Ciné-Asie Chronique Ciné Asie - Onibaba - Les Tueuses
Réalisé en 1965 et produit par la Kindai Eiga Kyokai, Onibaba du très prolifique Kaneto Shindô, auteur de L'Ile Nue (1962), est une œuvre inégalée graphiquement.
Deux femmes, 'auditrices' d'une guerre, viennent se servir sur les carcasses encore fumantes de soldats morts au combat.
Les cadavres sont alors jetés dans un trou sombre et profond... Dans d'immenses champs de roseaux battus par les vents, deux femmes chassées de leur village guettent de nouveaux soldats à dépouiller. Tel que le présente Shindô, le trou sombre et profond est un tunnel vers la mort, l'ultime échappatoire à une vie d'ennui. Tout concourt à compléter un canevas de l'horreur : les malédictions des campagnes, le code du bushido bafoué, la peau grasse, les seins tombants de femmes se raccrochant au souvenir d'époux qui n'ont pas survécu au champ d'honneur.
Comme contaminés par une immense épidémie de peste, les personnages de cette odyssée de l'enfer trimballent leurs gueules fatiguées et blanchâtres pour mieux piller ceux qui se battent pour la cause. Les paysannes de Onibaba sont des parasites obscènes que le Japon souhaite oublier. Affreuses, sales et pas foncièrement plus mauvaises que les valeureux soldats morts au front. Magnifiée par la photographie de Kiyomi Kuroda rappelant celle de Sergei Urusevsky sur Soy Cuba (1964) de Mikhail Kalatozov, la mise en scène stylisée de Kaneto Shindô, dans laquelle aucun plan n'est de trop, transporte le spectateur dans une dimension infernale et irréelle.
Si certains points du scénario peuvent paraître laborieux, l'interprétation de la vieille femme et de sa bru, respectivement Nobuko Otowa et Jitsuko Yoshimura, est sans faille. Fausse oxygénation dans un merdier dense et feuillu, fleur fanée dans un maelström de pourriture, Shindô filme l'amourette un peu poussive entre la jeune femme et Hachi l'oisif, réveillant la jalousie de la vieille femme, bientôt prise à son propre jeu.
Dans Onibaba, la survie dans une chevelure de femme, la sécheresse des cœurs, la cruauté du destin de ces deux poupées macabres rappellent les sublimes œuvres 'amorales' du début des années 70 comme The Honeymoon Killers (1970) de Leonard Kastle avec le couple macabre et génial Tony Lo Bianco-Shirley Stoler, ou l'esprit de famille présent dans des œuvres célèbres du cinéma d'horreur, fruits d'une génération engluée dans la guerre du Vietnam, comme l'inoxydable et inremakable The Texas Chainsaw Massacre (1974) de Tobe Hooper ou le vieillissant The Last House on the Left (1972) de Wes Craven.
En 1962, le parfum enivrant de L'Ile Nue, précédente réalisation de Kaneto Shindô, faisait déjà éclater les frontières de l'esthétisme baudelairien. En 1965, poursuivant sur sa lancée, Shindô confirmait avec Onibaba la beauté plastique de ses œuvres et offrait au monde une alternative aux enfantillages d'un Nakata et de jeunes filles aux cheveux noirs et gras, coincées dans des cassettes VHS.
Chroniqueur : The Duke
Deux femmes, 'auditrices' d'une guerre, viennent se servir sur les carcasses encore fumantes de soldats morts au combat.
Les cadavres sont alors jetés dans un trou sombre et profond... Dans d'immenses champs de roseaux battus par les vents, deux femmes chassées de leur village guettent de nouveaux soldats à dépouiller. Tel que le présente Shindô, le trou sombre et profond est un tunnel vers la mort, l'ultime échappatoire à une vie d'ennui. Tout concourt à compléter un canevas de l'horreur : les malédictions des campagnes, le code du bushido bafoué, la peau grasse, les seins tombants de femmes se raccrochant au souvenir d'époux qui n'ont pas survécu au champ d'honneur.
Comme contaminés par une immense épidémie de peste, les personnages de cette odyssée de l'enfer trimballent leurs gueules fatiguées et blanchâtres pour mieux piller ceux qui se battent pour la cause. Les paysannes de Onibaba sont des parasites obscènes que le Japon souhaite oublier. Affreuses, sales et pas foncièrement plus mauvaises que les valeureux soldats morts au front. Magnifiée par la photographie de Kiyomi Kuroda rappelant celle de Sergei Urusevsky sur Soy Cuba (1964) de Mikhail Kalatozov, la mise en scène stylisée de Kaneto Shindô, dans laquelle aucun plan n'est de trop, transporte le spectateur dans une dimension infernale et irréelle.
Si certains points du scénario peuvent paraître laborieux, l'interprétation de la vieille femme et de sa bru, respectivement Nobuko Otowa et Jitsuko Yoshimura, est sans faille. Fausse oxygénation dans un merdier dense et feuillu, fleur fanée dans un maelström de pourriture, Shindô filme l'amourette un peu poussive entre la jeune femme et Hachi l'oisif, réveillant la jalousie de la vieille femme, bientôt prise à son propre jeu.
Dans Onibaba, la survie dans une chevelure de femme, la sécheresse des cœurs, la cruauté du destin de ces deux poupées macabres rappellent les sublimes œuvres 'amorales' du début des années 70 comme The Honeymoon Killers (1970) de Leonard Kastle avec le couple macabre et génial Tony Lo Bianco-Shirley Stoler, ou l'esprit de famille présent dans des œuvres célèbres du cinéma d'horreur, fruits d'une génération engluée dans la guerre du Vietnam, comme l'inoxydable et inremakable The Texas Chainsaw Massacre (1974) de Tobe Hooper ou le vieillissant The Last House on the Left (1972) de Wes Craven.
En 1962, le parfum enivrant de L'Ile Nue, précédente réalisation de Kaneto Shindô, faisait déjà éclater les frontières de l'esthétisme baudelairien. En 1965, poursuivant sur sa lancée, Shindô confirmait avec Onibaba la beauté plastique de ses œuvres et offrait au monde une alternative aux enfantillages d'un Nakata et de jeunes filles aux cheveux noirs et gras, coincées dans des cassettes VHS.
Chroniqueur : The Duke
De saqura [4377 Pts], le 12 Janvier 2015 à 18h58
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