Critique du volume manga
Publiée le Mercredi, 12 Juin 2024
Jeune fille qui ne trouvait pas sa place dans son monde d'origine, Alice a atterri dans une version étonnante de Kyoto, au coeur d'un monde où le plus important, pour pouvoir y rester, est de trouver sa vraie vocation, de comprendre qui l'on veut être et d'être utile. Après quelques mésaventures l'ayant temporairement faite vieillir, elle est désormais décidée à se faire sa place dans cette ville différente et à en apprendre davantage dessus. Pour ça, elle se met en quête d'un mystérieux cartographe qu'elle a la chance de très vite trouver, non sans quelques dangers blessant notamment Hachisu, qui a tout fait pour la protéger. Il a beau sembler avoir dans la vingtaine, cela fait déjà quarante ou cinquante ans que cet homme est arrivé dans ce monde, y a nourri un grand amour avec sa femme désormais partie vers les cieux. Et à son contact, Alice apprend notamment que l'argent est ici remplacé par des sortes de points de vertu, donné à chaque fois qu'on se rend utile. Voici alors notre héroïne encore plus décidée à trouver sa place, en ayant l'idée d'ouvrir une échoppe vouée à ses livres et à la lecture ! Bientôt, elle a l'occasion de rencontre la princesse Ayame, la jeune soeur du prince qui pourrait bien être Ren, le garçon de son enfance. En voulant saisir cette chance pour le voir, le jeune garçon la reconnaîtra-t-il seulement ?
Après un premier volume très plaisant dans l'ensemble, l'heure est déjà venue pour Alice in Kyoto Forest de tirer sa révérence avec ce deuxième et dernier tome, si bien qu'une constatation s'impose immédiatement: même si l'on sent bien que toutes les principales grandes lignes de cette version manga sont bouclées, il va falloir accepter le fait que beaucoup de choses plus amples, après avoir été esquissées, restent en suspens, dans la mesure où nous avons affaire ici à l'adaptation du seul premier volume d'une série de romans qui en comporte donc plusieurs. Ce manga n'est alors, en quelque sorte, qu'une porte d'entrée vers les romans. une porte d'entrée certes soignée et se suffisant globalement assez bien à elle-même, mais qui a malgré tout quelque chose de frustrant, d'autant plus que les romans d'origine sont à ce jour inédits en France.
Une fois cette mise en garde faite, avouons-le, la lecture reste agréable ici, à la fois grâce au dessin de Niwa Haruki, à son application certaine pour bien adapter le premier roman de l'oeuvre d'origine de Mai Mochiduki, et à quelques surprises plutôt bien menées au sujet de Ren vers la fin du tome. Cependant, une part plus pointilleuse du lectorat risque bien de tiquer face à certaines grosses facilités scénaristiques parfois presque ahurissantes. On peut encore tolérer la facilité avec laquelle Alice tombe directement sur le cartographe, en revanche toute la petite affaire d'enlèvement d'Ayame par une secte frôle le ridicule (et attention, car les dernières lignes de ce paragraphe vont un peu spoiler), entre la façon dont Alice croise justement par hasard un membre de la secte, le fait que celui-ci perde pile à ce moment-là une carte de visite, le simple fait que ces ahuris aient des cartes de visite (des cartes de visite ! Pour une secte censée agir dans l'ombre et dont personne n'a jamais réussi à trouver l'emplacement ! WTF ?! ), le "666" de gamin en guise de code de la porte (sérieusement...), les motivations toutes pourries de cette secte (en gros, ils sont méchants pour le plaisir d'être méchants, et basta), et le deus ex machina divin final (même si l'histoire du cartographe a vaguement préparé ça).
A vous de voir si votre niveau de tolérance au n'importe quoi scénaristique est suffisant lors de cette grotesque affaire d'enlèvement. Mais si l'on passe outre ceci, tout le reste du volume s'avère tout à fait sympathique. Ainsi, sans satisfaire totalement, Alice in Kyoto Forest conserve un certain charme au fil de ce deuxième volume, et constitue globalement une pioche tout à fait honorable dans la collection Moonlight.