Critique du volume manga
Publiée le Mercredi, 23 Avril 2014
Les hôtesses de l'air. Depuis toujours, les clichés sur leur beauté, leur côté rassurant ou leur uniforme en font un fantasme persistant, et c'est pour ça qu'à la base, Sae en est devenue une. Eternelle célibataire de 23 ans, elle pense enfin attirer les hommes en choisissant ce métier, mais elle risque de tomber de haut, car en plus de ne pas du tout avoir un caractère d'hôtesse, elle ne peut que constater que la situation souvent vue comme enviable de ces filles passant leur vie dans les airs à voyager, et en réalité tout ce qu'il y a de plus précaire, autant côté financier que côté sentimental !
Nouvelle série en 4 tomes des éditions Black Box, Appelez-moi hôtesse nous plonge dans un sujet assez rare en manga et également assez méconnu, en s'appliquant à faire ressortir les conditions de vie pour le moins particulières des hôtesses de l'air (et des stewards), au fil des aventures de notre héroïne, Sae, et de ses amies et collègues, principalement Yuka, stéréotype de la belle hôtesse plaisant énormément aux hommes, et Megumi, célibataire endurcie de 28 ans qui se fiche de l'amour.
Au fil de chapitres plus ou moins indépendants (souvent de petites histoires dans la grande), Hanayo Hanatsu croque la vie loin d'être évidente de ces personnes au travail très encombrant. Certains chapitres sont l'occasion de voir la tenue et le comportement très stricts qui sont demandés : il faut toujours être au service des clients même quand ceux-ci sont désagréables, la tenue doit être impeccable, les horaires doivent être rigoureusement tenus... au risque de réprimandes parfois sévères. D'autres moments permettent de mieux entrevoir la difficulté d'avoir une relation amoureuse stable : certains comme le steward Heboki s'en accommodent en voyant rarement leur petite amie, d'autres comme Yûka en profitent pour vivre dans le luxe auprès de riches clients partout où elles vont, d'autres encore comme Megumi semblent très bien se passer de toue relation sentimentale... Et, en toile de fond, il y a toujours la question financière de ce travail : avec la fin de la bulle économique plusieurs années auparavant, le travail autrefois si gratifiant d'hôtesse est devenu un métier où il est désormais difficile de joindre les deux bouts, encore plus pour une fille comme Sae, qui a un mal fou à bien gérer son argent.
Appelez-moi hôtesse s'offre donc bel et bien un vrai fond, pas toujours approfondi jusqu'au bout, mais qui a à coeur d'exploiter comme il se doit un sujet un peu atypique. Mais qu'on se le dise, la série semble bien partie pour être avant tout une oeuvre assez humoristique et un peu sentimentale, avec une approche surtout féminine, comme le laissent voir le casting surtout féminin, le ton très axé sur les tourments de demoiselles, et le style graphique rappelant pas mal de josei. Pour tout cela, on peut compter sur l'héroïne, Sae, à l'opposé des clichés sur les hôtesses : un peu maladroite, très peu rigoureuse, capable de partir au quart de tour et un brin futile dans ses relations avec les autres, c'est une fille loin d'être parfaite, qui a parfois des difficultés à prendre sur elle et à faire la part des choses, et qui est bien plus occupée à penser à elle et à sa recherche d'un mec qu'à faire parfaitement son métier, ce qui aurait pu, plus d'une fois, lui valoir un renvoi, si à côté de ça elle ne montrait pas à certaines reprises une prise d'initiative bienvenue. Si elle peut parfois être irritante, surtout à cause de sa recherche systématique d'un mec ou de son comportement un peu trop futile (elle se plaint de son salaire pour manger par exemple, mais à côté de ça elle ne pense qu'à s'acheter des sous-vêtement de luxe qu'elle ne peut montrer à personne), elle est surtout une héroïne dynamique, amusante, et agréable à suivre dans ses imperfections, et apporte forcément à l'oeuvre un charme assez unique, encore renforcé par ses principales amies et collègues. D'un côté Yûka qui profite totalement des fantasmes qu'elle véhicule pour vivre comme une pacha, de l'autre Megumi qui ne croit aucunement en l'amour, ce qui ne l'empêche pas de connaître une relation... purement sexuelle ?
Ce premier tome d'Appelez-moi hôtesse est une lecture sympathique, qui s'offre un assez bon équilibre entre son sujet rarement vu et son humour assez féminin et mûr. Un titre à tester, en attendant de voir si le plaisir de lecture se maintiendra sur les trois volumes suivants.