Voyages de Gulliver - Actualité manga

Voyages de Gulliver : Critiques

Gulliver ryokō-ki

Critique du volume manga

Publiée le Jeudi, 23 Novembre 2017

Le nouveau représentant de la collection des Classiques en manga des éditions nobi nobi ! s'attaque à un joli morceau de littérature avec Les Voyages de Gulliver, oeuvre phare de l'écrivain irlandais Jonathan Swift écrite en 1721. Parfois considérée comme un simple récit d'aventures pour la jeunesse, ce roman est pourtant tout autant adressé aux adultes, Swift y offrant notamment une satire de certaines choses de son époque, et entamant à l'aube des Lumières une certaine réflexion sur les différences entre les peuples, leur diversité, ce qu'ils peuvent nous apprendre... en plaçant ainsi le relativisme en son centre.


Fort d'un imaginaire assez conséquent (surtout pour son époque), le roman, qui compte 4 actes pour 4 récits de voyages, a connu bon nombre d'adaptations, en dessin animé, en série, au cinéma... l'une des plus récentes étant le film de 2010 avec Jack Black dans le rôle de Lemuel Gulliver. L'oeuvre de Swift a également inspiré nombre d'auteurs, à commencer par Hayao Miyazaki sur le Château dans le Ciel : le célèbre cinéaste a retenu de voyage de Gulliver à Laputa le nom de de la contrée qu'il réutilise pour le château, ainsi que certaines thématiques autour de la science et de son impact sur toute civilisation.


Pour cette adaptation manga abrégée, le dessinateur Kiyokazu Chiba a choisi de ne retenir que deux voyages sur les quatre du roman, et il s'agit bien sûr des deux pus emblématiques : celui à Lilliput, peuple tout petit où Gulliver se retrouve en position de géant, et celui à Brobdingnag, où il se retrouve tout petit dans un pays où tout le monde est gigantesque.


Dans l'ensemble, le mangaka sait retirer l'essentiel de ces deux récits, en présentant suffisamment bien le contexte de chacune des deux civilisations merveilleuses où Gulliver se retrouve, chacune des deux ayant évidemment sa manière de fonctionner, ses souverains, ses problèmes... et le personnage principal y étant évidemment accueilli comme un être différent (par exemple, les lilliputiens en ont d'abord peur et se demandent s'ils peuvent se fier à ce géant). Qui plus est, le style narratif se veut très proche du roman, puisque c'est Gulliver qui raconte ses voyages, ici aussi. 


Mais le problème est que l'ensemble ne fait que tout survoler. Traiter ces deux riches voyages en un nombre très limité de pages (environ 80 pages pour Lilliput et environ 70 pour Brobdingnag) contraint Chiba a beaucoup coupé, à n'évoquer qu'en surface nombre de thématiques (comme l'absurdité des guerres dans le premier voyage, et la critique du système politique de l'époque dans le deuxième), et à rester très linéaire dans sa façon de faire avancer les histoires. Il en résulte un aspect assez lisse, mais pas forcément désagréable, car le mangaka parvient quand même à faire ressortir une très bonne chose : l'évolution de Gulliver d'un voyage à l'autre, le personnage évoluant dans sa façon de voir les choses. En effet, les géants de Brobdingnag l'ont vraiment bien accueilli, et il se demande alors s'il n'aurait pas dû agir de la même manière à Lilliput. Ainsi, l'importance de savoir se remettre en cause est placée en avant.


Visuellement, c'est à la fois un peu propre pour un récit d'aventure, Chiba bousculant rarement sa mise en scène, et efficace dans l'expressivité des personnages et dans l'utilisation des décors qui sont là quand il faut.


Malheureusement beaucoup trop rapide, trop bref et ne faisant qu'esquisser les richesses du roman, ce manga reste pourtant une porte d'entrée honnête pour les plus jeunes, et peut servir de première étape vers l'oeuvre d'origine. Car malgré le côté un peu lisse et les coupures, Kiyokazu Chiba parvient à dégager des choses intéressantes.


On retrouve ici les habituels standards de qualité de la collection des Classiques de l'éditeur, avec une charte graphique spécifique et un signet marque-page. La traduction de Fabien Dautriche est soignée, la postface de Julia Brun offre un très bon aperçu des richesses de l'oeuvre de Swift, et l'impression est très honnête.


Critique 1 : L'avis du chroniqueur
Koiwai
12.5 20
Note de la rédaction