Critique du volume manga
Publiée le Vendredi, 01 Juillet 2022
Spy x Family est assurément devenu l'un des mangas-phares de Kurokawa ces derniers temps, plus encore après la récente diffusion de la première partie de l'anime, qui a fait décoller la popularité de l'oeuvre. Il n'y a donc rien de très étonnant à voir l'éditeur tâcher de chouchouter la série de Tatsuya Endô, notamment en voulant lui dédier régulièrement des éditions collectors limitées. Ainsi, après le tome 6 qui a eu droit à une plaque en métal anecdotique et à une jaquette bonus mal fichue car gondolée (quelle drôle d'idée d'avoir fait deux jaquette distinctes au lieu d'une seule jaquette recto verso), une édition collector a priori plus consistante fut annoncée pour ce 8e volume dès le mois de mars, pour une sortie initialement prévue en mai mais ayant dû être reportée de semaine en semaine, la faute à des retards de fabrication dus à la pénurie de certains matériaux. C'est finalement en tout fin de ce mois de juin qu'est arrivé ce petit coffret, non sans susciter toujours plus d'attente suite à ses retards. Mais à l'arrivée, l'attente valait-elle le coup ?
Eh bien, pas si sûr, car une petite douche froide nous attend: le petit coffret en carton rigide a beau être très joli en étant illustré à la manière de valise de voyage aux couleurs de la série, et l'intérieur a beau avoir été pensé avec soin grâce à un encart devant maintenir précautionneusement le contenu, le fait est que la taille de l'ensemble est un peu trop petite, si bien que les ex-libris et le volume sont trop serrés, littéralement compressés dans la boîte, et donc particulièrement difficiles à retirer sans faire de petits dégâts. Pour une attente si longue, c'est vraiment ballot... Les réactions négatives n'ont pas tarder à fuser sur les réseaux sociaux de l'éditeur, qui a alors pris soin de répondre avec professionnalisme: malgré des prémaquettes reçues au bon format, la version finale de la boîte coffret est effectivement plus étroite que prévu, gênant l'extraction des ex-libris et du manga, si bien que Kurokawa s'engage à échanger les mangas abimés durant l'opération. Si vous êtes concerné(e), vous pouvez donc contacter l'éditeur en message privé sur ses réseaux sociaux pour faire votre demande.
Ce désagrément passé, on découvre tout de même, à l'intérieur du coffret, le tome bien sûr, mais aussi et surtout le principal supplément de cette édition collector, à savoir un set de 16 ex-libris détachables (ils forment un livret au départ). De dimensions 115x175mm environ, ceux-ci sont imprimés sur un papier cartonné épais suffisamment qualitatif pour permettre une qualité d'impression convaincante, et proposent une sélection d'illustrations couleurs tantôt "inédites", tantôt tirées des jaquettes de certains tomes, tantôt issues de certaines pages couleurs des volumes.
A la fin du volume précédent, nous laissions la famille Forger sur le point de vivre un bel événement, à savoir une croisière sur un paquebot de luxe gagnée par Anya. La petite fille, accompagnée de son "père" Loid, est forcément excitée par ce qui s'apparente à une vraie petite aventure pour elle ! Mais et Yor dans tout ça, pourquoi ne les accompagne-t-elle pas ? Eh bien, sous couvert de devoir accompagner un client sur le paquebot dans le cadre de son travail, la tueuse "Princesse Ibara" est en réalité en mission secrète, où elle doit protéger l'épouse d'un mafieux assassiné face aux possibles attaques des assassins engagés par l'homme qui a tué son mari. Yor semble d'autant plus déterminée à protéger cette femme qu'elle a avec elle son tout jeune enfant, qu'elle souhaite plus que tout protéger. Mais la mission s'annonce périlleuse, non seulement car les ennemis sont nombreux, sont bien entraînés et ont un informateur directement sur le paquebot, mais aussi parce que la jeune femme ne doit pas être démasquée par Loid et par Anya, en plus de voir éviter des blessures qui attireraient la suspicion et pourraient alors sceller son destin en tant que Madame Forger...
Comme espéré, Tatsuya Endô nous ressert enfin un arc un peu plus long, puisqu'il s'étire sur l'ensemble de ce volume et qu'il devrait visiblement s'achever au début du prochain tome. Ici, la recette est assez simple et s'inscrit dans la grande tradition des comédies d'espionnage, avec une Yor présente sur le même bateau que Loid et qu'Anya et qui doit donc accomplir sa périlleuse mission de protection en devant éviter d'être démasquée par sa fausse famille... Mais ce qu'elle ne sait évidemment pas, c'est qu'Anya, avec son pouvoir de télépathie, est parfaitement au courant de ce qu'elle doit accomplir (même si elle analyse les choses telle la petite fille qu'elle est), et qu'elle entreprend donc elle aussi d'éloigner Loid de sa femme quand elle est en pleine action. Cela donne des situations assez attendues mais franchement rocambolesques, et d'autant plus efficaces que les rebondissements, les menaces, les confrontations s'enchaînent à un rythme toujours soutenu et fluide à la fois. Ajoutons à tout ça les différentes réactions d'Anya (sa joie enfantine de pouvoir profiter d'une croisière et ses coups de stress ou de mauvaise humeur, entre autres), les difficultés de Loid pour oublier un moment son statut d'espion et pour tenter de satisfaire sa fille qu'il peine parfois à comprendre, et le côté résolument badasse et parfois improbable des combats de Princesse Ibara, et il y a alors facilement de quoi s'amuser, une nouvelle fois.
Et pourtant, comme souvent, l'auteur ne se limite pas à l'action et à l'humour, car il ne manque aucune occasion de remettre sur le devant cette notion de famille à travers ses trois personnages principaux (et bond, ne l'oublions pas, même s'il ne fait qu'une brève apparition dans ce volume). Tandis que Loid essaie de comprendre comment être une bon père en nous amusant pas mal tant il est parfois à l'ouest (et Anya ne lui facilite pas la tâche), la petite fille fait de son mieux, à son échelle, à sa manière, pour essayer de préserver au mieux la famille qu'elle s'est enfin trouvée, ce qui a de quoi toujours toucher un peu derrière l'humour. Enfin, c'est surtout Yor qui, forcément, est particulièrement sur le devant dans ce tome et qui, elle aussi, s'interroge pas mal: en voyant la femme qu'elle doit protéger ne plus penser à rien d'autre qu'à la protection de son enfant, notre tueuse commence forcément à se questionner sur ce qu'elle-même veut. Pourquoi continue-t-elle de se battre et de tuer ? Est-ce pour l'argent ? Pour protéger son pays ? Ou y a-t-il autre chose ? la réponse qui se dessine est aussi classique que jolie.
On attendra donc avec plaisir la suite et fin, dans le prochain volume visiblement, de cet arc qui constitue une étape classique du genre mais qui s'avère plutôt rondement mené sous la narration et le trait d'Endô. Entremêlant action et humour, l'auteur a surtout un don pour ne rater aucune occasion de mettre un peu plus en avant les relations familiales de ces personnages qui évoluent encore un tout petit peu, à leur rythme.