Gokusen Vol.1 - Actualité manga

Gokusen Vol.1 : Critiques

Gokusen

Critique du volume manga

Publiée le Mercredi, 17 Septembre 2014

Entre deux titres promis au succès, il arrive encore, de temps à autre, que les éditions Kazé Manga nous amènent une bonne surprise que l'on n'attendait plus. Gokusen fait clairement partie de celles-ci. Prépubliée au Japon entre 2000 et 2007 dans les pages du magazine josei You des éditions Shûeisha, cette série en 15 tomes de Kozueko Morimoto a connu dans son pays d'origine un succès retentissant qui lui a valu une sympathique adaptation animée en 2004 (sortie en France chez IDP il y a quelques années), une version drama très populaire sur trois saisons entre 2002 et 2008, et un film live en 2009.


Gokusen, contraction de "Gokudô no sensei" ("professeur gangster"), nous narre les aventures de Kumiko Yamaguchi, jeune femme qui vient tout juste de finir ses études pour devenir professeur, et se retrouve d'emblée mutée dans un lycée à la réputation trèèèèès difficile : le lycée Shirokin de la ville de K, rongé par des racailles qui n'ont absolument aucun respect pour les enseignants. Autant dire que la jeune femme va avoir fort à faire pour s'imposer auprès de la classe dont elle est la prof principale, la 1ère 4. Rapidement prise à parti par les lycéens qui la traitent de tous les noms, font des montages photo sur elle et lui balancent ce qui leur passe sous la main en plein cours, la demoiselle aurait normalement de quoi s'enfuir d'emblée... mais elle n'en fait rien, reste tantôt passive tantôt décalée, ce qui lui vaut aussi d'être traitée de gourde par ses chers élèves. Mais son comportement cache surtout sa véritable identité, celle d'une héritière de clan yakuza ! Petite-fille du boss du clan Takeda, elle a grandi depuis ses 7 ans dans cet univers yak', et y a appris autant à se battre comme une tarée qu'à vivre aux côtés des pires tronches de tueurs imaginables. Alors, vous pensez bien qu'une simple classe de racailles ne lui fera pas grand-chose niveau effroi... même si elle devra sans doute redoubler d'efforts pour les amadouer !


La série est souvent considérée comme un "GTO au féminin", or la comparaison ne va pas très loin et s'arrête à peu près au fait qu'un(e) prof sachant se battre va amadouer ses élèves. Pour le reste, Kozueko Morimoto offre surtout un mélange aussi surprenant que détonnant entre univers scolaire et milieu yakuza, deux mondes plutôt opposés la plupart du temps. Et c'est sur un ton résolument humoristique que la mangaka nous offre ce cocktail.


Il faut dire que, dès le premier volume, le récit est porté par une palette de personnages prometteurs et qui provoquent déjà pas mal de rires.


Côté scolaire, il y a évidemment les élèves et leurs tronches assez clichées de racailles peu fréquentables, mais il y a aussi et surtout un personnel enseignant lui aussi un pue étrange, dont le vieux proviseur Shirakawa un brin vicieux, ou l'excellente Shizuka Fujikawa, nouvelle prof au lycée, qui a quitté le collège où elle enseignait avant parce que les garçons n'étaient pas encore assez adultes physiquement. Vous l'aurez compris, la miss fantasme à la moindre occasion sur les beaux adolescents (plutôt rares au milieu des racailles), au point de vouloir monter un club de chorale avec les plus mignons minets du bahut et d'avoir parfois des propos déplacés ou légèrement trash.


Côté mafia, ce n'est pas mal non plus, entre le bel avocat Shinohara dont Kumiko est raide dingue depuis le lycée, le premier lieutenant adjoint Wakamatsu un peu lourdaud, les sbires très boulets, le terrible gangster Tenkai aux yeux de biche, ou les autres gangs aux noms ridicules.


Mais entre les deux, c'est évidemment Kumiko qui met tout le monde d'accord. Sous son allure de jeune minette à couettes et à lunettes, celle qui est vite surnommée Yankumi cache un temporairement du tonnerre, qu'elle laisse volontiers éclater chez elle (à coups de mandales sur ses sbires, par exemple), mais qu'elle tente tant bien que mal de cacher au lycée... Malheureusement, son statut de petite-fille de parrain de la mafia sachant se bastonner manque constamment de ressortir, ce qui crée nombre de situations délectables. On lui balance des billes de pachinko en plein cours ? Hop, elle les chope en plein vol avant de faire mine qu'elle ne comprend rien à ce qui se passe. Un de ses élèves est sur le point de se faire tabasser par d'autres adolescents ? Elle part défoncer la méchante bande en toute discrétion (ou presque).


Tant et si bien que l'on s'amuse beaucoup à la lecture. Quand ce ne sont pas les personnages secondaires qui font ou disent n'importe quoi, notre héroïne prend le relai. On s'amuse avec les quiproquos qu'elle crée : tout le monde au lycée croit qu'elle a les pétoches alors que non, elle joue les gourdes pour ne pas éveiller la curiosité, elle dupe son monde, mais sa façon de partir au quart de tour est souvent délicate à contenir, si bien que l'un de ses élèves, le beau gosse de la classe Shin Sagawa, se montre déjà curieux vis-à-vis de cette femme qui semble cacher bien des choses. Et dans le gang Kuroda, elle impose sa loi de petite-fille du boss avec caractère, quitte à prendre quelques décisions riches en problèmes quand son grand-père est convalescent. Difficile de ne pas craquer devant cette héroïne de caractère, aussi amusante qu'impressionnante.


Bref, on passe un bon moment, on se marre plus d'une fois, mais l'auteure n'oublie pas de mettre en place un fond plus conséquent en croquant déjà un background pour certains personnages, comme Shin dont on découvre un peu le passé avant d'arriver au lycée Shirokin, ou l'avocat Shinohara dont on apprend l'origine du lien avec le grand-père de Kumiko. On a hâte de voir ces éléments de fond prendre plus d'ampleur.


Graphiquement, on a quelque chose de très typé josei, assez épuré, ayant fortement tendance à délaisser les décors au profit des personnages. Pour ceux-ci, le trait est un brin inégal, mais véhicule beaucoup de choses, les bouilles des différents protagonistes (qu'il s'agisse de notre héroïne, de Shizuka, de Tenkai est ses yeux improbables, du proviseur ou des différentes brutes) véhiculant bien l'humour. Le découpage, lui, reste classique, net, assez posé, ce qui n'empêche aucunement les cases d'être très animées. Et un constat s'impose : entre son univers très masculin, son personnage féminin de caractère et la petite touche de féminité dans le graphisme, la série a de quoi plaire autant aux garçons qu'aux filles.


Partagé entre cadre scolaire et univers mafieux, Gokusen trouve un savant équilibre où perce une héroïne de caractère déjà savoureuse. La série part sur de très bonnes bases !


L'édition française nous offre un joli rapport qualité/prix. Pour moins de 8€, on a droit à un grand format à l'impression honnête et à la traduction globalement convaincante et dépourvue de grosses fautes. Seul le papier paraît un peu en deçà, sans être mauvais pour autant. Et la tranche promet de nous offrir une très jolie frise, une fois tous les tomes mis les uns à côté des autres !


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
16 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs