Manga Interview de Natsumi Aida autour de son nouveau manga Le Bourge et la Cagole
Autrice du grand succès Switch Girl !! mais aussi de C.L.A.S.S., de Virgin Complex, du très bon Ugly Princess et d'Analog Drop, Natsumi Aida est une mangaka qui n'est plus à présenter et que, depuis déjà plus d'une quinzaine d'années, Akata suit très activement en lui restant fidèle. Ainsi, après Japan Expo à Paris en 2012 et Polymanga à Montreux en Suisse en 2017, c'est à la Foire du livre de Bruxelles en Belgique que l'éditeur a invité l'autrice en Europe pour la troisième fois, dans le cadre du lancement de sa nouvelle série Le Bourge et la Cagole.
C'est autour de cette nouvelle œuvre qu'elle accepta de répondre à nos questions lors d'une longue interview, entre ses conférences et ses séances de dédicaces pendant lesquelles elles offrit de bien belles surprises à ses fans, à savoir une exposition de ses planches originales ramenées par ses soins ainsi que des origamis faits par ses mains.
Aujourd'hui, à l'occasion de la sortie cette semaine du tome 4 de la série, on vous propose de découvrir cette passionnante rencontre avec une autrice pas comme les autres, aussi gentille et reconnaissante envers son public que bavarde et franche dans ses réponses !
Natsumi Aida, merci d'avoir accepté cette interview. Une question simple pour démarrer : comment vous est venue l'idée de la série Le Bourge et la Cagole ?
Natsumi Aida : La première chose à laquelle j'ai réfléchi en créant cette série, c'est le besoin de m'adapter au magazine, dédié à un public plus adulte que ce à quoi j'étais habituée. Je me suis demandée ce qui pourrait plaire à ce public-là, et au bout de cette réflexion j'ai retenu l'idée d'une jeune mariée et de sa relation houleuse avec sa belle-mère.
De plus, je voulais éviter quelque chose de trop plat ou plan-plan, et souhaitais conserver un récit où je pourrais garder mon style graphique et exprimer mon caractère, quelque part dans la lignée des héroïnes de mes œuvres précédentes. Dans cette optique de dynamiser l'histoire, j'ai donc réfléchi, dans un second temps, à faire en sorte que les deux mariés soient issus de milieux totalement différents, en me disant que ça permettrait de jouer sur beaucoup de choses en termes de rebondissements et d'humour.
Comme vous l'avez dit, cette série a été prépubliée au Japon dans un magazine qui est un peu plus orienté pour un public féminin de jeunes adultes, à savoir le Be Love des éditions Kôdansha. Pensez-vous que la publication dans un magazine un peu plus adulte vous a permis d'écrire et dessiner des choses que vous n'auriez pas pu faire ailleurs ?
Je ne sais pas si j'aurais eu des interdits dans mes séries précédentes, mais ce qui est certain, c'est qu'étant donné qu'elles étaient destinées à un public plus jeune et étaient dans des revues plus axées sur l'aspect sentimental, je faisais en sorte que l'amour y reste l'élément principal, avant que le succès ne me permette de développer d'autres choses.
Dans Le Bourge et la Cagole, la dynamique est complètement différente. En vieillissant, le lectorat s'intéresse à plus de choses, donc il y a plus de thèmes qui peuvent être abordés, et de manière générale les rapports humains ne sont plus limités à l'amour. Ainsi, dans cette série, j'ai le sentiment que l'amour n'est pas central, qu'il ne s'agit pas du sujet principal, et que le plus important se trouve dans les relations humaines de manière générale.
Au Japon, cette série a été votre tout premier travail avec les éditions Kôdansha, alors qu'avant vous étiez restée toujours fidèle aux éditions Shûeisha et notamment au magazine Margaret. Qu'est-ce qui a motivé ce changement ?
A la base, je suis aussi une lectrice de mangas, et je lisais beaucoup de revues autres que celles de Shûeisha, notamment certaines de Kôdansha. Auparavant je n'avais pas eu l'opportunité d'aller voir ailleurs, car je dessinais des histoires d'amour et avais bien ma place chez Shûeisha pour ça.
