Critique du volume manga
Publiée le Lundi, 02 Septembre 2024
Chronique 2 :
La "revanche" d'Akane sur le futatsume Rhien n'a pas été sans conséquence: en manquant de respect envers son ainé plus gradé qu'elle, la jeune fille s'est notamment attiré l'ire de maître Hassho, qui refuse alors de lui enseigner le moindre récit tant qu'elle n'aura pas gagné en maturité. Loin de se laisser démonter, Akane entreprend alors de redorer son blason en essayant de participer au prochain spectacle de Rokuro, mais pour ça il lui faut à tout prix apprendre un nouveau banashi, puisque son répertoire d'histoires reste encore faible !
C'est dans ce contexte délicat qu'elle attire l'attention de maître Urara, une femme charismatique et très talentueuse, qui entend bien laisser son nom dans l'histoire du rakugo en tant que femme. Seul hic: "Ocha kumi", l'histoire qu'Urara a décidé d'enseigner à Akane, n'est pas du tout faite pour l'adolescente en étant dominée par un personnage d'oiran séductrice et fourbe... Akane saura-t-elle alors, trouver comment jouer correctement ce banashi ? La question est d'autant plus importante pour elle que l'enjeu est grand: si son "Ocha kumi" ne convainc pas vite Urara, elle pourra dire au revoir au spectacle de Rokuro, et donc à l'espoir de redorer son blason auprès de maître Hassho !
La majeure partie de ce sixième volume se consacre alors à l'enseignement à Akane de ce fameux récit par Urara, pour un résultat qui ne montre pas de surprise particulière mais qui, une nouvelle fois, se révèle rondement mené, principalement en mettant réellement à l'épreuve Akane: en effet, comment interpréter convenablement une oiran quand on n'est soi-même qu'une adolescente sans expérience de séduction ? Pour cela, la jeune fille va devoir expérimenter, tenter des choses quitte à d'abord se passer un peu la figure, comme lors de sa sortie avec la bonne poire Jumbo qui la perce vite à jour ! Et à l'arrivée, deux idées essentielles sont à retenir pour l'évolution de notre héroïne en tant qu'apprentie rakugoka: l'importance à la fois de pouvoir s'appuyer sur autre chose que les connaissances théoriques, et de savoir s'adapter face à ses propres limites.
La lecture reste d'autant immersive et prenante que les auteurs glissent à nouveau plusieurs détails sur l'univers du rakugo (ne serait-ce que la pièce "Ocha kumi" elle-même, et qu'Akane reste facilement séduisante dans son côté passionné et dans son gain de maturité: même si parfois elle fonce tête baissée car elle veut vite devenir futatsume, elle sait prendre en compte les remarques qu'on lui fait pour progresser, et sait également faire de ses craintes et de ses limites un moteurs stimulant pour avancer de plus belle. Dans fond, la recette est très standard de pas mal de shônen surtout nekketsu,mais appliquée au domaine du rakugo et à une telle héroïne elle reste addictive.
Enfin, ce sont aussi les personnages gravitant autour d'Akane qui continuent de nous intéresser, eux aussi: que ce soit Urara dont les ambitions en tant que femme dans le rakugo sont fortes, Hikaru dont on attend de voir le rôle futur, ou surtout Kaisei Arakawa sur qui on découvre certaines choses et qui se place toujours plus fortement comme le rival à surpasser pour notre héroïne, Akane-banashi continue d'en avoir sous le coude pour facilement nous maintenir accrochés sur les tomes à venir !
Chronique 1 :
Le comportement d'Akane ne fait pas l'unanimité, si bien que maître Hassho refuse de lui apprendre un seul récit. Néanmoins, la jeune zenza tape dans l'œil d'Urara Ransaika, une shin'uchi qui aspire à de grandes ambitions dans le monde du rakugo, bien qu'elle soit une femme. C'est pourquoi elle accepte d'enseigner à Akane une histoire qu'elle pourra performer lors du spectacle de Rokuro Kashiwaya, son ainé. Mais la tâche ne sera pas aisée, puisque le récit proposé à la zenza ne semble tout simplement pas lui correspondre...
Le personnage d'Urara Ransaika s'est avéré marquant, aussi bien par son charisme que par sa position qui nourrit le discours de la série à l'égard du Rakugo, art vieillissant et codifié qui gagnerait éventuellement à évoluer avec son époque. La shin'uchi devient le maître temporaire d'Akane dans un segment toujours aussi saisissant dans sa manière de varier la représentation du Rakugo et d'en montrer les subtilités tout en insistant sur ces idées de fond.
Par l'histoire que transmet maître Urara à sa jeune disciple, c'est un nouveau problème que la jeune zenza doit honorer. La formule est donc classique, mais l'écriture de Yuki Suenaga permet d'exploiter le schéma avec un dynamisme particulièrement saisissant, permettant de créer un vrai suspense dans l'appropriation de l'héroïne de l'histoire d'Ocha Kumi, et par conséquent de nous laisser captifs de ce dénouement d'arc. Tout reste très intelligent dans le développement de l'aventure, que ce soit les idées visuelles pour donner vie à ce nouveau récit, l'angle abordé pour résoudre la problématique et faire évoluer Akane, ou l'idée féministe qui se dégage de ce volet. Le tout en suivant un fil rouge présent depuis l'opus précédent, l'enjeu étant aussi pour la vedette de la série de faire ses preuves auprès d'ainés et de mentors rebutés par ses comportements récents. Tout s'emboîte donc avec équilibre et justesse, faisant du passage Ocha Kumi un condensé impeccable des diverses forces de l'œuvre.
Puis, la transition vers l'arc suivant n'a rien pour nous décrocher. Développant finement le personnage de Kaisei Arakawa, pour l'heure l'un des plus grands rivaux d'Akane pour ne pas dire son antagoniste, elle plante les graines d'une nouvelle compétition d'ampleur qui s'annonce comme un parcours du combattant pour la protagoniste. Dans la forme, Akane-banashi reste constamment dans le récit initiatique aux codes du shônen. Mais parce que l'esthétique du Rakugo et le fond de l'œuvre prennent une place importante, ce classicisme est atténué, et l'agencement de l'histoire devient limpide et légitime.
Après 6 tomes, on reste conquis par l'œuvre de Yuki Suenaga et Takamasa Moue. La progression d'Akane est évidente, les enjeux semblent aller au-delà de la simple progression de l'héroïne, et toute la découverte du monde du Rakugo reste saisissante. Tout pour nous pousser à continuer, donc !