Othello - Classique en manga : Critiques

Otero

Critique du volume manga

Publiée le Lundi, 27 Février 2023

Après Roméo et Juliette, Hamlet et Macbeth, la collection Les Classiques en Manga des éditions nobi nobi! a accueilli, en ce mois de février, une adaptation d'une autre pièce de théâtre célèbre de William Shakespeare : Othello, de son nom complet Othello ou le Maure de Venise. Considérée comme l'une des pièces les plus sombres du célèbre dramaturge, celle-ci s'inscrit dans la droite lignée de ses autres tragédies les plus célèbres qui ont été citées précédemment. Elle aurait été écrite en 1603, donc après Roméo et Juliette, Macbeth et Hamlet, mais avant Le Roi Lear et Antoine & Cléopâtre, pour vraiment se contenter de citer les plus célèbres tragédies du dramaturge. Cette pièce a notamment été adaptée à deux reprises à l'opéra (par Rossini puis par Verdi), a inspiré une peinture à Delacroix, a eu de multiples adaptations au cinéma... sans oublier qu'elle fut une source d'inspiration pour de nombreux écrivains, en particulier le personnage de Jago qui a posé de nombreuses bases de l'archétype du personnage jaloux et manipulateur.

Cette histoire en cinq actes nous narre la vie d'Othello, un vaillant général qui est en plus gouverneur de Chypre, après être revenu victorieux de la guerre contre les Turcs. Tout semble actuellement lui sourire puisque, sur le plan personnel, il vient d'épouser la femme qu'il aime et qui l'aime en retour, Desdémona, malgré l'opposition de son père à cette union. Mais dans l'ombre, une sombre machination se prépare sous le joug de Jago, l'enseigne d'Othello: déçu de ne pas avoir eu le poste qu’il espérait après la victoire contre les Turcs, celui-ci, avide de vengeance envers son supérieur, sème le trouble en lui, mettant au point des manipulations pour lui faire croire que Desdémona le trompe avec Cassio, un lieutenant pourtant honnête. A force d'enchaîner les stratagèmes fourbes, Jago parvient à faire tomber Othello dans une spirale de jalousie, de folie et de violence toujours plus infernale...

Inspirée d’un conte italien écrit en 1565 par Giovanni Cinzio, que Shakespeare a insérée dans un contexte de conflit militaire, et où il a rajouté ou transformé des personnages. Othello voit le dramaturge exploiter une nouvelle fois les liens amoureux passionnés de ses personnages ,jusqu'à faire de cette passion le poison qui va les mener à leur perte. Ainsi, sous les manipulations de Jago, aucun personnage ne sera épargné, en particulier Othello et Desdémona bien sûr, mais aussi Cassio, lieutenant honnête qui n'a rien demandé, et bien d'autres visages plus secondaires mais important dans cette spirale infernale comme Roderigo, un homme vouant une admiration pour Desdémona, ou Bianca, maîtresse de Cassio. La qualité première de la pièce d'origine est sans doute d'aller toujours plus loin dans la chute d'Othello, de Desdémona et d'autres personnages, jusqu'à l'issue fatale et brutale, avec en toile de fond nombre de thématiques qui, pour la plupart, sont régulières chez Shakespeare: l'amour tragique bien sûr, et tout ce qui va avec (jalousie, désir...), mais aussi les amitiés bafouées, la vengeance et par la même occasion la trahison, ou même les préjugés raciaux puisque Othello est maure. Cependant, si Othello est considérée comme l'une des plus sombres pièces du célèbre dramaturge, c'est peut-être pour la violence qu'inspire son personnage principal éponyme, encore un cran au-dessus de Hamlet ou de Macbeth, et bien loin de la pureté des jeunes amants Roméo et Juliette. En effet, Othello peut se montrer très insultant envers sa propre épouse, n'hésite pas à frapper et à exécuter ses proches, sous l'emprise des sentiments négatifs installés en lui par Jago.

Concernant cette version manga plus spécifiquement, on la doit au duo Crystal S. Chan (adaptation) et Julien Choy (dessin), un binôme qui fut déjà à l'oeuvre sur Macbeth, Hamlet et Le Livre de la Jungle. A l'instar des deux précédentes adaptation de Shakespeare par ce duo, on a droit à une adaptation la plus fidèle possible puisqu'elle reprend l'intégralité du texte d'origine, en suivant la traduction originelle de François Guizot. Il n'y a donc aucune coupure, aucun raccourci, ce qui est tout au mérité du binôme qui nous offre alors ici un joli pavé de plus de 400 pages, d'où le prix assez élevé de 12€. Mais malheureusement, se montrer totalement fidèle à l'oeuvre d'origine ne peut suffire à faire un bon manga: comme sur leurs précédents travaux, les deux auteurs montrent de grosses lacunes sur le plan graphique, on ne peut plus pauvre. Dépourvu de la moindre idée de mise en scène, très inégal dans les designs, très peu nuancé dans les expressions faciales (la plupart du temps, c'est soit peu expressif, soit trop expressif et donc caricatural), le rendu visuel ne bénéficie d'aucune vision propre, d'aucun gros travail d'immersion. En réalité, tout repose sur la qualité du texte d'origine, les visuels se contentant d'accompagner basiquement l'histoire, sans apport particulier, et en se contentant finalement d'offrir des images à un jeune public qui ne serait pas enclin à se farcir la pièce d'origine de manière purement textuelle. A l'arrivée, on va dire que le minimum syndical est accompli, mais si vous avez déjà lu et apprécié le texte de la pièce d'origine vous pouvez passer votre chemin car l'adaptation visuelle n'apporte quasiment rien de marquant ici.

Concernant l'édition française, on retrouve le travail habituel typique de nobi nobi! pour ses Classiques en Manga, avec une charte graphique claire et immédiatement identifiable, un côté "beau-livre" dû à la reliure et au signet marque-page, une première page en couleurs, une qualité de papier et d'impression tout à fait honorable, et une postface correcte de Tomoko Seigneurgens pour resituer l'auteur et son oeuvre.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
12 20
Note de la rédaction