Auberge de la vie (l') Vol.1 - Actualité manga
Auberge de la vie (l') Vol.1 - Manga

Auberge de la vie (l') Vol.1 : Critiques

Saihate kara Toho Go-fun

Critique du volume manga

Publiée le Vendredi, 05 Avril 2024

Elle nous avait conquis en 2021-2022 avec la série en trois tomes Le goût des retrouvailles: la mangaka Nozo Itoi est de retour aux éditions Akata en ce mois d'avril avec L'Auberge de la vie, une oeuvre en deux volumes qu'elle a dessinée en 2020-2021 pour le compte du magazine Comic Bunch des éditions Shinchôsha, un magazine proposant des mangas orientés seinen divers et variés comme la tranche de vie sensible My Girl de Mizu Sahara, le récit d'action Sôten no Ken ou, plus récemment la fiction historique Rose Bertin. De son nom original "Saihate kara, Toho 5-fun" (littéralement "À 5 minutes à pied du point le plus éloigné"), cette courte oeuvre, malgré son côté intimiste, a eu la chance de connaître une adaptation en série live de 8 épisodes en 2022 dans son pays d'origine.

L'histoire nous immisce auprès d'une jeune femme nommée Sumomo Kôda, alors qu'elle semble sur le point de prendre une décision radicale concernant son existence: armée de sa liste des dix choses à faire avant de mourir, elle descend en bus au niveau du cap de Shide, un lieu tristement surnommé le "cap de la mort ", car en ce lieu viennent chaque mois un nombre incalculable de personnes pour se suicider en se jetant du haut de la falaise. Notre héroïne fait partie des personnes qui commencent sérieusement à songer à en finir, elles aussi, tant elles sont persuadées que plus rien de bon ne peut leur arriver dans la vie et que, quelle que soit les décisions qu'elles prendront, celles-ci seront mauvaises. Pourtant, avant de songer éventuellement à vraiment passer à l'acte, Sumomo doit encore accomplir la dixième et dernière chose de sa liste: retrouver Yucoco, une starlette de son enfance qui a visiblement marqué en profondeur sa vie, et qui se trouverait peut-être dans les parages. C'est là que le destin entre en marche, puisqu'elle ne tarde par à retrouver sa cible sous le nom de Yûko Shiraishi, aujourd'hui devenue la responsable de l'auberge Gilda, un lieu où l'on peut manger et dormir à son aise sous les bons petits soins du chef de cuisine Monsieur Zen et de l'employé Ibuki. En se voyant offrir par Yûko l'opportunité de travailler pendant trois mois à l'auberge, Sumomo va avoir l'occasion de côtoyer des clients songeant eux aussi à la mort pour des raisons diverses et variées. Et la façon dont les membres de l'auberge vont redonner un sens à leur existence risque bien de la changer, elle aussi.

Dans sa globalité, ce premier tome, hormis quelques petites exceptions, suit un schéma standard où chaque chapitre s'intéresse au cas d'un nouveau client, ce qui est l'occasion pour Nozo Itoi d'effleurer un paquet de sujets: pressions et harcèlement au travail, dérives du show-business, deuil, moqueries envers l'apparence physique, rapports familiaux compliqués, harcèlement scolaire, sentiments amoureux et écarts qu'ils peuvent provoquer... Tous les sujets évoqués par l'autrice sont très humains. Et quand bien même le format fait que la mangaka passe assez vite sur chaque cas, elles parvient à chaque fois à dégager chez ses personnages beaucoup d'humanité grâce à une écriture efficace, et tout compte fait à toucher juste quand l'heure est venue pour eux, sous l'impulsion du personnel de l'auberge, à repartir de l'avant, quitte pour ça à ce qu'ils fassent également le point sur leurs propres erreurs.

Mais Itoi ne s'arrête pas tout à fait à ce simple schéma, puisque chaque cas est aussi l'occasion de percer, petit à petit, le propre background de chacun des quatre employés, que ce soit Ibuki (dont, d'ailleurs, l'évolution de la relation avec Sumomo sera aussi un autre axe de lecture), Monsieur Zen, Sumomo dont on découvre petit à petit les raisons du mal-être au fil des souvenirs qui se rappellent à elle ainsi que ce que Yucoco a pu lui apporter autrefois, et bien sûr Yûko elle-même, dont le côté à première vue salvateur cache aussi un passé difficile que nous n'allons pas spoiler ici. La mangaka tire une force supplémentaire non seulement du soin suffisant accordé au background de chacun de ses personnages, mais aussi de sa faculté à offrir un récit aucunement pesant malgré les sujets évoqués, l'ensemble ayant même quelque chose d'assez lumineux sous son dessin tout en douceur, en sensibilité et en clarté.

Il s'agit donc ici d'un premier volume fort joli pour ce diptyque dont on attendra la suite avec beaucoup d'intérêt, tant l'autrice, depuis son superbe "Le goût des Retrouvailles", ne semble avoir rien perdu de sa faculté à aborder des thématiques très humaines avec finesse.

Au niveau de l'édition française, c'est du tout bon pour Akata: la jaquette reste fidèle à l'originale nippone tout en s'offrant un logo-titre très propre conçu par Clémence Aresu, la traduction effectuée par Alexandre Goy sonne très juste, le lettrage signé Tom "spAde" Bertrand est très soigné, le papier est bien épais et agréable à manipuler malgré une petite transparence par moments, l'impression est de très bonne qualité, et les quatre premières pages en couleurs (absentes de l'édition japonaise, soulignons-le) constituent un petit bonus très sympathique.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
15.75 20
Note de la rédaction