Ciné-Asie Critique - One Fine Spring Day
Nous débutons la semaine avec une chronique de Rogue Aerith du film One fine spring day, réalisé par le Sud-Coréen Hur Jin-Ho. Un autre film de ce réalisateur, April snow, sera chroniqué dans la semaine, puisque les "spéciales réalisateurs", on aime vous en proposer sur Manga-news !
Sang-Woo (Yu Ji-Tae) est un jeune ingénieur du son, qui vit à Séoul avec son père, sa tante et sa grand-mère, atteinte de la maladie d'Alzheimer. Un hiver, il fait la rencontre d'Eun-Su (Lee Young-Ae), animatrice de radio, avec laquelle il doit enregistrer des sons dans la nature, durant plusieurs semaines. Au fil du clapotis de l'eau, du vent dans les bambous, de la chute sourde des flocons de neige, ils se rapprocheront, et tomberont amoureux. Le temps passe. Tout va bien entre les deux jeunes trentenaires. Jusqu'au jour où Sang-Woo propose une chose à Eun-Su. Elle n'est pas d'accord. Il ne comprend pas. A partir de là, Eun-Su s'éloignera de plus en plus, et Sang-Woo ne parviendra pas à arranger les choses. Le début de la fin.
Réalisé par Hur Jin-Ho et sorti en 2001, « One fine spring day » narre de façon tout à fait naturelle le début et la fin d'un amour entre deux jeunes adultes. Loin des bons sentiments, c'est le réalisme qui prime avant tout : comme dans tous ses autres films, Hur Jin-Ho nous montre une fois encore qu'il est l'un des meilleurs cinéastes de l'intimité et des sentiments.
D'un scénario finalement assez minimaliste, on obtient deux heures qui passent très vite, et ce grâce à la délicatesse et l'élégance de la mise en scène. Celle-ci fait des choix, qui ne seront pas appréciés par tout le monde mais qui continuent pourtant d'être diablement efficaces. Les plans fixes sont nombreux, les travellings absents : c'est la fameuse patte du réalisateur coréen, que l'on retrouve dans tous ses films distribués en France.
Quelle entreprise difficile de vous donner un avis sur ce « beau jour de printemps ». Le sujet du film étant le récit de la naissance d'une histoire d'amour, puis d'une rupture, il renvoie forcément à l'intimité de chacun d'entre nous. En tant que spectateur, rester objectif n'est pas chose aisée, car les personnages étant formidablement réalistes, on est toujours tenté de s'identifier à l'un d'entre eux... et donc de rejeter l'autre. Quand bien même on essaie de résister, de se placer successivement du point de vue de l'homme puis de la femme, ou vice-versa, l'un d'eux finira toujours par nous émouvoir plus que l'autre. Comme celui auquel on s'identifie, on aura envie de faire les mêmes choses à l'autre.
Les spectateurs verront dans Sang-Woo un personnage auquel on s'attache facilement, qui a tout du gentil garçon, que toutes les femmes devraient s'arracher. Ils verront dans Eun-Su une jeune femme plus malicieuse, insouciante, peut-être même un peu superficielle et pimbêche... Peu importe, tous les deux vont bien ensemble. Les spectatrices au contraire verront dans Eun-Su une certaine froideur et un recul juste vis-à-vis de sa propre relation, et dans Sang-Woo un être immature et possessif. Peu importe, tous les deux vont bien ensemble. On a donc là un film à voir en couple, ou avec une personne du sexe opposé au vôtre, qui vous permettra de comprendre (ou pas, si vous êtes du même avis...) les réactions du personnage que vous aurez rejeté. Les réactions de Sang-Woo vis-à-vis de la rupture ? Normales pour un spectateur ! Intolérables pour une spectatrice ! Les réactions de Eun-Su vis-à-vis de la rupture ? Compréhensibles pour une spectatrice ! Inqualifiables pour un spectateur ! Ainsi, les personnages ne bénéficient pas spécialement d'une vraie profondeur psychologique : ce sont les spectateurs qui le leur accordent car ils s'identifient à eux. Cette dualité de visions se retrouve jusque dans la perception du jeu des deux acteurs principaux. Les spectateurs trouveront certainement Lee Young-Ae en retrait, Yu Ji-Tae impeccable, et vice-versa pour les spectatrices.
