The Summer Hikaru Died Vol.1 - Actualité manga
The Summer Hikaru Died Vol.1 - Manga

The Summer Hikaru Died Vol.1 : Critiques

Hikaru ga Shinda Natsu

Critique du volume manga

Publiée le Mercredi, 11 Octobre 2023

The Summer Hikaru Died est sans doute la grosse nouveauté des éditions Pika pour la dernière partie de cette année 2023. De son nom original Hikaru ga Shinda Natsu (dont le titre anglais de l'édition française est une traduction littérale), ce manga entremêlant surnaturel, horreur, mystère et drame fut annoncé dans notre pays en grandes pompes dès le mois de septembre 2022, et n'a cessé d'entretenir notre intérêt au fil de ces derniers mois, que ce soit en s'affichant dans le top 10 des ventes Oricon au Japon à la sortie de son 3e tome, ou en finissant à la première place du classement du manga pour garçons au célèbre prix Kono Manga Ga Sugoi de cette année. Pour entretenir de plus belle l'attente dans notre pays, Pika a proposé, à partir de juillet dernier, une avant-première numérique chapitre par chapitre du premier volume. Et à présent, voici que ce tome 1 débarque enfin en version papier en ce mois d'octobre !

Cette oeuvre est la toute première série de Mokumokuren, un artiste passionné, entre autres, par l'horreur japonaise à base d'esprits, son pseudonyme étant d'ailleurs une référence directe à un yôkai. A l'origine, cet auteur ne se destinait pas du tout à une carrière de mangaka: dessiner était pour lui un simple passe-temps, du moins jusqu'à ce qu'il commence à poster sur twitter ses dessins de ce qui allait devenir plus tard The Summer Hikaru Died. Il fut alors très vite repéré par les éditions Kadokawa grâce à son style travaillé, ce qui lui permit ensuite de véritablement lancer sa première série sur le site Young Ace Up à partir d'août 2021, celle-ci se poursuivant au rythme d'un chapitre par mois, en comptant actuellement 3 tomes. Juste avant de se lancer dans cette série, Mokumokuren eut l'occasion de publier dans le magazine Comic Gene de l'éditeur Media Factory (devenu une marque du groupe Kadokawa il y a dix ans) l'histoire courte "Period", qui constitue donc ses vrais débuts en tant que mangaka professionnel.

La série démarre sur une scène quasiment anodine, comme il pourrait y en avoir partout. Alors que l'été bat son plein sur leur village de campagne isolé et entouré par la forêt, l'adolescent Yoshiki et son précieux ami d'enfance Hikaru savourent une glace tout juste achetée à la supérette, tout en discutant avec insouciance. Le fait que Hikaru dise "tortue" au lieu de "torture" au fil de la discussion dès la première page pourrait n'être qu'une maladresse totalement anodine, mais en réalité elle prépare déjà à la triste et inquiétante vérité que Yoshiki affirme juste après: Hikaru n'est plus Hikaru. Quelque chose l'a remplacé. En effet, six mois plus tôt, Hikaru est resté porté disparu pendant une semaine alors qu'il était parti dans la montagne, avant de revenir comme si de rien n'était. Mais depuis, Yoshiki, qui connaît son ami d'enfance par coeur, a eu tout le temps de constater que celui-ci n'est plus le même. Le "faux" Hikaru ne s'en cache alors plus: il est un être qui s'est emparé du corps du jeune garçon alors qu'il était sur le point de mourir, pour venir vivre parmi les humains. Qu'est exactement cette chose qui a remplacé son ami et qui menace même de devoir le tuer si jamais il révèle sa vraie nature aux autres ? Yoshiki s'interroge forcément, mais préfère essayer autant que possible de faire comme si de rien n'était: plutôt que de risquer d'être définitivement séparé de son ami le plus cher, il préfère poursuivre son quotidien auprès de cet être à l’image parfaite de Hikaru. Mais combien de temps cela pourra-t-il durer, alors que d'étranges événements commencent à frapper le village ?

