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Millennium Actress : Critiques

Critique du dvd : Millennium Actress

Publiée le Dimanche, 13 Juin 2010

« Après tout, c'est surtout courir après lui que j'aime ».

Un journaliste, Genya Tachibana, et son caméraman, partent interviewer une célèbre actrice septuagénaire, Chiyoko Fujiwara, qui s'est retirée du monde du cinéma alors qu'elle était au sommet de sa carrière. Vivant d'une retraite paisible, elle reçoit du journaliste un cadeau : une petite clef, entraînant chez la vieille femme des réminiscences multiples, en particulier sa quête palpitante d'un amour inassouvi.

Pendant tout le film, les personnages du présent (le journaliste et son caméraman) assistent au passé de l'actrice, que ce soit sa véritable vie ou les scènes de ses films, voire y participent. Cet effet de narration amène un dynamisme fort et un humour très agréable. On assiste donc généralement à une succession de scènes de films, la narration contrastant entre un rythme énergique et une histoire assez décousue. Les scènes d'action sont peu nombreuses mais efficaces. Entre réalité et rôle, le film nous fait voyager à travers le cinéma populaire japonais et la diversité de ses genres : épopées historiques, films de ninja et samouraïs, espionnage, films de SF. Mais un fil conducteur est tissé durant tout le film. Chiyoko cherche à retrouver un peintre, dissident politique, rencontré alors qu'elle était jeune fille, qui lui a donné une petite clé dorée et lui a promis qu'ils se rencontreraient à nouveau. Hommage au cinéma populaire japonais et à l'Histoire japonaise, Millenium actress porte aussi un regard critique sur le Japon des années 1940 à nos jours (« la politique avait viré à droite », la place de la femme dans la société, etc...). Dans la quête de l'amour impossible, la recherche permanente de la personne qui nous a un jour retourné le coeur, Satoshi Kon transcende la thématique du coup de foudre en évitant tout sentimentalisme niais et plat, préférant explorer la passion et le sacrifice.

La symbolique joue un rôle très important : les secousses sismiques, les scènes de course et de fuite, la sorcière ainsi que la clef qui ouvre la porte vers le passé sont autant d'éléments auxquels le spectateur devra s'attacher s'il veut saisir toute la richesse du scénario. Satoshi Kon a aussi voulu rendre hommage, à travers un personnage fictif et une question surprenante (quelle est « l'actrice du millénaire » ?), sur ces actrices japonaises, véritables muses lorsque le cinéma japonais était à son sommet (années 70 et 80).

Millenium actress se démarque donc avant tout par sa narration originale, jouant entre l'histoire personnelle de Chiyoko, ses rôles d'actrice, et les interventions des personnages du présent dans les scènes du passé. L'humour burlesque apporté par ce processus narratif facilite l'assentiment du spectateur à entrer dans le film. Exemple parmi tant d'autres : alors que Chiyoko joue une ninja vengeresse, Genya intervient en tant que rônin handicapé, rappelant fortement Zatoichi, pour se débarrasser des ennemis. Les personnages du présent interagissent avec ceux du passé, et on perçoit bien l'évolution de la jeune actrice. Dans Perfect Blue, Satoshi Kon avait déjà expérimenté les thématiques de réalité/fiction à travers le cinéma. Dans Millenium actress, il systématise ce principe en en faisant un processus narratif à part entière, original mais créant un dynamisme étonnant !

Côté animation, pas de surprise. L'ensemble reste très agréable. Les couleurs sont harmonieuses, souvent froides et tristes, tendant vers toutes les nuances de gris et de bleu (tout le contraire du pétillant Paprika). Les scènes sont marquées par les paysages enneigés, les forêts, les intérieurs fermés. Certains passages contrastent avec cette impression générale : une scène où Chiyoko traverse une estampe retraçant l'histoire japonaise ressemble à un dérèglement de la palette de couleurs, en ce que tout devient soudainement chatoyant (campagnes ensoleillées, ombrelles, paysages fleuris avec de fabuleux cerisiers). Ou comment Satoshi Kon joue encore une fois avec ses spectateurs...

Le film est servi par une bande-son magistrale de Susumu Hirasawa, entre musiques traditionnelles, envolées lyriques au piano et techno-punk surgissant au moment où l'on s'y attend le moins, donnant un coup de fouet supplémentaire et faisant la transition vers les scènes d'action.

L'unique bonus de ce DVD sont les coulisses du tournage. On aurait vraiment apprécié quelques à-côtés et un contenu plus fourni étant donné la richesse du scénario ! Le film est proposé en version originale japonaise, française, allemande et espagnole (de même pour les sous-titres). La VF est vraiment à éviter : la traduction n'est pas fidèle et on perd de toute façon au change à voir cette oeuvre autrement qu'en VO, tant Millenium actress, rempli de références, renvoie à la culture japonaise.

Extrêmement riche dans son scénario (hommage, symbolique, amour), original et inventif dans sa narration, Millenium actress ne satisfera que les spectateurs acceptant d'être plongés de plein fouet dans la culture japonaise et la complexité de l'intrigue. L'humour, le rythme dynamique, la psychologie des personnages et la diversité des thèmes abordés font que beaucoup y trouveront leur compte, pour une plongée aisée dans un univers envoûtant.

Critique 1 : L'avis du chroniqueur
RogueAerith

16 20
Note de la rédaction
Note des lecteurs