que cela se fasse au détriment des autres segments du marché. Depuis 2005, 1 album vendu sur 3 est d’origine asiatique : mais seuls 9 shônen (séries destinées principalement aux jeunes garçons) ou shôjo (pour les jeunes filles) assurent 50% des ventes du secteur.

Et seulement 7 éditeurs tiennent l’essentiel de l’économie des mangas traduits en français : en terme de parts de marché, Kana est en tête (151 volumes publiés en 2008), suivi par Glénat Mangas (137 volumes), puis, plus loin derrière, par Delcourt (et ses filiales Akata – 94 volumes – et Tonkam – 152 volumes) et par Pika (155 volumes) ; ensuite, le secteur est détenu, dans une moindre mesure, par Kurokawa (68 volumes), Panini Manga (123 albums) et Soleil Mangas (81 volumes). Ces 7 entreprises ayant réalisé plus de 90% des ventes de mangas en volume, elles sont bien armées pour résister à une éventuelle arrivée des éditeurs japonais qui, à la recherche d’un relais de croissance de plus en plus difficile à trouver sur leur marché intérieur, pourraient publier eux-mêmes leurs séries en Europe.

En conséquence, le nombre d’éditeurs francophones publiant des bandes dessinées asiatiques se réduit : on en compte plus que 36 (au lieu de 40 en 2007). Parmi eux, citons les outsiders que sont Asuka, Bamboo (Doki-Doki), Carabas (Kami), Casterman (Sakka, Hanguk et Hua Shu), Clair de lune (Gakko), 12 bis, Ki-oon, Le Lézard noir, Milan (Kankô et Dragons) et Taïfu, ou encore Paquet et Samji (repreneur de certaines séries éditées par la SEEBD) pour la bande dessinée coréenne, et Akileos, Drakosia, Ohayo, Toki et Xiao Pan pour la chinoise. Sans oublier certains généralistes qui se spécialisent plutôt dans le seinen (bande dessinée pour jeunes adultes) à l’instar de Cambourakis, Cornélius, La 5ème Couche, Imho, Vertige Graphic ou Flblb récompensé par le Prix Asie-ACBD 2008 décerné au Visiteur du Sud de Oh Yeong Jin pendant le festival Japan Expo.

Nous assistons aussi à une diminution des rééditions des bandes dessinées venues d’Extrême-Orient (92 au lieu de 138 en 2007) et de ce que certains appellent le "franga", le manga européen ou le "global manga" : c'est-à-dire les tentatives réalisées par les auteurs européens de s’inspirer ouvertement des différents codes graphiques et narratifs des mangas. Les pourtant très dynamiques éditeurs que sont Akiléos, Ankama, Carabas, Delcourt, 12 bis, Les Humanoïdes associés, Paquet, Pika ou Soleil n’en ont publié que 42 (contre 57, l’an passé). Cependant, les styles des jeunes auteurs sont toujours très influencés par les codes graphiques et narratifs des mangas et de plus en plus de graphistes asiatiques illustrent des scénarios d’auteurs francophones.

La passion de ce public assez monomaniaque pour les mangas (anime ou livres) se développe aussi sur Internet (animeland.com, animint.com, mangagate.com, manga-news.com, manga-sanctuary.com, mangaverse.net, mangavore.net, the-ryoweb.com, webotaku.com…) ou dans les 6 essais qui leur ont été consacrés en 2008.

Si on note un timide retour de la bande dessinée érotique grâce à quelques éditeurs (Dynamite, Tabou, Le Gang ou encore Pika avec le didactique manga Step up, Love Story de Katsu Aki et Delcourt avec l’imposant comics Filles perdues de Melinda Gebbie et Alan Moore) qui tentent de faire rejaillir la source affaiblie par l’Internet et la censure, le phénomène remarquable de 2008 est le développement marqué de la bande dessinée francophone à destination des filles ! 


- Ankama, société qui a explosé grâce à leur jeu vidéo en ligne, entre dans le capital de la chaîne de télévision Nolife (orientée jeux vidéo et culture japonaise) et signe avec Microsoft, tout en diversifiant sa production.
- Delcourt a acquis une participation majoritaire dans le capital de la société RG Square (spécialisée dans les films et séries d’animation japonais) pour mettre en commun leurs expériences d’édition et en audiovisuel.

La presse de bande dessinée semble souffrir de la concurrence d’Internet (gratuité et nouveaux terrains créatifs), en dépit de la présence de 71 revues spécialisées.

En ce qui concerne les revues sur les mangas (AnimeLand, Coyote, Dofus Mag, Geisha, Hard Manga, Japaneko, Made in Japan, Manga Kids, Maniak !, Planet Manga, Score Asia…), les tirages sont parfois plus importants, mais ces magazines se consacrent bien plus souvent à l’anime et aux jeux qu’à la bande dessinée.


Aujourd’hui, le 9e art a donc acquis une véritable reconnaissance culturelle : d’ailleurs, 1 livre acheté sur 8 et 1 ouvrage emprunté sur 5 dans les bibliothèques est une bande dessinée !

Gilles RATIER
Secrétaire général de l’ACBD

Le bilan complet est disponible ici : http://www.acbd.fr/bilan-2008.html






© Gilles Ratier, secrétaire général de l'ACBD (Association des Critiques et journalistes de Bande Dessinée).

commentaires

Blood

De Blood [2541 Pts], le 06 Janvier 2009 à 11h03

Passionnant, ce bilan ! Il permet de relativiser certaines idées reçues, et d'en conforter d'autres (9 séries pour plus de 50 % des ventes !).

Myth Cloth

De Myth Cloth, le 05 Janvier 2009 à 22h51

Ce serait en effet interessant que des éditeurs Japonais éditent directement leur manga chez nous afin de diminuer les délais de parutions ^^

Imaginez le jour ou la sortie d'un Manga se ferait quasiment en même temps en France et au Japon ?

On en voit déjà les prémisses avec la section FR du site internet JUMPLAND et des rumeurs de parution de magazine de prépublication du JUMP en France alors pourquoi pas ^^

Et bé elle est loin l'époque du ClubDo et des Manga publié au compte goutte, on a fait du chemin depuis quand même !!! O-O

Raitei_

De Raitei_, le 05 Janvier 2009 à 22h16

je cite ", elles sont bien armées pour résister à une éventuelle arrivée des éditeurs japonais qui, à la recherche d’un relais de croissance de plus en plus difficile à trouver sur leur marché intérieur, pourraient publier eux-mêmes leurs séries en Europe."

Ca veut dire qu"un éditeur japonais pourrait éditer un de ses mangas directement en france ?
Par éxemple si Kodansha souhaite publier un de ses mangas en france, il le ferait par l'intérmédiaire de Kodansha France ?

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