Amour de cuisinier (un) : Critiques

Kei ne ménage pas ses efforts pour devenir cuisinier. C’est dit, il le sera, et il apportera de l’amour et du réconfort aux autres grâce à sa cuisine. Il prend sa formation très au sérieux, quitte à devoir se lever à l’aube pour un temps de trajet tout bonnement hallucinant, encore plus important qu’avec les transports parisiens ! Il ne lâchera rien et compte bien s’y accrocher… Toutefois, la fatigue se fait sentir et les choses ne sont plus aussi simples. Il menace même sa réussite, à force de fatigue. Il va alors accepter un plan un peu louche d’un étudiant louant une chambre dans une demeure habitée déjà par trois autres locataires. Le loyer et la proximité de l’école défiant toute concurrence, Kei accepte sans plus réfléchir. Mais quand il va revenir pour s’installer, la surprise sera de taille. Les trois autres locataires, trois jeunes hommes, sont des plus bordéliques et les mots ordre et ménage ne doivent pas signifier grand-chose à leurs yeux. Mais quand il leur fait à manger pour leur première soirée à quatre, Kei gagne le cœur de ses colocataires et les emporte dans une satisfaction gustative rare. Il aura, comme son grand-père, touché le cœur de ces garçons avec sa cuisine.

Rassuré quant à sa vocation, Kei va s’y lancer de plus belle en participant même à un concours que Shohei, le colocataire aspirant à devenir acteur, va juger chez eux. Il se rapproche de plus en plus de ce garçon, qui se glisse dans son lit pour réclamer à manger quand il est ivre, l’entraîne dans un club de dessin où il doit poser presque nu et dans des positions équivoques… Quand Shohei l’embrasse, Kei ne sait plus comment réagir, et quand bien même il aurait envie que cela recommence, il ne s’en sent pas capable. Il lui faudra un électrochoc pour réaliser ce dont il a vraiment envie. Malgré les baisers intempestifs, les agressions au milieu de la nuit, et ce rayonnement dont il fait preuve, Shohei est un bon garçon et il va pousser Kei à réaliser son rêve, et plutôt deux fois qu’une ! En effet, les deux jeunes gens partagent un secret dont eux-mêmes n’ont pas confiance. Quant à Yasuhisa et Tsubasa, les deux autres jeunes gens, ils se rapprochent dans leur coin, ne sachant trop où cela les mène. La petite histoire nous apportant le point de vue de Tsubasa est intéressante, dans la mesure où l’on comprend son adoration qui, couplée à sa timidité, le mène dans une impasse. Les émotions de ces quatre hommes sont touchantes, réalistes et même si un peu rapides, on les accepte et la narration se permet cette facilité sans problème, sans que cela ne nous dérange. Les protagonistes sont variés, bien différents les uns des autres, jusque dans leurs représentations graphiques qui déterminent parfaitement leurs personnalités. Rien à dire, c’est une affaire qui marche, malgré les quelques facilités notamment sur la fin. On pardonne les rares grossièretés, contre un récit réussi et attachant.

Point bonus encore, les graphismes. Ils amènent une réelle dose de sensualité dans le récit. Les traits sont ronds, courbes, les visages et les positions très expressives. Vraiment, le trait de l’auteur apporte quelque chose au manga qui prend alors une dimension supplémentaire dans l’émotivité de ses personnages. Les protagonistes sont typés, fins, différents les uns des autres. Ils montrent leurs émotions clairement et à part quelques erreurs de proportions ou des chibis un peu simplets, le trait est sans défaut. Les arrières plans sont toutefois un peu simples, et l’auteur a un peu d’exagération notamment dans les rougissements et la honte des personnages. Bref, un bon petit one-shot qui montre bien les sentiments des jeunes adolescents et adultes, et qui nous séduit par sa fraîcheur. Junko est sans aucun doute une mangaka de talent, qu’il est de bon ton de lire et d’apprécier quand on voit la qualité qui découle de ses œuvres.