Piece Vol.1 - Manga

Piece Vol.1 : Critiques

Piece

Critique du volume manga

Publiée le Vendredi, 13 Juillet 2012

Haruka Origuchi, 19 ans, était une lycéenne discrète, qui ne cherchait pas à nouer le contact avec les autres, si bien que beaucoup la trouvaient futile, sans intérêt, et se moquaient d'elle. Mais aujourd'hui, Haruka est morte d'un cancer du sein, et ses anciens camarades sont conviés à ses funérailles. Des funérailles qui ont plus le goût de retrouvailles pour tous ces jeunes gens qui n'ont jamais pris la peine de parler à Haruka et se contrefichent à moitié de sa disparition. Mizuho Suga est dans la même position. Pourtant, quand elle se voit demander une faveur par la mère de la défunte, son petit équilibre fragile bascule. Face à une mère persuadée qu'elle était l'amie de sa fille, Mizuho accepte de rechercher l'ancien petit ami de Haruka. S'enclenche alors un parcours sinueux, à la découverte d'une fille discrète qui cachait apparemment bien des secrets. Un parcours où la jeune fille sera bientôt rejointe par Narumi et Yanai, deux autres camarades. Un parcours synonyme de remise en question pour les trois jeunes gens...

Découverte en France avec le superbe Sablier, véritable coup de coeur de la rédaction à son époque qui reste sans nul doute parmi les meilleurs shôjo parus en France, Hinako Ashihara avait démontré d'indéniables dons dans la peinture psychologique de jeunes adultes meurtris, en plein doute, ne sachant comment agir face à des douleurs aussi variées que l'amour ou la mort. Avec Piece, la mangaka semble repartir sur cette base, bien qu'elle déclare avoir choisi ici de nous faire "vibrer" plutôt que de nous faire "réfléchir". En réalité, elle parvient aisément à cumuler les deux.

Tout d'abord, de par son synopsis, Piece n'annonce rien de joyeux, et ne l'est effectivement pas. De par les thèmes abordés, on se retrouve face à un shôjo mature, qui aborde des choses complexes avec une subtilité aussi forte, voire encore plus forte que dans le Sablier. En effet, ici, l'auteure prend son temps, prend le temps de décrire la psyché de ses personnages. Alors même que l'entrée dans le vif du sujet est rapide, Hinako Ashihara parvient à dégager très vite chez chacun de ses trois personnages principaux une personnalité qui lui est propre, et qui ne cessera de se révéler un peu plus au fil de leurs pérégrinations pour percer les secrets de la défunte Haruka.
Ainsi découvre-t-on en Mizuho une jeune fille froide, distante, qui n'exprime que très peu ses sentiments et préfère rester sur la défensive, au risque de blesser ses proches, à commencer par son petit ami qui décide de la quitter. Un événement qui sera le déclencheur de sa remise en question. Séduisant et cédant à ses envies, Narumi est un personnage qui déstabilise aussi bien les acteurs de l'histoire que les lecteurs, et c'est avec impatience que l'on attend d'en découvrir plus sur lui. Quant à Yanai, tête de classe, il renferme au plus profond de lui une fierté parfois mal placée qui lui a déjà joué plus d'un tour, et l'on ne tardera pas à découvrir qu'il était un peu plus proche de Haruka qu'il ne le laissait transparaître. Et c'est avec grand intérêt qu'on les voit dévoiler sous nos yeux, petit à petit, la vie bien plus intéressante que prévue de Haruka, personnage à part entière de la série, et même personnage central, sans qui rien n'arriverait.

Un peu paumés face à leurs propres défauts, face à leurs propres doutes, les trois jeunes gens voient alors se dessiner en eux des interrogations purement humaines qui ne finiront alors plus de les nuancer de manière très réaliste. Aucun personnage n'est trop lisse ou trop manichéen, chacun profite d'ores et déjà d'un approfondissement les rendant on ne peut plus crédibles. Ici, une personne s'interroge sur sa passivité alors qu'elle aurait pu s'intéresser plus à Haruka de son vivant. Là, une autre se demande ce qu'est l'amour et si elle a déjà une seule fois déjà réellement ressenti ce sentiment. Ailleurs, on se questionne quant à sa façon d'être, et l'on cherche à évoluer, à changer, en retraçant le parcours d'une personne qui n'est plus là, comme une sorte de rédemption. A la fois un moyen d'honorer la mémoire de la défunte, et d'aller de l'avant.

Subtils, très intériorisés, les dialogues parviennent habilement à nuancer les réponses aux différents questionnements, notamment autour de l'amour et du sentiment amoureux dans ce premier volume. Comme dans le Sablier, Hinako Ashihara adopte un ton assez intimiste, très subtil, qui évite habilement les lourdeurs qu'aurait pu amener un tel sujet. La mangaka a le grand mérite de rester pudique dans le traitement de son sujet, ce qui a pour effet de renforcer l'ambiance qui s'en dégage, une ambiance tout à fait particulière, triste sans être larmoyante ou pathétique, sensible et délicate sans en faire trop, jamais malsaine ou voyeuriste.

Les choses sont donc habilement mises en place et ne demandent qu'à être approfondies après ce premier volume accrocheur. La patte fine et subtile de Hinako Ashihara n'a en rien changé depuis le Sablier, et tout laisse présager un shôjo psychologique finement ciselé et passionnant, pour peu que l'on accroche à l'ambiance particulière (qui ne conviendra clairement pas aux lectrices les plus jeunes) et au ton globalement posé.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
17 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs