Nova Vol.1 - Actualité manga

Critique du volume manga

Publiée le Mercredi, 16 Mars 2022

Chronique 2 :

En 2018, l'artiste française Caly achevait sa série Hana no Breath aux éditions H2T, une comédie sentimentale globalement fraiche et convaincante, quand bien même elle ne proposait pas de point final à proprement parler. On attendait alors de retrouver l'autrice sur une nouvelle œuvre, et pourquoi pas dans un registre différent puisqu'elle a déjà prouvé avec MahO-Megumi, titre auto-édité, son goût d'embrasser des genres variés. Et c'est justement ce que sa nouvelle œuvre nous réserve : Lancée en octobre 2020, Nova quitte la candeur de Hana no Breath pour s'orienter vers la tranche de vie teintée de suspense et de science-fiction. Dès lors, on pouvait être enthousiastes à retrouver Caly et sa patte dans un tout autre registre.

Lycéen parmi tant d'autres, Rease a une particularité : Sa discrétion. Ses camarades ne le remarque que peu, aussi le quotidien du garçon est façonné par la routine, bien qu'il trouve grâce aux yeux de sa maman aimante. Pourtant, sa vie monotone bascule lorsque, en pleine nuit, une jeune femme s'introduit dans sa chambre : Nova. L'air imperturbable, la demoiselle annonce être présente en qualité d'observatrice, afin de juger si Rease représente une menace ou non pour « l'organisation ». Débute alors une cohabitation étrange, le garçon ayant du mal à savoir qui est Nova et ce qu'elle sous-entend avec sa mission. Mais c'est lorsqu'il sera frappé lui-même par des événements étranges qu'il découvrira réellement la tâche de la jeune fille et de l'organisation à laquelle elle appartient...

Après la douceur printannière de Hana no Breath, place à un récit teinté de science-fiction et de mystères. Assez rapidement, ce premier volume de Nova atteste l'ambiance différente adoptée par l'autrice dans sa nouvelle œuvre, tout en restant pourtant dans une certaine identité (sur laquelle nous reviendrons). Les premières pages ne manquent pas de mélancolie à travers son héros, Rease, que l'on soupçonne en marge des autres, ou au moins solitaire. Il semble vivre un quotidien doté d'une certaine amertume, et c'est sa rencontre avec Nova qui pourrait le sortir de sa routine... ou presque. Car la connexion entre les deux personnages ne se fait pas sous un jour enthousiaste, au contraire. Au même titre que le protagoniste, il nous est difficile de cerner la demoiselle, au point de peut-être douter de ses bonnes intentions. Si la singularité de la situation et l'hébergement en urgence de la mystérieuse jeune fille amuse, ce n'est pas forcément le cas de l'ensemble du volume, nimbé de mystères et qui aborde même certains événements avec une pointe de gravité. A ce titre, la patte de Caly sait coller à cette atmosphère, un peu plus pesante par moment, quand bien même son trait garderait un caractère épuré.

C'est de manière quasi évidente que la relation entre Rease et Nova finit par être abordée, l'un apportant à l'autre et inversement. Concernant le garçon, c'est bien entendu sa curiosité quant à la mission de sa nouvelle colocataire qui sera piquée, tout comme la notre. Qui est Nova ? Quel tâche doit-elle accomplir ? Et quel rapport avec l'introduction énigmatique de ce premier opus ? Des réponses seront amenées, ou plutôt des éléments de développements qui étayent parfois le mystère, au même rythme de l'évolution de la relation entre les deux têtes d'affiche. Et au fur et à mesure que chacun découvre l'autre, Nova (le manga) gagne en ambiance, notamment un ton doux-amer dès lors qu'on en apprend davantage sur la demoiselle. Il reste encore bien à faire dans cette histoire, mais les choses avancent déjà à bon rythme, tant dans le scénario que dans l'alchimie entre les deux têtes d'affiche.

Et si on évoquait précédemment la capacité de Caly à s'adapter à un nouveau registre, force est de constater que l'autrice reste dans une certaine humanité avec cette histoire. L'idée de l'amour indépendamment du genre est furtivement amené, tandis que tous les aspects relationnels dépeints apportent une pierre à cette édifice chaleureux. Il y a la relation entre Rease et Nova, bien entendu, mais aussi celle que le garçon commence à nouer avec certains camarades de classe, des « marginaux » qui se démarquent par leurs caractères et leur acceptation des codes d'une société qui a tendance à mettre à l'écart tout ce qui ne rentre pas dans le moule. Alors, on se demande jusqu'où la série développera ce propos et le greffera, peut-être, davantage au récit principal centré sur Nova.

La nouvelle œuvre de Caly s'offre donc un départ saisissant, à la fois envoutant et touchant par sa mélancolie, abordant la quête fantastique de deux êtres totalement opposés mais qui commencent déjà à accepter l'autre, et s'ouvrir peu à peu à lui. Sachant qu'il reste encore trois volumes (la série ayant directement été annoncée en quatre tomes), Nova a encore le temps d'évoluer et de montrer bien des développements.


Chronique 1 :

Egalement connue dans le milieu amateur pour sa série MaHo-Megumi, Caly eut l'honneur, en 2017, d'être l'une des artistes ayant inauguré le catalogue papier des éditions H2T, avec Hana no Breath. Grâce à ses héroïnes attachantes, à son trait bourré de douceur, à ses sujets modernes et à son traitement intéressant de l'adolescence, cette courte série en 2 tomes a eu droit à un très bel accueil, y compris ici, si bien que l'on espérait forcément revoir un jour Caly chez H2T, d'autant plus que l'artiste semble vraiment bien s'entendre avec l'éditeur en étant bien souvent présente sur son stand lors de divers salons. Et en cet automne 2020, l'espoir se concrétise enfin avec la sortie du premier volume de la nouvelle série de l'artiste !

Rease est, à première vue, un collégien de 13 ans comme les autres, à ceci près, peut-être, qu'il a parfois le sentiment de n'être lié à rien et de venir d'ailleurs, comme s'il était un peu à part dans la société. Peut-être est-ce l'influence de son père, toujours absent, faisant des recherches sur les météorites, et lui ayant probablement transmis sa passion pour le ciel et les étoiles ? Quoi qu'il en soit, le jeune garçon s'applique à mener une vie normale, que ce soit à la maison aux côtés de sa mère aimante Emma qui s'est remise en couple avec la sympathique Ellen, ou à l'école où il cherche à rester discret, même si son côté un peu dans la lune lui vaut parfois des moqueries. Et pourtant, ce soir-là, sa vie ordinaire est vouée à être considérablement bousculée par l'irruption chez lui d'une bien étrange jeune femme: Nova, 22 ans, qui affirme être là pour l'observer sur la longueur. S'il est inoffensif il sera protégé, mais s'il est jugé dangereux il sera éliminé. Mais à quoi rime tout ceci ? Qu'a-t-il de spécial ? Quelle est cette Organisation pour laquelle travaille Nova ? Tout en s'interrogeant, Rease est bien obligé de s'arranger pour que la jeune femme s'installer à la maison sans éveiller les soupçons de sa mère, et la fait donc passer pour sa correspondante étrangère. C'est alors le début d'une cohabitation qui sera révélatrice de beaucoup de choses, autant sur la présence d'une étrange menace extraterrestre infiltré parmi les humains, que sur les tourments des personnages eux-mêmes...

Après la douce romance adolescente de Hana no Breath, Caly revient avec un récit où elle change en partie de registre en s'essayant à un genre parfois trop rare en manga (surtout de la part d'artistes féminines): la science-fiction. Et cette part SF, c'est petit à petit qu'elle se dévoile, l'autrice sachant piquer vite et bien la curiosité pour mieux apporter par la suite ce qu'il faut savoir de la menace extraterrestre semblant planer sur les terriens. Ainsi apprendra-t-on bien assez vite que Nova a pour mission de récupérer les EKSAA, des entités extraterrestres parasites qui entrent dans leur hôte via des failles psychiques puis exacerbent leurs émotions en les rendant agressifs et violents. Tout en observant Rease, la jeune femme doit donc poursuivre cette mission, en repérant les personnes exagérément violentes pour extraire le mal en eux et faire en sorte qu'ils redeviennent comme avant. Dans ce premier tome, cela donne déjà lieu à quelques brefs instants où l'habituelle douceur de la narration de Caly laisse soudainement place à des instants plus brutaux... et ceux-ci ne sont évidemment pas gratuits en tâchant de véhiculer déjà certaines choses sur l'humain, car si certains parasités se calment et fuient une fois l'EKSAA extrait, d'autres, à l'image d'une mère de famille dans ce volume, ne semblent pas forcément beaucoup plus différents une fois "guéris".

"Parfois, je me demande si les EKSAA ne font pas que révéler ce qu'il y a de pire chez les humains."

La part SF de l'oeuvre promet alors d'être intéressante, d'autant qu'elle est évidemment ponctuée de questions qui viennent naturellement à l'esprit. Qu'est donc exactement l'Organisation ? Que fait-elle des parasites extraits ? Et, surtout, quelle est donc la nature exacte de Rease, observé par Nova car il semble vraiment à part ? Alors que le jeune garçon ne souhaite que vivre normalement, le voici qui a soudainement d'étranges griffes apparaissant sur ses mains de temps à autre...

Tout en proposant un récit de science-fiction assez prometteur, Caly reste néanmoins fidèle à ce qu'elle a déjà pu montrer dans Hana no Breath, en s'intéressant de près à la vie de ses héros au travers d'une forte part de tranche de vie. Cet aspect est bien souvent doux, assez chaleureux grâce à des personnages sympathiques comme Emma, Ellen et le chat Muffin, Rease semblant grandir dans un petit nid familial agréable, en plus d'être moderne au vu du lien entre sa mère et Ellen. Mais cette part de douceur vient également contraster avec le début de petits développements un peu plus compliqués, qui sont potentiellement durs sans non plus trop l'être sous le trait de Caly. On entrevoit à l'école quelques difficultés comme de petites brimades, la mise à l'écart de celles et ceux qui sont jugés différents (comme William et Dylan, qui toutefois semblent bien le vivre), le désir de notre héros de passer inaperçu. Tandis qu'à la maison et ailleurs, nombre d'instants permettent d'entrevoir petit à petit, en la taciturne et très neutre Nova, des douleurs et traumatismes passés qui finiront peu à peu par s'expliquer.

D'ailleurs, nul doute que l'évolution de Nova sera aussi un point essentiel du récit. A son arrivée, la jeune femme est vraiment là uniquement pour sa mission, et n'agit qu'en pensant à cela, en observant les choses avec une économie de mots, et en notant toutes ses observations sur son carnet... à tel point que Rease se demande même si elle est humaine et commence lui aussi à l'observer ! Mais le jeune garçon aura sans nul doute l'occasion de voir qu'elle est aussi une fille comme les autres, et on appréciera de l'observer dans son évolution au gré d'instants où, par exemple, elle cuisine avec Emma où se confie laconiquement.

Visuellement, retrouver le dessin tout en rondeurs, doux et clair de Caly est un plaisir. Ben sûr, le goût de l'artiste pour divers designs chibi mignons est toujours là lui aussi. Et on appréciera un soin accordé aux décors tels que la forêt, l'ancien observatoire, la maison, ou l'école, des décors bien présents quand il le faut sans être surchargés.

Au bout du compte, c'est un joli début pour NOVA ! Tout en installant une part SF bienvenue, l'artiste s'en sert habilement pour commencer à esquisser certains de ses sujets de prédilection autour de l'adolescence et des rapports humains, donnant lieu à une lecture aussi convaincante qu'intrigante.

Cette chronique ayant été réalisée à partir d'une épreuve numérique non-corrigé fournie par l'éditeur, pas d'avis sur l'édition !
  

Critique 2 : L'avis du chroniqueur
Takato

15 20
Critique 1 : L'avis du chroniqueur
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16 20
Note de la rédaction