Kirin - The Happy Ridder Speedway Vol.1 : Critiques

Kirin

Critique du volume manga

Publiée le Jeudi, 23 Novembre 2023

Le tout début du mois de novembre a vu arriver un nouvel éditeur de manga sur le marché en Kasaï, nouveau label dédié au manga du groupe Larivière qui édite principalement des magazines mais qui possède également les éditions Casa BD. Si elle a pu faire parler d'elle (très souvent en mal, mais on reviendra très vite là-dessus) sur les sites spécialisés, cette arrivée est passé inaperçue à une échelle plus généraliste, et pour cause: à l'heure actuelle, Kasaï semble mort-né. Aucune communication, aucun site, aucun réseau social, aucune réponse aux mails quand on essaie de contacter la maison-mère pour en savoir plus... C'est comme si personne n'existait pour gérer le lancement de ce nouvel éditeur, et forcément ça ne donne absolument pas confiance, et encore moins l'envie de laisser une chance au nouveau venu sur le marché du manga, d'autant plus que les deux premiers mangas de son catalogue sont des séries plutôt longues: tandis que La Randonneuse de Hideo Shinanogawa compte déjà 17 tomes au Japon (pas le choix le plus judicieux pour se lancer et faire ses preuves), Kirin - The Happy Ridder Speedway de Shôhei harumoto (ou Showhei Halumoto) totalise 11 volumes. Sur Manga-news, on a toutefois toujours envie de laisser une chance aux nouveaux éditeurs, si bien que l'on s'est penchés sur le premier tome de Kirin - The Happy Ridder Speedway 1. Spoil: on n'aurait vraiment pas dû.

Avant même d'entamer le bouquin, il faut déjà noter un gros couac (et encore, attendez de voir notre avis en fin de chronique sur la "qualité" éditoriale, ce sera croustillant): au Japon, Kirin - The Happy Ridder Speedway est la suite d'un autre manga de l'auteur simplement nommé Kirin (peut-être un hommage à la bière éponyme, dont l'auteur a possiblement beaucoup trop abusé pour pouvoir pondre un navet pareil). Ayant sa petite popularité dans le registre de la moto et des sports mécaniques au point d'avoir connu une adaptation live, Kirin est une saga que Harumoto, jusque-là inédit en France, initia dès 1987 avec une première série en 39 tomes (inédite en France) qui s'acheva en 2010. Dès cette même année 2010, il lança au Japon, dans le magazine Young King de Shonen Gahosha, une deuxième saison qui a pris fin en 2016 après 11 volumes, et c'est cette saison 2 qui est proposée en France. Vous voyez déjà le problème: la deuxième saison est a priori en lien assez étroit avec la première, étant donné que dans ce tome 1 on ne comprend pas grand chose de ce que l'auteur essaie de nous raconter ('fin, vu le peu qu'il y a à raconter de base...). Le choix de publier The Happy Ridder Speedway alors qu'on ne connaît pas Kirin en France apparaît alors plutôt étrange (pour rester poli).

Mais bon, essayons quand même de nous intéresser aux... euh... "péripéties" de ce premier volume. Tout commence par la vision d'une moto faisant la course contre une voiture, on ne sait pas trop où, et encore moins pourquoi (rassurez-vous, on ne le saura jamais). Kirin, le motard, finit cependant par tomber en panne et, après un appel, est aidé par un autre motard s'appelant lui aussi Kirin (ce qui, apparemment, est incroyable, car c'est bien connu qu'on ne peut pas rencontrer par hasard quelqu'un ayant le même prénom que soi). Conduit dans la ville la plus proche, il va y faire... euh... rien, à part être soigné par une jeune fille sympa et être recruté par un gus pour des raisons qui nous échappent. C'est l'occasion pour lui d'errer et de rencontrer des gens qui n'ont généralement pas l'air très recommandables. Des personnages féminins qui sont tous cantonnés au rôle de call-girls en tenues sexy pour faire de la figuration et rappeler que les sports mécaniques c'est pas pour les gonzesse t'as vu, leur boss Katou (surnommé Chappy, ne me demandez pas pourquoi, je m'en fous) qui aime bien les frapper sans raison (non seulement c'est pas très charmant, mais en plus les filles s'en se ficher royalement d'être maltraitées puisqu'elles n'ont aucune réaction), un gros flic ripou au physique bien ingrat comme il faut et qui semble être la terreur de tout le monde sans qu'on sache trop pourquoi (d'autant qu'on nous dit qu'il est le seul policier de la ville, gné ?)... et c'est à peu près tout. Même si on sent qu'il y a une sale ambiance dans cette ville, pendant longtemps on ne voit pas où le mangaka veut en venir, car il ne dévoile rien et se contente de jouer sur les grosses caricatures dépourvues d'âme, de caractère et de personnalité qui lui servent de personnages.

Il faut finalement attendre le dernier chapitre pour que Harimoto se décide enfin a expliquer les grandes lignes. il est dans une ville dont on ne peut pas partir, car elle est bordée par des canaux au nord et à l'ouest et donne sur l'océan pacifique au sud et à l'est, et que celle-ci est autonome et a interdit aux gens de quitter ses frontière afin d'endiguer la diminution de la population. Les autorités ont alors dû composer avec des gangs de motards révoltés qu'elles ont canalisées en promouvant les sports mécaniques. Les gens doivent donc se défier dans des courses, mais avant ça ils doivent faire preuve de leur bonne condition physique en faisant des combats dans un ring. Y a-t-il vraiment besoin de vous expliquer en quoi tout cet ersatz d'univers est complètement débile et mal pensé ? Qu'est-ce qui empêche réellement les habitants d'essayer de partir ? Pourquoi des courses? pourquoi des combats avant les courses ? Pourquoi le gros flic leur fait si peur ? Pourquoi tous ces gens semblent se ficher royalement de ce qui se passe et de ce qui leur arrive en étant ainsi retenus prisonniers dans une ville ? Et puis, il n'y a vraiment personne à l'extérieur (à tout hasard, les pays proches de cette ville) pour lutter contre ce qui est finalement une grande prise d'otages ?

Bon, vous l'aurez compris: inexistant pendant la majeure partie du tome, le scénario est tout bonnement neuneu et improbable dès que l'auteur essaie de l'installer. Pour compenser ce naufrage scénaristique, il faut alors espérer que les qualités visuelles soient là... mais malheureusement, sur ce plan-là aussi Kirin - The Happy Ridder Speedway coule direct. Contentez-vous de feuilleter les toutes premières pages (celles qui sont pourtant censées en mettre plein la vue pour nous accrocher, alors c'est dire le niveau de la suite), et ça vous sautera au jeu: c'est très moche et extrêmement vide, en particulier les paysages qui sont d'une pauvreté abyssale (ce ne sera pas beaucoup mieux pour la ville, dont les décors urbains restent eux aussi très, très pauvres). Même les routes parcourues par les véhicules ne ressemblent à rien, et les personnages semblent tous avoir un balai dans le *** tant ils sont inexpressifs. Pire, il arrive souvent que leurs semblants d'émotions ne collent pas du tout à ce qui leur arrive, à l'image de cette fille qui reste inexpressive après avoir été cognée par Chappy (aucune peur, aucun ressentiment, rien), où d'une scène où Densuke semble sourire alors qu'elle est censée être agacée. Et pour couronner le tout, les dialogues sont insipides, les textes sont très mal écrits (si vous avez compris quelque chose au délire sur la grappe de raison au début du chapitre 7, faites-moi signe), et on cherche encore les scènes de courses mécaniques qui sont censées être le fer de lance de l'oeuvre puisqu'il faut se contenter de quelques véhicules par-ci par-là (la seule chose que l'auteur dessine à peu près correctement, même si on ne voit jamais les véhicules dans les détails).

Ce qu'on va dire est méchant, mais c'est un fait: le tome 1 de Kirin est complètement nul et ne montre pas la moindre bribe d'intérêt, au point que l'on se demande pourquoi les éditions Kasaï ont voulu sortir ça en guise de première série de leur catalogue. Et pourtant, on n'a pas encore abordé le point le plus fâcheux, qui est le niveau de qualité éditoriale exécrable de ce premier volume. Rien que la jaquette est une aberration, l'éditeur ayant préféré conserver le titre japonais en gros, plutôt que d'écrire quelque part le nom du mangaka. Au vu de la pauvreté graphique, le grand format ne se justifie aucunement, sauf pour monter le prix et pour mettre encore plus en évidence les énormes tares visuelles. La traduction est très basique et ne dégage rien, en n'aidant alors vraiment pas à s'immerger un peu plus dans ce qu'on nous propose. le papier, lui, a le mérite d'être assez opaque, mais offre une qualité d'impression moyenne. Mais le pire du pire provient du lettrage très mal fichu (il faut voir certaines bulles où les textes sont légèrement penchés, ça a vraiment été fait à l'arrache), et surtout du sous-titrage des onomatopées qui est un manque de respect intégral à l'oeuvre (bah oui, même si le tome est mauvais, pas besoin de lui manquer autant de respect): les traductions françaises chevauchent les onomatopées d'origine dans des polices d'écriture parfois totalement différentes, elles sont très mal intégrées, elles n'ont souvent aucun sens ("Fwshh" et "Quietsch!" pour des voitures/motos qui roulent, vraiment ?! WTF ?!)...

Le tome 1 de Kirin - The Happy Ridder Speedway est une masterclass. Une masterclass de tout ce qu'il ne faut pas faire en tant que scénariste, en tant que dessinateur et en tant qu'éditeur. Vraiment, il n'y a rien de rien qui va, ça en devient effrayant. Oubliez vite cet énorme incident et ce gâchis complet de papier et d'encre, et si vous voulez du manga de sports mécaniques penchez-vous plutôt sur l'excellent Capeta ou sur le célèbre Initial D.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
2 20
Note de la rédaction