7 Ninjas d’Efu (les) Vol.1 - Actualité manga
7 Ninjas d’Efu (les) Vol.1 - Manga

7 Ninjas d’Efu (les) Vol.1 : Critiques

Efu no Shichinin

Critique du volume manga

Publiée le Jeudi, 05 Mars 2020

Chronique 2

Les éditions Meian ont frappé fort entre 2018 et 2019, avec la licence Kingdom forcément, mais aussi avec quelques premiers titres qualitatifs. On retient les excellents Baltzar et Angolmois, ainsi que le très punchy et divertissant Jormungand, mais un autre titre un peu plus particulier a fait partie des nouvelles acquisitions japonaises de l'éditeur de l'été 2019 : Les 7 ninjas d'Efu.

A l'origine de ce titre, un certain Takayuki Yamaguchi, que nous avons d'abord connu avec Shigurui, manga en 15 volumes (ou plutôt 13 pour la parution française, les deux derniers ayant été des tomes doubles), proposé chez Panini avant de tomber en arrêt de commercialisation. Bon timing avec cette chronique, d'ailleurs, puisque Meian a annoncé via l'émission Manga Sûr que Shigurui serait prochainement réédité au sein de son catalogue.

Concernant Les 7 ninjas d'Efu, le titre est en cours de parution au Japon depuis 2015, au sein du magazine Champion Red de l'éditeur Akita Shoten. Un récit toujours en cours, et qui compte pour l'heure 8 opus dans son pays d'origine.

Et c'est une fresque historique que nous propose, une fois encore, Takayuki Yamaguchi, avec une pointe de fantastique dans l'intrigue. En 1615, au Japon, Ieyasu Tokugawa a pris le pouvoir par la force, destituant Hidenori Toyotomi. Les fidèles de ce dernier sont traités sans scrupules, traqués et massacrés par les soldats de Tokugawa. Iori Hyôdô, fille de samouraï, et Kaizô, son protecteur, fuient pour échapper au massacre, et atteignent une paisible vallée autonome ou vit Kakugo, un puissant jeune homme. Espérant y trouver un havre de paix, ils finissent par être rattrapés par les troupes de Tokugawa, et s'en suivra un massacre duquel un mystique événement surviendra, faisant naître un Onshin, autrement dit l'une des sept lâmes d'Efu, pouvant clamer vengeance sur leurs tortionnaires...

Si on devait résumer l'intrigue des 7 Ninjas d'Efu, via ce premier tome, ça serait par l'histoire d'une vengeance face à un pouvoir en place n'hésitant pas à supprimer ses opposants, ce en jouant sur un certain fantastique à travers l'éveil des fameux ninjas d'Efu du titre. Mais ce volet initial prend une forme toute particulière, et narre deux récits parallèles, évoluant autour de personnages distincts, avec comme dénominateur commun la lutte contre les forces armées de Tokugawa, chargée d'éliminer les fidèles et proches de l'empereur vaincu. Un concept pour l'heure efficace mais qui devra faire ses preuves dans la suite de l’œuvre. Car difficile de savoir précisément où Takayuki Yamaguchi veut en venir pour l'instant. Compte-t-il développer, au cas par cas, les sept lames d'Efu . L'avenir nous le dira, sachant que la série est bien partie pour dépasser la dizaine de volumes.

Alors, on apprécie pour le moment ces histoires féodales, teintées de drame, narrant la survie de personnages bien précis. Et peut-être plus que l'histoire racontée, bien que les personnages montrent déjà un certain charisme, c'est toute l'esthétique proposée par le mangaka qui fait mouche. Du côté fantastique de l'oeuvre et de ses combats violents et sans tabous visuels résultent une aura jouissiviement grotesque. Les coups de sabre sont vifs, et les victimes sont démembrées quand elles ne subissent pas des sévices encore plus fortes. La mise en scène de Takayuki Yamaguchi va dans ce sens : elle est décomplexée, parfois improbable, mais résulte d'un parti-pris assumé afin de donner une puissance graphique unique aux combats. En ce sens, ce premier tome montre un potentiel esthétique assez fort, et constitue un divertissement rythmé, bourrin, efficacement appuyé par son contexte historique très intéressant. A noter que cet aspect méritera parfois une lecture attentive : certains termes utilisés sont des empruntes du folklore d'époque, et les quelques annotations proposées par Meian ne seront pas de trop pour cerner un peu mieux tout cet envers du décor.

Les 7 Ninjas d'Efu, c'est donc un titre décomplexé et prometteur, un récit qui ravira les esthètes pour le style de son auteur, mais qui devra confirmer ses qualités scénaristiques dans la suite de la série. Le manga a largement de quoi intriguer, et mérite donc qu'on lui donne sa chance.

Concernant l'édition, Meian livre une copie très honnête. On apprécie le vernis sélectif de la couverture, sur le titre de la série, ainsi que la présence d'une page couleur et d'un papier qualitatif de bonne épaisseur. La traduction de Vincent Marcantognini est à saluer, le travail ayant certainement dû être douloureux étant donné le contexte dépeint et les notions utilisées. Quelques tournures de phrases sont parfois un peu étranges, mais rien qui nous sorte de la lecture à proprement parler.


Chronique 1

Il y a un an, les jeunes éditions Meian, auparavant connues uniquement pour Egregor, se lançaient dans le manga à proprement parler avec Kingdom, l'un des principaux succès manga dans son pays d'origine, ais qui rebutait les autres éditeurs sans doute à cause de sa longueur et de son sujet potentiellement inapte à toucher suffisamment un public occidental. De ce pari audacieux, Meian a fait un véritable succès. Et un an plus tard, en ce mois de juillet 2019, l'éditeur semble bien décidé à prendre encore du galon en lançant pas moins de trois nouvelles séries nippones ! En plus de Jormungand bien connu pour son excellent anime et qui fut longtemps attendu, on trovue éalement dans le lot Gunka no Baltzar, une série de guerre et de stratégie sur fond historique dont on connaît déjà l'auteur en France pour le très bon one-shot La Bataille de Sekiheki, récit sur les Trois Royaumes sorti autrefois chez Clair de Lune. Quant au troisième manga, celui dont il est question ici, il marque le retour chez nous de Takayuki Yamaguchi, un mangaka que l'on a adoré il y a quelques années chez Panini pour Shigurui, oeuvre de samouraï sombre, violente, belle et profonde où il adaptait un roman cruel de Norio Nanjo.

De son nom original Efu no Shichinin, Les 7 Ninjas d'Efu est la dernière série en date de l'auteur, qui cette fois-ci est seul aux commandes en signant à la fois le dessin et le scénario. Toujours en cours de parution depuis 2015 dans le magazine Champion Red d'Akita Shoten, l'oeuvre voit Yamaguchi rester dans la veine historique qu'il semble apprécier, avec son lot de samouraï sans foi ni loi entre autres choses. Mais tout ceci, il le reprend à sa sauce pour poser les bases d'une récit de vengeance sans concession et avec une dose de surnaturel !

Nous voici donc plongés au 17e siècle au Japon. Suite à l'unification du Japon entamée par Nobunaga Oda et Hideyoshi Toyotomi, Hideyori, le fils de ce dernier, poursuit l'oeuvre de son père, jusqu'au siège du château d'Osaka en 1615 qui le voit mourir sous l'impulsion d'Ieyasu Tokugawa. Installant dès lors son bakufu, il se fixe pour missions première de traquer et d'éradiquer absolument tous les possibles survivants du clan Toyotomi, et crée pour cela une milice spéciale chargée d'abattre sans autre forme de procès quiconque apparaît suspect, y compris les plus faibles comme les nourrissons. Détenteurs de "sceaux du bakufu" qui leur confère la bénédiction des Tokugawa et du dieu de la guerre Kibitsu hiko-no-mikoto, ils n'hésitent pas à commettre les pires horreurs et atrocités, allant même souvent plus loin que les plus sanglantes choses commises par les samouraïs, si bien que le pays, loin de retrouver son calme, est plongé dans un climat d'angoisse. Face à eux, pourtant, un groupe de 7 guerriers de l'ombre, des combattants revenus d'entre les morts nommés Onshin, s'apprêtent à voir le jour. Ce sont les 7 lames d'Efu...

Pour son nouveau récit, Yamaguchi se fait un plaisir de surfer sur tout un contexte historique réel mais qu'il va reprendre à sa sauce. Ainsi, les grands lignes autour de la mort de Hideyori, de la prise de pouvoir d'Ieyasu et de l'installation du bakufu sont exactes, tout comme l'évocation de plusieurs personnages historiques comme Motohide Hanabusa. A cette base, l'auteur ajoute pas mal d'autres références, un peu plus mythologiques comme la présence du légendaire Kibitsu hiko-no-mikoto, ou simplement via de brèves références à des éléments historiques antérieur comme la présence de fusils Tanegashima ou l'évocation de la Bataille d'Okehazama. On peut aussi souligner, à un moment, la façon dont le mangaka reprend à sa manière le conte de Momotarô.

Sur toutes ces bases, Yamaguchi se lance alors dans un récit dont les premiers éléments sont clairement posés dans les toutes premières pages, avant que le tout ne s'engage dans une voie qui, sur les premiers tomes, risque d'être on ne peut plus linéaires: les uns après les autres, les futures Lames d'Efu vont être introduites via leur petite histoire personnelle puis la façon dont ils meurent avant de revenir à la vie avec un fort esprit de vengeance. Pour ça, Yamaguchi prend plutôt son temps: au bout du tome 1, nous n'en sommes qu'aux deux tiers de l'histoire de la deuxième lame ! A priori, il va s'engager sur un rythme de trois chapitres pour chaque lame, ce qui fait que les premiers tomes risquent bel et bien d'avoir un schéma particulièrement basique... mais au-delà de ça, c'est tout de même un début de récit immersif qu'il nous offre, et on doit cela à sa volonté de proposer quelque chose de résolument sombre et sans concession.

Ainsi, d'emblée Yamaguchi nous fait ben comprendre que son manga ne sera pas tendre du tout, on le sent bien via des personnages peu ragoûtants comme la milice bien sûr qui va jusqu'à tuer enfants et bébés (on ne voit pas ces scènes, ais elles sont souvent évoquées), mais aussi des paysans ingrats, un proxénète parfois brutal, une avorteuse aux méthodes infâmes... la galerie de personnages donne d'emblée la couleur. Et à cela, il faut ajouter la patte visuelle de l'auteur, toujours aussi brute et riche depuis Shigurui. Par rapport à sa précédente oeuvre, Yamaguchi donne tout de même moins dans les mises en scènes chorégraphiées et fascinantes lors des combats, en revanche il n'épargne rien concernant les mises à mort. Même si le découpage limite souvent les combats à quelques coups, le dessinateur se fait plaisir dans les corps mutilés: décapitations en pagaille, démembrements, découpages en petits morceaux, testicules arrachés... A travers ses planches, il dépeint un univers plus violent et sombre que jamais, qu'il parvient à rendre encore plus immersif à travers des décors très présents. Dans son genre, c'est donc on ne peut plus efficace, et ça sert bien les deux premiers petits arcs, centrés respectivement sur un jeune "barbare" revenant d'entre les morts pour protéger une belle et caractérielle vassale des Sanada et pour venger la mort des siens, puis sur une femme devant lutter contre la milice cherchant à la tuer car elle fut l'une des servantes de Hideyori qui l'a engrossée. Ca pose tranquillement quelques figures fortes, en attendant de voir ce qu'elles donneront plus tard.

Malgré un schéma qui risque d'être très, très linéaire sur les premiers tomes, Takayuki Yamaguchi installe donc assez bien les bases de son univers, porté par un ton résolument sombre, sans concession et brutal. le volume 2 sortant en même temps que le premier, peut-être aurons-nous très vite l'occasion de se faire un avis un peu plus prononcé sur ce sanglant récit féodal aux accents surnaturels.

Du côté de l'édition, signalons que le petit tirage effectué en avant-première pour Japan Expo souffre de problèmes d'impression: pas assez appuyée, elle a par moments un côté un peu "délavé", sans oublier quelques légers moirages par instants. L'éditeur a signalé que  ce problème, touchant uniquement le tome 1 et pas le tome 2, est "exclusif" au tirage de Japan Expo (qui a été détruit directement après le salon), et que les volumes disponibles après Japan Expo ne seront pas touchés par ce problème. Ensuite, il y a l'incursion des textes dans les bulles, pas toujours très soignée avec des lettres pouvant sortir des cases voire piétiner légèrement sur le dessin. Ce n'est jamais dramatique, il n'y a rien qui empêche de suivre la lecture avec plaisir, mais il fallait tout de même le signaler. Pour le reste, Meian livre un bel objet, avec un papier souple, assez épais et sans transparence, une première page en couleur, et une jaquette bénéficiant d'un joli vernis sur le titre. Quant à la traduction signée Vincent Marcantognini, elle s'avère plutôt honnête et assez claire. On notera le choix d'offrir un certain nombre de petites astérisques, entre autres pour expliquer certains noms de techniques laissés en japonais, ce qui est un choix pertinent. On aurait éventuellement aimé que ce travail d'astérisques aille encore plus loin avec des petites explications sur certaines références historiques, afin de rendre la lecture plus accessible à un plus large public.


Critique 2 : L'avis du chroniqueur
Takato

15 20
Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
14 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs