actualité manga - news illustration

Dvd Chronique série animée - Mobile Suit Gundam - The Origin I

Samedi, 09 Avril 2016 à 15h00

Depuis sa création, il y a maintenant 35 ans, Gundam s'est imposé comme une des franchises animées les plus populaires du Pays du Soleil Levant, occasionnant un gigantesque empire commercial regroupant de nombreuses séries et plusieurs films, une quantité phénoménale de mangas dérivés, un nombre impressionnant de jeux vidéo, et bien sûr les incontournables "Gunpla" (abréviation de "Gundam Plastic Model"), véritables maquettes de collection basées sur les méchas phares à construire soi-même. A l'origine de ce phénomène, on trouve une série légendaire, "Mobile Suit Gundam", réalisée par un créateur d'animé visionnaire nommé Yoshiyuki Tomino qui a notamment travaillé avec Osamu Tezuka sur la série Astro Boy de 1963, l'une des oeuvres fondatrices de la japanimation.


En 1979, le réalisateur Tomino imagine un nouveau concept consistant en une approche inédite du genre mécha, jusqu'alors cantonné à des robots surpuissants (ou "super-robot"). Abordant les méchas comme des armes de guerre réalistes ("real-robot") d'un lointain futur, il nous fait découvrir une grande fresque épique de science-fiction dans un univers plongé dans le chaos d'une guerre universelle avec pour objectif d'en dénoncer l'absurdité et de mettre en avant les malheurs et les tragédies qu'elle ne cesse d'engendrer. Si Gundam n'a guère rencontré le succès au cours de sa première diffusion, le public étant alors dérouté par cette approche inédite d'un genre ancré si profondément dans les consciences, la popularité de la série phare de Tomino n'a cessé de s'accroître au fil des rediffusions (ce qui n'a malheureusement pas empêché la série de subir une annulation et une fin raccourcie à l'époque), allant jusqu'à s'offrir les honneurs d'une ressortie sur grand écran sous la forme d'une trilogie de films ayant remporté un succès considérable à l'époque. Le mythe Gundam était lancé.


L'univers de Gundam nous plonge dans un futur où l'homme a colonisé l'espace pour soulager une Terre qu'il n'a que trop longtemps polluée, marquant l'avènement d'un nouveau calendrier, le "Siècle Universel" (Universal Century). De vastes colonies en orbite autour de la Terre deviennent les nouveaux foyers de l'humanité, et tout autant de nations spatiales sous le contrôle de la toute puissante Fédération Terrestre qui dirige tout l'univers. Plus d'un demi-siècle a passé depuis le début de la colonisation, nous sommes désormais en l'année 0079 du Siècle Universel et Side 3, la colonie la plus éloignée de la Terre, s'est autoproclamée Duché de Zeon et revendique son indépendance. Cela provoque le début de la première Grande Guerre spatiale de l'histoire, opposant Zeon à la Fédération. De nombreuses colonies sont frappées par la dure réalité de la guerre, comme Side 7 où vit l'adolescent Amuro Ray, le protagoniste de la première série Gundam, qui rejoint alors l'armée fédérale et qui devient le pilote du mécha éponyme, devant combattre l'armée de Zeon et notamment le lieutenant Char Aznable, charismatique homme masqué et héros de guerre qui dissimule un lourd passé. La série présentait ainsi une galerie de personnages mémorables dans les deux camps, appuyant sur l'humanité des différents acteurs du conflit et sur la complexité de la guerre dans sa globalité où aucun camp n'ayant plus raison que l'autre et où la nature contradictoire des hommes les pousse à s'entretuer à cause de leurs points de vue différents et inconciliables alors que la plupart aspirent à un monde en paix, occasionnant de nombreuses tragédies tout du long des 43 épisodes qui composent cette magnifique série.


Mais si Mobile Suit Gundam nous raconte la guerre d'indépendance, il y a toutefois une histoire qui n'a pas été contée pendant longtemps: celle des origines de cette guerre, des événements qui ont poussé les deux camps sur la voie du conflit armé, faisant basculer les destins de nombreux personnages dont la plupart n'y auront pas survécu. C'est le mangaka Yoshikazu Yasuhiko, l'un des artisans de la série à l'époque dont il était le character designer et le responsable de l'animation, qui nous a finalement dévoilé la véritable histoire cachée des origines de cette Guerre d'Un An à travers les pages de son manga "Mobile Suit Gundam: The Origin", adaptation retravaillée et approfondie de l'histoire de la première série Gundam. A travers un long arc narratif de six volumes, il nous dévoilait ainsi le passé dramatique de nombreux personnages, à commencer par l'enfance de Char Aznable et de Sayla Mass qui s'appelaient alors Casval et Artesia. Fort du succès de ce manga reçu avec le même enthousiasme de la part de la critique à travers le monde, acclamé comme un des grands chefs d'oeuvre de la science-fiction, le studio Sunrise a choisi de célébrer l'anniversaire des 35 ans de sa franchise phare en annonçant l'adaptation animée de cet arc inédit, venant ainsi compléter l'histoire de l'une des plus grandes sagas de la japanimation. Si les spectateurs japonais connaissent déjà l'histoire de la Guerre d'Un An avec son approche dénonciatrice et violente de la thématique de la guerre, The Origin s'affiche ici un tout autre objectif: s'interroger sur les causes mêmes (essentiellement politiques) qui ont abouti à cette guerre. Et si Mobile Suit Gundam était l'histoire d'Amuro Ray, c'est un tout autre personnage que sa préquelle met à l'honneur: son rival Char Aznable, l'antagoniste en personne, être torturé et assoiffé de vengeance. Pour la première fois, on va découvrir l'histoire de ce personnage à la complexité ô combien fascinante et les événements qui ont transformé le jeune Casval Daikun en ce monstre à mi-chemin entre Darth Vader et le Comte de Monte Cristo.


L'action de ce premier long-métrage de "Mobile Suit Gundam: The Origin", intitulé "Les Yeux Bleus de Casval", se déroule une petite dizaine d'années avant les événements de "Mobile Suit Gundam", en l'an 0068 du Siècle Universel pour être précis, à une époque où Side 3 (futur Duché de Zeon) était encore appelée la "République Autonome de Munzo". Après plus d'un demi-siècle à subir le joug de la domination coloniale, les citoyens de Munzo se tournent vers le président Zeon Zum Daikun, célèbre philosophe et héros des révolutions, pour défier la Fédération Terrestre afin de concrétiser leur long rêve d'une nation indépendante. Ce dernier s'apprête à prononcer un discours historique devant l'assemblée lorsqu'il s'effondre subitement, officiellement d'une crise cardiaque. Très vite, la rumeur d'un assassinat par empoisonnement perpétré par la Fédération se répand, plongeant Side 3 dans une ère de chaos, des émeutes éclatant dans toute la capitale contre les soldats fédéraux. Jimba Ral, ancien proche conseiller de Zeon Daikun, soupçonne vite son homologue Degwin Sodo Zabi d'avoir fomenté cet assassinat et comploté avec ses fils Gihren et Sasro pour s'emparer du pouvoir sur Munzo. Craignant pour la sécurité des proches de Daikun, sa compagne Astraia et ses enfants Casval et Artesia, il décide de les placer sous la protection de son fils Ramba Ral, militaire honorable, dans sa demeure. Mais, alors que l'histoire se réécrit sous les manipulations de la famille Zabi, l'influence de Jimba Ral ne cesse de décliner, annonçant la fin de la maison des Ral. Très vite, l'étau se referme autour des enfants de Daikun, centre de toutes les convoitises et de tous les complots. Alors que Degwin Zabi et ses enfants s'emparent du pouvoir sur Munzo, leur heure étant arrivée, l'existence des héritiers de Daikun, et notamment Casval, constitue un obstacle qu'ils ne peuvent se permettre d'ignorer trop longtemps, sous peine de les voir se retourner contre eux une fois arrivés à l'âge adulte. Afin de les protéger et de leur permettre de mener une vie paisible loin du destin cruel qui leur est imposé et dont ils n'ont aucune chance de réchapper, Ramba Ral décide de comploter avec sa partenaire et complice Crowley Hamon, chanteuse de bar avec un bon réseau de connexions, pour permettre à son père et aux enfants de quitter Side 3 pour une existence plus paisible sur la Terre. Mais les événements de cette ère troublée ne vont pas rester sans conséquence sur les destins de Casval et Artesia, victimes de la cruauté et de l'ambition des adultes. Alors que l'une restera marquée par une profonde tristesse, le second va succomber à la colère et à la haine, scellant sa transformation en celui qui deviendra la redoutable et terrifiante "Comète Rouge", le vengeur masqué Char Aznable.


Ce premier OAV adapte donc essentiellement l'enfance tragique de Casval et Artesia, période traitée dans le volume 9 du manga de Yoshikazu Yasuhiko qui marquait le début de cet arc narratif inédit faisant office de préquelle à la série Mobile Suit Gundam. Pour ceux qui ne connaissent pas du tout les séries de Yoshiyuki Tomino se déroulant dans l'Universal Century, cette adaptation est une porte d'entrée idéale dans l'univers de Gundam, même cette histoire ne trouve sa vraie richesse qu'en la mettant ensuite dans la perspective des conséquences qui en découlent dans la série originale, les deux oeuvres étant complémentaires. Ayant lu le manga dont est dérivée cette série d'OAV (et connaissant également la série et les films de la première série Gundam), la première chose qui me frappe en voyant cette adaptation est l'absolue fidélité à l'histoire racontée par Yasuhiko. Rien n'est laissé à l'écart, toutes les scènes du manga sont présentes, ce qui permet à ceux qui ne le connaissent pas de ne rien manquer et d'avoir un point de vue aussi complet que possible sur ce chapitre fondateur de la saga de l'Universal Century. On retrouve vite cet univers en proie au chaos qui sombre progressivement dans la paranoia et la violence, ces manipulations politiques et ces complots qui entourent les destins de plusieurs personnages et qu'on voit se refermer progressivement sur eux, menaçant d'emporter leurs vies, et ce monde où l'histoire est en pleine évolution et où les puissants d'autrefois sont voués à disparaître et à périr ou à lutter pour leur survie. Une histoire sombre et complexe qui pose les bases des événements de la série "Mobile Suit Gundam" et qui permet de mieux comprendre d'où viennent ses différents acteurs et comment ce monde a pu basculer sur le terrain d'une guerre universelle totale. Yasuhiko ne laisse jamais rien au hasard, développant son récit dans ses moindres détails pour apporter une compréhension aussi complète que possible des événements, et surtout pour nous raconter comment ces destins différents se mêlent pour nouer cette grande tragédie humaine et politique.

Maintenant, une chose qui me laisse davantage sceptique, c'est l'approche que cette adaptation animée a de cette histoire. Certes, les événements sont retranscrits avec une fidélité exemplaire et de manière très complète, mais ça n'empêchera pas ceux qui ont lu le manga de Yoshikazu Yasuhiko de constater que l'atmosphère générale très noire de cette intrigue a été considérablement allégée dans les choix de mise en scène et de narration, similaire à ce qui avait déjà été opéré sur l'adaptation de "Mobile Suit Gundam Unicorn". Ici, de nombreuses scènes marquantes par leur noirceur, leur violence ou la tension dramatique immense qui s'en dégageaient dans le manga perdent de leur impact, la faute à une mise en scène beaucoup trop académique qui s'efforce de garder une certaine distance et une certaine retenue par rapport à la véritable violence qui se dégage de cette histoire et des échanges entre les personnages (la scène de la confrontation entre Casval et Kycilia Zabi, véritable lutte à mort verbale, en est l'un des exemples les plus parlants alors qu'elle est censée être la scène phare de cette adaptation, mise en avant dans la promotion de l'animé), ou par une plus grande insistance sur les rares passages humoristiques qui viennent ici contrebalancer complètement avec la noirceur de l'intrigue. Il est important de noter que ces derniers étaient employés de manière subtile dans le manga, similaire à ce qu'Hiromu Arakawa faisait dans Fullmetal Alchemist, alors qu'ici l'adaptation appuie et insiste dessus au point de leur faire perdre tout leur effet, créant des moments de lourdeur qui se marient difficilement au reste de l'intrigue et dont on se serait bien passé.


Lorsqu'on a évoqué l'adaptation animée du manga de Yoshikazu Yasuhiko, on a aussi beaucoup parlé de son grand retour à l'industrie de l'animation après plus de deux décennies où il s'était reconverti en tant que mangaka, se spécialisant particulièrement dans les grandes fresques historiques (Jesus, Joan, Alexandros...). Comment oublier l'artiste qui a été l'un des artisans fondateurs de la série "Mobile Suit Gundam" et qui a officié sur d'autres, animés à succès tels que Space Battleship Yamato ou encore Crusher Joe dont il avait lui-même réalisé le film ? En plus de ça, il est épaulé par nul autre que Takashi Imanishi, très populaire auprès des fans pour avoir réalisé l'excellente série d'OAV "Mobile Suit Gundam 0083: Stardust Memory", digne héritier spirituel de la série originale. Avec des talents aussi reconnus pour se partager les fonctions de réalisateurs, on était en droit de s'attendre au meilleur pour cette adaptation, d'où une certaine déception avec le produit final. L'académisme inattendu de la réalisation et la noirceur très fortement atténuée par rapport au manga trahissent beaucoup des attentes que l'on pouvait avoir de cette adaptation animée qui avait le potentiel pour s'imposer comme l'un des chefs d'oeuvre de la saga Gundam. Maintenant, en dépit de cette réalisation très (trop) académique dans sa mise en scène, il y a tout de même aussi un certain nombre de qualités comme une animation très soignée dans son ensemble (excepté quelques CGI mal incrustés), une bande originale signée Takayuki Hattori ("Code Breaker", "Space Pirate Captain Harlock: Endless Odyssey") qui est pile dans le bon ton pour insuffler un souffle épique et tragique à cette histoire, ou encore une distribution très réussie. Le casting de cette préquelle avait beaucoup fait parler, nombreux étant ceux qui se demandaient si les comédiens phares de la série de 1979 allaient revenir, tout en attendant au tournant le choix de la comédienne qui allait succéder à la regrettée Yô Inoue dans le rôle primordial de Sayla Mass, alias Artesia Som Daikun. Finalement, de la série d'époque, seuls reviennent Banjo Ginga et l'incontournable Shuichi Ikeda que l'on retrouve avec plaisir dans leurs rôles phares de Gihren Zabi et surtout de la légendaire "Comète Rouge" Char Aznable. Le reste de la distribution a été complètement remanié, mais avec d'excellents choix de casting qui s'adaptent particulièrement bien à cet univers et à leurs rôles. On notera tout spécialement la prestation superbe de la talentueuse Megumi Han (Gon Freecss dans la version 2011 de "Hunter x Hunter") qui reprend le rôle d'Artesia sans faillir alors que la pression entourant la relève de Yô Inoue était loin d'être évidente à gérer, les fans japonais étant extrêmement protecteurs envers ce rôle qui se devait d'être confié à la meilleure comédienne possible. Chapeau à Megumi Han qui, par son talent immense, a réussi à faire l'unanimité et à être pleinement acceptée dans son nouveau rôle, tout en perpétuant au passage un certain héritage familial (sa mère, Keiko Han, était l'interprète de Lalah Sune, autre personnage mémorable de "Mobile Suit Gundam"). N'oublions pas non plus Miyuki Sawashiro (le personnage éponyme de la série "Beelzebub") qui interprète une jeune Crowley Hamon pleine de charme et d'audace, ou encore l'immense Mayumi Tanaka (Monkey D. Luffy dans "One Piece") qui consacre tout son talent à véhiculer les émotions intenses et la colère redoutable du jeune Casval Rem Daikun, le jeune garçon qui deviendra Char Aznable.


Un petit mot sur l'édition collector japonaise qui a fait l'objet d'une distribution internationale limitée, exclusivement en précommande quelques mois avant sa sortie. Il s'agit essentiellement d'une boîte illustrée par Yoshikazu Yasuhiko en personne qui contient le Blu-ray du film et les bonus qui l'accompagnent, un petit livret et deux carnets contenant les designs et le storyboard du long-métrage agrémentés de nombreuses notes de production. Dommage pour nous, pauvres européens, rien n'a été traduit depuis le japonais, ce qui laisse un goût un peu amer à la bouche pour une édition qui coûtait quand même pas moins de 100 euros pour un animé d'à peine une heure. Une bonne surprise toutefois du côté du disque Blu-ray qui n'est pas zoné, pouvant être lu sur tous les lecteurs, et qui propose notamment un sous-titrage français de bonne qualité, chose étonnante pour une édition qui a bénéficié d'une distribution internationale aussi limitée, mais qui s'explique cependant en partie par une diffusion internationale en streaming sur le site de Daisuki. Pas d'option française par contre au niveau de l'audio qui ne propose que le japonais et l'anglais, et ça nous suffit très bien tant Gundam est de toute façon une oeuvre à découvrir dans sa version originale, mais on regrettera par contre l'absence totale de sous-titres en ce qui concerne les commentaires audios de l'équipe du film. Tout cela vient nous rappeler qu'il s'agit essentiellement d'une édition importée, distribuée exceptionnellement à l'internationale, mais que le gros de la distribution de la série passe par Daisuki.


Annoncée en grande pompe pour le 35ème anniversaire de la franchise Gundam, cette adaptation animée du manga "Mobile Suit Gundam: The Origin" est incontestablement une oeuvre à découvrir pour les fans de l'Universal Century qui ne connaissent pas encore cette histoire préquelle inédite tant son apport mythologique est conséquent, apportant une nouvelle profondeur à nombre de personnages cultes que l'on pensait connaître par coeur et qui réussissent une nouvelle fois à nous surprendre. Il faudra cependant composer avec un travail d'adaptation qui décevra quelque peu les lecteurs du manga par sa mise en scène trop classique et épurée qui fait perdre beaucoup d'impact à de nombreuses scènes et d'intensité aux personnages, mais qui ne devrait cependant pas gêner davantage les autres spectateurs qui découvriront avec plaisir et intérêt les origines de la Guerre d'Un An qui auront forgé les destins de nombreux personnages d'anthologie, à commencer par la ravissante Sayla Mass et surtout l'immense Char Aznable, l'un des personnages les plus populaires de la japanimation et l'homme masqué emblématique de la franchise Gundam. "Sieg Zeon !"

L'avis du chroniqueur
GlassHeart

Samedi, 09 Avril 2016
16 20

commentaires



Si vous voulez créer un compte, c'est ICI et c'est gratuit!

> Conditions d'utilisation