Underwater - Le village immergé Vol.1 - Actualité manga
Underwater - Le village immergé Vol.1 - Manga

Underwater - Le village immergé Vol.1 : Critiques

Suiiki

Critique du volume manga

Publiée le Mardi, 26 Janvier 2016

Critique 1


Ki-oon, bien qu'étant un éditeur ayant un catalogue de plus en plus fourni, trie les titres qu'il propose aux lecteurs avec soin, et ce nouveau titre qui sort dans sa sublime collection « Latitudes », ne déroge pas à la règle !
Le simple fait d'observer la couverture, qui bénéficie d'un remarquable travail de l'éditeur, nous laisse à penser que nous allons pouvoir profiter d'une belle histoire, à la fois douce et reposante, un magnifique appel à venir découvrir son contenu !

L'auteure n'est pas forcément inconnue des lecteurs, bien que peu prolifique : elle est celle qui nous a permis de découvrir Mushishi, titre déjà envoûtant et empli de magie. A partir de là, on s'attend forcément à quelque chose dans la même veine, dans le même esprit...nous ne serons pas déçus !
Deux tomes seulement suffiront pour s’imprégner de cette belle histoire, courte, mais forte, véhiculant de nombreuses émotions !

Le Japon connaît une période de sécheresse importante, à tel point que la consommation d'eau est contrôlée. Pour Chinami qui est inscrite au club de natation, c'est un calvaire ! La piscine étant vide, pas moyen de s’entraîner correctement. Elle doit se contenter de faire des tours de terrain avec ses camarades sous la surveillance de leur entraîneur. Mais par une telle chaleur, un tel effort provoque un malaise chez la jeune fille qui perd conscience. Lorsqu'elle se réveille, elle n'est plus sur le terrain de course, mais au bord d'un lac à l'eau cristalline. La tentation est trop forte, elle plonge...pour se réveiller sous la surveillance de ses camarades et de son entraîneur, inquiets pour elle… Sans doute était-ce un rêve.
Pourtant lorsqu'elle se rendort, elle retourne au bord de ce lac… Elle y fait la connaissance d'un jeune garçon prénommé Sumio qui sort de ce même lac. Il va l'emmener chez lui pour qu'elle fasse la connaissance de son père, un vieil homme du nom de Tatsumi. Après quelques allers-retours entre les deux mondes, le sien, son monde réel, et le monde de Sumio, sans doute un monde onirique, un monde dans lequel la pluie ne cesse jamais, elle va se rendre compte que le garçon et son père sont les derniers habitants du paisible village dans lequel ils se trouvent. Et pourtant des voix se font entendre...sans doute des fantômes.
Chinami va raconter ses étranges aventures à sa mère et à sa grand-mère, ce qui va provoquer des réactions étranges chez ces deux dernières… Elles semblent avoir connu le village ainsi que leurs deux habitants, mais à une autre époque !

Impossible d'en dire davantage sans réduire à néant les efforts de l'auteure pour nous plonger dans son univers onirique et fantasmatique. En effet cette histoire n'est au final pas que celle de Chinami, ce n'est d'ailleurs pas la sienne, elle ne sera au final qu'un élément déclencheur pour nous plonger dans le passé de ce fameux mystérieux village qui a réellement existé, mais dans un autre temps, un autre lieu…
Le personnage principal de ce récit n'est ni Chinami, ni sa mère, sa grand-mère, Sumio ou Tatsumi, le véritable rassembleur de tous ces personnages c'est le village, au centre de toutes les préoccupations, de tous les souvenirs, de tous les questionnements. Ce même village qui est porteur de légendes, celles du dieu Dragon qui protège le village et sa descendance, mais qui peut aussi le condamner à un fléau contre lequel il n'y a rien à faire.
Ce sont plusieurs générations que ce village va raconter, comment ils se sont aimés, comment ils se sont séparés, leurs bonheurs, leurs souffrances...tout cela le village l'a vu, l'a vécu, et au centre de ce village, le catalyseur de tout ce qui anime le récit : la cascade que voit Chinami lorsqu'elle apparaît pour la première fois dans ce monde, cette même cascade dont va sortir Sumio, cette même cascade qui fascine et qui effraie…
Et c'est notamment ce sentiment ambivalent que l'auteure va s'efforcer de raconter au cours de son récit, dans lequel chaque chapitre apporte un regard différent, un éclaircissement sur l'ensemble, et ce peu importe si la logique temporelle n'est pas respectée. On commence à notre époque (du moins on le suppose), pour enchaîner sur une époque plus lointaine, celle de la Seconde Guerre mondiale avant de revenir quelques années en arrière par rapport au présent… Cela peut sembler confus, pourtant tout est lié, tout s'imbrique.

Bien entendu l'élément au centre du récit, outre le village, c'est, comme le titre le laisse imaginer, l'eau ! Dans le monde réel, elle vient à manquer, rendant la vie pénible, dans le monde onirique, elle est omniprésente, elle tombe sans arrêt, et pourtant, si ce monde se présente comme plus paisible, il est dépeuplé...l'eau apporte la quiétude, mais pas la vie.
Dans le récit du passé elle est également au centre de toutes les préoccupations, et là encore bien qu'apaisante elle est source de mort et de malheur… Et pourtant toute la beauté du récit est là !

Parce que même si le choix de narration de l'auteure peut s'avérer confus (les changements temporels se font parfois sans transition visible, on peut alors mettre un peu de temps à savoir qui sont les personnages présents et quels liens ils ont avec ceux déjà apparus), ce titre est véritablement beau, dans le sens le plus pur du terme.
Il s'en dégage une ambiance apaisante, douce, et surtout envoûtante. Le contraste entre les deux mondes est d'ailleurs flagrant. Le monde réel est étouffant et surpeuplé, alors que le monde onirique est calme et tranquille. Et c'est clairement ce qui domine sur l'ensemble du volume. Mais il se montre également triste, et ce à plusieurs reprises, et là encore l'eau est partout, dans le décor et dans les larmes.

Le travail de l'éditeur est une nouvelle fois de grande qualité, rien que le travail sur la couverture est remarquable, avec ce relief agréable au toucher et renforçant le sentiment d'immersion...dans le récit, mais également sous l'eau.
L'adaptation est de qualité et on apprécie les traductions sans failles.

Bien qu'un peu confus, ce premier tome est absolument renversant et on plonge dans ce récit les yeux fermés pour baigner dans une ambiance apaisante ! 


Critique 2


Depuis la fin du superbe Mushishi en 2009, nous avions un peu perdu de vue Yûki Urushibara. Il faut dire que la mangaka n'est pas parmi les plus prolifiques : depuis la conclusion de Mushishi en 2008 au Japon, et avant le retour de sa série phare en 2014 via de nouveaux récits, elle n'a signé qu'une seule autre série, à savoir Suiiki, un titre en deux tomes prépubliés de 2009 à 2011, et que les éditions Ki-oon nous proposent ici de découvrir dans leur collection Latitudes sous le nom Underwater - Le Village immergé !

Un retour de l'auteure en France que l'on a longtemps espéré, et qui attire l'oeil dès le regard posé sur l'édition : grand format, couverture en embossage (reliefs/creux) dont les formes rappellent de l'eau, couleurs douces et hypnotiques, premières pages en couleur saisissantes... Couplés à une excellente traduction et à une très bonne qualité d'impression, il y a tout pour que l'on se laisse prendre par le nouveau récit paisible et poétique de l'auteure...

