Die Wergelder Vol.1 - Actualité manga
Die Wergelder Vol.1 - Manga

Die Wergelder Vol.1 : Critiques

Wergelder

Critique du volume manga

Publiée le Mercredi, 24 Janvier 2024

La venue du grand Hiroaki Samura au Festival International de la Bande Dessinée d'Angoulême semblait être le moment idéal pour que Pika Edition lance en France Die Wergelder, une oeuvre que l'éditeur semblait avoir dans son panier depuis un bon moment. Il s'agit du deuxième titre de l'auteur dans le catalogue de cette maison d'édition, après l'excellent et imprévisible Born To Be On Air! dont on ne se lasse pas. D'abord prépubliée dans le magazine Nemesis de Kôdansha (un drivé du magazine Shônen Sirius) au Japon avant d'être transférée en 2018 dans le Shônen Sirius suite à l'arrêt du Nemesis, Die Wergelder est une série que le mangaka poursuit tranquillement, parallèlement à ses autres projets: depuis son lancement en juillet 2011, seuls 7 tomes ont vu le jour, le 7e volume étant paru au Japon le 9 janvier dernier.

Quelque part en Chine, une femme ravissante nommée Jie Mao, au sein de la maison close où elle sert de "remplaçante", laisse son client du jour assouvir ses plus violentes pulsions, avant de... tuer l'homme de sang-froid. Se nommant en réalité Träne (a priori), cette beauté borgne allemande n'était pas là par hasard, et semble mue par un profond désir de vengeance. A l'évocation du nom de son village natal de Kiebitzenberg, la victime a tout juste le temps d'écarquiller les yeux, comme rattrapé par un sinistre passé, avant de succomber. Puis à une autre époque, au Japon, Shinobu, une jeune paumée qui s'apprêtait à fuir avec son copain yakuza, est rattrapée par la hiérarchie de celui-ci: si elle ne veut pas subir les pires tortures de la dénommée Soli (ne vous fiez pas à son minois adorable, car c'est une foldingue), elle a tout intérêt à obéir aux ordre d'Azuma, le chef du clan, qui compte l'envoyer en tant que guide sur son île natale Ishikunagi où doit se dérouler une transaction avec un clan rival dirigé par le dénommé Shindo/Kudo. Sur place, il va de soi qu'absolument rien ne va se passer comme prévu, car c'est au clan qui parviendra à duper l'autre. Et comme si cela ne suffisait pas, l'irruption d'une mystérieuse femme-assassin que personne ne connaît plonge bientôt les lieux dans un bain de sang, en poussant bientôt Shindo a faire appel à sa propre tueuse, une splendeur froide aussi belle dans sa robe chinoise que mortelle dans le moindre de ses coups.

Vous n'avez pas tout compris à ce pitch que l'on a volontairement laissé assez mystérieux ? C'est tout à fait normal, et c'est volontaire de la part du mangaka, puisque celui-ci prend d'abord le parti de nous proposer une narration non-linéaire qui jongle quelque peu entre les époques, les personnages et les lieux pour, petit à petit, nous inviter à retracer la place que vont prendre les différents visages dans tout ceci, et à découvrir plus ou moins quelles sont leurs motivations. Le procédé est ici assez efficace, car on suit avec intérêt ces figures qui, pour la plupart, restent encore très nébuleuses.

Dans l'immédiat, on profite alors surtout de deux choses, la première des deux étant tout simplement le charisme qu'imposent petit à petit, chacune à leur manière, les différentes héroïnes, puisque l'on sent déjà bien ici que ce sont les femmes qui seront en avant, et plus particulièrement des femmes aussi belles que fortes, dangereuses et vénéneuses, comme les aime régulièrement l'auteur dans ses oeuvres. De Träne à Shinobu en passant par Soli et évidemment la femme en tenue chinoise (cette dernière étant même le point de départ de la genèse du projet), chacune de ces femmes a son petit quelque chose, ainsi que sa part de mystère que l'on a envie de découvrir, tandis que l'on comprend qu'il ne vaut mieux pas les embêter (bon, sur ce dernier point, Shinobu est quand même un peu à-part pour l'instant, même si elle a un côté provocateur délicieux). Ensuite, il y a, bien sûr, le style graphique inimitable de Samura: avec son trait riche, fin et ciselé, l'auteur se fait plaisir dans des premières scènes d'action joliment chorégraphiées (mention spéciale à la femme en robe chinoise) et dotées de plusieurs angles de vue très ambitieux et parfaitement menés, tout comme il nous annonce déjà la couleur avec une violence qui promet d'être assez extrême et qui va jouer sur différents créneaux: meurtre, torture, drogue, prostitution... avec tout ce que ce dernier point pourra impliqué en terme de nudité, de sexe et de BDSM, tout ceci ayant un bon petit goût de cinéma dit "Pinky Violence", assez typique de certaines réalisations nippones des années 1970 à base de violence, de femmes badass à souhait, de nudité féminine et d'érotisme "gentillet" (l'un des plus célèbres exemples de ce courant étant le film "La Femme Scorpion" de Shun'ya Itô, qui est justement une des références de Samura).

Dans l'ensemble, la mission est très bien accomplie avec ce premier volume: derrière une narration assez stimulante, se lance une quête de vengeance très adulte, portée à la fois par des figures féminines qui en imposent et par l'inimitable dessin d'un artiste très doué pour ce registre. Restera à voir comment Samura, sur la longueur, compte développer cette intrigue un peu défouloir.

Cette chronique étant basée sur une épreuve numérique fournie par l'éditeur, il reste difficile de parler de la qualité éditoriale, mais on peut au moins souligner l'efficacité de la traduction effectuée par Ryoko Akiyama.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
16 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs