Othello - Actualité manga

Othello : Critiques

Otero

Critique de la série manga

Publiée le Samedi, 11 Janvier 2014

Quoi, encore un shôjo ? Du shôjo oui, mais aussi du visual rock, et quand on secoue bien, on a une comédie détonnante et un peu sociale. Othello commence comme tout bon shôjo, Yaya est une jeune fille timide qui tente tant bien que mal de survivre au lycée et de se faire des amis. Sauf que ses deux « pseudo » amies Seri et Moe passent leur temps à se moquer d’elle, à la rabaisser. Tes chaussures compensées sont démodées, tu n’es pas très futée, tu es trop naze… Yaya encaisse, mais est bien contente de retrouver sa chambre, son poster du groupe Juliet et leur leader Shôhei. Après avoir passé le réveillon de l’an 2000 toute seule dans le train, s’être fait disputer par son père, elle découvre dans la boîte aux lettres une capsule temporelle qu’elle avait faîte à l’âge de 7 ans alors que sa mère était encore vivante. Et à l’époque, elle s’était jurée de réaliser ses rêves, de devenir chanteuse. Que s’est-il passé, comment a-t-elle pu se laisser faire, se résigner. Yaya se déteste, et c’est pourquoi elle n’est vraiment elle que le week-end. En effet, elle est Mimi, cosplayeuse de visual rock à tendance gothic lolita. A Harajuku, elle retrouve d’autres fans et passe de bons moments. Mais lorsque Seri et Moe la surprennent en train de se changer ans les toilettes du métro, cet espace de liberté est aussi menacé. Elles décident alors de lui jouer un nouveau mauvais tour et l’invitent à une soirée karaoké avec des mecs rencontrés sur le net.

Lycéenne le jour, cosplayeuse la nuit

Ce qu’elles ne savent pas, c’est que Yaya a plus d’un tour, ou plutôt d’une personnalité, dans son sac. En effet, si Yaya a besoin de se déguiser pour devenir Mimi, lorsqu’elle est sous pression ou en danger, elle n’a qu’à se cogner ou jeter un coup d’œil dans un miroir pour que Nana se réveille. Et là, pas besoin d’artifices vestimentaires, Nana est le fruit de toutes les frustrations, déceptions et autres déconvenues que Yaya a connu dans sa vie. La gentille fille sage laisse alors place à une sorte de double maléfique, pour le coup plutôt je-m’en-foutiste et cool. Ainsi, alors que Seri, Moe et les garçons acculent Yaya pour qu’elle chante du Juliet, elle se réfugie dans le petit miroir de son enfance, typique des magical girls, et… Métamorphose ! Nana prend alors le relais, donne une leçon de karaoké à tout le monde, mais surtout sauve Seri et Moe, qui n’étaient pas loin de passer à la casserole. Ce qui ne les empêchent pas de continuer à persécuter Yaya, surtout que celle-ci ne se souvient de rien. Une partie du manga se résument ainsi aux différentes crasses de Seri et Moe et la réaction de Yaya ou plutôt de Nana. Qu’elles lui piquent l’enregistrement que lui a fait le beau et gentil Moriyama, qu’elles la poussent à leur donner son billet pour le concert du groupe de Moriyama ou qu’elles invitent Moriyama pour qu’il voit Yaya en cosplayeuse… Vous aurez compris qu’il est souvent question de Moriyama, il est en effet le seul à sembler s’intéresser vraiment à Yaya, à sa vie, sa personne, ses envies. Il le fait bien sûr de manière détournée, avec son air bougon, mais ses marques d’affection n’en restent pas moins claires. Ainsi, lorsque Seri et Moe découvrent que Yaya n’est aussi pas insensible, elles se servent de lui. Les pauvres, puisqu’à chaque fois, elles font que réveiller Nana, qui leur assène une « Punition divine ! » du meilleur effet.


Vengeance sociale
Mais derrière cet aspect comique, pour le moment irrésistible mais qui pourrait vite devenir répétitif si la mangaka s’entête dans cette voie, Othello est objet social très intéressant. Une sorte de miroir révélateur bien que déformant de l’adolescence dans notre société et notre époque. Le tout du point de vue des jeunes filles. En effet, d’habitude dans les shôjo, l’héroïne se retrouve soit au milieu d’un triangle amoureux, soit entouré d’une ribambelle de beaux gosses ténébreux, soit téléportée dans un monde fantastique. Souvent timide, transparente bien que mignonne, l’héroïne devient alors l’objet de tous les regards, enjeux voire désirs. Les lectrices peuvent alors rêver, se rêver à sa place, même si tout cela reste du domaine de la fiction, du fantasme. Or, Othello s’inscrit dans une réalité culturelle immédiatement identifiable : le lycée, le cosplay, le visual kei… Il est alors sûr que beaucoup de jeunes filles, de Françaises et même de lectrices de Japan Vibes se reconnaissent dans Yaya, plus que de n’importe quelle autre Tohru, Nana ou Momo. En effet, combien encore cachent à leurs camarades d’école leur passion pour le cosplay, le visual kei ou même le manga. Elles font profil bas et ne se sentent elles-mêmes, pleinement, que chez elle ou alors le temps d’un week-end, d’une convention. Mais plus encore, elles aimeraient pouvoir être comme ça tous les jours, au quotidien, au naturel. Etre moins Yaya et plus Mimi et Nana. S’habiller comme elles veulent, monter sur scène pour embrasser le garçon qui leur plaît. Ainsi, en filigrane, le manga dépeint mine de rien la situation de beaucoup de filles (et de garçons disons-le), cette frustration, cette injustice de ne pas pouvoir être soi-même. Et au passage, Satomi Ikezawa en profite pour donner à toutes une petite vengeance salvatrice, rigolote et finalement bienveillante.

Faire la différence

Il y a d’ailleurs un peu de Peach Girl dans Othello. Seri et Moe ne sont pas sans rappeler la diabolique Saé que l’on a adoré détester pendant 18 volumes, avant qu’elle ne devienne une héroïne à son tour dans Ura Peach Girl. D’ailleurs, si le dessin de Satomi Ikezawa se rapproche le plus d’une autre mangaka, c’est celui de Miwa Ueda. Grands yeux pétillants, chevelures soyeuses et ondulées, visages SD inspirés et originaux, découpage dynamique, trait fin… peut-être le style est-il un peu plus enfantin à l’instar de celui de Wataru Yoshizumi (Marmalade Boy, Mint na Bokura, Ultra Maniac). Tout est donc réuni pour être en présence d’un shôjo qui s’il ne révolutionne pas le genre, lui donne un éclairage nouveau, original et empathique.

Hoagie




Note de la rédaction
Note des lecteurs
14.5/20

Evolution des notes des volumes selon les chroniques:

15.00,15.00,15.00,16.00,16.00,17.00,15.00

Les critiques des volumes de la série