Mais en prenant en âge, j'avais moins envie de parler de romance, or les magazines shôjo de Shûeisha ont vraiment pour directive un besoin de centraliser les choses sur l'amour. C'est là que j'ai ressenti l'envie de mieux observer ce qui se faisait chez d'autres éditeurs, et que j'ai eu une opportunité d'aller vers le magazine Be Love.
A cette époque de transition où je me demandais dans quel magazine j'allais dessiner ma prochaine série, je travaillais avec une assistante qui était aussi lectrice du Be Love et qui a été la première à me dire que ce magazine pourrait correspondre à ce que je souhaitais concevoir. Elle m'a présenté un site de matching entre éditeurs et auteurs, sur lequel les éditeurs mettent leur profil en décrivant le type d'oeuvres qu'ils font et cherchent, et c'est là que je suis tombé sur le profil de madame Ueda du Be Love, qui m'a semblé super énergique. J'ai alors appelé la rédaction de ce magazine un peu en mode sauvage pour prendre contact, et de fil en aiguille ça a abouti à notre collaboration.
Dans le bonus du tome 1 vous expliquez un peu la genèse du personnage de Manatsu : vous vouliez une femme qui soit un peu le contraire de Shûtarô. On a donc une héroïne au caractère à la fois doux et bien trempé, lumineuse et sociable, aux manières simples et spontanées, avec beaucoup de droiture d'esprit. En revanche, on se pose encore une question sur elle : pourquoi avoir choisi spécifiquement d'en faire une ex-gyaru ? Et pouvez-vous nous expliquer en quoi le statut de gyaru vous intéresse ?
D'une manière générale, lorsque j'étais lycéenne dans la deuxième moitié des années 1990, l'esthétique, la mode et l'état d'esprit gyaru/kogaru étaient très, très influents, autant dans la société que dans la culture pop. Tout naturellement, c'est donc quelque chose qui m'a impactée et beaucoup marquée. Et aujourd'hui encore, en terme d'image, les gyaru restent un peu des icônes d'une époque précise. De ce fait, c'est quelque chose de très agréable à dessiner pour moi.
Après, avec le recul, Nika de Switch Girl !! et Aku d'Analog Drop étaient déjà décrites, elles aussi, avec certains éléments typés gyaru dans leur allure et dans leur comportement. Et dans le cas de Manatsu, j'aime plutôt mélanger l'aspect gyaru avec un caractère proche de celui d'une yankee.
Mais ce qui est certain, c'est qu'il y a deux choses qui définissent le mouvement gyaru pour moi et que j'apprécie beaucoup. Tout d'abord, l'état d'esprit positif, où on veut toujours aller de l'avant malgré les épreuves, le tout avec beaucoup d'énergie. Ensuite, le fait de ne pas transiger avec ce qu'on aime, et d'exprimer à fond qui on est et ce qu'on aime à travers la mode, peu importe ce que les gens en pensent.
Justement, vos héroïnes ont toujours quelque chose d'inspirant, avec une certaine force de caractère (Manatsu en est encore une preuve). Malgré les doutes elles vont de l'avant, elle se veulent souvent franches et sans fards, elles peuvent facilement décomplexer les lectrices comme a si bien su le faire Nika de Switch Girl !!, et même quand initialement elles manquent de confiance en elles elles apprennent à gagner cette confiance, à l'image de l'héroïne d'Ugly Princess. En quoi concevoir ce type d'héroïnes vous tient à cœur ?
De façon générale, dans ma manière d'envisager les rapports humains, je ne m'intéresse pas aux gens qui n'ont pas d'opinions, car ils m'ennuient. Plutôt que d'être toujours dans les apparences, de dresser une sorte de mur ou de façade devant soi, je préfère largement les personnes qui osent la confrontation, qui n'hésitent pas à exprimer qui ils sont et à dire ce qu'ils pensent vraiment, quitte à ne pas se faire aimer. Au moins, ces gens-là sont authentiques, ne jouent pas un rôle et sont honnêtes.
Du coup, tout naturellement, c'est quelque chose que j'aime exprimer dans mes personnages : je veux qu'eux aussi montrent pleinement leur intériorité, et je suis heureuse quand ça a un impact sur mes lecteurs pour qu'ils osent à leur tour s'exprimer de la même manière.
Je suis très contente que vous me posiez cette question, car ça me confirme encore un peu plus que je parviens, dans mes séries, à transmettre la façon dont j'envisage les rapports humains.
Autrice très généreuse et désireuse de faire plaisir à ses fans, Natsumi Aida présentait pendant ses dédicaces plusieurs classeurs regroupant des planches et illustrations originales, le tout avec des commentaires traduits en français par ses soins !
Difficile aussi de ne pas parler de Yuriko qui, dans le tome 1, est le stéréotype poussé un peu à l'extrême de la belle-mère fourbe que l'on adore détester, et qui derrière ses côtés détestables peut aussi faire rire, surtout avec ses problèmes de rides et certaines de ses expressions faciales ! Comment avez-vous imaginé ce personnage ?
En travaillant pour le magazine Be Love, je me suis dit que je pouvais me permettre de dessiner un personnage plus âgé. Et en ce qui concerne ses problèmes de rides, c'est quelque chose que je n'aurais pas abordé dans mes séries précédentes, car ça n'aurait pas touché le lectorat-cible. Le fait de m'adresser à un public de femmes un peu plus âgées était donc une opportunité de mettre en scène ce genre de thématique.
D'une manière globale, plutôt que de dessiner la beauté, ce qui me plaît c'est de dessiner les imperfections comme les rides, la graisse et autres choses qui ne correspondent pas aux standards de beauté, qui sont réelles et qui font la vie. En plus de décomplexer sur ces sujets-là, ça m'amuse, alors tout naturellement je mets encore plus d'énergie dans mon dessin. Je prends beaucoup de plaisir à les dessiner, donc je pense que ça rend mes planches encore plus impactantes.
Par ailleurs, mon éditrice madame Ueda est très fan du personnage de Yuriko, m'en parlait beaucoup, me faisait beaucoup de suggestions à son sujet... Et je pense que ces échanges avec elle ont renforcé encore plus l'énergie mise dans ce personnage.
A votre avis, quelle est la part de Manatsu, de Shûtarô, voire de Yuriko ou de Masa en vous ? Et que représentent pour vous ces personnalités si différentes et marquées ?
Quand je crée et dessine des personnages si différents, ils ne sont pas censés me représenter. Mais même si je n'en ai pas forcément conscience, je me base sur mon expérience et sur mon vécu pour tout un tas de situations qui les concernent, alors tout naturellement il y a une part de moi en chacun d'eux, car je me limite à ce que je connais, à ce que j'ai moi-même pu expérimenter ou observer.
Je me rends compte parfois que mes personnages sont « limités » à moi et expriment donc une partie de mon vécu, parce que quand je rencontre des gens dans la vraie vie et qu'ils se comportent ou pensent d'une façon totalement différente de moi, ça me marque voir ça me choque, et ça me paraît logique. Là, je me dis alors que la variété de personnages que je crée est encore insuffisante, car certaines façons d'être et de penser dans la vraie vie me sont encore étrangères.
Même dans l'exemple du personnage de Yuriko, que je décris un peu comme la vilaine capable de tous les coups bas, finalement elle reste dans la limite de ce que j'arrive à imaginer en termes de fourberie et d'actions que moi-même j'estime horribles. Mais il existe peut-être des comportements encore plus vils, qui dépassent mon entendement, mes connaissances et mes expériences personnelles, et que je ne peux alors pas concevoir car ils me sont trop étrangers.
En somme, ce genre de personnage exprime une part de ce que je peux imaginer et de ce que je peux comprendre à travers mon vécu.
La série est une comédie sur fond de lutte des classes. En quoi aborder ce sujet-là vous semblait essentiel ?
De manière générale, dans la vraie vie et au quotidien, nombre de personnes se comparent aux autres et ressentent des formes de graduation, que celles-ci soient justes ou pas. C'est quelque chose que j'ai déjà mis en scène dans plusieurs de mes œuvres, notamment dans C.L.A.S.S. où il y avait vraiment un système de castes dans l'école, ou dans Ugly Princess où l'héroïne se compare toujours aux autres.
Non seulement je pense que c'est quelque chose de naturel, que ce soit en positif ou en négatif, mais en plus parler de ça dans une série est très pratique en terme de ressort narratif. Ça amène une dynamique supplémentaire dans l'histoire, c'est frontalement et directement facile à comprendre pour le lectorat.
Et puis, de manière plus personnelle, et plus spécifiquement dans Le Bourge et la Cagole, ça me plaît énormément d'avoir une héroïne qui se frotte à des gens qui sont considérés comme «hiérarchiquement au-dessus » d'elle. Ça m'a permis d'amener de la confrontation, de l'action, mais peut-être aussi une forme de réconciliation. Se confronter à ce qu'il y a « au-dessus » de soi, c'est le genre de motif qui me plaît beaucoup.
Le tome 4 de la série est sorti cette semaine.
La relation amoureuse qui s'installe entre Manatsu et Shûtarô dans le tome 1 est vraiment jolie, car ils ont appris à se connaître petit à petit sous différents angles pour saisir qui ils sont vraiment, le tout au-delà de leurs différences de rang social et d'éducation. En quoi mettre en scène cela vous tenait à cœur ?
Dans ce manga il n'y a pas de triangle amoureux comme c'est si souvent le cas dans les shôjo, en revanche il y a une sorte de triangle relationnel puisque, en plus du couple principal, il y a Yuriko. Elle est présentée comme l'ennemie, et dans cette dynamique-là il fallait que la force de la relation entre Manatsu et Shûtarô soit un véritable support. Face à Yuriko, il fallait que cette relation amoureuse soit efficace, avec beaucoup de confiance, de respect et de soutien entre eux deux. C'est pour ça que j'ai souhaité faire autant attention à la naissance de leur relation, même si par la suite ils devront faire face à des incompréhensions et à d'autres épreuves.
De plus, il fallait que j'installe et mette en valeur cette relation suffisamment vite, pour pouvoir ensuite placer la dynamique de l'histoire ailleurs, à savoir dans les problèmes amenés par Yuriko.
A part ça, en terme d'équilibre de couple, j'ai l'impression que Shûtarô est plutôt comme un support pour Manatsu. Il la suit et elle l'inspire car c'est très souvent elle qui agit, mais c'est lui qui la soutient.
On peut aussi voir dans la série une certaine idée du bonheur : Manatsu a beau venir d'un milieu modeste elle semble parfaitement épanouie et bien dans ses pompes, là où Shûtarô se sent vide et esclave de son statut de riche héritier dont la vie est déjà tracée sans qu'il y puisse quoi que ce soit. Du coup diriez-vous, comme le veut une célèbre expression française, que l'argent ne fait pas le bonheur ?
Vous êtes dans le vrai. A la base, ce n'est pas comme ça qu'était pensée la série puisque, comme je l'expliquais tout à l'heure, je l'ai crée en me basant sur les personnages. Mais très vite, quand j'ai créé ces personnages, je me suis rendue compte que j'avais très envie d'aborder cette question du bonheur.
Quand on est plus jeune, on se pose beaucoup de questions sur ce par quoi passe le bonheur : l'apparence, la réussite sociale, l'argent... Ce sont des interrogations auxquelles on est tous confrontés. Et ma réponse à ces questions, c'est sans aucun doute que ce n'est pas parce qu'on a de l'argent ou parce qu'on est haut-placé qu'on est forcément heureux, car ces choses-là amènent des contraintes supplémentaires, notamment de la pression en plus pour se maintenir au niveau.
Plutôt que de tout avoir mais de subir cette pression-là constamment, est-ce que le bonheur ce n'est pas plutôt de profiter en permanence du quotidien de façon plus simple ? Je peux le dire, ce sujet du bonheur est devenu assez vite l'un des éléments centraux de la série, dans mon envie d'écriture, de thématiques à aborder, et de compréhension des gens.
Comprendre les gens, mêmes les plus différents, semble vraiment vous tenir à cœur...
Effectivement. Je pense qu'il y a beaucoup de problèmes et de conflits qui naissent du fait qu'on n'arrive pas ou qu'on ne cherche pas à comprendre l'autre. Il y a beaucoup de situations où, parce qu'on ne comprend pas quelqu'un, on se met à le détester. Alors que si on essaie de faire l'effort de comprendre l'autre, de se mettre à sa place, d'essayer de cerner ses sentiments et son vécu, ça pourrait déjà résoudre pas mal de situations conflictuelles dans la société et dans le monde.
Bien sûr, c'est un point de vue un peu idéaliste, voire naïf, mais il n'empêche que si chacun faisait cet effort ce serait plus enrichissant et ça évacuerait un paquet de problèmes.
La série se déroule à Hachiôji, ville où vous êtes née, où vous avez vécu jusqu'à vos dix ans, et que vous mettez joliment en avant avec son côté familier et convivial. Aujourd'hui, quel regard portez-vous exactement sur cette ville de votre enfance ?
C'est une ville où les gens sont très énergiques, ont un caractère très, très affirmé, expriment facilement ce qu'ils pensent vraiment, sont très passionnés et expressifs quand ils discutent. Je pense que c'est quelque chose qui a influencé autant ma personnalité que mes œuvres, car j'ai grandi là-bas et j'ai toujours énormément d'affection pour cette ville.
Aujourd'hui, j'habite à environ une demi-heure de Hachiôji, et alors que ce n'est pas si loin, je constate que l'ambiance et la façon d'être des gens là où je vis sont très différentes. Ça m'intrigue beaucoup de me dire à quel point, en seulement 30 minutes de trajet, tout ça peut être si différent.
Vous qui, comme vous le disiez tout à l'heure, aimez exprimer vraiment votre ressenti et aimez les gens authentiques, pensez-vous que votre enfance à Hachiôji a influencé cette face de votre personnalité ?
Oui. J'ai vécu là-bas jusqu'à mes dix ans, et mine de rien les premières années d'une vie sont souvent très constitutives de qui on va devenir.
Et à cette époque-là, quand on a déménagé dans un endroit pas si éloigné mais un peu plus en campagne, je me souviens m'être sentie parfois très seule, très isolée, car dans mon nouveau lieu de vie je ne retrouvais plus cette authenticité, cette franchise et cette honnêteté. C'était à la fois marquant et étonnant.
Pour finir, on sent que vous avez sûrement un rapport assez étroit avec la France, ainsi qu'avec les éditions Akata qui vous suivent depuis tant d'années et qui vous ont déjà invitée trois fois en Europe. Vous avez même écrit une postface exclusivement pour le public français dans le tome 1 du Bourge et la Cagole, et êtes venue à Bruxelles avec plein de petits cadeaux pour vos fans....
Quand je suis venue pour la première fois en France, à Japan Expo, dans le cadre de la publication de Switch Girl !!, j'ai vraiment été profondément marquée par mes échanges avec mon lectorat. En tant qu'autrice japonaise, les fans dans mon pays d'origine me faisaient beaucoup de retours sur les gags et sur l'humour de la série. Mais la manière dont les lecteurs français se sont réappropriés l'oeuvre et m'en ont parlé était plus profonde et plus forte. Leur ressenti, leurs points de vue intimes, les aspects plus sérieux, l'identification et la libération qu'il y avait autour du personnage de Nika... Ce sont des choses qui m'ont extrêmement marquée et touchée, comme si les lecteurs européens avaient une lecture plus profonde de la série et, peut-être aussi, une approche plus artistique.
De ce fait j'ai toujours une reconnaissance infinie envers ça, et à chaque fois que je reviens en Europe j'ai le désir de rendre un peu ce que j'ai pu ressentir lors de ma venue à Japan Expo, mais aussi à Polymanga et encore aujourd'hui à la Foire du Livre de Bruxelles.
Interview réalisée par Koiwai. Un immense merci à Natsumi Aida pour sa très grande gentillesse et pour ses réponses, à Bruno Pham des éditions Akata pour la mise en place de cette rencontre et pour son interprétariat, et aux équipes de la Foire du Livre de Bruxelles et de Kôdansha.