Sakura-Gari - Actualité manga

Critique de la série manga

Publiée le Lundi, 24 Août 2015


Yuu Watase n’est pas une inconnue dans le milieu du shojo. On peut même dire qu’elle est efficacement connue par nombre de lectrices en quête de romantisme. D’ordinaire, ses histoires sont sucrées même dans le drame ou dans le fantastique, la fin est toujours heureuse et les personnages progressent toujours dans leur amour pur qui dépasse les limites de leur destinée. Sakura-gari, c’est aussi un manga de Yuu Watase. Et pourtant ! A la lecture, même du premier tome, on pourra aisément constater qu’il n’y a aucun mais alors aucun point commun avec les autres mangas de l’auteur. Ici, pas de narration fleur bleue. Ici, pas de douces mièvreries et de promesses d’amour éternel. On plonge au contraire bien vite dans la violence, avec l’histoire d’un jeune étudiant qui se fait engager comme domestique chez un richard de la ville, le tout dans un contexte d’ancien Japon un peu dépaysant. Là où le yutaka est habit standard et où seul Monsieur Soma porte le costard, en bon occidental qu’il est. Masataka va peu à peu découvrir des sentiments interdis, des tabous comme il n’en avait jamais imaginé. Un monde nouveau, celui de l’aristocratie décadente, d’un maitre despotique qui fera de son mieux pour le dominer, le faire chanter bref le posséder.

Si le ton est dur et les manières quelques peu violentes avec des abus sexuels qui ne sont pas chose rare dans le manga, avec des personnages tous plus sadiques les uns que les autres, on y découvre un trop plein de sentiments mal exprimés. Soma est rempli de tendresse, de culpabilité et de peur qu’il ne sait pas exprimer autrement qu’en forçant les plus faibles et en s’offrant aux plus forts qui peuvent lui rapporter quelque chose. Comme il l’a toujours fait, et ce depuis l’arrivée d’un étudiant en médecine dans sa maison familiale, à l’époque de la mort mystérieuse de sa belle mère. C’est la maladresse des émotions qui prédomine dans le récit, et Masataka va devoir s’armer de beaucoup de patience, de compréhension et de magnanimité pour effacer la violence de son maitre teintée d’ironie. Passer de la haine à la volonté de le voir sourire, c’est une évolution magistrale qui nous donne à tous une belle leçon sur les sentiments qui ne sont pas toujours comme on croit les voir. Loin des chemins préétablis de l’amour, l’auteur impose son histoire avec ses rebondissements et son cheminement très particulier, qui fait naître les émotions là où on ne les attend pas forcément. Véritable chef d’œuvre, ode à l’amour mais surtout bien plus profond qu’un simple yaoi, Sakura-gari est une perle, un extra-terrestre dans l’univers de la mangaka. Un inattendu bienvenu qui nous réconcilie avec les capacités de Watase en manière de renouvellement et d’expérimentations. Sa petite série de trois volumes ne ressemble à rien d’autre, et tout est extrêmement dosé et équilibré dans la narration parfaite qu’elle met en place.

En ébauchant une famille complètement folle, Yuu Watase met en exergue les vices humains, les tabous de l’époque et les seuls moyens pour Soma de démontrer son affection dans une société qui considère l’homosexualité comme un passe temps marginal plutôt qu’une réelle possibilité de tendresse. De plus, le trait de l’auteur reste tout aussi beau voire plus qu’à ce qu’on peut lui connaitre, l’édition étant pour beaucoup dans le contraste et la netteté des traits. Si Soma se montre très efféminé et délicat, on ne retrouve les autres héros de Watase que dans son style physique et pas du tout dans son caractère alors que la mangaka a la fâcheuse habitude de réutiliser ses personnages, personnalités comprises, d’un titre à l’autre. De plus, Masataka a un trait que l’on ne connait pas dans le palmarès de Watase, et se distingue agréablement grâce à son air un peu juvénile et naïf, un petit côté poupon et pourtant assuré qui offre une dimension assez particulière. Enfin, les décors sont magnifiquement soignés avec certaines scènes à couper le souffle notamment dans le dernier tome. Une narration construire, un rythme suivi et soutenu, une fin rocambolesque mais émouvante à souhait et un graphisme splendide … Il ne reste plus qu’une édition de qualité, au prix élevé mais largement justifié devant de si beaux opus quoiqu’un peu difficiles à prendre en main. Dommage, ceci-dit, que le soin accordé ne soit pas le même que pour un tome d’Angel Sanctuary Deluxe basé pourtant sur le même principe. Les pages sont un peu trop blanches (donc transparentes car pas assez épaisses) et la traduction parfois hasardeuse à suivre vers la fin de la série, même si le texte original doit y être pour quelque chose … En tous les cas, Sakura-gari est une excellente acquisition à ne surtout pas regretter.


NiDNiM


Note de la rédaction

Evolution des notes des volumes selon les chroniques:

17.00,18.00,19.00

Les critiques des volumes de la série