Ce récit, c'est en premier lieu celui de Chinami. Dans un Japon en proie à de très strictes restrictions d'eau, l'athlétique adolescente s'évanouit pendant un entraînement. Quand elle se réveille, elle semble néanmoins très loin de chez elle, sur les berges d'une rivière à l'eau très pure et attirante. Pour elle qui a à peine le droit de prendre des bains à cause des restrictions d'eau, ce lieu est aussi étrange que fascinant, et il est trop tentant de se baigner dans l'eau cristalline qui l'entoure. Mais une interrogation est forcément en elle : que fait-elle là ? S'agit-il d'un rêve ? Elle n'a pas trop le temps de se questionner, car son monde réel et contemporain finit par la rappeler.
Mais Chinami aura rapidement la sensation voire la confirmation qu'il ne s'agit pas d'un simple rêve, car dès que ses yeux se ferment, la voici replongée dans ce cadre naturel idyllique, dont elle va pouvoir découvrir toutes les richesses. En parcourant les lieux, elle finit par tomber sur un petit village, qui semble avoir été totalement déserté, sauf par deux personnes : Sumio, un mystérieux garçon de son âge, et un vieil homme du nom de Tatsumi avec lequel il vit. Elle prend contact avec, tout en se demandant toujours où elle est, et qui ces deux garçons peuvent bien être.
Mais son étrange et fascinante expérience de cet "autre monde" n'est que le point de départ de tout. Car en évoquant son rêve à ses parents et à sa grand-mère, Chinami va réveiller en eux les souvenirs secrets du passé...

Il paraît difficile d'en raconter plus sur l'histoire sans en dire trop. Car à partir de la "visite" de Chinami dans ce village, et de sa rencontre avec Sumio et Tatsumi, Urushibara va développer un récit où la découverte captivante de ce cadre va laisser place à une histoire familiale ancestrale aux élans dramatiques, où toutes les générations vont s'entrecroiser. Personnages du présent et du passé se mêlent, en même temps qu'époque moderne se mêle au lieu qui semble hors du temps, que le rêve se mêle à la réalité, et que le surnaturel fascinant de ce lieu et de mythes comme le dragon Ryujin se mêle au dur réalisme qui attend le village. Et la mangaka mène à merveille sa barque, tant tout s'entrecroise sans jamais choquer, tant les différentes facettes de son oeuvre sont bien intégrées pour narrer une histoire qui laisse difficilement de marbre.

Il faut dire de Yûki Urushibara qu'elle a sa patte visuelle pour elle. Déjà fascinante dans Mushishi, elle l'est à nouveau ici. Son trait fin, ses nuances de gris, son utilisation intelligente des trames, son souci du détail sur les décors sont autant d'éléments qui accrochent le lecteur pour mieux le plonger à la découverte de ce village, de son environnement, et de son histoire. On retrouve le goût de l'auteure pour les détails à l'atmosphère à la fois mystérieuse et paisible, voire relaxante, comme les dessins de l'herbe ou des feuilles bruissant au gré du vent, de l'eau de la rivière et de la cascade qui attirent irrémédiablement, de ce village typique avec son vieux pont... Les lieux emblématiques, comme cette cascade qui semble cacher bien des secrets et des légendes, ou ce vieux pont, ressortent parfaitement et semblent constamment attirer les personnages et les lecteurs.
Exactement comme dans Mushishi, Urushibara se fait presque naturaliste dans sa manière dé dépeindre tout l'univers qui entoure ses personnages, et dans sa façon dont ce cadre naturel possède une influence forte sur les hommes qu'il accueille. Cela rappelle notamment les oeuvres de Daisuke Igarashi, dont Urushibara semble avoir été très imprégnée.
Un élément naturel, plus que tous les autres, témoigne parfaitement de cette impression : l'eau, évidemment. A une époque où notre héroïne connaît de fortes restrictions d'eau au point de ne pas pouvoir prendre de bain comme elle le veut, son arrivée au bord de la rivière est salvatrice et nous rappelle à quel point cette eau a de la valeur pour la vie. L'eau sera ensuite omniprésente, notamment via la cascade, théâtre de nombre d'événements. Même bien qu'elle soit source de vie, cette eau peut être aussi source de disparition, que ce soit concernant les hommes, ou concernant le village lui-même...

En somme, le retour d'Urushibara dans nos contrées ne déçoit aucunement et captive dès les premières pages. L'auteure écoule son récit avec maestria, nous invitant à y plonger au plus profond. Laissez-vous donc immerger, vous ne devriez pas le regretter.


Critique 2 : L'avis du chroniqueur
Koiwai

17.5 20
Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Erkael
17 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs