Critique du volume manga
Publiée le Mardi, 09 Septembre 2025
Le mois d'août a vu la collection Shônen des éditions nobi nobi! s'enrichir d'un nouveau manga en deux tomes: Hina et Bambi, une courte série qui a été prépubliée au Japon en 2022-2023 dans le Bessatsu Shônen Magazine des éditions Kôdansha. Il s'agit de la toute première publication française de Maria Komaki, mangaka qui se faisait aussi appeler Baku Oriyama pendant ses premières années de carrière et qui a débuté professionnellement à la fin des années 2010.
On découvre ici Hinata et Taku, affectueusement surnommée Hina et Bambi depuis leur plus tendre enfance, et inséparables amis depuis tout autant de temps. Ayant grandi de manière très simple et avec beaucoup de proximité entre eux au coeur d'un petit village de montagne, ils ne se verraient sans doute pas vivre l'un(e) sans l'autre... Si bien que quand Hina affirme vouloir passer ses années de lycée à Tôkyô pour saisir les opportunités de devenir mangaka, Bambi décide de la suivre, et les voici tous les deux logés pour les années à venir chez les cousines du jeune garçon. Mais en plus de suivre les cours et de découvrir pour la première fois de leur vie la gigantesque ville, les deux adolescents arrivent à un âge où, tout naturellement, on s'éveiller à l'amour, si bien que Bambi se sent rapidement attiré par la belle et douce déléguée de classe Kasumi Togawa dont il se rapproche vite et bien, tandis que Hina a le coup de foudre pour le bad boy sportif Shôtaro Sameshima qui ne cesse de lui mettre des vents mais qu'elle voit quand même comme un prince de manga shôjo. Pourtant, en voyant les autres les considérer souvent comme un couple, et en observant mieux Hina, Bambi se met aussi à ressentir des émotions qu'ils ne connaissait pas encore...
Petite comédie romantique scolaire dans la droite lignée du genre, Hina et Bambi, pour être apprécié, devra impliquer une chose: que l'on accepte l'accumulation à vitesse grand V d'un bon paquet de clichés: la découverte de la ville par des provinciaux/campagnards avec tout ce que ça peut impliquer de décalages parfois très, très gros, les bonnes grosses coïncidences (comme par hasard, les deux cruschs de Hina et de Bambi se retrouvent tous les deux non seulement dans leur lycée mais en plus dans leur classe), les personnalités très téléphonées des personnages... Ce genre de poncifs s'enchaînent sans jamais vraiment s'arrêter et pourraient blaser quelque peu un lectorat ayant déjà l'habitude de ce genre de lecture. En revanche, cela ne posera sans doute aucun souci à un public nouveau et jeune, ce qui tombe bien puisqu'il s'agit de la cible prioritaire de nobi nobi! ici. Ainsi, au-delà de ces très nombreux clichés, le jeune public (voire les plus grands) pourront profiter d'une petite histoire qui, pour le reste, est assurément bien campée.
Car ici, la question du passage de l'amitié vers l'amour est traitée avec beaucoup de mignonnerie ainsi qu'avec une certaine justesse.
Mignonnerie, car la complicité de Hina et Bambi dans tout ce qu'ils font est évidente, si bien qu'on ne les imagine vraiment pas séparés l'un(e) de l'autre, tous deux comprenant bien qu'il leur est même impensable d'imaginer la chose, au gré des petites épreuves/rencontres/découvertes à Tôkyô et du regard que les autres peuvent poser sur eux (leurs camarades de classe les pensent d'abord en couple, les deux cousines de Bambi les observent avec bienveillance en se demandant quand ils comprendront qu'ils s'aiment...). De plus, ce côté mignon est bien appuyé par le dessin clair, expressif, vif et assez rond où nos deux personnages principaux (en particulier Hina qui passe facilement par beaucoup d'émotions) affichent un petit paquet de bonnes bouilles.
Et justesse car, ici, Maria Komaki fait le choix astucieux de beaucoup faire passer son récit par Bambi, par ses pensées, son ressenti, ses prises de conscience... Le jeune garçon se pose soigneusement pas mal de questions sur son rapport à Hina, sur la manière dont il commence à la voir désormais, et la narration fait tout pour qu'on l'accompagne petit à petit dans ses évolutions intérieures, pour un résultat facilement attachant.
On a donc ici une plutôt bonne pioche de la part de l'éditeur, car dans un registre parfois éculé, et même en enchaînant à grande vitesse les poncifs du genre, ce premier volume dégage également pas mal de bonnes choses dans cet amour naissant, dans cet éveil sentimental propre à l'adolescent et dans la question du passage de l'amitié vers l'amour. Affaire à suivre avec le deuxième et dernier tome, qui est sorti en France en même temps que le premier opus !
Enfin, du côté de l'édition française, on a quelque chose de satisfaisant si l'on excepte le nombre un peu trop élevé de petites coquilles d'inattention dans les textes. La jaquette de Chloé Girard adapte fidèlement et soigneusement l'originale japonaise, le papier est souple, assez épais et bien opaque, l'impression effectuée en France chez Dupliprint est de bonne facture, la traduction d'Angélique Mariet est claire et assez vivante, et le travail d'adaptation graphique de Corinne Luijten est propre.