Le film de Hur Jin-Ho est excellent en ce qu'il vient montrer (dénoncer ?) des aspects communs dont on n'ose jamais trop parler, sur lesquels on n'ose jamais trop se pencher, par peur de se faire du mal vis-à-vis de notre vécu. « One fine spring day » traite de la crainte de s'engager de la femme, de l'urgence au contraire de s'engager de l'homme qui croit l'avoir trouvée, la vraie, la bonne, l'unique. « One fine spring day » n'est pas à conseiller après une rupture, car il appuie là où ça fait mal : l'incompréhension, la colère, la vengeance, l'acceptation, le pardon (ou non), le retour vers l'autre pour recommencer... l'oubli, et aussi les leçons qu'on tire d'une relation, les petits gestes, touchants, qu'on a appris au contact de l'autre et qu'on garde malgré soi.
Ce petit bijou de sensibilité ne souffre en fait que d'un seul défaut, qui concerne sa narration. Ce n'est pas une succession de crises qui conduit à la séparation, mais deux ou trois détails, qu'on vous laissera découvrir. Pour deux personnes censées être amoureuses, la séparation arrive trop vite, et naît finalement de pas grand chose a priori. Les personnages ne prendront pas le temps de discuter. C'est d'ailleurs ce qui manque vraiment pour que leur relation fonctionne : le dialogue. Car l'incompréhension provient du décalage des aspirations des deux personnages. Leur mutisme réciproque, qui ne peut solutionner les problèmes, manque cruellement de réalisme (même si on se doute que certains couples se quittent ainsi, sans se battre pour la relation...), alors que ce même réalisme constitue pourtant la première force du film. Les réactions des personnages apparaissent ainsi disproportionnées face à certains enjeux, mais manquent d'impact sur d'autres.
On reprochera à l'édition DVD d'être trop avare en bonus. Ce que le réalisateur a voulu faire passer dans son film, vous ne le trouverez que dans des interviews sur le net. Notez que le film n'est disponible qu'en coréen sous-titré, et que le ton employé dans la traduction est sans fautes.
Film extrêmement sincère, réaliste, sans prétention, bénéficiant d'une mise en scène élégante dans la sobriété (c'est rare), « One fine spring day » est encore un très beau film de Hur Jin-Ho, décidément trop méconnu en Occident. Lui, ainsi que son compatriote Hong Sang-Soo, offrent vraiment un cinéma à part, sachant filmer la sensibilité des hommes et des femmes comme personne.
Sang-Woo (Yu Ji-Tae) est un jeune ingénieur du son, qui vit à Séoul avec son père, sa tante et sa grand-mère, atteinte de la maladie d'Alzheimer. Un hiver, il fait la rencontre d'Eun-Su (Lee Young-Ae), animatrice de radio, avec laquelle il doit enregistrer des sons dans la nature, durant plusieurs semaines. Au fil du clapotis de l'eau, du vent dans les bambous, de la chute sourde des flocons de neige, ils se rapprocheront, et tomberont amoureux. Le temps passe. Tout va bien entre les deux jeunes trentenaires. Jusqu'au jour où Sang-Woo propose une chose à Eun-Su. Elle n'est pas d'accord. Il ne comprend pas. A partir de là, Eun-Su s'éloignera de plus en plus, et Sang-Woo ne parviendra pas à arranger les choses. Le début de la fin.
Réalisé par Hur Jin-Ho et sorti en 2001, « One fine spring day » narre de façon tout à fait naturelle le début et la fin d'un amour entre deux jeunes adultes. Loin des bons sentiments, c'est le réalisme qui prime avant tout : comme dans tous ses autres films, Hur Jin-Ho nous montre une fois encore qu'il est l'un des meilleurs cinéastes de l'intimité et des sentiments.
D'un scénario finalement assez minimaliste, on obtient deux heures qui passent très vite, et ce grâce à la délicatesse et l'élégance de la mise en scène. Celle-ci fait des choix, qui ne seront pas appréciés par tout le monde mais qui continuent pourtant d'être diablement efficaces. Les plans fixes sont nombreux, les travellings absents : c'est la fameuse patte du réalisateur coréen, que l'on retrouve dans tous ses films distribués en France.
Quelle entreprise difficile de vous donner un avis sur ce « beau jour de printemps ». Le sujet du film étant le récit de la naissance d'une histoire d'amour, puis d'une rupture, il renvoie forcément à l'intimité de chacun d'entre nous. En tant que spectateur, rester objectif n'est pas chose aisée, car les personnages étant formidablement réalistes, on est toujours tenté de s'identifier à l'un d'entre eux... et donc de rejeter l'autre. Quand bien même on essaie de résister, de se placer successivement du point de vue de l'homme puis de la femme, ou vice-versa, l'un d'eux finira toujours par nous émouvoir plus que l'autre. Comme celui auquel on s'identifie, on aura envie de faire les mêmes choses à l'autre.
Les spectateurs verront dans Sang-Woo un personnage auquel on s'attache facilement, qui a tout du gentil garçon, que toutes les femmes devraient s'arracher. Ils verront dans Eun-Su une jeune femme plus malicieuse, insouciante, peut-être même un peu superficielle et pimbêche... Peu importe, tous les deux vont bien ensemble. Les spectatrices au contraire verront dans Eun-Su une certaine froideur et un recul juste vis-à-vis de sa propre relation, et dans Sang-Woo un être immature et possessif. Peu importe, tous les deux vont bien ensemble. On a donc là un film à voir en couple, ou avec une personne du sexe opposé au vôtre, qui vous permettra de comprendre (ou pas, si vous êtes du même avis...) les réactions du personnage que vous aurez rejeté. Les réactions de Sang-Woo vis-à-vis de la rupture ? Normales pour un spectateur ! Intolérables pour une spectatrice ! Les réactions de Eun-Su vis-à-vis de la rupture ? Compréhensibles pour une spectatrice ! Inqualifiables pour un spectateur ! Ainsi, les personnages ne bénéficient pas spécialement d'une vraie profondeur psychologique : ce sont les spectateurs qui le leur accordent car ils s'identifient à eux. Cette dualité de visions se retrouve jusque dans la perception du jeu des deux acteurs principaux. Les spectateurs trouveront certainement Lee Young-Ae en retrait, Yu Ji-Tae impeccable, et vice-versa pour les spectatrices.
Le film de Hur Jin-Ho est excellent en ce qu'il vient montrer (dénoncer ?) des aspects communs dont on n'ose jamais trop parler, sur lesquels on n'ose jamais trop se pencher, par peur de se faire du mal vis-à-vis de notre vécu. « One fine spring day » traite de la crainte de s'engager de la femme, de l'urgence au contraire de s'engager de l'homme qui croit l'avoir trouvée, la vraie, la bonne, l'unique. « One fine spring day » n'est pas à conseiller après une rupture, car il appuie là où ça fait mal : l'incompréhension, la colère, la vengeance, l'acceptation, le pardon (ou non), le retour vers l'autre pour recommencer... l'oubli, et aussi les leçons qu'on tire d'une relation, les petits gestes, touchants, qu'on a appris au contact de l'autre et qu'on garde malgré soi.
Ce petit bijou de sensibilité ne souffre en fait que d'un seul défaut, qui concerne sa narration. Ce n'est pas une succession de crises qui conduit à la séparation, mais deux ou trois détails, qu'on vous laissera découvrir. Pour deux personnes censées être amoureuses, la séparation arrive trop vite, et naît finalement de pas grand chose a priori. Les personnages ne prendront pas le temps de discuter. C'est d'ailleurs ce qui manque vraiment pour que leur relation fonctionne : le dialogue. Car l'incompréhension provient du décalage des aspirations des deux personnages. Leur mutisme réciproque, qui ne peut solutionner les problèmes, manque cruellement de réalisme (même si on se doute que certains couples se quittent ainsi, sans se battre pour la relation...), alors que ce même réalisme constitue pourtant la première force du film. Les réactions des personnages apparaissent ainsi disproportionnées face à certains enjeux, mais manquent d'impact sur d'autres.
On reprochera à l'édition DVD d'être trop avare en bonus. Ce que le réalisateur a voulu faire passer dans son film, vous ne le trouverez que dans des interviews sur le net. Notez que le film n'est disponible qu'en coréen sous-titré, et que le ton employé dans la traduction est sans fautes.
Film extrêmement sincère, réaliste, sans prétention, bénéficiant d'une mise en scène élégante dans la sobriété (c'est rare), « One fine spring day » est encore un très beau film de Hur Jin-Ho, décidément trop méconnu en Occident. Lui, ainsi que son compatriote Hong Sang-Soo, offrent vraiment un cinéma à part, sachant filmer la sensibilité des hommes et des femmes comme personne.
De Koiwai [12811 Pts], le 01 Octobre 2012 à 20h35
Il a l'air franchement sympa, en tout cas la chronique me donne envie !
De Kimi [3391 Pts], le 01 Octobre 2012 à 18h58
Encore un très bonne chronique de ta part Rogue! Tu m'as donné l'eau à la bouche et j'essaierai de me procurer le film dès que possible. n_n