Le moins que l'on puisse dire, c'est que Mokumokuren prend bien soin d'installer toute une ambiance dès les premières pages, ne serait-ce qu'en nous faisant pleinement ressentir l'atmosphère à la fois agréable et suffocante de l'été, cette saison estivale qui est au coeur du récit jusqu'à se retrouver dans le titre de l'oeuvre: le chant quasiment permanent des cigales via les onomatopées, les glaces, les rafraichissantes pastèques, les vêtements légers, les tournesols... sont autant de détails nous imprégnant facilement.

Mais le côté à la fois agréable et suffocant vient aussi, bien sûr, de l'étrangeté qui est désormais celle de Hikaru, si tant est que l'on puisse encore vraiment l'appeler ainsi. Des bons moments passés ensemble, les deux garçons en vivent encore beaucoup, à tel point qu'une vraie bromance a lieu entre eux: Yoshiki ne s'imagine pas séparé de Hikaru, l'être qui a remplacé son ami le protège plus d'une fois d'événements inquiétants, des petits souvenirs insouciants ne cessent de parsemer le récit, on sent que les deux adolescents se connaissent par coeur, jusqu'à être très familiers l'un envers l'autre, se taquiner et faire volontiers dans les sous-entendus... L'auteur fait tout pour nous faire ressentir une relation qui dépasse l'amitié ou l'amour, qui n'est aucun de ces deux sentiments-là, et sur laquelle on peut difficilement poser une étiquette dessus. Et c'est précisément ce qui rend difficile et dramatique la situation actuelle, une situation où Hikaru est en réalité mort et où Yoshiki semble alors se raccrocher au faux Hikaru pour, sûrement fuir une réalité qu'il ne peut pas accepter. En filigranes, on sent alors déjà s'esquisser des thématiques sérieuses autour du deuil voire même de l'identité, puisque Yoshiki se raccroche à un Hikaru qui n'est plus vraiment Hikaru.

Enfin, bien sûr, cette situation amène aussi une toute autre ambiance qui se marie parfaitement au reste: si l'oeuvre est généralement qualifiée de manga d'horreur, ce n'est pas pour rien, tant la situation prête forcément à l'inquiétude. Alors qu'on ne sait pas ce qu'est exactement le faux Hikaru (et que l'inconnu surnaturel suscite souvent une forme d'angoisse, naturellement), à côté de ça des événements bizarres commencent à avoir lieu: un chat habituellement docile qui se montre effrayé par Hikaru, une vieille dame retrouvée morte dans des conditions impensables après avoir eu des paroles virulentes envers Hikaru la veille, une femme au foyer mettant en garde Yoshiki... sans oublier le pur travail d'atmosphère, via des détails comme le village isolé dans une campagne reculée et entouré par une dense forêt, les petits comportements insolites, l'inquiétude transparaissant chez les personnages, la noirceur de la forêt, la forme qui se rapproche peu à peu entre les arbres, une montagne interdite d'accès... De l'horreur à la japonaise, préférant suggérer le malaise plutôt que de le montrer via des effets gores, et qui se révèle très efficace ici, sous le dessin d'un auteur jouant beaucoup sur des angles de vue millimétrés et cinématographiques, un encrage très noir quand il le faut, et des décors et designs se voulant réalistes. N'oublions pas non plus quelques subtilité comme la métaphore autour des libellules, qui renvoie directement au statut de Hikaru : elles se ressemblent mais ne sont pas pareilles...

A l'arrivée, il semble difficile de ne pas se laisser happer par l'ambiance particulièrement réussie de ce début de série. Entre horreur et drame, Mokumokuren, en s'appuyant sur un travail narratif et visuel très appliqué, installe toutes les ficelles d'un récit efficace et qui devrait aborder des sujets sérieux derrière l'angoisse qui s'installe insidieusement. Il n'y a plus qu'à se laisser happer, imprégner, en attendant une suite qui, fort logiquement, devrait aller crescendo.

En ce qui concerne l'édition française, on est sur une copie tout à fait honorable. Derrière la jaquette minimaliste très proche de l'originale japonaise et dotée d'un vernis sélectif, on trouve trois premières pages en couleurs sur papier glacé, puis une qualité d'impression honorable sur un papier suffisamment épais et souple. Le lettrage est propre, tandis que la traduction de Manon Debienne et Sayaka Okada se révèle claire et efficace.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
16.25 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs