Ma vie dans les bois Vol.4 - Actualité manga
Ma vie dans les bois Vol.4 - Manga

Ma vie dans les bois Vol.4 : Critiques

Manga Shinshirakawa Genjin Upa!

Critique du volume manga

Publiée le Vendredi, 25 Mai 2018

Au fin fond de leur montagne au sud de Fukushima, Shin Morimura, son épouse Miki et leur chien continuent leur vie loin du tout confort et des choses trop matérielles, et ils sont de plus en plus épanouis. Leur terrain compte désormais trois petits bâtiments que le mangaka a principalement construits de ses mains, la meule à charbon maison est fonctionnelle tout comme le fumoir, l'élevage se porte bien, les plantations aussi. Oui, leur quotidien, désormais vieux de 4 ans, va très bien. Du moins, jusqu'à ce jour du 11 mars 2011...


Vous l'aurez déjà compris, avec ce 4e volume, la série autobiographique de Shin Morimura s'attaque à un gros morceau, une épreuve importante: la triple catastrophe de Fukushima, à à peine une centaine de kilomètres de là où ils habitent. Ce jour-là, le couple se lève comme d'habitude et exerce leurs occupations, jusqu'à l'heure fatidique de 14h46 où la terre se met à trembler. Des séismes, ils en ont déjà connu pas mal, mais aucun ne fut violent au point de tout faire bouger. Ils ont de la chance: les dégâts sont minimes chez eux, et la cabane en rondins n'a même pas subi le moindre dégât ! Et c'est ainsi que malgré les répliques sismiques, ils passent la journée même du 11 mars 2011 de façon plutôt insouciante... et en n'ayant aucune idée de la situation réelle, puisqu'ils n'ont plus de radio ni de télé. Mais quand des hélicoptères des FJA se mettent à passer près de chez eux en basse altitude à répétition, ils ne peuvent que se poser des questions. Encore plus en voyant que la route a été détruite et qu'ils sont donc coincés dans leur montagne, que l'eau de leur pompe est devenue trouble et boueuse, ou qu'ils n'ont plus d'électricité.


D'emblée, le témoignage de l'auteur sur son vécu de la triple catastrophe s'annonce donc passionnant et assez unique, car il le présente sans changer la recette de son manga: en racontant comment lui a vécu les choses, le plus simplement du monde, comme une étape supplémentaire de sa nouvelle vie en montagne. Mais une nouvelle étape plus influente qu'aucune autre qu'il le veuille ou non... Ignorant d'abord que la situation est si grave, le couple tend à montrer qu'il n'aurait pas dû se couper autant, car pour rester connecté au monde, certains moyens de communication comme la radio ou la télé peuvent rester essentiels. Et une fois mis au courant, c'est pour eux, comme pour tout le monde, la stupéfaction, l'effroi et l'inquiétude. Beaucoup de choses leur passent en tête: savoir si leurs connaissances de la région sont en sécurité, signaler qu'eux-mêmes sont saufs, vouloir apporter leur aide à leur échelle, mais ils ne le peuvent pas... Toujours sur le même ton assez quotidien, sans pathos, sans excès, Morimura évoque bien ce que lui et Miki ont pu traverser: l'inquiétude au rythme des répliques sismiques des jours et semaines suivants, le sentiment d'impuissance... et une interrogation face à la menace de la radioactivité qui touche peu à peu toute la région: à l'heure où des milliers de gens sont en cours d'évacuation, doivent-ils eux-mêmes partir ? Pourtant, alors qu'on leur dit de ne plus rien manger qui provient de la montagne, car tout est contaminé de façon invisible, la nature suit son cours comme si rien ne s'était passé, les bourgeons se remettent à fleurir, les plantes à pousser... et c'est peut-être cette constatation qui forge naturellement le choix du couple: non, ils ne quitteront pas leur montagne, et continueront d'y vivre et de s'en nourrir, par amour de leur coin de paradis, et comme un défi envers la catastrophe. Ça pourrait paraître inconscient vu que tout le coin est irradié, mais c'est leur choix de vie. Et à l'image de la nature ou de bien d'autres personnes ailleurs, ils vont poursuivre leur quotidien normalement, quitte à reconstruire et faire renaître ce qui peut l'être, petit à petit.


C'est alors dans cette optique de renaissance et de défi que Morimura se lance dans deux nouveaux chantiers avec un surplus de motivation, en cherchant à redonner une raison d'être à des objets abandonnés suite au drame: de vieilles toilettes, des pierres... Au programme, des WC dans le jardin dont il construira le bâtiment, mais sans être pleinement satisfait, car au bout du compte il devra quand même dépenser beaucoup pour le rendre fonctionnel, et surtout parce qu'il devra à nouveau faire avec une chose qui contrôle toutes nos vies modernes: l'électricité, fournie par les centrales. C'est donc avec la volonté de "faire chier" ces centrales qu'avec les vieilles pierres récupérées, il se lance dans la construction d'un grand four ! On retrouve ainsi très vite le Morimura constructeur, persévérant et ingénieux, qui ne se laisse pas abattre par l'impact de la triple catastrophe et reprend bel et bien son quotidien. Avec, à la clé, de vrais moments de bonheur et de convivialité quand de nombreuses connaissances éditoriales viennent lui rendre visite pour inaugurer comme il se doit le four. Quoi de plus chouette comme réaction face à un drame qui, de toute façon, mettra très longtemps à s'oublier, bien plus longtemps qu'une vie humaine ?


Ma vie dans les bois s'offre donc un excellent 4e volume, où le mangaka, sans s'écarter à un seul moment des habitudes de son oeuvre, évoque de façon passionnante le drame de Fukushima à son échelle. Un joli témoignage, au sein d'une série qui confirme ses qualités.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
16.5 20
Note de la rédaction