Mauvaise Herbe Vol.2 - Actualité manga
Mauvaise Herbe Vol.2 - Manga

Mauvaise Herbe Vol.2 : Critiques

Nora to Zassô

Critique du volume manga

Publiée le Mardi, 29 Décembre 2020

Touché par le sort de la jeune Shiori Umino, et troublé par sa ressemblance avec sa fille décédée 6 ans auparavant à seulement 9 ans à cause de son inattention, l'inspecteur Yamada a recueilli cette adolescente qui, à seulement 16 ans, a déjà connu le pire: détestée et battue depuis toujours par sa mère, fugueuse, réfugiée dans un bordel clandestin puis chez des mecs rarement dépourvus d'arrière-pensées, elle n'a absolument aucun repère affectif. Yamada pourrait-il alors combler ce manque ?

Après un premier volume particulièrement fort et bien mené, le drame humain de Keigo Shinzo se poursuit avec un deuxième volume où régulièrement, l'espoir semble s'installer, au gré d'une certaine cohabitation qui s'installe. Pourtant, cette cohabitation ne semble pas toujours partir sur des bons rails, à cause du vide social résidant en Shiori, faisant qu'elle a régulièrement des comportements inadaptés: elle avait d'abord chapardé le portefeuille de l'inspecteur, puis cette fois-ci elle tente de le remercier comme elle le peut (c'est-à-dire, avec ce qui semble le plus intéresser les hommes en elle...), ou alors se noie dans l'alcool à son âge quand ça ne va pas... Mais face à cette adolescente en perdition, Yamada se veut bienveillant, en tâchant du mieux qu'il peut de faire naître en elle cette lueur qu'elle n'a jamais eue. Cependant, les épreuves sont bien nombreuses, entre les interrogations naturelles (la jeune fille peut-elle rester là ? Yamada ne risque-t-il pas d'être accusé d'enlèvement ?), le chat Roco mal en point, le retour au lycée qui risque d'être difficile, ou simplement les regrets et l'obsession que l'inspecteur continue d'avoir pour sa défunte fille, au point que Shiori a le sentiment qu'il cherche à la remplacer à travers elle...

Le mangaka, habilement, entremêle ainsi avec efficacité les moments presque positifs/optimistes et les instants où le doute et la douleur sont à nouveau proches d'éclater. Et cela passe par de nombreuses étapes au fil de la colocation: Yamada tâche de préparer des repas et laisse même des petits mots rassurants et attentionnés en début de tome, les répliques parfois ringardes de cet homme font mouche, il souhaite installer une rotation pour les tâches ménagères afin de réadapter l'adolescente... puis il y a le cas du chat Roco, blessé, proche de la mort même, mais soigné, adopté et ne devant plus jamais être délaissé, le comparatif entre cette petite boule de poils abimée et en recherche d'affection et la jeune fille étant évident. Yamada se veut attentif, mais s'interroge beaucoup, notamment vis-à-vis des services sociaux qui n'auraient pas forcément le temps de prendre en charge Shiori, ce qui est l'occasion pour l'auteur d'évoquer vite et bien la cruelle réalité de ces services, débordés par des demandes toujours plus importantes.

Et au bout de tout ça, enfin, il y a la question du retour à l'école, cette école où l'adolescente n'a pas mis les pieds depuis 4 mois. L'espoir de Shiori est bien là: elle se demande si elle pourra enfin avoir une vie normale, et espère. Elle fait des efforts dans ce sens, à son rythme, en essayant de se faire des amies, et les choses semblent d'abord assez enthousiasmantes de ce côté-là. Mais il suffit de peu pour que tout dérape: des rumeurs galopantes sur sa longue absence, des gens qui se mettent à s'éloigner d'elle, à médire sur elle et à la critiquer sans même essayer d'en savoir plus... L'insensibilité du monde contemporain a vite fait de rattraper les bribes d'espoir pour mieux les faire disparaître.

C'est alors sur un dernier chapitre particulièrement dur que se referme le volume, tant les plus profonds tourments des deux personnages principaux reviennent au galop jusqu'à exploser, et d'un bout à l'autre la lecture se fait à nouveau aussi forte qu'immersive. Keigo Shinzo brille par ses planches très artisanales (beaucoup de hachures, pas de trames, et pourtant aucune impression de vide), par ses angles souvent bourrés de sens, par ses petits instants de non-dit où la mise en scène suffit... Une lecture souvent puissante, dont on attendra la suite avec autant d'intérêt que de fébrilité.
  

Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
16.25 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs