Cléopâtre - Actualité manga

Cléopâtre : Critiques

Cleopatra

Critique du volume manga

Publiée le Mercredi, 29 Janvier 2020

Autrice assez importante de l'histoire du shôjo, ayant participé à ouvrir et à renouveler le genre à partir des années 60-70 (notamment en incorporant des sujets historiques dans certaines de ses oeuvres) aux côtés de noms encore plus importants comme Moto Hagio, Riyoko Ikeda ou Keiko Takemiya, Machiko Satonaka, comme beaucoup de grandes figures féminines de cette période, reste malheureusement peu éditée dans notre pays, mais les éditions Black Box ont eu la bonne idée de s'y essayer à deux reprises il y a quelques années. Tout d'abord en octobre 2014 avec La vie de Raphaël, un one-shot plutôt récent dans la carrière de l'autrice (il date de 1996) qui revenait avec une certaine réussite sur la vie du célèbre peintre. Puis en juin 2015 avec le one-shot de 190 pages qui nous intéresse aujourd'hui: Cléopâtre.

Publiée dans le magazine Shoujo Friend de Kôdansha en 1975 dont en plein de la décennie la plus prolifique de la mangaka, l'oeuvre nous offre une vision historique et romancée de la vie de la plus célèbre reine d'Egypte. Enfin, une vision surtout romancée. Très, très romancée.

Après des toutes premières pages exposant très vite les grandes lignes historiques autour des origines de Cléopâtre, le récit nous plonge plus concrètement à une époque où Cléopâtre, encore âgée de 18 ans et récemment devenue reine, doit faire avec la menace de Rome à l'encontre de son pays. Sous l'impulsion de Jules César, la présence romaine est partout, son expansion se poursuit, et les choses vont encore prendre un nouveau tournant lorsque la reine d'Egypte et le leader romain se rencontre. Il est subjugué par sa beauté, elle se laisse happer par son charisme. Ils vivront ensemble l'une des plus célèbres histoire d'amour de l'Histoire antique, mais il ne s'agit là que de la première grande étapes amoureuse de Cléopâtre: sa beauté attire toujours plus les regards, à la mort de César elle tombe dans les bras de Marc-Antoine qui a lui aussi succombé à ses charmes, sans forcément prévoir que son pouvoir d'attraction a quelque chose d'empoisonné pour les hommes qui l'entourent...

Si Machiko Satonaka reste fidèle aux très grandes lignes de la vie de Cléopâtre telle qu'on la connaît à travers les documentations (ses rivaux au départ, ses idylles avec César et Marc-Antoine, la naissance de Césarion, la manière dont sa présence a peut-être influé sur les choix politiques plus tyranniques de César vers la fin de son règne, sa mort etc, etc...), il apparaît très vite évident que la mangaka souhaite surtout insister sur un aspect en particulier: ses relations amoureuses avec Jules César puis avec Marc-Antoine, chacune des deux occupant grosso modo une moitié de l'ouvrage. Et à partir delà, mieux vaut ne plus voir le récit comme historique (tel que pouvait l'être beaucoup plus le one-shot sur Raphaël), car Satonaka nous offre avant tout de bons gros poncifs sentimentaux et dramatiques dignes d'une tragédie shakespearienne, mais en tout de même moins bien écrit. Car ici, la mangaka semble faire toujours plus dans la mièvrerie et le larmoyant, à grand renfort de sentiments très exacerbés chez Cléopâtre, d'amours paraissant évoluer beaucoup trop vite à cause du format bref (sérieusement, on a l'impression qu'elle tombe amoureuse de Marc-Antoine en deux secondes alors que son Jules est mort un peu de temps avant)... ça ravira éventuellement les amatrices et amateurs de récits un peu à l'eau de rose, mais on en attendait forcément un peu plus. Il y a bien des idées intéressantes: le pouvoir d'attraction de Cléopâtre, le complexe, difficile voire impossible partage entre amour et exercice du pouvoir... mais ces aspects-là sont trop rushés, et, surtout, c'est toujours la faiblesse sentimentale de Cléopâtre qui semble prendre le dessus. Jamais la reine ne semble vraiment diriger son pays ou montrer ne serait-ce qu'un peu de force de caractère, elle apparaît constamment comme une victime passive de ses sentiments.

Reste que le coup de crayon, lui, reste efficace dans son genre. Bien ancré dans son époque, il appuie bien le côté fleur bleue en faisant appel à des yeux teintés d'étoiles et à une forte dramaturgie, qui se ressent aussi dans la mise en scène des personnages avec une héroïne aux poses parfois théâtrales. Cléopâtre, avec son physique gracile et son allure tantôt douce tantôt élégante, dégage du charme. Et côté décors et costumes, c'est assez présent et suffisamment soigné, même s'il ne vaut mieux pas y chercher une grande rigueur historique.

En somme, loin d'un titre comme celui sur Raphaël, ce one-shot sur Cléopâtre s'apparente beaucoup moins à un récit historique qu'à une tragédie un peu à l'eau de rose. Soyez-en donc bien avertis, d'autant que parfois l'autrice en fait des tonnes sur le mélo. Nul doute que ça plaira à une tranche du lectorat, et qu'il reste intéressant de pouvoir lire en France un shôjo de cette période (car ça reste trop rare). Néanmoins, on en attendait forcément un peu plus.
   

Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
12 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs