Critique du volume manga
Publiée le Mercredi, 31 Août 2022
En plus de devoir encaisser l'échec du référendum sur la construction de l'usine de retraitement en ville, les jeunes membres de la chorale doivent surtout faire face à la décision de Machiya, qui a arrêté de chanter et est partie aux Etats-Unis. Les réactions sont très diverses: certaines personnes estiment que c'est son choix et qu'il ne regarde qu'elle, tandis qu'une personne comme Mito ne voit plus l'intérêt de continuer le chant, elle qui déteste sa voix et qui prenait tant exemple sur Machiya qu'elle admirait. Quant à Yutaka, il reste démuni devant ce départ, plus encore au vu de ce qu'il a pu dire à Machiya auparavant... Bref, la situation est plutôt morose. mais c'est dans ce contexte que revient au Japon Vladimir, accompagné de la star montante Lilico qui souhaitait chanter avec Machiya après avoir assisté à sa performance sur Le Tour d'écrou. Et le jeune russe, qui a autrefois été un rival stimulant pour Yutaka avant de se confronter brutalement au changement de voix dû à sa puberté, a une proposition inattendue à faire aux élèves de la chorale: une participation à un opéra de Noël, loin de toute compétition, qui pourrait bien être porteur d'espoir pour tous ces jeunes...
Faisant partie des personnages centraux de la série depuis quasiment les débuts, Vladimir se présentait évidemment comme le mieux placer pour signer un renouveau pour Yutaka et ses camarades, lui qui fut un rival pour notre jeune héros et qui, avant lui, a déjà dû surmonter son changement de voix. Le voir montrer en quelque sorte l'exemple n'a donc rien d'anodin, il s'agit d'un choix logique et malin de la part de Yuhki Kamatani pour bien cristalliser son parcours personnel mais aussi son parcours commun avec Yutaka, et c'est donc avec une symbolique forte qu'arrivent les fameux préparatifs pour l'opéra de Noël, événement sonnant de façon particulière à la fois pour les personnages pris séparément et pour le groupe de la chorale de manière générale, l'oeuvre restant précisément un manga choral jusqu'au bout.
Ce parfum de renouveau, Kamatani prend soin de le faire ressentir moins par les dialogues, par moment très discrets, que par les visuels toujours aussi beaux avec nombre d'envolées saisissantes et de nouvelles métaphores toujours aussi bien senties, nous faisant ainsi vivre le parcours de cette poignée d'enfants/adolescents avec une infinie verve poétique. Qui plus est, Kamatani a le mérite de ne pas s'arrêter strictement au cas des jeunes, notamment en revenant sur le cas du professeur Ota qui n'est d'abord pas chaud du tout pour participer à l'opéra de Noël, à moins que Madame Ohashi n'arrive à lui secouer les plumes. Car les adultes ont aussi une place-clé dans ce récit, que ce soit pour retrouver une certaine jeunesse, en accomplissant leur travail de transmission envers les jeunes, mais aussi en n'oubliant pas d'écouter les jeunes eux-mêmes comme saura enfin le montrer l'aïeul envers Mariko. Et dans tous les cas, il est alors question de s'adapter aux changements, que ce soit ceux des habitants de la ville face à l'arrivée inévitable de l'usine, ou ceux des enfants face à l'inéluctable arrivée de leur puberté.
La fin amenée par Kamatani, au bout du compte et après une ellipse, se révèlera très jolie. Les personnages "secondaires" (Mariko, Betsuyaki, Takamine, Tomo, Mito, Machiya...) n'y sont globalement pas oubliés en suivant chacun leur voie, tandis que du côté de Yutaka on découvre avec intérêt s'il a surpassé ou non la perte de son timbre de soprano, la réponse étant bien sûr teintée de l'espoir et de l'attention typiques de la série. On ressort alors pleinement satisfait de cette lecture vibrante, d'autant qu'à la fin un chapitre spécial vient apporter une importante pierre supplémentaire à l'édifice en racontant comment Vladimir a entamé sa carrière de soprano.