Marriage Toxin Vol.1 - Manga

Marriage Toxin Vol.1 : Critiques

Marriage Toxin

Critique du volume manga

Publiée le Vendredi, 22 Septembre 2023

Le mois de septembre est synonyme de rentrée scolaire, mais aussi de nouveautés fortes sur le marché du livre, d'une manière générale. La rentrée littéraire concerne aussi le manga, et d'importantes nouveautés ont atteint nos librairies durant ces dernières semaines. Du côté de Crunchyroll, conformément à la politique du catalogue de l'ex-Kazé, c'est en puisant dans les dernières valeurs sûres de l'écurie Jump que la maison a tenté un coup important. Son choix s'est porté sur Marriage Toxin, un récit qui compte 6 tomes à ce jour au Japon, et qui joue la carte du récit d'assassin et de la comédie d'action et romantique en parallèle. La série est issue du Shônen Jump+ qui, après des œuvres comme Dandadan, Kaiju 8 ou Ron Kamonohashi, sans oublier le transfert de Chainsaw Man pour sa saison 2, s'impose comme l'un des biais de prépublication shônen incontournables. Si bien qu'il n’est pas insensé de voir, à terme, le magazine numérique éclipser le Shônen Jump papier, pourtant si légendaire.

Marriage Toxin est l'œuvre de Joumyakun au scénario, et de Mizuki Yoda au dessin. Ce dernier est un ancien assistant de Gege "Jujutsu Kaisen" Akutami, et a fait un passage rapide dans le Shônen Jump en 2018 avec le court neà;lation, annulé après 3 tomes. Auparavant, ces deux artistes en herbe ont fait leurs débuts sur de petits projets, chacun de leurs côtés, avant de s'associer dès 2022 sur le présent manga. C'est donc un duo neuf, à l'énergie palpable étant donné le rendu de ce premier tome.

Leur série s'instaure dans une sorte de mouvance où le monde du crime devient un cercle de protagonistes, pour des assassins ou espions pas si méchants que ça. Dans Marriage Toxin, l'histoire est celle de Gero, l'héritier d'une famille de tueurs à gages dont les méthodes meurtrières passent par le poison. Plus que quiconque, le jeune homme est un virtuose de son art, et se paie même le luxe d'être dicté par une morale stricte : il ne tue que les pourritures. Mais parce que son boulot ne lui a jamais permis de rencontrer l'amour, ce qui va de pair avec l'incapacité du garçon à flirter avec quiconque, Gero est célibataire... au grand damn de sa famille qui veut un héritier. Quand la sœur de l'empoisonneur, en couple avec une femme, annonce être prête à tout plaquer pour honorer le vœu de sa famille, Gero se montre prêt à tout pour rencontrer une dulcinée, et ainsi éviter à sa sœur ce sacrifice. Lorsqu'il doit assassiner une arnaqueuse experte en relations sentimentales, il voit l'occasion de recruter un mentor qui lui permettra d'arriver à ses fins...

La base de l'œuvre signée Joumyakun et Mizuki Yoda se révèle des plus séduisantes. Assez dense dans les ambiances introduites, ce premier volume plante habilement cette comédie d'action aux enjeux romantiques, par un équilibre maîtrisé de tous ses ingrédients. Car une fois le pitch introduit, le récit oscille entre des missions périlleuses, sérieuses et d'une bonne intensité, avec un objectif global plus décalé, puisqu'il consiste à trouver une épouse pour le protagoniste empoisonneur. Une finalité un poil benêt, mais qui cache un enjeu plus grave qu'il n'y paraît, puisque la démarche de Gero est d'éviter à sa sœur, homosexuelle, de devoir s'ancrer dans une vie à l'opposé total de ses attirances, et par définition de ce qu'elle est. Il y a donc quelque chose de subtil dans ce plot de départ, avec une dimension inclusive naturelle et de bon sens, ce qui reste assez rare dans les shônen d'action grand public. Quelques premiers bons points pour les auteurs donc, tentent que l'équilibre global du tome confirme la solidité de ce binôme.

Pourtant, le début de Marriage Toxin s'ancre dans un certain classicisme, que ce soit par le thème des tueurs à gages largement revu ces derniers temps, ou le schéma très introductif qui vise à planter des personnages au compte-gouttes, via quelques premières aventures au concept simple sur le papier. C'est une amorce typique du genre, et plus globalement des shônen estampillés Jump, mais qui s'avère bien maîtrisée avec ce tome de départ. Car outre le fait que les éléments de base du scénario s'introduisent avec fluidité, ces mécaniques gagnent en force au fil de ces six premiers chapitres, tandis que la patte de Mizuki Yoda s'annonce pleine de promesses. Pour l'heure, le dessinateur semble rester un peu trop sage, mais démontre des atouts indéniables entre quelques designs originaux et des moments d'action plus libérés. Dans un récit de combats et de moments explosifs, c'est un atout indéniable, comme Yuto Suzuki l'a démontré avec son Sakamoto Days particulièrement inventif dans certaines de ses compositions de scènes de baston.

Et il n'en faut vraiment pas plus pour passer un bon moment de lecture, pour s'attacher aux personnages et à leur relation de base, et pour entrevoir le potentiel indéniable de Marriage Toxin. Le récit est assurément prometteur, pas tant sur son intrigue, mais plutôt sur sa dimension graphique, son juste équilibre des atmosphères, et sur ses rapports entre protagonistes. À voir où cela nous mènera, mais ce premier tome assure le spectacle va une formule certes classique, mais bien pensée et correctement amenée.

Notons que Crunchyroll a décliné ce premier tome en une version simple et une édition collector. Cette dernière, sobre, inclut une jaquette alternative ainsi que l'histoire courte marquant le début de la collaboration entre Joumyakun et Mizuki Yoda. Un supplément important puisqu'il s'agit d'un morceau de la carrière des deux artistes, et qu'on apprécie avoir dans un format indépendant, en tant que livret qui se glissera aux côtés des tomes de Marriage Toxin. Loin des stickers, posters et autres gadgets dispensables, voilà une édition spéciale légitime. Pour certains, ça permettra peut-être à Crunchyroll de faire un début d'amende honorable, après les multiples couacs et choix éditoriaux navrants des mois passés.

Ajoutons à ça la traduction très vivante de Sayaka Okada et de Manon Debienne, qui rend l'immersion dans ce début de récit encore plus savoureuse. Le lettrage a été assuré par le studio Hinoko qui offre un rendu bien calibré.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Takato
15.5 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs